LA LISTE DE LA HONTE Slim Bagga: Criminels au ministere de l’interieur – Extirper le mal à jamais Le Mouvement Ettajdid: Communiqué au sujet des scènes de violence à la Place du Gouvernement Le Parti des Verts pour le Progrès: Solidarité des Verts avec le peuple Egyptien Mouvement Ettajdid: Communiqué de solidarité avec le peuple égyptien dans sa révolte héroïque Ahmed BEN AMOR: La transparence des commissions Hend Harouni: Short Question About Lengthened Presidencies in The Arab World
AFP: Tunisie: des partis réclament une Constituante et un comité de salut public ANSA: Egitto/Tunisia: Ashton attaccata al Parlamento europeo AFP: Le cas du clan Ben Ali « entre les mains de la justice » AP: French minister denies links to Tunisia ex-regime AFP: Tunisie: coup de balai dans la police, le gouvernement reprend la main AFP: Canada: l’opposition demande l’extradition du Tunisien Belhassen Trabelsi AFP: France/Tunisie : Alliot-Marie, « meurtrie », rejette toute démission AFP. Ghannouchi demande aux Tunisiens de reprendre le travail Reuters: Risks in Egypt were on Obama’s radar early on AFP: Le gouvernement français passe l’éponge pour Alliot-Marie AFP: Les dirigeants européens bousculés par la vague de contestation arabe AFP: Les habitants du Proche et Moyen-Orient voient la Turquie comme une modèle (sondage) AFP: Tunisie: la Belgique saisit des comptes et un immeuble du clan Ben Ali AFP: Egypte-Tunisie: une revendication de liberté et de dignité » (évêques) Reuters: La ministre Michèle Alliot-Marie « peut rester », selon Matignon AFP: Tunisie: le nettoyage continue, relance des contacts internationaux AFP: Le Parlement européen demande le renforcement de la coopération avec Tunis AFP: Les troubles dans le monde arabe depuis la révolution tunisienne
REVUE DE PRESSE
LA LISTE DE LA HONTE
CRIMINELS AU MINISTERE DE L’INTERIEUR
Extirper le mal à jamais
par SLIM BAGGA Autant le dire sans ambages: la Tunisie ne connaîtra stabilité et sécurité que si l’on s’attèle à nettoyer les Ecuries d’Augias. Parmi les actions urgentes à entamer, l’assainissement du ministère de l’Intérieur apparait comme une priorité. Il serait suicidaire de laisser impunis ou en poste de hauts fonctionnaires qui, non seulement, ont profité de la dictature mais surtout sont impliqués dans des affaires criminelles et financières douteuses. Parmi ces hauts cadres, nous citerions: 1/ MOHAMED ENNACEUR (HAMADI HLESS) Longtemps directeur des enquêtes spéciales au sein des services de renseignements, il a été nommé directeur de l’école de La Manouba. Il est personnellement impliqué dans de nombreux assassinats politiques, faits de torture, viols et atteintes à l’honneur et à l’intégrité physiques d’opposants politiques, qu’ils soient islamistes ou autres. Il a constitué des milices à son propre service en vue de comploter contre l’Etat et falsifier de nombreux dossiers. 2/ ADEL TIOUIRI Il occupa le poste de directeur des Sections spéciales, directeur général de la Sûreté nationale, directeur général de la Sécurité publique. Avant de le geler dans ses fonctions, il a été l’autorité agissante au ministère de l’Intérieur du fait qu’il est l’enfant gâté de Ali Seriati et son bras long au ministère. Il est impliqué dans les événements des derniers jours par les instructions qu’il a données en vue d’ouvrir le feu sur les manifestants. Il a également fait procéder à des liquidations au sein de la population, y compris dans les milieux de la sécurité. ADEL TIOUIRI dirigeait aussi la milice de Ali Seriati. 3/ JALLEL BOUDRIGA Ce directeur général des Unités d’intervention est le premier responsable qui a ordonné à ses subalternes de tirer sur les manifestants et d’user des bombes lacrymogènes empoisonnées devant le ministère de l’Intérieur, le jour de la fuite de Ben Ali. 4/ ABDALLAH HAMMOUDA (surnommé par Ben Ali l’homme gentil) L’ancien directeur général des Sections spéciales est responsable de tous les crimes commis par ses services. Abdallah HAMMOUDA était en liaison directe par Ben Ali et lui faisait des rapports quotidiens. Il n’ignorait rien de ce qui se passait dans le pays, et à plus forte raison au sein de ses services. Il établissait personnellement les rapports concernant les crimes sans en respecter d’ailleurs le déroulement chronolgique. D’ailleurs, Ben Ali le chargeait personnellement des missions les plus crapuleuses. 