14 avril 2010

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TUNISNEWS
9 ème année, N° 3613 du 14.04.2010
 archives : www.tunisnews.net 

 


AISPP: Procès du 14 avril AISPP: Houda Ouertani déférée pour l’instruction – Son mari observe une grève illimitée de la faim et des soins AISPP: Interpellation de Zyed Ferchichi AFP: Tunisie : la famille de Taoufik Ben Brik craint une prolongation de sa peine Slim Bagga: Les clans de ZABANOSTRA cèdent La Goulette à Imed Trabelsi et tabassent la présidente sortante de l’UNFT Babelmed: Zeyneb Farhat, maîtresse en sa demeure La Liberté: Fribourg – Hommage à la mère de famille tunisienne assassinée AFP: L’UPM encore bien loin de son ambition d’être un moteur de paix AFP: Au Soudan, les islamistes au pouvoir ont séduit les confréries soufies (REPORTAGE)


Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis Aispp.free@gmail.com Tunis, le 13 avril 2010

Houda Ouertani déférée pour l’instruction Son mari observe une grève illimitée de la faim et des soins


Aujourd’hui mardi 13 avril 2010, Houda Bent Mohammed Ben Mustapha Ouertani, née le 26/10/1985, étudiante en troisième cycle à la faculté des sciences de Tunis, a été déférée en état d’arrestation et en présence de son avocat devant le premier juge d’instruction du Tribunal de Première Instance de Tunis, monsieur Saïd Ben Romdhane, pour fourniture d’armes, d’explosifs, de produits et de matériel à une organisation terroriste, de participation à une agression violente sur un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions et de menaces avec arme. Elle a nié les accusations portées contre elle et la commission des infractions pour lesquelles elle était déférée et elle a décrit au juge d’instruction les circonstances qui l’avaient poussée ainsi que son mari à quitter la Tunisie clandestinement après des brimades et des descentes chez elle et sa famille. La défense a plaidé et a fait part de son étonnement que sa cliente soit déférée en état d’arrestation car le dossier était vide de toute preuve établissant qu’elle ait commis les infractions pour lesquelles elle était déférée. La défense a demandé un non-lieu et à titre conservatoire sa libération de prison. L’étudiante Houda Ouertani avait été arrêtée avec son mari Zyed Labidi, un ancien prisonnier politique récemment diplômé de la faculté de sciences, par des agents de la garde nationale dans l’après midi du 28/02/2010 dans la région de Babouche, délégation d’Aïn Draham alors qu’ils tentaient de passer en Algérie pour fuir l’enfer du contrôle administratif imposé au mari et de se débarrasser des brimades et du harcèlement incessant qui la visait elle. Les agents de la Garde nationale avaient ouvert le feu et les avaient atteints lors de leur arrestation. Houda Ouertani avait été conduite à l’hôpital des forces de la Sureté Intérieure de La Marsa où elle avait été soignée pendant plus d’un mois. Après sa guérison, le juge d’instruction avait émis un mandat de dépôt à son encontre à la prison pour femmes de Mannouba. Lors de son hospitalisation, il lui avait été interdit de rencontrer qui que ce soit, parents ou avocat. L’association a reçu un appel au secours de la famille de son époux, Zyed Labidi, qui a rendu visite à ce dernier hier et l’a trouvé dans un état critique. Il les a informés qu’il faisait une grève sauvage de la faim et des soins. Il refuse les soins dans une démarche suicidaire de protestation contre l’arrestation injustifiée de sa femme. Sa famille nous a fait part de son inquiétude pour sa vie. Pour la commission de suivi des procès politiques Le secrétaire général Maître Samir Ben Amor (traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)


Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 43 Rue Eldjazira, Tunis Aispp.free@gmail.com
[…]   En dépit d’une décision de justice de non-lieu prononcée en faveur de l’ex prisonnier politique Zyed Ferchichi, la police politique de Bizerte l’a arrêté mardi 13 avril 2010 pour ne le relâcher qu’au terme de 7 heures de garde à vue arbitraire. L’association a appris qu’il avait été soumis à des menaces et d’intenses pressions visant à le contraindre à émarger quotidiennement. Zyed Ferchichi avait été arrêté le 25 mars en guise de représailles parce qu’il ne s’était pas soumis à un émargement quotidien.. .après avoir rencontré une délégation de l’Organisation Human Rights Watch…. […] Pour la commission de suivi des prisonniers libérés Le vice Président de l’Association Maître Abdelwahab Maatar (traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)

Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis Aispp.free@gmail.com Tunis, le 14 avril 2010
  •    Aujourd’hui, 14 avril 2010, la quatrième chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis, présidée par le juge Mehrez Hammami, a examiné l’affaire n°20101, dans laquelle sont déférés Hamza Ben Hichem Ben Mohammed Sadok Sadkaoui, né le 1/12/1982 et Ouahid Ben Mohammed Ben Mohammed Ben Othman, né le 26/03/1981, déférés en état d’arrestation pour adhésion à une organisation et à une entente ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’incitation à commettre des infractions terroristes et à adhérer à une organisation terroriste. Après l’appel de l’affaire, les accusés ont nié lors de leur interrogatoire ce qui leur était imputé et ont affirmé que les déclarations qui leur étaient attribuée dans le procès verbal de l’enquêteur préliminaire leur avaient été arrachées sous la torture. Puis ce fut le tour des plaidoiries de la commission de la défense, composée de maîtres Charfeddine Dhrif, Haddhami Bousserra et Samir Ben Amor. La défense a demandé à ce que le jugement innocente leurs clients pour absence de preuves matérielles établissant leur culpabilité et parce qu’ils avaient été déférés sur la foi de procès verbaux non dignes de foi dans la mesure où ils établissent que leurs clients auraient tenu pendant l’année 2004 des réunions dans une mosquée de Zarzouna et décidé de voyager en Syrie pour affermir leurs convictions et pour passer en Irak afin de rejoindre la résistance, et qu’ils étaient partis dans ce but, mais la commission de la défense a présenté à la commission du tribunal des documents officiels des autorités syriennes prouvant que l’un des accusés était en Syrie depuis août 2003 !!! Tandis que le second accusé était arrivé en Syrie en septembre 2004. La défense a également présenté des documents officiels établissant qu’ils faisaient des études de façon assidue et avec succès, que tous les deux s’étaient mariés avec des Syriennes et avaient eu des enfants, infirmant les procès verbaux de la police quant au but de leur voyage en Syrie. Puis la séance a été levée pour les délibérations et le prononcé du jugement. Les autorités tunisiennes ont refusé d’accorder des visas aux épouses des accusés afin qu’elles leur rendent visite avec leurs enfants.  
  •  Aujourd’hui 14 avril 2010, la treizième chambre criminelle de la Cour d’Appel de Tunis, présidée par le juge Tahar Yafreni, a examiné l’affaire n°14380 dans laquelle sont déférés en état d’arrestation Nader Ferchichi, né le 5/12/1980, Hamdi Kasri, né le 15/10/1985, Issam Mezzi, né le 18/08/1985, Houssem Rihane, né le16/01/1983, Nizar Jmi’i, né le 18/06/1982, Mohammed Boujemaa, né le 30/10/1981, Hassen Bahri, né le 11/06/1983, Béchir Cherni, né le 4/9/1981, Farid Loussif, né le 26/2/1961 et Mohammed Gharsalli, né le 9/4/1986, pour adhésion à une organisation ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’incitation à commettre des infractions terroristes et à adhérer à une organisation terroriste, de fournitures d’armes et de munitions à une organisation en relation avec les infractions terroristes, de tenue de réunions sans autorisation, de vol simple, de non révélation aux autorités concernées les informations qui leur étaient parvenues sur la commission d’infractions terroristes. Après l’appel de l’affaire, les accusés ont nié ce qui leur était imputé lors de leur interrogatoire, puis vint le tour de la plaidoirie de la commission de la défense composée de Maîtres Anouar Kousri et Imène Triki qui ont demandé l’annulation du jugement en première instance et l’acquittement des accusés. Puis la séance a été levée pour le délibéré et le prononcé du jugement : En ce qui concerne la culpabilité, le jugement en première instance a été confirmé, mais les peines de Nader Ferchichi, Houssem Rihane et Nizar Jmi’i ont été ramenées de dix ans à huit ans, celles de Hamdi Kasri, Issam Mezzi et Mohammed Boujemaa ont été ramenées de huit ans à trois ans. Les peines de trois ans pour les autres accusés ont été ramenées à un an. Les jeunes déférés dans cette affaire sont originaires de la région de Bizerte. Pour la commission de suivi des procès politiques Le secrétaire général Maître Samir Ben Amor (traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)

 

Maison de Quartier de Bagatelle

11 impasse Bachaga Boualem – 31100 Toulouse (métro Bagatelle)

soirée ciné-club et débat

vendredi 23 avril à 20 h

TUNISIE

mouvement social et répression

avec le documentaire

« Redeyef : le combat pour la dignité »

