7 juillet 2011

فيكل يوم، نساهم بجهدنا في تقديمإعلام أفضل وأرقى عنبلدنا،تونس Un effort quotidien pour une information de qualité sur notre pays, la Tunisie. Everyday, we contribute to abetter information about our country, Tunisia

TUNISNEWS
11 ème année, N°4062 du 07.07.2011

 


Reporters sans frontières:TUNISIE – Nawaat.org menacé de procès pour diffamation

Agefi: Tunisie: la relance des exportations amortit la crise de l’industrie

Lemonde.fr: Tunisie/élections: 67% des Tunisiens indécis, Ennahda (islamistes) en tête

Le Soir: Tunisie: nouvelles actions en justice contre Ben Ali pour corruption

Business News: Tunisie – Un consensus en vue à l’Instance de Ben Achour

Jeune Afrique: Tunisie : la société civile vent debout

Kapitalis: Tunisie. La communication de crise de Lazhar Akremi à l’épreuve à Gafsa

Kapitalis: Tunisie. Ghannouchi, les islamistes tunisiens et le double langage

Leaders: Faouzia Charfi : pour débattre des vrais problèmes, il nous faut une Tunisie des libertés

Realites: Mohamed Talbi : «La Tunisie n’est pas prête à se laisser dominer par la terreur»

Jeune Afrique: Moyen-Orient : Al-Jazira dans la tourmente

INTERVIEW-Levi’s seeks to tap Arab Spring to sell jeans

 
 


 
Reporters sans frontières

TUNISIE – Nawaat.org menacé de procès pour diffamation


07.07.2011
Alors que l’ombre de la cybercensure plane toujours sur l’Internet tunisien, le blog Nawaat.org, lauréat du Prix du Net-Citoyen 2011, décerné par Reporters sans frontières le 11 mars dernier, est menacé de poursuites judiciaires pour diffamation par le journaliste et professeur franco-libanais Antoine Sfeir, rédacteur en chef du magasine Les Cahiers de l’Orient. En cause ? Un article intitulé « Les thuriféraires libanais de la dictature Ben Ali sur le grill tunisien », publié sur Nawaat.org, le 20 mars 2011, par le journaliste libanais René Naba.
Nawaat.org a été mis en demeure, le 16 juin 2011, par l’avocat d’Antoine Sfeir, qui exige le retrait du texte incrimé dans les 48h, sous peine de poursuites. En l’absence de réponse, l’avocat a adressé le même avertissement à l’hébergeur Dreamhost, qui l’a transmis à son client, Nawaat.
Quatre autres sites hébergeant l’article, www.oumma.com, www.palestine-solidarite.org, www.izuba.info et www.renenaba.com, ont reçu une même mise en demeure.
Reporters sans frontières dénonce ces tentatives d’intimidation qui rappellent les mauvais temps de la dictature Ben Ali. Aucune évolution démocratique ne peut se faire sans respect de la liberté de la presse et de la liberté d’expression.
L’organisation encourage l’hébergeur Dreamhost, basé aux Etats-Unis, à respecter ses engagements pour la liberté d’expression et à ne pas céder aux pressions d’Antoine Sfeir.
Dans une déclaration conjointe, les sites Internet incriminés ont affirmé qu’ils ne retireraient pas l’article, et qu’ils se battraient pour leur liberté d’expression.
Selon Nawaat.org “le courrier (de l’avocat, ndlr) ne mentionne aucun passage spécifique, se bornant à évoquer la diffamation”. Le site rappelle qu’”il est de notoriété publique que les propos incriminés peuvent faire l’usage d’un droit de réponse, conformément aux usages”. Selon le blog, “le fait de demander la suppression pure et simple de l’article, sans faire au préalable usage d’un droit de réponse, équivaudrait à une censure de fait. Censure d’autant plus inadmissible que les plaignants occupent moins d’un cinquième de cet article”.
Contacté par Reporters sans frontières, Antoine Sfeir a déclaré qu’il ne réclamait pas nécessairement le retrait de l’article dans son intégralité, mais uniquement les passages “diffamatoires”, concernant notamment les insinuations de René Naba selon lesquelles il aurait personnellement perçu de l’argent de la part de l’ancien président Zine el-Abidine Ben Ali.
Nawaat.org est un blog collectif indépendant, créé en 2004 et animé par des blogueurs tunisiens, qui a longtemps été bloqué par l’appareil de censure de l’ère Ben Ali.
Lire l’article: http://fr.rsf.org/tunisie-nawaat-org-menace-de-proces-pour-07-07-2011,40615.html

Tunisie: la relance des exportations amortit la crise de l’industrie


L’industrie tunisienne subit toujours le contre-coup de la crise mais l’activité reprend progressivement, notamment grâce à une relance des exportations, selon l’Agence tunisienne pour la promotion de l’industrie (API).
Le rapport de l’API, transmis mercredi à l’AFP, souligne une hausse en valeur des exportations de 14% sur les cinq premiers mois de l’année. Elles étaient dans le rouge en janvier (-2,3%).
Les activités manufacturières ont baissé de 4,9% durant les quatre premiers mois de l’année en cours, indique l’API, mais cette baisse est limitée à 2,6% si l’on inclut les activités minières et énergétiques.
Le recul de l’indicateur de la production industrielle est amorti par la reprise des exportations. A la fin du mois de janvier, une baisse de 11,4% de cet indicateur était enregistrée, mais au terme de quatre mois d’activité (entre janvier et avril), cette baisse a été ramenée à 4%. L’agence tunisienne se dit « confiante » et assure que les premiers chiffres des mois de mai et juin sont « encourageants ».
L’API explique cette relance par le retour au calme en Tunisie et l’accroissement de la demande extérieure. L’augmentation des prix des produits exportés, notamment dans les secteurs de l’agroalimentaire et du textile, a également joué en faveur de la Tunisie.
Les promesses d’investissements des Tunisiens ont augmenté d’un quart (26,4%) contre une baisse de 28,1% pour celles des capitaux étrangers.
(Source : www.agefi.ch, le 6 juillet 2011)

Tunisie/élections: 67% des Tunisiens indécis, Ennahda (islamistes) en tête


TUNIS, 06 Jul 2011 (AFP) – Deux Tunisiens sur trois ne savent pas pour qui ils iront voter lors de l’élection de l’assemblée constituante le 23 octobre, mais le mouvement islamiste Ennahda arrive en tête (14,3%) des intentions de vote, selon un sondage publié mercredi par l’institut 3C Etudes.
67% des Tunisiens interrogés se montrent indécis face à l’offre politique pléthorique (une centaine de partis ont été créés depuis la fuite de l’ex-président Ben Ali le 14 janvier), selon cet institut.
Parmi les principales formations, le mouvement islamiste Ennahda, légalisé après la révolution, arrive en tête des intentions de vote (14,3%) devant le Parti démocrate progressiste (PDP) qui obtient 4,7% et le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) à 1,6%.
Le Congrès pour la République (CPR) recueille 1,1% d’intentions de vote et le PCOT (Parti communiste) 0,8%.
Ce sondage a été réalisé par téléphone du 9 au 15 juin sur un échantillon représentatif de la population tunisienne âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.
3C Etudes se présente comme « le groupe tunisien leader des études marketing ». Créé en 2002 et opérant notamment en France, l’institut se lance pour la première fois avec ce sondage dans le secteur des études d’opinion en Tunisie.
Depuis la chute de Ben Ali, les instituts de sondage ont investi le champ de l’opinion politique, mais en sont encore à leurs balbutiements.
Faute d’historique, les résultats ne comportent aucune correction.
(Source : www.lemonde.fr, le 6 juillet 2011)