5/ CHEDLY SAHLI C’est un Général qui a occupé le poste de directeur général des Services techniques (DGST), un service de sécurité implacable et aux immenses moyens. Chedly Sahly est un proche du Général Ali Sériati 6/ Avant d’occuper la fonction d’Inspecteur général des Services, il a occupé celle directeur de la sureté de l’Etat (DSE). Il est personnellement impliqué dans des crimes et aimait assister aux pires séances de torture qu’il se plaisait à affiner. Sous sa direction, les crimes les plus odieux, qui ne se comptent plus, ont été exécutés. Des preuves ont été amassées contre ses actes et seront présentées à la Justice. Ces preuves sont d’ailleurs entre les mains de membres du ministère de l’Intérieur, d’autant plus que Ali Mansour a réussi à concentrer sur lui la haine, y compris au sein de ses collaborateurs. 7/ MAHMOUD BEN AMOR Après avoir occupé les fonctions de directeur de l’anti- terrorisme et la DSE, il a été muté à l’Inspection des Services. Les murs du ministère de l’Intérieur témoignent de l’abjection de ses crimes, des tortures jusqu’à ce que mort s’en suive, des viols d’hommes. Il est à l’origine des procédés les plus odieux de torture, notamment des islamistes. Même les agents de sécurité n’ont pas été épargnés par ses horreurs, comme l’indiquent les preuves que détiennent ces derniers concernant le complot qu’il avait fomenté contre l’ancien directeur de la sécurité extérieure, Nabil Abid. 8/ IMED ACHOUR Directeur de la Sûreté de l’Etat (DSE), c’est l’un des disciples de Mahmoud Ben Amor. En dépit du fait qu’il n’a occupé ses fonctions que pendant un an environ, il a néanmoins commis les pires crimes contre les salafistes. 9/ MONCEF BEN GUEBILA La vie de ce tortionnaire notoire est jalonnée de crimes dans les innombrables fonctions sécuritaires qu’il a occupées, avant d’être nommé directeur au sein du parti au pouvoir, le RCD. 10/ ABDALLAH HATTAB C’est le directeur des enquêtes spéciales au sein des services de renseignements. C’est le portait craché de Mohamed Ennaceur Hless (voir plus haut). 11/SALAH OUELD ALLALA Chef de l’anti-terrorisme, il s’illustre par la fabrication de preuves et le montage de faux dossiers. Haute probabilité de son implication dans des crimes. 12/ HATEM CHEBBI Directeur de la sûreté du District de Tunis. Il est connu dans les milieux des opposants politiques, des avocats et des défenseurs des droits de l’homme comme le patron d’un gang d’agresseurs. Il a créé une milice dirigé par un chef de services de renseignements du nom de « BABOURI ». Cette milice a pour nom « GROUPE DE CHOC ». 13/ IMED DAGGHAR C’est l’ex-patron de la police judiciaire qui vient d’être bombardé à la tête des Renseignements généraux. 14/ TAOUFIK BOUOUN Il a occupé jusqu’à récemment le directeur de la Sûreté du District de Bizerte. Il a auparavant occupé plusieurs fonctions où il est impliqué dans chacune d’entre elles dans des affaires de torture et d’agressions physiques à l’encontre d’activistes politiques et de militants syndicaux, et tout particulièrement contre des juges et des avocats dans la période où il était en 2005, ched de la Sûreté à Bab Souika. Il se lia ensuite à la famille TRABELSI qui le désigna à l’aéroport international de Tunis-Carthage où il veillait personnellement à la fuite de capitaux dans des valises échappant à tous les contrôles d’usage légaux. Corrompu, il usa de ses fonctions pour s’enrichir de manière illicite. Il n’est qu’à visiter sa villa à la Cité Ennasr, dont le coût dépasse le million de dinars, ses autres nombreuses propriétés et les multiples comptes bancaires dont il dispose. (A suivre…) Slim BAGGA
Communiqué au sujet des scènes de violence à la Place du Gouvernement
Communiqué de solidarité avec le peuple égyptien dans sa révolte héroïque
Solidarité des Verts avec le peuple Egyptien