En 2008, un important mouvement social contre la corruption a été violemment réprimé dans le bassin minier deGAFSA (sud tunisien),

les femmes y ont tenu un rôle important.

débat avec

Mouhieddine Cherbib

militant du Comité pour le respect des libertés etdes droits de l’Homme en Tunisie.

entrée libre et gratuite


Tunisie : la famille de Taoufik Ben Brik craint une prolongation de sa peine


AFP, le 14 avril 2010

PARIS — La famille de Taoufik Ben Brik, journaliste et opposant tunisien détenu depuis fin octobre 2009, redoute que sa peine de prison ne soit prolongée au-delà du 26 avril, son terme théorique, a-t-elle indiqué à l’AFP. « Depuis deux semaines, il est soumis aux provocations et menaces de certains détenus à la solde du pouvoir. Ils veulent le pousser à commettre une faute qui entraînera une prolongation de son incarcération », a déclaré sa soeur, Najet Zoghlami. Taoufik Ben Brik a été arrêté fin octobre, puis condamné le 26 novembre 2009 à 6 mois de prison pour l’agression d’une femme d’affaires, mais ses proches dénoncent une manipulation destinée à le faire taire, après des écrits très critiques dans la presse française contre le président Zine El Abidine Ben Ali. De santé fragile, Taoufik Ben Brik souffre d’une maladie dégénérative des défenses immunitaires. Son état de santé « reste instable, alarmant », a précisé son avocat français, William Bourdon, confirmant que la peine de prison du journaliste devrait d’achever en principe le 26 avril. « La logique d’acharnement reste de mise, c’est absolument insupportable », a-t-il ajouté. Le cas de Taoufik Ben Brik pourrait être évoqué jeudi et vendredi, lors d’une visite à Tunis du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, à l’occasion d’une réunion des pays du pourtour méditerranéen. « Nous suivons attentivement la situation de M. Ben Brik et nous nous sommes exprimés à ce sujet à plusieurs reprises », a déclaré mercredi le porte-parole du ministère, Bernard Valero. « Nous entretenons avec les autorités tunisiennes un dialogue étroit, qui nous permet d?aborder tous les sujets, y compris naturellement celui des droits de l?Homme », a-t-il ajouté. En novembre dernier, Bernard Kouchner s’était déclaré « déçu » par les condamnations de journalistes, mais la Tunisie avait rejeté « toute ingérence étrangère dans ses affaires intérieures ». Opposant de longue date au président Ben Ali, Taoufik Ben Brik, 49 ans, est détenu dans une prison située à 130 km de Tunis. Il avait déjà, en 2000, observé une grève de la faim de 42 jours pour protester contre la situation des droits de l’Homme dans son pays.

Les clans de ZABANOSTRA cèdent La Goulette à Imed Trabelsi et tabassent la présidente sortante de l’UNFT

 

par Slim BAGGA Qui peut encore douter un instant que ce pays va de catastrophe en calamité? Que les clans ne s’embarrassent plus de prendre les initiatives et les décisions les plus choquantes? Imed Trabelsi, trafiquant international notoire se présente aux Municipales en tant que tête de liste à La Goulette. La nouvelle a provoqué une onde de choc dans la ville, mais personne ne se hasarde encore à la dénoncer. Dans les cafés et en privé, l’on soutient à juste titre qu’en mettant la main sur La Goulette, les clans Trabelsi-Materi auront parachevé leur main mise sur toute la banlieue nord de La Goulette à La Marsa.

C’est qu’il se faut l’imaginer le gros nounours, fils de sa mère, drapé de l’écharpe de maire… Déjà qu’entrepreneurs et chefs d’entreprises le fuyaient comme la peste chaque matin, évitaient de le prendre au téléphone, laissant leurs secrétaires écouter ses menaces et enregistrer son racket. -« Bonjour, je suis Imed Tabelsi, le neveu du Président. J’organise une une soirée avec telle vedette libanaise, je vous réserve 10 places à 300DT l’unité. Je vous envoie quelqu’un ce matin pour le chèque ». Et paf, 3000 DT dans les poches…

Ou encore: -« Bonjour, je suis Imed Trabelsi, le neveu de Tartempion. Nous organisons au Palais des Expositions d’El Kram la semaine du persil (pardon des matériaux de construction). Notre parrain Ben Aléone de ZABANOSTRA inaugurera lui-même l’événement. J’ai pensé à vous pour la participation aux frais (préparation, banderoles, tee-shirts et même l’achat des youyous des veuves désargentées). Je vous envoie quelqu’un pour le chèque ». Et paf, 2000 DT dans les poches! « Elire » maire celui dont la place est dans une prison avec le reste de son clan, c’est comme dirait Ben Ali « Takris Daoulet El Qanoun », la consolidation de l’Etat de droit. Agressions Dans cette atmosphère délétère caractérisée par la mainmise sur toutes les structures et sur la Communication, gare à celui ou celle qui relève la tête. La présidente de l’Union des femmes tunisiennes, Aziza Htira, a été sauvagement agressée et limogée lors de la tenue du dernier Congrès de l’UNFT.