Tunisie: nouvelles actions en justice contre Ben Ali pour corruption


Deux nouvelles actions en justice ont été enclenchées contre l’ex président tunisien Ben Ali, et contre son gendre Sakher el-Materi pour des affaires de corruption financière et immobilière, a indiqué mercredi l’agence officielle TAP.
La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Tunis a décidé de déférer les deux accusés devant la chambre criminelle, sans fournir de précision sur les affaires en question.
Aucune date n’a été fixée. Quelque 182 affaires sont déjà instruites par la justice tunisienne à l’encontre du président déchu, réfugié en Arabie Saoudite depuis le 14 janvier, et déjà jugé deux fois par contumace.
M. Ben Ali a été condamné lundi à 15 ans et demi de prison et 54.000 euros pour détention d’armes, de stupéfiants et de pièces archéologiques.
L’ex président et son épouse Leïla Trabelsi avaient déjà été condamnés le 20 juin à 35 ans de prison et 45 millions d’euros d’amende pour détournement de fonds.
Sakher el-Materi, le gendre préféré de Ben Ali, a réussi à fuir au Qatar selon la presse tunisienne. Il est impliqué dans plusieurs affaires d’escroquerie et de détournement de fonds publics.
Ce jeune homme d’affaires issu de la bourgeoisie tunisoise, propriétaire de plusieurs médias jusqu’à la révolution, fait l’objet d’un avis de recherche lancé par les autorités tunisiennes après la chute du régime.
(Source : www.lesoir.be, le 6 juillet 2011)
 

Tunisie – Un consensus en vue à l’Instance de Ben Achour


 

Le Professeur Iyadh Ben Achour a rapporté, au cours de la séance de ce matin du mercredi 6 juillet 2011 de l’Instance supérieure de réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, les propos échangés lors de la rencontre de conciliation tenue avant-hier au Conseil de l’ordre des avocats entre plusieurs composantes de l’Instance, dont notamment Ennahdha et le CPR. Le Professeur Ben Achour a d’abord affirmé son attachement au ‘retour de l’unité au sein de l’Instance’ et remercié tous ceux qui ‘œuvrent pour le retour au consensus’. Il a ensuite rappelé certaines constantes comme ‘le fait que les élus au sein de l’instance soient intouchables, par respect même aux valeurs de la démocratie’. Il a finalement rapporté sa proposition d’installer une commission de concertation qui ‘aiderait le bureau de l’instance dans la préparation de son ordre du jour et la gestion de ses travaux’. Le président de l’Instance a également proposé de ‘reporter à la semaine prochaine le vote de la loi sur les partis’ afin de laisser du temps à davantage de concertations, surtout qu’entretemps, le Premier ministre assistera le 13 juillet à une audience de l’Instance pour débattre avec ses membres sur l’avancement de l’action du gouvernement. Les débats ayant suivi les propos de Ben Achour ont avalisé le report du vote sur la loi des partis, tout en insistant sur le fait que ‘le consensus ne doit pas se faire à tout prix’. Il doit respecter le statut de l’instance qui est de ‘légiférer en cette phase transitoire’. Les intervenants ont aussi rappelé que ‘les règles du jeu sur la base desquelles l’instance a commencé ses travaux, ne sauraient être révisées pour servir les intérêts des uns ou des autres’. Enfin, il a été convenu de se réunir de nouveau pour préparer la venue du Premier ministre et organiser les interventions lors de cette séance exceptionnelle. Il est également à signaler que Mustapha Tlili, président de la commission chargée d’établir la liste des ‘mounachidine’, a précisé au cours d’une courte intervention que ladite liste ‘a besoin de quelques retouches’ car elle doit comprendre ‘des noms ayant personnellement appelé l’ancien président à se représenter en 2014 et ce, dans des articles personnalisés et en dehors des listes’. Il a promis ‘d’ajouter ces noms et de présenter la liste lors de la séance de jeudi prochain, 14 juillet’.

Source: ”Business News” Le 07-07-2011

Lien:http://www.businessnews.com.tn/details_article.php?a=25585&temp=1&lang=fr&t=520


Tunisie – Un site web pour défendre Abdallah Kallel


Un site web a été mis en ligne pour défendre Abdallah Kallel et s’interroger s’il ne serait pas victime d’un complot politique. Il semblerait que le site ait été mis en ligne par les enfants de cet ancien ministre de Ben Ali qui a occupé plusieurs ministères de souveraineté dont la Défense, l’Intérieur et la Justice et qui a été, au 14 janvier, président de la Chambre des conseillers. Le site présente Abdallah Kallel comme étant une victime des actuels responsables politiques, de campagnes de désinformation et comme quelqu’un qui, en 40 ans de carrière, se serait toujours opposé à la corruption et aux pratiques du clan Ben Ali. Il recense le patrimoine de l’ancien ministre et invite les responsables politiques actuels à avoir le courage de publier le leur. Le site propose également un lien pour voir les événements ayant mené à l’arrestation de Abdallah Kallel et les plaintes le visant.

Pour acceder au site cliquer ce lien: http://www.abdallah-kallel.com/accueil.php


Tunisie : la société civile vent debout


 

Avocats, syndicalistes, enseignants, militants associatifs, ces Tunisiens étaient en première ligne le 14 janvier. À quatre mois de l’élection de la Constituante, ils entendent peser dans le débat national pour sauvegarder les acquis de la révolution et concrétiser ses objectifs.

Sous pression pendant vingt-trois ans, la Cocotte-Minute tunisienne a fini par exploser à la figure de la dictature. Au nom de la justice sociale, de la liberté et de la démocratie, les Tunisiens ont fait une révolution aussi inattendue que rapide. Et presque chirurgicale. En à peine un mois, ils ont décapité un système gangrené par la corruption, mis un terme à l’hégémonie des clans proches du régime et relégué aux oubliettes de l’Histoire l’ex-parti présidentiel, le tout-puissant Rassemblement constitutionnel démocratique (RDC), désormais dissous.

La peur d’une révolution confisquée

Mais, ce faisant, la révolution tunisienne n’a paradoxalement opéré que partiellement les grands changements que suppose une révolution ; les hommes, les institutions, les médias et le monde des affaires sont toujours là. La redistribution des cartes par les trois gouvernements de transition successifs a été lente, maladroite et peu visible ; certains y ont même décelé au mieux un changement dans la continuité, au pire l’effet d’une contre-révolution en marche. Ceux qui tenaient le haut du pavé le 14 janvier craignent qu’on ne leur confisque leur révolution.

Même si la mouvance islamiste a réussi à essaimer au sein de la classe moyenne et parmi les plus démunis, la majorité des Tunisiens oppose une grande méfiance aux discours des 91 partis politiques, à qui ils reprochent de n’avoir d’yeux que pour les sièges de la future Constituante. Ils sont tout aussi perplexes face aux dérives populistes des médias, qui font l’apprentissage du quatrième pouvoir, et à l’activisme tous azimuts des syndicats, qui ont paralysé certains secteurs et plongé la vie sociale et économique dans le chaos.

Après l’euphorie et la ferveur nées du 14 janvier, les Tunisiens ont été rapidement rattrapés par les dures réalités de la reconstruction, qui ont révélé les mutations, les atermoiements et les erreurs nécessaires à l’accomplissement de la démocratie. Cet équilibre instable n’est pas seulement dû à une transition toujours incertaine, mais également au hiatus – né de la révolution sans chef – entre le pouvoir exécutif et la légitimité révolutionnaire, sans oublier l’impact de la crise libyenne, qui a gravement affecté le sud du pays. Mais la « révolution sans chef » n’en a pas moins des acteurs, des porte-parole et des fers de lance, notamment au sein de la société civile, qui redécouvre progressivement les vertus de la citoyenneté, sa nature, ses prérogatives et ses limites..