Le Parti des Verts pour le Progrès suit avec une profonde inquiétude et effroi les évènements survenus en Egypte. En tant que composante politique démocratique qui œuvre pour la diffusion des valeurs de justice et de respect de la diversité, le PVP exprime son engagement absolu et non-conditionné pour la défense des objectifs de la révolution égyptienne et annonce son adhésion au processus international qui se déploie pour faire prévaloir les principes de liberté et de démocratie. Partant de la solidarité de ses militants et militantes avec les nobles objectifs de la révolution égyptienne, le Parti réitère l’expression de son soutien le plus absolu avec nos frères égyptiens, ce peuple intrépide et courageux qui, imbibé de l’esprit de la révolution tunisienne, de sa gloire et de sa quête de la dignité, a défié toutes les formes d’oppression pour arracher sa liberté et concrétiser la justice sociale entre les différentes régions égyptiennes. Le Parti des Verts pour le Progrès exprime, par ailleurs, son adhésion à la révolte du 25 janvier 2011 qui est en train de percer et de réussir à faire déchoir les symboles de la corruption et de la persécution et à revaloriser les notions de liberté et de justice. Le vent du changement qui est parvenu à faire choir le régime tunisien, a atteint nos voisins en Egypte et va aboutir à mettre en place les piliers de l’indépendance réelle, de la dignité et de la liberté, d’autant que le peuple tunisien a réussi à briser les obstacles de la frayeur, a démontré une grande confiance en soi et a prouvé qu’il est capable de forcer le destin et de réaliser le changement souhaité. Le brave peuple égyptien mérite des conditions de vie plus dignes et plus adéquates qui rompent avec les formules d’assujettissement international ainsi que les méthodes de resserrement sécuritaire, tous deux facteurs ayant poussé l’Egypte à dériver de son rôle historique tant sur le plan arabe qu’international et ont relégué cette nation à un rôle secondaire alors que l’histoire de l’Egypte a toujours été empreinte de distinction et de considération. En référence à cette vérité, le Parti des Verts pour le Progrès exhorte toutes les composantes de la société civile nationale et internationale à se mobiliser pour soutenir la révolte du peuple égyptien, à travers différents aspects et initiatives et exprime sa confiance que cette révolte aboutira à concrétiser la liberté, la démocratie et la dignité nationale. Le Parti des Verts pour le Progrès condamne toutes les vaines tentatives initiées par le régime répressif en Egypte tendant à contourner l’esprit de la révolution et à transformer la place Tahrir, en un grand champ de bataille entre compatriotes. Le PVP prévient du recours à des moyens répressifs basés sur le répression et le massacre de la population qui a été évincée et écartée de son environnement extérieur à travers la rupture de toute forme de communication avec l’étranger et le black-out médiatique opéré. Le Parti des Verts pour le Progrès appelle les autorités égyptiennes à stopper l’effusion du sang égyptiens et les accrochages avec les manifestants et arrêter de recourir à différents moyens criminels qui ont prouvé, notamment en Tunisie, leur inefficacité dans le maintien des régimes totalitaires et despotiques. Le Parti des Verts pour le Progrès Par / Bureau politique Le Secrétaire Général Mongi Khammassi
LA TRANSPARENCE DES COMMISSIONS
Sans aucune transparence, trois commissions ont été constituées pour reformer la vie politique, enquêter sur la prise illégale d’intérêts et la corruption, abus de pouvoir et répression. En fait deux des trois commissions n’ont aucun intérêt. Car l’appareil juridique peut se charger des plaintes et des témoignages des victimes de la corruption et de la répression. D’ailleurs les gens croient en se présentant devant ces commissions récupérer leurs droits spoliés. Les tunisiens n’ont pas besoin des investigations mais de faire rétablir la justice. Et c’est l’affaire des tribunaux. C’est aussi l’occasion d’affirmer l’indépendance de la justice. Le pouvoir déchu a utilisé l’appareil judiciaire pour étouffer toute espace de liberté. Il a mobilisé l’administration fiscale pour casser toute résistance. Et il a noyauté l’administration domaniale afin de s’approprier illégalement des biens publiques. Sans oublier certains services du ministère de l’Intérieur pour terroriser les oppositions. L’opinion publique n’a aucune idée sur la façon avec laquelle sont choisies les personnalités de ces commissions. D’ailleurs la commission chargée de la révision constitutionnelle est composée essentiellement de professeurs de droit. On dirait une commission pédagogique afin de prépare un programme d’enseignement universitaire. L’attente des tunisiens est de banaliser la vie politique et de donner beaucoup de place à la société civile. Une telle commission doit s’ouvrir sur toutes les composantes politiques et intellectuelles de la Tunisie. Non à une commission technique mais un espace de débat et de confrontation. Un débat transparent et pourquoi pas relié directement par les médias audiovisuels comme dans toute démocratie. Il faut finir avec les menus concoctés en arrière boutique. Ahmed BEN AMOR Paris le 03/02/2011