Abdalwaheb Mazarini Abdallah l’avait, en effet, reçue à Carthage et lui avait dicté le contenu de son intervention dans une émission de Hannibal TV, intervention axée sur le rôle « cléopâtrien » de Leïla Trabelsi dans le rayonnement de la Femme tunisienne. Aziza Htira outrepassa les consignes strictes, les barbouzes s’en occupèrent illico. Cela s’est bien passé en Tunisie, au pays où le double langage présente la Femme comme la plus avancée, la plus libérée, la plus libre et la plus responsable. Mais on ne joue pas avec l’Histoire ni avec le rôle de Zinochette dans l’Histoire de la Femme. Limogée, Aziza Htira servira d’exemple à d’autres qui oseraient ne pas falsifier les faits. Et fait unique, la nouvelle composition du Bureau exécutif de cette Organisation aura une proche des Materi comme présidente, Saloua Terzi Ben Attia et en tant que vice-présidente…Naima Boutiba Materi, mère du pieux gominé Sakhr.

On est rassurés: la Femme tunisienne libre et responsable est désormais entre de bonnes mains… Slim BAGGA


Zeyneb Farhat, maîtresse en sa demeure

Nathalie Galesne

Rencontre avec Zeyneb Farhat, femme de théâtre, féministe, militante de la cause palestinienne, responsable avec son mari, le metteur en scène Taoufic Jebali, de El Teatro, un des rares lieux de création indépendants en Tunisie.

Il y a des pétulances qui cachent des enfances singulières et des parcours d’exception. De ses premières années, Zeyneb Farhat pourrait aisément concocter un best-seller.

Zeyneb appartient a une fratrie de 7 enfants, tous de la même “mère biologique”, comme elle désigne la femme qui l’a engendrée et élevée pour la distinguer de son autre mère, la première épouse de son père, avec qui elle a également vécu. “la première femme de mon père avait une adoration pour lui tandis que ma mère, qui avait dû l’épouser de force, le haïssait. Les deux femmes avaient une vraie complicité et moi j’avais deux mères. Cela peut sembler aujourd’hui très pittoresque, mais à l’époque nous étions une famille relativement traditionnelle puisqu’en Tunisie la polygamie n’a été abolie que le 13 août 1956”.

La deux épouses dirigent ensemble la maisonnée. En fait de maisonnée, Zeyneb a grandi dans une immense demeure tapissée de livres. Son père, directeur d’école et syndicaliste, professeur d’histoire de la pensée musulmane au prestigieux collège Sadiki, deviendra une sorte de figure mythique pour la petite Zeyneb qui en sera séparée prématurément. “Il était à fond pour la scolarisation des filles, mes deux soeurs aînées étaient d’ailleurs scolarisées dans les années 40-50, une rareté en ce temps-là. Et puis, la grande bibliothèque familiale regorgeait d’imaginaires à notre portée. Je me souviens encore de la lecture d’Antigone à 13 ans, cette rencontre inoubliable avec une femme qui dit non par amour”.

Blessure

La vie de la famille change du tout au tout à la disparition du patriarche, en 1963, dans les geôles de Bourguiba. “Quelques années après l’indépendance, il y eut un projet de complot contre Bourguiba”, explique Zeyneb, “ce projet regroupait tous les frustrés de l’indépendance, mon père a été sollicité. Bien qu’il n’ait pas pris part au complot, il a été condamné à 5 ans de travaux forcés pour ne pas avoir dénoncé les coupables. Il est mort au bout de 10 mois, à 58 ans, dans un fort espagnol au nord de la Tunisie.”

Les deux veuves forment alors un couple. Elles sont soudées, solidaires, ne tolèrent aucune ingérence des autres membres de la famille dans leur foyer. Personne ne doit entraver leur existence. La première prend la place du père, “un très beau visage féminin de l’autorité masculine, la raison pour laquelle j’ai toujours été indifférente à toute tentative de domination mâle sur ma personne.” souligne Zeyneb. L’autre, la mère biologique, se métamorphose totalement à la mort de son mari. Elle veut coûte que coûte que ses filles travaillent, gagnent leur vie, connaissent l’autonomie qui lui a été refusée.