« Institutionnaliser » la révolution

Toujours aussi combative, l’avocate Leila Ben Debba, cette pasionaria du 14 janvier qui brandissait le drapeau national devant le ministère de l’Intérieur, est intarissable quand elle évoque le chemin parcouru par le pays. « On avance lentement, presque sans s’en rendre compte, mais au fond, nous avons obtenu tant de résultats, se félicite-t-elle. Dernier en date, l’élection de la Constituante, fixée au 23 octobre. Mais n’oublions pas que c’est la pression populaire qui a mis fin aux tergiversations des deux gouvernements Ghannouchi et conduit à la tenue de ce scrutin. » L’économiste Mahmoud Ben Romdhane, du parti Ettajdid, émanation de l’ancien parti communiste, abonde dans le même sens : « Les avancées sont considérables. Nous sommes parvenus à “institutionnaliser” politiquement la révolution. La Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution a fixé des règles, parfois hardies, comme celle établissant la parité, et nous avons également préparé l’avenir en fixant la mémoire à travers l’action des commissions d’enquête sur les exactions de l’ancien régime. »

Une société civile en maturation

Hier unis contreBen Ali, les Tunisiens sont aujourd’hui appelés à jeter ensemble les fondements d’une IIe République en faisant l’expérience du débat contradictoire. Car, au-delà de la cacophonie des partis politiques, c’est la société civile qui apparaît comme la garante de la transition démocratique et la pierre angulaire de l’unité nationale. Ainsi a-t-on vu, à son initiative, le débat sur certaines problématiques clés, telles que la laïcité, l’égalité, la parité, portées sur la place publique. Éditrice, très active dans le milieu associatif, Faouzia Skandrani s’emploie ainsi à mettre en réseau les associations citoyennes « pour donner plus d’impact à des réflexions sur des problèmes de fond, comme le principe d’égalité, qui sont d’un intérêt largement partagé et que les médias négligent d’aborder ». « La société civile retrouve sa liberté d’action, confirme Bochra Belhadj Hmida, avocate et militante des droits de la femme. Mais il est essentiel de s’assurer que le processus continue. Il faut également résoudre le problème sécuritaire pour mettre en avant nos acquis. Le nécessaire rétablissement des valeurs passe par un travail de prise de conscience générale des élites et des citoyens. Une partie du pays à elle seule ne peut le sauver. Il s’agit d’œuvrer ensemble à une réelle cohésion nationale. »

La montée en puissance d’une société civile en maturation fait office de contrepoids à la prolifération des partis, dont les programmes, les objectifs et les arcanes demeurent trop flous pour l’opinion publique. « Les partis sont déconnectés des réalités du terrain », analyse Radhi Meddeb, chef d’entreprise et initiateur du mouvement citoyen Action et développement solidaire. Leila Ben Debba, elle, exige des garde-fous, comme la transparence sur le financement des partis. Des lois doivent être rapidement mises en place à cet effet pour que la démocratie ne soit pas l’objet de tractations financières ni prise en otage par le pouvoir de l’argent, certaines forces politiques – les islamistes d’Ennahdhaou les anciens du RCD – disposant de moyens considérables.

Constituante souveraine, inconnue à variables multiples

La démultiplication des opinions et des tendances politiques est devenue palpable lors des discussions autour du code électoral et de la date à retenir pour l’élection de la Constituante. Si certains ont jugé les débats souvent superflus, d’autres ont soutenu au contraire que c’était un passage obligé pour parvenir à un consensus sur des questions fondamentales et que le report des élections était une bonne chose pour permettre d’identifier les différentes propositions politiques. Pourtant, une Constituante souveraine reste perçue comme une inconnue à variables multiples qui pourrait faire basculer le pays dans l’escarcelle des islamistes, les autres partis peinant à dégager les bases de fronts communs.

Abdelaziz Mzoughi, un indépendant qui a claqué la porte de la Haute Instance, ne cache pas son désappointement : « Il est important d’avoir des élections dans la paix civile, mais la Constituante n’est pas un bon choix ; nous risquons de sortir du despotisme d’un homme pour tomber dans celui d’une Constituante. » Faire front pour que le processus de démocratisation ne bénéficie pas aux antidémocrates est le défi auquel font face aujourd’hui les progressistes, toutes tendances confondues. À cet égard, la Haute Instance veut donner des assurances à travers un pacte national garantissant un seuil minimum de démocratie dans la future Constitution.

Un travail de fond pour l’exécutif

Le pluralisme est également une nouvelle donne avec laquelle doit composer le gouvernement, qui, sous la pression des uns et des autres, peine à agir et subit l’inertie d’un appareil administratif toujours en place. Très critiqué pour sa frilosité, il ne donne pas l’impression d’être animé par une volonté de rupture. L’opinion lui reproche de n’avoir pas su travailler dans la proximité et juge nécessaires des actions à effets immédiats. « L’armée, dans son rôle, a été remarquable, mais la police, toujours loyaliste, doit faire un travail de fond pour changer, écrit un internaute. Reconnaître des abus et des maladresses serait un signe fort que pourrait donner l’exécutif. Tout finit par se savoir. » Tandis que la blogueuse Lina Ben Mhenni s’insurge contre le gouvernement, « qui n’a pas à prendre certaines décisions ; les libertés reculent avec un retour de la violence policière et du silence dans les médias ». Pour sa part, Nafaa Ennaifar, chef d’entreprise, affirme que « chacun doit jouer son rôle. Le gouvernement, l’administration, la société civile, les médias et surtout les syndicats doivent sensibiliser l’opinion aux différents enjeux et assumer leurs responsabilités ».

Une économie fragilisée

La révolution, ou plutôt les tentatives de déstabilisation qui l’accompagnent, et la guerre civile libyenne coûtent cher à la Tunisie. L’aggravation du taux de chômage, qui est passé de 13 % à 19 %, la pression des syndicats, le net recul de la consommation, la chute du tourisme et la disparition du marché libyen affectent lourdement l’économie. En revanche – heureuse surprise –, les exportations des industries textiles et mécaniques sont en hausse. Beaucoup ont vu dans les mouvements sociaux et les grèves qui ont bloqué le pays des manœuvres de la direction de l’Union générale tunisienne du travail, la toute-puissante UGTT, qui a longtemps eu le monopole de l’action syndicale. Avec la création de deux nouvelles centrales, l’UGTT a dû mettre une sourdine à ses actions et entamer une profonde remise en question.

Si Radhi Meddeb juge l’explosion des revendications tout à fait légitime, Nafaa Ennaifar constate que « de nouveaux rapports constructifs se sont instaurés avec une nouvelle vision de la relation patrons-salariés, qui ont comme ennemi commun la précarité. Cette redéfinition crée une amélioration de la compétitivité, mais l’environnement de l’entreprise n’est pas exempt de turbulences, comme les grèves dans les institutions ». Faouzi Elloumi, patron du groupe Chakira, considère que « la politique a tenu mieux que prévu et l’économie a su résister dans certains secteurs, mais une transition trop longue aurait de graves conséquences sur l’investissement. Dans une économie de développement transparente, nous devons consolider nos acquis pour ne pas voir partir les investisseurs ». « Une révolution a un prix, tempère Mahmoud Ben Romdhane. Le principal défi est de surmonter cette phase pour que redémarre la machine économique », tandis que Nafaa Ennaifar soutient que « la reprise ne dépend que de nous et du retour de la confiance ».

Avenir incertain

En première ligne le 14 janvier, les jeunes apparaissent aujourd’hui, avec les populations des régions de l’intérieur, comme les oubliés de la révolution. Avides d’exercer leur citoyenneté, confrontés au chômage, ils sont nombreux à penser que les débats ne donnent pas à manger, d’autant qu’ils ont l’impression d’être négligés par les partis politiques, alors qu’ils représentent près de 40 % de la population. Au-delà des revendications, Lina Ben Mhenni exprime un certain désarroi : « Nous avions un ennemi commun et nous avons travaillé à le contrer. Mais depuis le 14 janvier, les intérêts divergent. Je suis aujourd’hui dans le flou. »

L’activiste Hamadi Kaloutcha surenchérit : « Nous avons beaucoup milité pour les libertés, mais certains partis se sont montrés ingrats et manœuvrent de façon malhonnête pour que des calculs politiciens prennent le pas sur la révolution. » Sami Ben Sassi, représentant de la société civile, est tout aussi amer : « La transition est floue, difficile. Nous voguons entre l’espoir et la déception. Je n’ai pas l’impression que les choses aient changé. »

Si l’homme et la femme de la rue ne cachent pas leur angoisse face à un avenir qui leur semble incertain, si les Tunisiennes sont inquiètes face aux velléités d’Ennahdha de revenir à la charia, d’autres se font une raison. « Nous avons fait une révolution et nous avons voulu la démocratie, ce n’est pas une mince affaire. Nous avons été naïfs de croire que cela pourrait être rapide. Tout est à mettre en place. Il faut solder le passé et apprendre à s’entendre », explique le gérant d’une boulangerie qui demeure optimiste quant au bon sens de ses concitoyens.