Short Question About Lengthened Presidencies in The Arab World
Tunisie: des partis réclament une Constituante et un comité de salut public
TUNIS, 02 Fev 2011 (AFP) – Le « Front du 14 janvier », qui regroupe dix partis politiques interdits sous le régime de Ben Ali, a réclamé mercredi la mise en place d’une Assemblée constituante et d’un Congrès national « pour la protection de la révolution », sur le modèle des comités de salut public. « Nous voulons défendre la révolution et contrer toutes les tentatives de déstabilisation », a déclaré lors d’une conférence de presse à Tunis Jaloul Azouna, dirigeant du Parti de l’unité populaire légitime et porte-parole du Front du 14 janvier (date de la chute du président Ben Ali). Le Front réclame la constitution d’un « gouvernement provisoire » totalement débarrassé des anciens membres du parti de Ben Ali qui sera chargé de « préparer l’élection d’une Assemblée constituante » qui devra adopter une nouvelle constitution. Il veut également voir la « création d’un Congrès national pour la protection de la Révolution (CNPR) », sur le modèle des comités de salut public, ouvert à « toutes les composantes politiques, associatives, syndicales et culturelles » du pays. Ce CPNR veillera à « préparer les textes, décrets et lois provisoires (…) dans l’attente d’une nouvelle constitution ». Le Front du 14 janvier, qui regroupe notamment le Parti communiste ouvrier tunisien (PCOT) et le Parti socialiste de gauche (PSG), souligne le danger de confiscation de la révolte populaire si les tenants de l’ancien régime conservent des leviers du pouvoir. En dépit du grand coup de balai annoncé mardi soir à la tête de la police, il s’insurge contre le maintien à la tête du gouvernement de Mohammed Ghannouchi, en poste depuis onze ans, et la composition du parlement, dominé à 80% par le RCD. Les revendications du Front du 14 janvier sont relayées par plusieurs cadres de la puissante centrale de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), qui, cependant, a apporté son soutien à l’actuelle équipe de transition tout en se retirant du gouvernement.
Egitto/Tunisia: Ashton attaccata al Parlamento europeo
Le cas du clan Ben Ali « entre les mains de la justice »
Bruxelles (afp) Le cas de l’ex-président tunisien Zine El Abidine Ben Ali et de ses proches, accusés d’avoir détourné à leur profit des fonds publics, est « entre les mains de la justice », a affirmé mercredi le ministre tunisien des Affaires étrangères, Ahmed Abderraouf Ounaïs. « L’affaire concerne une justice enfin indépendante, elle n’a qu’à faire son travail selon le rythme qui est le sien, nous ne sommes ni impatients, ni anxieux, ni des lyncheurs », a dit M. Ounaïs à l’issue d’une rencontre avec la chef de la diplomatie de l’UE, Catherine Ashton à Bruxelles. Il s’agissait de sa première visite à l’étranger depuis sa nomination récente. « Nous ne nous prononçons pas sur ces malversations.Nous avons confié la question à la justice qui est en train de la traiter et tout ce que la justice nous a confiés nous le distribuons en tant que gouvernement à nos partenaires », a-t-il dit, à propos des décisions de gel des avoirs du clan Ben Ali décidées en Europe notamment. « Nous ne nous prononçons pas, ni sur la culpabilité, ni sur l’innocence de ces personnes », a-t-il ajouté. L’UE a décidé lundi de geler les avoirs de l’ex-président tunisien et de son épouse au motif que le couple fait l’objet d’une enquête judiciaire des autorités tunisiennes pour « détournement de biens immobiliers et mobiliers, ouverture de comptes bancaires et détention d’avoirs financiers dans plusieurs pays dans le cadre d’opération de blanchiment d’argent ». La justice tunisienne a ouvert des dossiers sur « un certain nombre de personnes incluant l’ancien président, son épouse, des membres de leur famille ou d’autres qui étaient leurs clients ou leurs complices », a précisé M. Ounaïs.