Naissance d’un lieu

“Quand tu grandis sans père, tu grandis anarchiste”, lance Zeyneb avec ce regard qui lui est propre, un oeil noir où se mêle une provocation rieuse à une insaisissable gravité. Rebelle, elle l’est sans nulle doute quand elle participe aux côtés de son compagnon, Taoufic Jebali, à la fondation en 1987 de El Teatro. “C’était dans l’euphorie du changement qui a suivi la disparition de Bourguiba et 31 ans de pouvoir absolu”, explique Zeyneb. “Nous avons connu 5 années faites d’attente, de souffle et d’espoir où nous avons été exonérés de persécution et d’oppression. On a eu la chance de commencer El Teatro à ce moment là. Jusqu’en 1993 on a pu positionner ce lieu comme un espace innovant ouvert à la société civile. On y organisait des rencontres, des réunions, des débats d’idées. Aujourd’hui, cela ne nous est plus possible. Il faut rester circonscrits à l’art et à la culture, ne surtout pas dépasser ce périmètre. Le pouvoir c’est le pouvoir et quand la machine opprime, elle est impitoyable. Taoufic Jebali est sans doute un des metteurs en scène les plus censurés de Tunisie, avec cinq de ses pièces interdites au public.”

Et pourtant El Teatro affiche imperturbable des spectacles de qualité, tout aussi dérangeants qu’actuels. C’est aussi un lieu ouvert aux artistes de la région et aux grandes questions qui la travaillent. “El Teatro s’est fait avec un budget dérisoire mais le rêve d’un espace alternatif s’installait. Nous avons ouvert avec Mémoires d’un dinosaure d’après Dialogues d’exilés de Brecht. Le choix d’un texte de Brecht et non d’un Marivaux donnait déjà le ton. J’étais enceinte au 7ème mois, légère, coquette, accompagnant avec amour et conviction la construction de ce lieu”, se remémore Zeyneb, la voix teintée d’émoi.

Depuis le spectacle se joue tous les 10 ans, en partie par fidélité à la mémoire du metteur en scène Rached Manai, en partie pour remettre au goût du jour ce superbe texte qui traite des fondements mêmes de l’identité du citoyen. “C’est toujours avec émotion que je vois les mêmes acteurs – Taoufik Jebali et Raouf Ben Amor-, jouer et jouer encore ce spectacle en Tunisie, Allemagne, France, Syrie, Egypte, Jordanie, au Liban”, précise Zeyneb.

Depuis El Teatro n’a cessé de programmer des rencontres particulièrement significatives, comme ce rendez-vous prétexte, il y a cinq ans, autour du Cheikh Imam. Cet Imam égyptien, excellent compositeur, joueur du Oud et interprète de son alter ego le poète Ahmed Fouad Najm, chantre des espoirs d’une gauche démocratique du monde arabe. “Nous l’avons exhumé des mémoires, 10 ans après sa mort” s’anime Zeyneb. “On se disait on va écouter de la bonne musique, on va lire de la bonne poésie, on va réveiller les excellents ensembles musicaux des années 80 en Tunisie et demander à d’autres, plus jeunes, de chanter à nouveau Cheikh Imam. Eh bien El Teatro a failli tomber en morceaux car des vagues hurlantes, vociférantes de jeunes sont venues réclamer le droit à participer à ces soirées affichées complet ! Nous avons dû installer en toute hâte une caméra et un grand écran, et les jeunes ont ainsi pu assister au concert en direct. Mémorable!”.

Paradoxes tunisiens

Pour Zeyneb Farhat, la culture revêt toujours une forme d’engagement, y compris dans un pays comme la Tunisie où il n’est pas toujours aisé vivre ses convictions. “La Tunisie est la terre de toutes les contradictions. Ce pays magnifique doté d’une législation extraordinaire, d’une diversité humaine et climatique fabuleuse, qui compte 10 millions d’habitants seulement, pourrait être un véritable éden, et les Tunisiens le peuple le plus heureux du monde. Mais la Tunisie a deux visages”, s’agace Zeyneb, “elle s’autoviole constamment, alors qu’elle est compétente et moderne, elle continue de se réprimer et de s’amenuiser”.