« Les Tunisiens ont inventé un nouveau concept, une révolution moderne, sans doute difficile à vivre, mais qui n’a rien de classique. Si l’Égypte a donné l’impression d’avancer plus vite en optant pour une présidentielle, elle n’en verra pas moins, de ce fait, le processus révolutionnaire ralentir. À long terme, la Tunisie s’en sortira mieux, car elle aura construit sa IIe République sur des bases solides : une nouvelle Constitution. Mais le plus dur reste à faire », conclut Leila Ben Debba.

Confidences d’un chauffeur de taxi

« Si mes sièges pouvaient parler, ils en raconteraient des choses. Depuis le 14 janvier, mes clients sont atteints de parlotte aiguë ; ils croient, le temps d’une course, être chez le psychiatre, raconte Ali. Au début, c’était l’euphorie et plus personne ne craignait de dire le fond de sa pensée à un banal chauffeur de taxi, souvent soupçonné du temps de Ben Ali, parfois à raison, d’être un indicateur. J’ai tout entendu : la peur des milices, les commentaires sur les mouvements pro- et anti-Casbah, la haine du RCD. Certains regrettent même Ben Ali pour la sécurité qui régnait. On voit aussi des barbus qui ne sont pas islamistes et des islamistes qui parlent de Dieu et reluquent les filles. Aujourd’hui, les gens sont dans la défiance et graignent pour leur avenir. La situation leur échappe. Ils cherchent à comprendre, mais personne ne se donne la peine d’expliquer la situation. Le Tunisien est un modéré que l’agitation politique désarçonne ; il ne sait pas construire dans l’angoisse et ne veut pas des extrêmes. Il souhaite tout simplement vivre tranquillement. »

Questions à Fadhel Moussa

Professeur, doyen de la faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis

Jeune Afrique : Où en est la Tunisie cinq mois après la révolution ?

Fadhel Moussa : La Tunisie est en transition démocratique, économique et sociale. Démocratique par la suspension de la Constitution de 1959, la dissolution du RCD, qui a monopolisé le pouvoir, l’émergence de quelque 90 partis politiques, l’organisation, le 23 octobre, de l’élection d’une Constituante, la libéralisation des médias et l’éclosion des droits et libertés. Cette évolution démocratique et politique ne s’est pas accompagnée d’un développement économique et social en raison des revendications sociales. La Tunisie vit une situation paradoxale : un affaiblissement de la croissance économique et un renforcement de l’ouverture démocratique et politique. Mais cette dernière finira par stimuler la première.

Quel doit être le rôle de la société civile ?

La société civile s’est particulièrement illustrée. Le nombre des associations et autres initiatives et mouvements citoyens dépasse celui des partis politiques qui envient leur action sur le terrain, la mobilisation des citoyens, la sympathie et la confiance qu’elles suscitent. Au-delà de leur action apolitique, certaines semblent s’intéresser à la politique. On n’exclut pas de voir des listes indépendantes aux élections issues de certaines associations, ou leur regroupement en des fronts ou pôles électoraux avec des partis, ou encore leur soutien ciblé à des listes électorales.

Quelles sont les priorités dans la perspective des élections ?

La première priorité, c’est le renforcement de l’ordre et de la sécurité, sans quoi on ne peut organiser d’élections crédibles. Il y a ensuite la mise en place d’un système équitable de financement des partis politiques et des campagnes électorales. Les acteurs politiques doivent faire montre d’un grand sens des responsabilités et avoir une haute idée de l’intérêt général, afin d’assurer la réussite de cette révolution et du processus démocratique qui demande de la persévérance, car c’est un défi permanent.

Source : « Jeune Afrique » Le 07-07-2011

Lien : http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2633p050-053.xml0/tunisie-democratie-reconstruction-rdctunisie-la-societe-civile-vent-debout.html


Tunisie. La communication de crise de Lazhar Akremi à l’épreuve à Gafsa


Le nouveau ministre délégué auprès du ministre l’Intérieur chargé des réformes, Mohamed Lazhar Akremi, a entamé sa mission de pompier par une visite, mercredi, dans la région minière de Gafsa. Ce n’était pas une sinécure.

L’activité économique dans cette région réputée frondeuse a connu ces derniers jours des perturbations en raison des mouvements de sit-in organisés par des groupes de chômeurs dans différentes structures de production et de services publics. La visite du responsable frais émoulu visait à dialoguer avec les meneurs des mouvements sociaux et à trouver des compromis pour résoudre les problèmes en suspens. Des rencontres ont ainsi été organisées entre M. Akermi et les sit-inneurs à El Ksar, Medhilla et Metlaoui. Le responsable gouvernemental a essayé d’expliquer que la légitimité des revendications des habitants de ces régions ne peut en aucun cas excuser le blocage de l’activité économique dans la région. Et que sans une reprise de cette activité, le gouvernement aurait du mal à répondre aux défis de l’emploi et du développement des régions. Il a proposé de constituer des comités et des groupes de sages afin d’identifier les priorités et les solutions au problème du chômage dans la région et de les soumettre aux autorités publiques. On ne peut pas dire que la communication de crise a opéré. Le nouveau ministre n’a pas de baguette magique ni de solutions instantanées. Et les paroles ne suffisent pas. Les grévistes et sit-inneurs, qui ont longtemps attendu, s’impatientent de cueillir les fruits de la révolution dont ils furent les déclencheurs. Ces fruits, ce sont des activistes et des opportunistes de Tunis qui les cueillent, comme toujours. Comme quoi, l’histoire tunisienne est un éternel bégaiement. Les «7 novembre» se suivent et se ressemblent étrangement…

Source : « Kapitalis » Le 07-07-2011

Lien : http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/4771-tunisie-la-communication-de-crise-de-lazhar-akremi-a-lepreuve-a-gafsa.html


Tunisie. Ghannouchi, les islamistes tunisiens et le double langage


Par Muqtedar Khan*

Dans un contexte politique marqué par la méfiance, la suspicion et même la peur, les partis, qu’ils soient islamistes ou sécularistes, devraient révéler le type de constitution qu’ils envisagent pour la Tunisie.

J’ai été à Tunis la semaine dernière (24 et 25 juin, Ndlr) pour participer à une conférence qui a réuni les principales tendances politiques désormais en compétition pour le pouvoir en Tunisie. Plusieurs chercheurs américains, spécialistes des transitions démocratiques ou d’islam politique étaient également là. La conférence était organisée par le Center for the Study of Islam and Democracy (Centre d’étude de l’islam et de la démocratie), think tank basé à Washington D.C. qui œuvre, depuis plus d’une décennie, à promouvoir la démocratie dans le monde musulman.