Associated Press, le 2 février 2011 à 19h51 GMT
French minister denies links to Tunisia ex-regime
By SYLVIE CORBET, Associated Press Sylvie Corbet, Associated Press – Wed Feb 2, 2:50 pm ET PARIS – France’s foreign minister on Wednesday denied a news report that she flew on a private jet belonging to a family member of Tunisia’s deposed president, and she ruled out resigning over the allegation. Michele Alliot-Marie said she did nothing wrong during her year-end holiday in Tunisia, which came just weeks before popular protests toppled the country’s longtime dictator, Zine El Abidine Ben Ali. Jean-Marc Ayrault, who heads the Socialist opposition in the French National Assembly, demanded that Alliot-Marie step down. She refused, and some lawmakers booed as she defended herself. « I sometimes take my vacations in Tunisia, but I pay for the travel and hotels myself, » she said. Even before the report, Alliot-Marie was in the spotlight over her handling of Tunisia: She was criticized for offering French security know-how to authorities in the former French colony as they struggled to subdue anti-government protesters in the run-up to Ben Ali’s ouster Jan. 14. Police led a violent crackdown on demonstrators, often opening fire at crowds. Le Canard Enchaine, a humor newspaper also known for its investigations, reported Wednesday that Alliot-Marie, her partner and parents flew aboard a plane co-owned by Ben Ali’s brother-in-law Belhassen Trabelsi from Tunisia’s capital to the beach resort town of Tabarka. Alliot-Marie told reporters that it was a former business partner of Trabelsi’s, businessman Aziz Miled, who allowed the family to join him on a prescheduled flight. She said the president’s brother-in-law had forced his way into Miled’s company and described him as a « victim » of the regime. She also said Miled was a long-standing friend. In Tunisia, observers corroborated Alliot-Marie’s description of Miled, saying he and many others had been forced against their will into business dealings with the president’s family, which threatened them with tax hikes or legal troubles if they refused to cooperate. The family of former First Lady Leila Trabelsi is said to have operated like a mafia, extorting money from shop owners, demanding stakes in businesses large and small, and divvying up plum concessions among themselves. Belhassen Trabelsi reportedly arrived in Canada last week with his family. The Canadian government said he applied for refugee status in Canada, effectively blocking efforts to extradite him to the North African country. Tunisia has issued an arrest warrant for Ben Ali, who fled to Saudi Arabia, accusing him of taking money out of the country illegally and other charges. Interpol said its Tunis bureau issued a global alert seeking the arrest of six family members, but their names have not been made public.
Tunisie: coup de balai dans la police, le gouvernement reprend la main
Canada: l’opposition demande l’extradition du Tunisien Belhassen Trabelsi
France/Tunisie : Alliot-Marie, « meurtrie », rejette toute démission
Par Philippe RATER PARIS, 02 Fev 2011 (AFP) – La ministre française des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, accusée d’avoir profité pendant des vacances en Tunisie de largesses d’un homme d’affaires lié au clan Ben Ali, a rejeté mercredi toute idée de démission, réclamée par l’opposition, se disant toutefois « meurtrie ». « Pour des choses qui sont fausses, pour des assertions, non, pas du tout », a déclaré Mme Alliot-Marie, interrogée sur une éventuelle démission. La ministre, 64 ans, membre du gouvernement depuis 2002, dirige la diplomatie depuis deux mois et demi et est depuis trois semaines en difficulté sur le dossier tunisien. Elle a annoncé mercredi soir qu’elle recevrait vendredi à déjeuner pour la première fois son nouvel homologue tunisien, Ahmed Abderraouf Ounaïs. L’opposition française (socialistes, Verts et communistes) a réclamé son départ après la révélation qu’elle avait bénéficié fin 2010, pendant des vacances effectuées en Tunisie, du jet privé d’un ami homme d’affaires tunisien, présenté comme proche du clan Ben Ali, ce que la ministre a contesté. « Si je prends mes vacances parfois en Tunisie, c’est à mes frais, voyages et hôtels », a-t-elle assuré devant l’Assemblée nationale, soulignant sur la chaîne de télévision Canal+ avoir « le droit d’avoir des amis ». « Je n’ai pas pensé à mal », a précisé sur France 2 la ministre, en ajoutant qu’au vu de la « polémique » et de « l’émotion » suscitées, elle ne referait pas un tel voyage dans ces conditions. « Je n’ai pas fait attention, probablement parce qu’il s’agissait d’amis », a-t-elle admis, en se disant « meurtrie de voir » ce dont elle est accusée. Elle avait pris un vol commercial pour Tunis, au moment des fêtes de fin d’année, avant d’être invitée avec sa famille par cet ami tunisien à partager son jet jusqu’à la ville de Tabarka. Elle a ensuite séjourné dans un hôtel appartenant à ce même Tunisien, Aziz Miled, et dit avoir réglé la note. Pour l’opposition socialiste, la ministre française s’est « totalement disqualifiée » et n’a « plus sa place au gouvernement » avec ce séjour dans un pays alors en révolte contre son président. Michèle Alliot-Marie a rétorqué qu’il « n’y avait aucune répression à ce moment-là ». L’utilisation du jet tunisien, avec ses parents et son compagnon, Patrick Ollier, ministre des Relations avec le Parlement, a été révélée par l’hebdomadaire Le Canard Enchaîné. Aziz Miled y est présenté comme un proche de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ex-président Zine el Abidine Ben Ali. Cet homme d’affaires figure sur une liste de personnalités tunisiennes dont la Suisse a gelé les avoirs le 19 janvier. Pour M. Ollier, Aziz Miled est au contraire « une victime » du clan Ben Ali, « spolié » par les Trabelsi, la belle-famille de l’ex-président. Le ministre des Affaires européennes, Laurent Wauquiez, a dénoncé une « campagne indigne d’acharnement » contre le chef de la diplomatie. « Quand on est dans un gouvernement, on n’a pas à utiliser des moyens privés » liés à une famille controversée, avait estimé dans la matinée sur RTL la dirigeante du Parti socialiste, Martine Aubry. « Partez ! », a demandé Yves Cochet du parti Europe Ecologie-Les Verts, un appel repris par les communistes. Ministre depuis plus de huit ans (Intérieur, Défense et Justice), Michèle Alliot-Marie avait déjà été critiquée après son offre le 11 janvier d’une coopération policière au régime de l’ex-président tunisien, tandis que les manifestations se multipliaient. Elle a aussi été accusée de « ne pas avoir dit la vérité » sur la réalité de la coopération policière franco-tunisienne, qui s’effectuait, selon elle, « essentiellement dans le cadre d’Interpol » alors que des informations ont fait état de l’achat par la Tunisie de grenades lacrymogènes françaises.
Ghannouchi demande aux Tunisiens de reprendre le travail
Risks in Egypt were on Obama’s radar early on
* Tunisia chaos immediately sparked worries about Egypt * U.S. response in Egypt hampered by crisis mode * Quality of intelligence a concern, future risks loom By Caren Bohan and Mark Hosenball WASHINGTON/LONDON, Feb 2 (Reuters) – When a public uprising ousted Tunisia’s leader after two decades in power, U.S. policymakers and intelligence analysts immediately wondered what this might mean for Egypt, the most populous Arab nation and a staunch American ally. Indeed, as far back as last year, senior aides to President Barack Obama got a warning from outside analysts that Egyptian President Hosni Mubarak’s grip on power was tenuous. The analysts advised the administration to try to get out in front of events. Yet, as the crisis in Egypt built over the course of the past week, the Obama administration struggled to keep up with fast-moving events, a problem it must overcome as it grapples with future events in Egypt and the wider region. « In the best of all worlds, they would have more clear, pro-active goals for the region, » said Brian Katulis, senior fellow at the Center for American Progress think tank, who was one of a handful of officials who met with the administration last year and warned about potential instability in Egypt. « But at this stage, especially as events unfold pretty quickly and violence escalates, it becomes all the harder for them to move out of this tactical, reactive mode. » Complicating matters for the administration are separate concerns about the adequacy of intelligence used by policymakers to help formulate their responses to such events. Two officials familiar with U.S. intelligence reporting on the protests in Tunisia and Egypt say that the view of some congressional and policymaking officials about the quality of U.S. intelligence on the crisis is that it has been behind the curve and not particularly useful. Congressional committees have begun to ask questions about the adequacy of U.S. intelligence reporting and analysis on the growing upheavals and possible future instability in North Africa and the Middle East, Capitol Hill sources said. Still, U.S. administration officials told Reuters that intelligence officials have long been watching calls for political change in Egypt and the potential that the protests could gather momentum was recognized from the beginning. « Did anyone in the world know in advance that a fruit vendor in Tunisia was going to light himself on fire and spark a revolution? No, » said Tommy Vietor, spokesman for the White House National Security Council. But Vietor said diplomats and intelligence officers had been reporting on « simmering unrest » in the region for years. « The brittleness of some of these regimes is something the president has noted and discussed for a long time, » a White House official said. The official said that during the first briefing Obama received on Tunisia’s crisis, he asked advisers for an analysis of where it could spread. Several analysts said the Obama administration was understandably reluctant to get too far out in front of events in Egypt and so pursued a cautious course. « It’s dangerous to be ahead of the curve, especially when you’re talking about a