A force d’avoir à se frotter aux paradoxes de son pays, Zeyneb Farhat a appris à résister à sa manière, à traiter avec le pouvoir. C’est pourquoi elle s’est vue parfois reprocher une certaine ambiguité. “Avec l’expérience tu apprends à te mouvoir dans les eaux troubles du pouvoir sans perdre ni ton âme, ni ton pantalon”, retorque-t-elle. “Quand tu as l’estime de toi-même, tu peux affronter le pouvoir politique. Après tout l’Etat c’est moi, je pars du principe que tout ce qui est au gouvernement, tout ce qui est public, jusqu’au dernier grain de sable tunisien, nous appartient, m’appartient. C’est pourquoi je n’ai pas de mal à travailler avec les structures de l’Etat. Je veux faire en sorte que ce pays soit le nôtre en y construisant une culture citoyenne grâce aux arts et aux lettres”.

Palestine mon amour

Comme tous les Arabes, Zeyneb a grandi dans le culte de la Palestine, mais elle éprouve pour cette terre et cette culture un attachement incommensurable: “L’idéologie arabe en exercice a porté beaucoup de torts aux peuples arabes, y compris à la Palestine. Or, la cause palestinienne n’appartient pas seulement aux Arabes, elle fait partie des grandes causes justes du 20ème siècle. Nous nous sommes battus contre l’apertheid en Afrique du sud, contre les dictatures en Amérique latine, nous nous devons de nous battre pour la Palestine qui vit un drame d’occupation et de violations des résolutions. Les autres allégations sont nulles et non avenues: la race, la religion…Je ne peux qu’être solidaire avec un pays colonisé et victime des calculs de l’histoire de l’après- guerre et de l’Europe !”

Zeyneb a souvent séjourné en Palestine. Lorsqu’elle évoque cette forme de résistance quotidienne qu’exercent les Palestiniens, la figure de Georgina lui apparaît immédiatement : “C’est est une artiste palestinienne d’El Qods, coquette et si belle! Tous les matins, elle se pomponne même si le cœur n’y est pas. Mais elle le fait rien qu’à l’idée de tous les check points israéliens qu’elle aura à traverser et du nombre de fois qu’elle aura à montrer son laisser-passer pour circuler chez elle, dans son pays. Elle se doit de montrer aux soldats qu’elle est fière et debout, en regard et en port. N’est ce pas une des plus belles cultures de résistance que l’on connaisse?”

Place aux femmes

“Ma conscience citoyenne se marie avec ma conscience de femme” insiste encore Zeyneb lorsqu’il s’agit de son engagement politique. C’est sans doute pourquoi elle milite à l’association tunisienne des femmes démocrates depuis 1989. Celle-ci vient de fêter ses 20 ans. Une belle tranche de vie et quelques beaux acquis, comme cette loi qui accorde la nationalité aux enfants de Tunisiennes mariées avec un non tunisien, ou encore celle qui condamne le harcèlement sexuel, ou celle sur l’égalité successorale qui donne à la femme les mêmes droits que l’homme en matière d’héritage.

Les femmes, c’est aussi un investissement que l’on retrouve dans la programmation d’El Teatro. Leurs voix dans les différents domaines de la création (littérature, théâtre, danse, arts visuels…) y ont depuis toujours une place de choix : de la résidence « Femmes, guerres et créations…” ouverte aux créatrices vivant dans les pays arabes en conflit armé, à l’implication aujourd’hui de El Teatro dans “Fa Na Nat”, projet soutenu par la Fondation Anna Lindh.

“Fa Na Nat est une plateforme euromed que nous avons fondée en novembre dernier à Bruxelles et qui comprend 6 partenaires: Voix de Femmes, Siwa, Mediana, Cultures plurielles, Tamlalt et El Teatro. Le festival que j’organise dans ce cadre du 16 septembre au 16 octobre à Tunis : “La rencontre des Libres Penseuses laïques en art et Lettres dans le monde arabe. Ces F…Respectueuses» relève justement le défi de mettre en avant, et sous toutes les lumières médiatiques, l’apport des femmes de ma région, femmes porteuses de projets, femmes artistes, femmes leaders …”

Un pari courageux et un clin d’oeil à la célèbre pièce de Jean-Paul Sartre La putain respectueuse qui portent le sceau de la vivifiante insolence de Zeyneb Farhat.

Pour en savoir plus sur El Teatro, ouvrir le document joint ou naviguer sur: www.elteatro.net

(Source : « Babelmed » (Le site des cultures méditerranéennes – France), le 13 avril 2010)

Lien:http://www.babelmed.net/Pais/M%C3%A9diterran%C3%A9e/zeyneb_farhat.php?c=5494&m=34&l=fr


Fribourg (Suisse)
Hommage à la mère de famille tunisienne assassinée


Un dernier hommage sera rendu aujourd’hui à la mère de famille d’origine tunisienne tuée la semaine dernière par son mari («La Liberté» du 8 avril).