Les craintes suscitées par Ghannouchi et son parti Cheikh Rached Ghannouchi a participé à la conférence. Il a parlé de sa vision de la Tunisie et de l’importance de reconnaître les longues et durables traditions non laïques des sociétés musulmanes. M. Ghannouchi, qui était en exil à Londres, est de retour en Tunisie après la révolution de jasmin, et il s’est déjà imposé comme la voix la plus dominante dans la politique tunisienne et son mouvement, Ennahdha (Renaissance) devrait être l’un des plus importants, sinon le plus important, parmi les acteurs de l’Assemblée constituante qui rédigera la nouvelle constitution de la Tunisie libre. Les élections pour cette Assemblée sont prévues pour le 23 octobre 2011. Beaucoup d’intellectuels laïques et de politiciens en Tunisie craignent que M. Ghannouchi et son mouvement utilisent le processus démocratique dans le pays pour le transformer en un Etat islamique et s’attaquer aux libertés civiles et politiques de ceux qui ne partagent pas leur vision islamiste. La Tunisie a fait des progrès considérables en accordant aux femmes des droits égaux et il y a une véritable crainte chez les jeunes femmes qu’Ennahdha puisse demander un jour à transformer la Tunisie en un autre Iran. Inutile de dire qu’Ennahdha et ses leaders démentent ces allégations qui suscitent la peur, et soulignent qu’ils sont juste un parti différent, bien qu’il mette davantage l’accent sur le fait que la Tunisie est un pays musulman et pense que les valeurs islamiques peuvent contribuer beaucoup à mettre un peu plus de sagesse dans la gouvernance politique. Le succès de Recep Tayyib Erdogan et de son Parti de la Justice et du Développement (Akp) en Turquie a donné espoir aux partisans de la laïcité que les partis islamistes peuvent prospérer dans un contexte démocratique sans remettre en cause ou en danger la démocratie. Ce succès a également donné de la légitimité à la feuille de route des partis islamistes. Est-ce qu’Ennahdha peut être un autre Akp, ou Ghannouchi va-t-il se retourner contre la démocratie, une fois qu’il en a bénéficié pour accéder au pouvoir? Tout le monde cherche une réponse à cette question. La situation avec les Frères musulmans est plus ou moins similaire, même si le contexte égyptien est beaucoup plus compliqué que celui de la Tunisie.

L’écart entre Ghannouchi et sa base sociale Rached Ghannouchi est différent des autres islamistes. Il a bénéficié de l’asile politique accordé par la Grande-Bretagne. Ayant vécu de longues années dans une démocratie libérale, il comprend comment celle-ci fonctionne, et nous espérons maintenant qu’il a reconnu et compris ses vertus. Il a rompu avec d’autres tendances islamistes et a, dans le passé, plaidé pour un pragmatisme idéologique. Il a, par exemple, rejeté l’idée de tuer les apostats religieux, accepté la nécessité de nouer des coalitions et exprimé la volonté des islamistes tunisiens de partager le pouvoir avec les non-islamistes. Parmi tous les partis islamistes qui, comme les Turcs de l’Akp, soulignent le fait qu’ils ne sont pas islamistes, celui de Rached Ghannouchi apparaît comme le plus compatible avec la démocratie. Mais beaucoup de ses détracteurs, en particulier en Tunisie, n’en sont pas encore convaincus et des allégations de «double discours» lui sont souvent faites. L’argument est qu’il dit une chose quand ce sont les partisans de la laïcité et de l’Occident qui l’écoutent, et toute autre chose quand il parle à ses adeptes. Les critiques soulignent également qu’étant donné son expérience et sa formation, il peut être véritablement un démocrate et même un libéral, mais la base d’Ennahdha et sa filiation sociale et idéologique ne le sont pas forcément, comme en témoignent les sentiments antidémocratiques fréquemment exprimées par beaucoup de ses jeunes dirigeants. M. Ghannouchi concède que son parti serait bien inspiré d’unifier davantage son message.

Une très mauvaise communication Lors de la séance des questions et réponses, j’ai posé à cheikh Rached la question suivante: si vous gagnez une partie importante des sièges de l’Assemblée constituante, est-ce que l’un de vos principaux objectifs, en plus d’encadrer la Constitution, serait aussi de protéger les droits de ceux qui n’ont pas voté pour vous? Seriez-vous capable de faire cela? Pourquoi n’essayez-vous pas de calmer les craintes et les soupçons sur vos intentions en publiant votre projet de constitution avant les élections? Afin que tout le monde sache ce pour quoi Ennahdha se bat. J’ai été déçu par sa réponse. J’espérais quelque chose du genre – «Quelle bonne idée, nous allons publier un projet de constitution avant les élections», ou «Nous y avons déjà pensé et sommes en train de faire exactement cela.» Mais tout ce qu’il a dit, c’est qu’Ennahdha n’ira pas aux urnes sans programme et que 150 professeurs d’université planchent actuellement sur l’élaboration du programme en question. En revanche, il n’a fait aucun commentaire sur ce que lui et son parti sont disposés à partager dans la nouvelle constitution tunisienne. Il n’a pas exprimé, non plus, d’engagement à défendre les droits de ceux qui ne votent pas pour Ennahdha. J’espère que le peuple tunisien exigera de tous les partis politiques, les islamistes et les non islamistes, une version du type de constitution qu’ils envisagent pour la Tunisie. Au moment où le contexte politique est marqué par la méfiance, la suspicion et même la peur, la publication d’un engagement des partis politiques sur certains principes fondamentaux avant les élections permettra de réduire les tensions et de renforcer leur coopération. Comme le printemps arabe est en train d’essaimer dans toute la région, un pareil engagement pourrait aider à réduire les soupçons de ceux qui ont du mal à admettre que les islamistes croient à la démocratie et œuvrent pour son établissement. Ces engagements les obligeront également à respecter les principes démocratiques au moment où ils vont se mettre à la rédaction des constitutions.

Traduit de l’anglais par Imed Trabelsi

Source: ‘‘Huffington Post’’.

Titre original de l’article : ‘‘Islamists and the Problem of Double Discourse’’.

* Les titres et intertitres sont de la rédaction de Kapitalis.

* Dr. Muqtedar Khan est professeur agrégé à l’Université du Delaware et Fellow de l’Institut pour la politique sociale et la compréhension.

Source : « Kapitalis » Le 07-07-2011

Lien : http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/4743-tunisie-ghannouchi-les-islamistes-tunisiens-et-le-double-langage.html


Faouzia Charfi : pour débattre des vrais problèmes, il nous faut une Tunisie des libertés


 

La mobilisation se renforce en faveur de la marche pacifique pour la liberté et contre la violence prévue ce jeudi 7 juillet à partir de 18h, au départ de la Place Pasteur, Tunis, vers l’avenue Mohamed V. Initiée par un collectif d’organisations et de partis politiques, elle vise à exprimer « le refus de la terreur » et «affirmer l’attachement à la liberté». « Je suis très mobilisée pour cette marche déclare Mme Faouzia Charfi, à Leaders. Il est essentiel pour notre pays que la peur ne paralyse pas la parole libérée depuis le 14 janvier. J’aimerais que l’on sorte de cet enfermement dans lequel nous sommes! Nous avons à débattre de tant de problèmes, l’éducation, l’enseignement supérieur, les filières proposées à nos jeunes, la recherche …. Nous avons face à nous le problème du chômage…. Mais pour que ces questions puissent être débattues, il nous faut: une Tunisie de la liberté, c’est pour cela que nous devrons être nombreux ce jeudi.»

Source : « Leaders » Le 07-07-2011

Lien : http://www.leaders.com.tn/article/faouzia-charfi-pour-debattre-des-vrais-problemes-il-nous-faut-une-tunisie-des-libertes?id=5690


Mohamed Talbi : «La Tunisie n’est pas prête à se laisser dominer par la terreur»


 

Mohamed Talbi s’est avéré un querelleur infatigable malgré ses 90 ans. Il a réussi à se mettre à dos les salafistes, les islamistes et une bonne partie des Tunisiens qui se sont précipités pour l’accuser d’imposture sans chercher à comprendre le sens profond de sa pensée. Cet érudit qui a passé plus de la moitié de sa vie à étudier le Coran, les textes fondateurs de l’Islam, l’histoire arabo-musulmane ainsi que les textes bibliques se trouve aujourd’hui dans l’œil du cyclone. Car il ose donner une autre vision de l’islam : une religion qui prône la tolérance, le respect de l’autre et l’ouverture d’esprit. Voilà un homme dont les travaux sont reconnus à l’échelle mondiale et qui continue son combat pour défendre ses pensées contre vents et marées. Dans cet entretien, il explique sa position vis-à-vis du salafisme et met en garde contre une certaine lecture obscurantiste de la religion musulmane. Il appelle fortement à protéger la liberté d’expression, seule garante d’une société plurielle où la cohabitation entre les différentes tendances est possible.