country that you have a very important relationship with and where the leader has made any number of sacrifices for the United States, » said Jon Alterman, a Middle East expert at the Center for Strategic and International Studies think tank. Katulis said the administration appeared to have been caught « a little flat-footed » by the speed of events in early public comments on the Egyptian crisis but believed the administration managed to catch up by the end of the week. Said Vietor: « The messaging has evolved with events but in a way that makes sure that the people of Egypt are out in front. » SHIFT IN RHETORIC When Obama delivered his annual State of the Union address to the U.S. Congress eight days ago, he did not discuss Egypt directly but alluded to the issues with a mention of Tunisia. Earlier that day, U.S. Secretary of State Hillary Clinton spoke publicly on the subject, expressing support for the protesters’ free speech as police fired tear gas and used water cannons to deter crowds. But she also described the Egyptian government as « stable, » a comment that was followed two days later by Vice President Joe Biden’s answer of « no » when asked whether Mubarak should step down. Activists in Egypt, including prominent opposition figure Mohamed ElBaradei, and several U.S. critics viewed the comments as suggesting solidarity with Mubarak. Some said the administration ran the risk of appearing to be on the wrong side of history. « They’ve been incredibly reactive, » said Daniella Pletka, a scholar at the American Enterprise Institute think tank. « You don’t get a sense that the administration has a vision of the outcome that it’s working towards. » But Katulis and Alterman offered a more favorable assessment, especially of the administration’s actions behind the scenes. A White House official said private messages to Egyptian officials have been far blunter than the public ones. Katulis said administration officials have « listened in a very thorough way to all of their counterparts. » In public, a shift in rhetoric began late last week. In a YouTube interview, Obama praised Egypt’s role as a U.S. ally « on a lot of critical issues » but urged the government to move ahead on reform. He again pressed the reform message in remarks to reporters at the White House after speaking to Mubarak by phone. On Sunday, Clinton took to the U.S. airwaves to call for an « orderly transition » in Egypt. By Tuesday Obama was urging that it take place soon. The U.S. president made the statement after watching in the White House Situation Room as Mubarak told Egyptians in a video message that he would not stand in elections scheduled for September. Mubarak’s message came amid mass protests in his country and after a meeting with former U.S. Ambassador Frank Wisner, who conveyed Obama’s view about the need for a transition in power in Egypt. Katulis and other analysts praised the decision to send Wisner, who has a close relationship with Mubarak, but whether the embattled Egyptian leader will heed the U.S. message remains a big question. « The real test of (the Obama administration’s strategy) will be what kind of results do they achieve on the ground, both in Egypt and what kind of reaction do they get in terms of partners and allies in the region? » Katulis said.
Le gouvernement français passe l’éponge pour Alliot-Marie
Les dirigeants européens bousculés par la vague de contestation arabe
Par Yacine LE FORESTIER BRUXELLES, 03 Fev 2011 (AFP) – Les dirigeants des pays de l’UE, accusés d’avoir trop longtemps toléré des régimes autoritaires sur leur flanc sud par peur de l’islamisme, vont devoir commencer à repenser leur relation avec le monde arabe lors d’un sommet vendredi à l’ombre de la contestation égyptienne. Les priorités de la réunion, prévue de longue date à Bruxelles, ont été largement chamboulées. Alors qu’elle devait être à l’origine centrée sur la politique énergétique de l’Europe et la crise de l’euro, l’attention sera très largement focalisée sur la vague de contestation qui ébranle une bonne partie de la rive sud de la Méditerranée et contraint les Européens à revoir leur stratégie. « L’Europe doit changer radicalement son paradigme sur la région et sa manière de percevoir le monde arabe », a estimé cette semaine l’universitaire tunisien Azzam Mahjoub, venu à Bruxelles parler des leçons à tirer par le Vieux continent des derniers soubresauts. « L’Europe a commis une énorme bévue en percevant les régimes autoritaires arabes comme un rempart à l’islamisme. C’est une humiliation pour nous de toujours agiter l’épouvantail islamiste et de croire que les pays arabes ne sont pas prêts pour la démocratie », a-t-il ajouté. Qu’il s’agisse de la révolution tunisienne, du Yémen ou des manifestations anti-Moubarak en Egypte, l’UE et ses pays membres sont apparus pétrifiés. Au mieux à la traîne des Etats-Unis qui donnent le ton des réactions occidentales, au pire complaisants à l’égard des régimes en place. Un peu plus de 20 ans après l’euphorie qui avait accompagné la chute du rideau de fer communiste en son cœur et