La cérémonie se déroulera dans les locaux de l’Association des musulmans de Fribourg (AMF), à la route de la Glâne à Fribourg, entre 12 h 30 et 13 h.

La dépouille de la malheureuse sera ensuite rapatriée en Tunisie pour y être inhumée. «La communauté tunisienne est très affectée par ce drame», explique Mohamed Ali Batbout, président de l’AMF.

Une sœur de la défunte a rejoint Fribourg en catastrophe pour veiller le corps. «Tout le monde est très chamboulé», poursuit le président, qui ajoute que la victime était bien connue au sein de la communauté, de même que son mari, actuellement incarcéré.

Les deux enfants du couple, âgés de 9 et 11 ans, ont été pris en charge par les services sociaux.

(Source : « La Liberté » (Quotidien – Suisse), le 14 avril 2010)


L’UPM encore bien loin de son ambition d’être un moteur de paix

AFP, le 14 avril 2010 à 12h59

    Par Jean-Louis DE LA VAISSIERE

 

    PARIS, 14 avr 2010 (AFP) – L’Union pour la Méditerranée (UPM) a  subi un  revers cuisant mardi, avec l’échec à Barcelone d’une conférence sur l’eau en raison du différend israélo-arabe, laissant mal augurer de ses ambitions à être, deux ans après son lancement, un moteur de paix.

    Une simple référence aux « territoires occupés », demandée par les pays arabes et rejetée par Israël, a fait capoter l’élaboration d’une stratégie pour l’eau en Méditerranée.

    Ce fiasco « fait planer des doutes sur l’avenir de l’UPM », a constaté son nouveau secrétaire général, le Jordanien Ahmad Massa’deh.

    Le succès du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement le 7 juin à Barcelone, qui devait être l’occasion d’une relance politique, est incertain, à un moment où les tensions s’accumulent entre Palestiniens et Israéliens, observent les analystes.

    Lancée tambour battant en 2008 sur initiative du président Nicolas Sarkozy, et regroupant 43 pays (les 27 de l’UE, Turquie, Israël, les pays arabes riverains de la Méditerranée), l’UPM ambitionnait précisément de surmonter les crises politiques à travers des projets concrets de coopération sur l’eau, la dépollution ou l’énergie.

    Mais elle reste plombée par les discordes, entre l’Algérie et la Maroc sur le Sahara occidental, entre Grecs et Turcs sur Chypre, mais surtout par le conflit palestino-israélien.

    L’été dernier, le président Sarkozy avait souhaité un sommet de l’UPM qui « accompagnerait la reprise des négociations de paix dans leurs trois volets », palestinien, syrien et libanais. Voeu jamais exaucé.

    Lors d’un colloque samedi à Paris, le chef de la diplomatie espagnole Miguel Angel Moratinos a évoqué un lancement possible à Barcelone avec la France et l’Egypte d' »une initiative politique », pour faire redémarrer le processus de paix.

    Tout en réaffirmant que l’UPM ne progresserait « que si on arrive à prendre une initiative forte sur le plan politique », le conseiller du président Sarkozy, Henri Guaino, concepteur du projet en 2007, s’est montré plus sceptique: « jamais la situation au Proche-Orient n’a été aussi bloquée, jamais le dialogue n’a autant été un dialogue de sourds ».

    Pour Denis Bauchard, expert sur le Moyen-Orient auprès de l’IFRI (Institut français des relations internationales), l’UPM est « loin du projet initial inspiré par Guaino, qui voulait créer une nouvelle union analogue à l’UE et un ensemble très intégré ».

    « Elle s’est réduite à un Barcelone plus », dit-il, faisant allusion au processus de Barcelone lancée en 1995, englué dans les différends israélo-arabes mais qui a permis à l’Union européenne de financer des projets  dans le sud de la Méditerranée. C’est à ce processus « Euromed » que l’UPM avait succédé avec un objectif bien plus ambitieux.

    L’ancien ministre français des Affaires étrangères, Hubert Védrine, qui voit dans l’UPM « un projet bien intentionné et mal conçu », pense qu’il n’a pas la vocation et la capacité à régler un problème aussi complexe que celui du Proche-Orient.

    « La dimension institutionnelle et politique de l’UPM me paraît prématurée, hyper-fragile, bancale », dit-il à l’AFP.