Que pensez-vous de l’attaque des salafistes contre le Cinémafricat et ce qui s’en est suivi ?

Si on applique la chariaâ, comme le salafisme le prône, Nadia El Fani devrait être condamnée à mort pour apostasie. J’ai rappelé ce fait à Abdelfettah Mourou lors de mon entretien avec lui sur Shams FM en lui demandant ce qu’Ennahdha aurait fait si elle avait le pouvoir. Il m’a répondu que l’artiste serait traduite devant la justice pour offense au sentiment religieux des Tunisiens. Cela ne signifie pas appliquer la chariaâ à la lettre comme le préconisent les islamistes. Pour moi, il n’a pas répondu clairement à ma question. Ennahdha continue d’utiliser le double langage et de faire preuve d’hypocrisie. Il faut dénoncer cela. Vous-même, vous figurez sur la liste noire des gens à abattre par les salafistes, surtout après ce que vous avez dit sur les compagnons du prophète et son épouse « Aicha ».

ne vous sentez-vous pas menacé aujourd’hui?

Je m’expose aux attaques des salafistes mais je n’y peux rien. Il faut bien que je continue mon engagement. Si je devais avoir peur, cela aurait pu arriver sous Ben Ali. Or, ce n’était pas le cas. (A ce moment, Talbi reçoit un coup de téléphone d’une dame qui prévient que sa conférence prévue le lendemain à l’Association des mères tunisiennes sera ajournée par peur des attaques des salafistes). Il reprend avec un air préoccupé : « Si le salafisme va passer à la violence et il l’a fait déjà, alors nous courrons beaucoup de risques ».

Que faire dans ce cas ? Qui pourrait protéger les intellectuels et les artistes?

C’est l’Etat qui doit assumer son rôle et faire une investigation aussi profonde que possible pour prévenir avant de guérir. Mais nous avons actuellement un Etat transitoire qui n’a pas de légitimité populaire. Donc il n’est pas fort… Il est vrai que l’Etat est fragile et plus ou moins paralysé. Mais dans une situation pareille, il doit assumer son rôle. Car il est responsable de la sureté nationale et de la sécurité des Tunisiens. Et vous, médias, vous êtes tenus de mener une campagne dans ce sens, pour que l’Etat ne recule pas devant l’extrémisme religieux. La nation tunisienne dans sa grande majorité est contre le salafisme fanatique. La presse a une grande responsabilité en ce moment.

Ne pensez-vous pas que les partis politiques et la société civile devraient aussi s’engager dans cette lutte?

Les partis politiques doivent soutenir l’Etat dans sa lutte contre le fanatisme. Mais ils ont besoin des médias pour faire parvenir leur voix. Vous devez être leur porte parole pour que les Tunisiens soient avertis du danger. Nous sommes aujourd’hui face à une situation très préoccupante.

Vous faites partie des adeptes d’un islam réformé, comment pensez-vous faire face à cet islam fanatique, rigide et violent ?

Je suis en train de mener la bataille intellectuelle contre cet islam-là par le biais de mes écrits. Mais si le contenu de mes ouvrages, ne parvient pas au grand public, c’est parce que les médias ne font pas leur devoir. Les penseurs apportent l’argumentation intellectuelle qui montre que le salafisme est sans fondement et qu’il ne représente pas l’Islam mais le terrorisme. Il faut que la presse diffuse nos idées. Le film de Nadia El Fani porte sur la laïcité et c’est pour cela qu’il a été attaqué.

Pensez-vous que la séparation entre le religieux et le politique comme modèle de société est possible aujourd’hui en Tunisie ?

Cela pourrait être possible si la société civile se mobilise fortement contre le fanatisme religieux et pour la séparation entre l’Etat et la religion. C’est le peuple qui peut faire barrage à l’extrémisme, quant à nous, intellectuels, nous mettons à sa disposition les fondements pour contrer l’argumentation du salafisme.

Mais ce peuple qui se montre si attaché à son identité arabo-musulmane et à l’article 1 de la Constitution, est-il prêt à accepter la laïcité ?

Je crois que la société dans sa majorité est prête à faire ce pas. Mais il y a une frange qui est en train de contrer ce projet. Alors c’est la confrontation entre deux tendances : une minorité qui veut imposer ses idées par la force et la terreur et une majorité qui est contre et qui se doit d’aller manifester dans les rues. Je lance, d’ailleurs, un appel au peuple tunisien pour se mobiliser comme il l’a fait contre la dictature. C’est ainsi que nous parviendrons à combattre le terrorisme, en le dénonçant et en montrant que la Tunisie n’est pas prête à se laisser dominer par la terreur.

On a entendu dire que vous préparez un livre sur le sécularisme, comment allez- vous traiter cette question ?

Oui, l’ouvrage est en arabe et porte le titre « L’Islam coranique et le sécularisme ». Nous devons créer notre sécularisme compatible avec notre identité. Je défends dans ce livre une société civile, multiple, avec des tendances différentes qui se tolèrent les unes les autres. Nous habitons dans une même maison qui est la Tunisie et qui appartient à tout le monde. Entre voisins, il faut qu’il y ait un modus vivendi afin de vivre ensemble sans s’entre tuer. Vous appelez donc à une plateforme de valeurs communes où tout le monde peut se reconnaitre… Les valeurs communes ne peuvent être qu’universelles. Le sécularisme ne veut pas dire athéisme. Je suis musulman pratiquant. Je ne peux pas défendre l’athéisme. Mais je dois respecter les athées de mon peuple qui doivent à leur tour respecter les musulmans tunisiens.

Vous puisez vos arguments pour défendre le sécularisme dans le Coran, comment ?

Je vous donne un exemple : le verset 34 de la sourate Foussilat : « Repousse (le mal) par ce qui est meilleur; et voilà que celui avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux ». Voilà ce que me dit le Coran. Il incite les Musulmans à la cohabitation et d’avoir recours en cas de litige, aux moyens les plus courtois pour le résoudre. Nous devons nous tolérer mutuellement quelles que soient nos idées, nos tendances, notre façon de vivre, de se comporter, de s’habiller. La violence est à éviter. Dans tous vos livres, vous appelez à considérer le Coran comme unique référence.

Mais est-ce que le musulman moyen a la possibilité d’accéder au texte et de le comprendre tout seul, sans passer par le hadith , l’exégèse et les fuqahas ?

Allah est capable de s’exprimer clairement par lui-même. N’importe qui peut lire le texte coranique s’il connait l’arabe. Le Coran est un texte très complexe mais très simple en même temps. On ne peut pas être plus clair que Dieu.

Mais le Coran est un texte assez complexe qui nécessite parfois un certain niveau intellectuel pour comprendre son sens ?

C’est un piège que le salafisme utilise justement pour dire aux gens : vous êtes incapables de comprendre. Nous sommes les seuls qui pouvons le faire et nous allons vous dire ce que préconise le Coran. Ils veulent nous piéger et développer chez nous un complexe d’infériorité face au Texte.

Pourquoi le barbu serait-il plus capable de le comprendre que moi ? Est-ce qu’il connait l’arabe mieux que n’importe quel Tunisien cultivé connaissant sa langue?

Il faut inverser l’argument salafiste en disant : nous sommes aptes à saisir le sens du coran au même titre que vous et même mieux.

Admettons que le musulman moyen comprenne le Texte, est-il capable de l’interpréter? Pourquoi voulez-vous qu’il cherche l’interprétation d’un autre ? Il peut interpréter par lui-même en se faisant aider par des ouvrages explicatifs bien faits comme ceux de Hamza Boubakeur ou de Youssef Ali.

Nous avons des instruments de lecture qui sont les travaux sérieux de savants musulmans.

Dans ce cas, faut-il éliminer la chariâa?

La religion musulmane comporte deux volets : le culte et la chariaâ. Le culte ne nécessite pas de culture particulière pour s’en acquitter. Chacun l’apprend au sein de sa propre famille. En ce qui concerne la chariâa, je pense qu’on peut s’en passer. Elle est remplacée aujourd’hui par l’Etat et l’Assemblée nationale qui font les lois. Je rappelle que la chariâa a été faite à la fin du deuxième siècle de l’hégire. Les Musulmans ont vécu sans elle pendant deux siècles. Nous pouvons donc, la mettre de côté.

Et que fera-t-on de tout l’héritage musulman cumulé ?

C’est un héritage culturel, et donc c’est l’affaire des chercheurs qui, eux, travailleront sur telle problématique ou telle autre. Mais l’Islam dans sa simplicité première c’est le culte. On ne demande pas au musulman d’être un juriste, ni un penseur ni un philosophe. Que pensez-vous de ce discours identitaire qui refait surface. On n’arrête pas de parler d’identité arabo-musulmane.

On a l’impression qu’elle s’est cristallisée à un moment où on devait s’ouvrir sur le monde ?

Le mot identité est un concept vide. La majorité des Tunisiens ne se posent pas la question identitaire parce qu’ils vivent leur identité, sans philosopher autour. C’est quelque chose de vécu. Tout ce qui n’est pas vécu est supplémentaire. L’identité est une réflexion à un niveau très élevé, un concept extrêmement complexe. Pourquoi, alors, est-il devenu le sujet central du débat aujourd’hui.

Y a-t-il des gens qui jouent sur cette question identitaire ? Certainement, il y a des gens qui veulent jouer là-dessus. Le salafisme veut confondre identité avec Islam. Un Tunisien qui n’est pas musulman a-t-il oui ou non l’identité tunisienne ?

L’Islam est un élément de l’identité et pas l’identité elle-même. On peut être Tunisien et athée ou chrétien ou juif. Il est vrai que l’Etat est fragile et plus ou moins paralysé.Mais dans une situation pareille, il doit assumer son rôle. Car il est responsable de la sureté nationale et de la sécurité des Tunisiens.

Source: ”Realites” Le 06-07-2011

Lien : http://www.realites.com.tn/details_article.php?t=534&a=23239&temp=1&lang=&w=


Moyen-Orient : Al-Jazira dans la tourmente


 

Au cœur des révoltes arabes, la chaîne qatarie a déçu certains auditeurs par le deux poids deux mesures dont elle a fait preuve selon les pays. La chercheuse Claire-Gabrielle Talon explique comment elle devient un enjeu géopolitique et une arme redoutable qui pourraient exacerber les tensions au sommet de l’État. Interview.

Al-Jazira tient à son « printemps arabe ». Février 2011, des jours durant la chaîne satellitaire qatarie a été l’ange gardien des manifestants égyptiens de la place Al-Tahrir. En choisissant de filmer 24 heures sur 24 le centre névralgique de la révolution, elle a protégé les citoyens d’une répression qui autrement aurait pu rester impunie. Fin juin, ses flashs info ouvrent toujours sur des films amateurs des manifestations en Syrie ou des combats libyens à Misrata. Alors même que le « printemps arabe » à bout de souffle semble s’enliser en ce début d’été.

Après quinze ans d’existence, la chaîne est devenue incontournable, mais elle doit aussi affronter pour la première fois des auditeurs déçus par l’évident deux poids deux mesures dont elle fait preuve selon les pays en révolte. Que fera, par ailleurs, la chaîne quand l’équilibre entre les diverses influences de la famille royale, qui garantit la pluralité à l’écran, sera menacé ? Heureusement pour Al-Jazira, le vent protestataire n’a pas encore soufflé au Qatar…

Claire-Gabrielle Talon, politologue française auteure d’un ouvrage intitulé Al Jazeera. Liberté d’expression et pétromonarchie, décrypte comment la chaîne réagit depuis six mois au « printemps arabe » et explique comment ces mouvements contestataires prennent place dans le système singulier d’une chaîne, ni tout à fait privée ni complètement publique, que craignent terriblement de nombreux régimes arabes dont elle est le poil à gratter…

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Jeune Afrique : Comment Al-Jazira a-t-elle couvert le « printemps arabe » ?

Claire-Gabrielle Talon : Al-Jazira a affiché un soutien manifeste aux révolutionnaires dès le début des événements enTunisie. Elle a mis en place une campagne de spots promotionnels, qui ressemblent à des publicités, avec images et musique, et qui sont sa marque de fabrique. Jusque-là, ils étaient surtout réservés à la question palestinienne, là ils concernaient l’Égypte, laLibye, le Yémen. Ces spots sont devenus envahissants, mais ils ne sont diffusés que sur la chaîne arabophone, pas sur l’anglaise. La proportion de reportages sur le terrain est aussi importante que d’habitude, mais la chaîne a fait le choix d’une couverture continue, l’écran régulièrement divisé en trois pour couvrir ce qui se passe dans plusieurs capitales en même temps. Elle a parfois été trop réactive en faisant état de certaines informations inexactes sur l’Égypte ou la Tunisie. Il y a eu aussi de nombreux débats passionnants dans les bulletins d’information.

Et la chaîne en anglais ?

Elle a eu en commun avec sa sœur arabe un très grand professionnalisme, mais elle n’a pas montré le même arabocentrisme ni le même populisme. Elle se rapproche plus du modèle des chaînes d’information occidentales, tout en couvrant le « printemps arabe » de très près. Surtout, elle n’a pas la même façon de montrer les images de violence que le canal arabophone.

La couverture des différents pays concernés a-t-elle été égale ?

Non. Ce type de spots ne concerne pas la Syrie ni Bahreïn. Al-Jazira est une chaîne subtile. On parle de tout, il n’y a pas de black-out grossier. Mais quand un sujet pose problème, on en parle moins et différemment. La Syrie est une alliée privilégiée du Qatar depuis un certain nombre d’années, il y a donc une grande prudence diplomatique, mais ce n’est pas figé. Après certains voyages diplomatiques qataris aux États-Unis et en Syrie, la chaîne a un peu infléchi son traitement des événements. Pour Bahreïn, c’est plus difficile puisque des forces qataries ont participé à la répression des manifestations avec les Saoudiens dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe. Comme toutes les pétromonarchies de la région, le Qatar a peur de voir la fronde bahreïnie s’étendre.

Ces choix ont-ils été le fruit d’un consensus au sein de la rédaction de la chaîne ?

La rédaction a été plutôt unanime pour l’Égypte, qui est un symbole, un centre de rayonnement très fort et le berceau du panarabisme. La chaîne a largement couvert la chute de Moubarak, qui a réjoui un grand nombre de journalistes. Pour autant, cela n’a pas empêché certains d’entre eux de montrer leur désapprobation face à la couverture des événements. C’est (officiellement) pour protester contre cet engagement que le chef du bureau de Beyrouth a démissionné en avril. À la tête du conseil d’administration de la chaîne, on trouve un représentant de la famille régnante, qui, comme dans d’autres émirats de la région, dirige un pays où tous les nationaux n’ont pas les mêmes droits politiques, et où il existe des niveaux de nationalité et des discriminations. Or, c’est notamment un groupe minoritaire qui manifeste à Bahreïn. Il est donc fort probable qu’Al-Jazira ait subi des pressions à ce sujet. Le prédicateur vedette d’Al-Jazira, le cheikh Qaradawi, fervent défenseur des réformes de l’émir, a qualifié le mouvement bahreïni de révolte sectaire, alors qu’il s’était engagé clairement contre Moubarak et Kaddafi.