    « Je propose, ajoute-t-il, pour sauver l’UPM d’en faire un parapluie sous lequel toutes sortes de projets se développent ». « On ne peut avancer que si on n’oblige pas tout le monde à faire la même chose en même temps. Il faut faire de grands projets à géométrie variable ».

    « Si la Méditerranée n’est pas sérieusement dépolluée, dans 10-15 ans, ce sera une poubelle. C’est un enjeu beaucoup plus intéressant qu’un projet politique ambigu qui n’avance pas », soutient l’ancien ministre socialiste.

 


Au Soudan, les islamistes au pouvoir ont séduit les confréries soufies (REPORTAGE)

AFP, le 14 avril 2010 à 11h49

Par Guillaume LAVALLEE

UM DUBBAN (Soudan), 14 avr 2010 (AFP) – Dans une cour ensablée, à l’ombre d’une mosquée, des enfants récitent des versets du Coran calligraphiés sur d’étranges tablettes de bois. Les mystiques s’opposaient jadis aux islamistes, mais les temps ont changé dans le Soudan du président Omar el-Béchir.

Le pays vit actuellement ses premières élections depuis 1986, et le président Béchir a multiplié pendant la campagne les discours dans les zones soufies et les éloges des confréries, une recette qui a porté ses fruits.

« Maintenant, nous sommes tous ensemble, il n’y a pas de différences » entre soufis et islamistes, assure Hafez Awad Allah, assis sous un arbre devant le bureau de scrutin d’Um Duban.

Plus grand pays d’Afrique, le Soudan est aussi le paradis des confréries soufies, des ordres religieux populaires qui prêchent la contemplation, s’écartent des affaires de la Cité et pratiquent des rituels jugés impies par les islamistes.

« Les soufis ne s’intéressent pas beaucoup à la politique, mais plus à la religion, alors que les islamistes s’intéressent davantage à la politique », résume Ahmed Charif, un habitant d’Um Badda.

A Um Dubban, centre de la branche Badriyya de la confrérie Qadariyya, les minarets effilés de la mosquée et le mausolée vert au toit conique argenté biseautent le ciel bleu, loin à la ronde.

Dans la « khalwa » -une école coranique-, des enfants vêtus de tuniques maculées récitent des versets coraniques écrits sur des tablettes de bois sculptées. « Il y a ici des enfants du Cameroun, du Tchad, du Niger, du Congo, du Darfour », dit Karar, un des aides du cheikh, voulant ainsi montrer la renommée de ce centre religieux situé à une trentaine de kilomètres de Khartoum.

Au Nord-Soudan, les cheikh soufis sont parfois vénérés comme des demi-saints régulant la vie traditionnelle de la communauté et dotés du pouvoir d’influencer les décisions de leurs disciples. Les villageois d’Um Dubban se bousculent au portillon pour demander conseil.

« Depuis que je me suis marié, j’ai peur de tout, j’espère que le cheikh pourra me guérir ou faire quelque chose pour moi », souffle d’une voix posée, un homme dans la vingtaine, bien rasé.

Quatre grandes confréries -Qadariyya, Tijaniyya, Semaniyya, Khatmiyya- y sont implantées depuis des lustres. « L’adoption de l’islam au Soudan s’est faite via les soufis », relève pour sa part Mohammed Osmane al-Mirghani, chef de la Khatmiyya et du Parti unioniste démocrate (DUP).

Cette formation politique -comme le parti Umma- a certes une base religieuse, mais elle ne défend pas l’application de la loi islamique et ne prône pas une main-mise de la religion sur les affaires de l’Etat.

La Umma et le DUP avaient terminé en première et deuxième positions lors des dernières élections multipartites en 1986, devant les islamistes, mais ces derniers ont pris le pouvoir trois ans plus tard à la faveur d’un coup d’Etat d’Omar el-Béchir.

« Dans les premières années de l' »Inqaz » (Salut), -nom donné à la période initiée par ce coup d’Etat-, plusieurs confréries éprouvaient un malaise. Elles ne se sont pas rebellées, mais ont gardé de la distance », souligne Idriss al-Hassan, professeur de sociologie à l’université de Khartoum.

Les dirigeants du DUP avaient eux quitté le pays à la suite du coup d’Etat, avant de rentrer au milieu des années 2000.

« Les islamistes ne partagent pas les mêmes conceptions que les soufis, mais ont une relation utilitariste avec eux », conclut Hassan Idriss, rappelant que l’ex-président Nimeiri (au pouvoir de 1969 à 1985) avait, pour asseoir son pouvoir, offert des avantages matériels à des cheikhs en échange d’une visibilité auprès d’eux.

 

 

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