Pourtant, vous expliquez dans votre ouvrage que la famille royale est généralement désunie…

Oui, il y a globalement trois réseaux d’influence aux tendances idéologiques différentes, qui s’affrontent notamment au sein du conseil d’administration de la chaîne. Ce qui n’empêche pas de très probables tensions politiques en ce moment dans le pays. Le rôle même d’Al-Jazira, qui devient un enjeu géopolitique de plus en plus important et une arme de plus en plus redoutable, pourrait exacerber les tensions politiques au sommet de l’État.

Le « printemps arabe » peut-il avoir en retour une influence sur les dynamiques de la chaîne ?

Oui. Plus le mouvement démocratique se rapproche du Qatar, plus le jeu va devenir complexe et plus la chaîne sera tenaillée. Car il existe une opposition au Qatar (même si elle est encore relativement muette et faiblement organisée), et celle-ci prend souvent Al-Jazira pour tête de turc. Comment la chaîne couvrirait-elle une fronde qui se développerait dans l’émirat, qui prendrait pour objet un ou plusieurs membres de la famille régnante et qui serait ouvertement hostile aux journalistes (étrangers pour la plupart) d’Al-Jazira ?

Vous êtes donc optimiste pour l’avenir de la chaîne ?

Al-Jazira est aujourd’hui l’une des plus grandes, si ce n’est la première des chaînes d’information internationales. Les Occidentaux ont mis près de quinze ans à s’en rendre compte. Elle dépasse ses concurrentes non seulement par ses moyens et le niveau de ses journalistes, mais aussi par la qualité des débats offerts au public. C’est l’originalité de cette télévision d’être à la fois un média engagé et l’une des premières sources d’information. Elle a toujours eu un fonctionnement complexe, notamment à cause des clivages idéologiques qui divisent la famille régnante. On a vu en 2009 le journaliste Ahmed Mansour interroger en direct le ministre des Affaires étrangères qatari sur son influence sur la chaîne à propos de la couverture changeante des affaires saoudiennes ! Aujourd’hui, l’avenir de la chaîne dépend en partie de l’équilibre des rapports de force au sein de la famille régnante et en partie des journalistes. Certains d’entre eux pourraient être tentés de regagner leur pays pour participer à la création de nouvelles structures médiatiques, surtout si les pressions exercées sur la rédaction s’accroissent.

Le « printemps arabe » a-t-il permis à la chaîne d’accroître sa popularité ?

Oui. Lors des manifestations, on a pu voir des panneaux « Merci Al-Jazira ». Mais beaucoup de téléspectateurs ont été déçus par son traitement différencié des pays concernés. La chaîne devra être vigilante, car sa primauté ne sera pas éternelle. Le « printemps arabe » peut être pour elle un moment critique. De nouvelles chaînes sont en train de naître.

Al-Jazira est-elle une chaîne révolutionnaire ?

Ce n’est pas elle qui a fait la révolution, mais elle a contribué à l’avènement d’une opinion publique éclairée, fortement politisée, et elle a donné la parole aux opposants politiques aux régimes arabes. Ce qui est révolutionnaire, c’est qu’un réseau de médias arabes soit en passe de devenir l’un des premiers du monde. Al-Jazira est maintenant officiellement suivie à la Maison-Blanche et Hillary Clinton en a reconnu elle-même la « puissance » en mars. C’est une révolution pour ceux qui disaient que la région est en déclin intellectuel depuis cinquante ans. Et surtout c’est une révolution de l’information et du journalisme, en rupture avec certaines traditions occidentales qu’Al-Jazira a critiquées. Elle donne des coups de pied dans les normes de représentation de la violence, dans la notion d’objectivité ; elle se veut à la fois engagée, panarabiste, propalestinienne, et en même temps très professionnelle.

Comment la chaîne se positionne-t-elle sur l’intervention de l’Otan en Libye ?

On ne peut pas dire qu’Al-Jazira se soit montrée hostile à cette intervention. Cela vient à la fois de l’influence de la diplomatie qatarie, qui a été très active sur ce dossier, et de l’opinion personnelle de beaucoup de journalistes, hostiles à Kaddafi. Globalement, pour nombre de membres de la rédaction, même s’il n’y a pas unanimité en son sein, la défense de la cause arabe passe par l’appui au CNT [Conseil national de transition, NDLR].

Menaces sur la chaîne

Al-Jazira est le bouc émissaire idéal. Ses bureaux ont été fermés en Égypte en janvier (avant d’être rouverts), puis au Yémen en mars. Son signal a été brouillé et ses journalistes ont été arrêtés en Libye. En Syrie, la chaîne a préféré suspendre les activités de son bureau à cause de menaces reçues suite à un sit-in de partisans d’Assad. Ailleurs, ses antennes avaient déjà été fermées en 2005 en Irak, en 2009 en Iran, et en 2010 à Bahreïn, au Maroc et au Koweït. La Jordanie et la Cisjordanie ont à un moment fermé ses bureaux et rappelé leur ambassadeur au Qatar. D’autres pays n’ont jamais autorisé la chaîne à ouvrir un bureau, comme l’Algérie, l’Arabie saoudite, la Libye ou la Tunisie benaliste…

Source : « Jeune Afrique » Le 07-07-2011

Lien :http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2634p082-084.xml1/media-libye-egypte-tunisiemoyen-orient-al-jazira-dans-la-tourmente.html


INTERVIEW-Levi’s seeks to tap Arab Spring to sell jeans

 
Reuters, le 7 juillet 2011 à 06h00 GMT
* Company eyes under-30s market with new campaign
* Implemented price rises in response to cotton costs
By Victoria Bryan
BERLIN, July 7 (Reuters) – Levi Strauss will attempt to tap into the revolutionary spirit of the « Arab Spring » with a « Go Forth » global marketing campaign aimed at attracting youthful customers back to a jeans brand that was once one of the most coveted in the world.
Fed up with high unemployment, rising food prices and repression, popular uprisings led mainly by young people overthrew governments in Tunisia and Egypt earlier this year. Libyan rebels are attempting to overthrow ruler Muammar Gaddafi, while protests and demonstrations have rocked governments in Bahrain, Yemen, Syria and swept across other parts of North Africa and the Middle East.
« We’ve always been about embodying the energy and events of our times and this campaign is about returning to the pioneering spirit of the brand, » Robert Hanson, Global President of the Levi’s brand told Reuters in an interview late on Wednesday.
He said change in the Middle East has been enabled by borderless communication and the kind of young people that the Levi’s brand would like to be embraced by.
« You’ve got young people showing up saying let’s galvanise the power of our collective force, work hard to make the world a better place, » Hanson said. « And what better brand than Levi’s? We’re doing a lot of innovative things in our products and stores to have them choose Levi’s as the uniform of progress. »
In the retail world, younger customers, particularly in countries such as the United States have become an important target market, with companies such as Adidas making a big push to gain high-school age customers who have a lot of money to spend on clothing.
« We’re obviously interested in those in their late teens and twenties, » Hanson said. « They buy a lot more jeans, are more into fashion and spend a lot more. »
Privately held Levi Strauss & Co, which also owns the Dockers brand, has turnover of $4.4 billion and its clothing is sold in more than 110 countries.
Once able to propel unknown artists to the top of the charts by using their songs in its adverts, the Levi’s brand now battles for market share with Wrangler and Lee, owned by VF Corp , and Guess along with a new wave of brands such as J Brand, Seven for all Mankind and Superfine.
« We’ve been working on transforming the brand over the last couple of years, » Hanson said, saying the aim was to firmly position Levi’s as an American classic brand.
Added to the increased competition is the rising cost of cotton, leaving the company in a dilemma over how to pass on increased material costs without putting off customers.
Hanson said the Levi’s brand had implemented price rises but declined to comment on the possibility of more later in the year.
While excited by the growth opportunities offered by emerging markets such as Brazil, India, China, Mexico, Turkey and Russia, Hanson said Levi’s was not pulling back from its traditional markets of the U.S. and Europe.
« We see opportunities to grow both emerging and developed markets, » he said.

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15 décembre 2008

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