l’ouverture de l’Europe de l’Est à la démocratie, le contraste est saisissant. Mercredi, devant le Parlement européen, le chef de file des élus Verts Daniel Cohn-Bendit a accusé l’UE de s’être trop longtemps satisfaite d’une vision du monde arabo-musulman où la seule alternative serait entre dictatures et théocraties. « Il y a une troisième voie, la lutte pour la liberté contre la dictature et la théocratie », a-t-il lancé. « Nous avons un peu oublié que des gens vivent là, qui veulent aussi la démocratie, et le droit de se déterminer eux-mêmes », admet le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Jean Asselborn. Une remise à plat est jugée par beaucoup nécessaire dans l’UE, ce qu’a reconnu à demi-mots son président Herman Van Rompuy dans sa lettre d’invitation au sommet. Il y appelle les dirigeants à passer en revue « les derniers événements survenus en Égypte et en Tunisie et leurs implications pour la région elle-même ainsi que pour l’Union européenne ». En Tunisie, l’Europe promet son aide à l’organisation des élections, au développement économique et à la société civile. Mais pour beaucoup, la stratégie traditionnelle de petits pas suivie par les 27 à l’égard des régime autocratiques dans le cadre de sa politique dite de « voisinage » – consistant à parier d’abord sur l’aide économique, via la coopération ou le commerce, dans l’espoir qu’elle conduira ensuite aux réformes démocratiques – a failli et devrait être inversée. « Après l’Europe du Sud dans les années 1970, l’Amérique latine dans les années 1980 et l’Europe centrale et orientale dans les années 1990, il semblerait que le tour de la Méditerranée soit venu », estime Alvara de Vasconcelos, de l’institut européen d’études de sécurité. « Il est d’un intérêt vital pour l’Europe que la démocratie s’enracine enfin dans cette région » située à sa porte, ajoute-t-il. Pour lui, ses dirigeants doivent se montrer aussi sourcilleux du respect des libertés publiques au Sud, qu’ils ne le sont à l’Est à l’égard du Bélarus ou il y a peu encore de l’Ukraine.
Les habitants du Proche et Moyen-Orient voient la Turquie comme une modèle (sondage)
ANKARA, 03 Fev 2011 (AFP) – Une majorité d’habitants du Proche et Moyen-Orient considèrent la Turquie comme un modèle et une preuve que l’islam et la démocratie sont compatibles, selon un sondage publié jeudi par un institut de recherches turc réputé. L’enquête, conduite par la Fondation turque d’études économiques et sociales (Tesev) en août et septembre, montre que 66% des 2.300 personnes interrogées en Arabie saoudite, Egypte, Irak, Iran, Jordanie, Liban, Syrie et dans les territoires palestiniens voient dans la Turquie un modèle de développement. Sa publication coïncide avec un vaste soulèvement populaire en Egypte et des troubles dans d’autres pays de la région, faisant suite à la chute du président tunisien le mois dernier. Soixante-six pour cent des personnes interrogées estiment que « la Turquie peut être un modèle pour les pays du Moyen-Orient » et une même proportion a affirmé voir en la Turquie « une synthèse réussie d’islam et de démocratie ». Interrogés sur les raisons pour lesquelles la Turquie peut être un modèle, 15% des personnes interrogées soulignent « l’identité musulmane » de ce pays, les autres arguments, par ordre décroissant, étant son économie, son régime démocratique et « sa défense des droits des Palestiniens et des musulmans ». Les personnes rejetant l’idée d’un « modèle turc » ont pour 12% d’entre eux pointé du doigt le régime laïque de la Turquie, un nombre plus faible de sondés évoquant un pays « pas assez musulman » ou « lié à l’Occident ». Soixante-treize pour cent des Turcs estiment que l’influence de la Turquie au Moyen-Orient avait progressé au cours des dernières années. 78% affirment qu’Ankara doit accroître son rôle, une même proportion soutenant une médiation turque dans le conflit israélo-palestinien. Le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, s’est attiré la sympathie du monde arabe avec ses critiques d’Israël et son soutien affiché à la cause palestinienne. Depuis l’accession au pouvoir de son gouvernement issu de la mouvance islamiste, en 2002, les relations entre la Turquie, le monde arabe et l’Iran ont connu une embellie.
Tunisie: la Belgique saisit des comptes et un immeuble du clan Ben Ali
BRUXELLES, 03 Fev 2011 (AFP) – La justice belge a saisi plusieurs comptes en banque de proches de l’ex-président tunisien Zine El Abidine Ben Ali et procédera avant la fin de la semaine à la saisie d’un immeuble à Bruxelles, a indiqué jeudi à l’AFP le parquet de la capitale belge. « Deux informations judiciaires ont été ouvertes sur des soupçons de blanchiment d’argent de la corruption en Tunisie. Nous avons procédé à titre conservatoire à la saisie de comptes bancaires et un bien immobilier à Bruxelles sera saisi aujourd’hui (jeudi) ou demain », a déclaré en fin de matinée la substitut du procureur de Bruxelles, Laure du Castillon. La responsable du parquet n’a pas souhaité préciser à ce stade les identités des personnes visées. Les sommes en jeu « ne sont pas négligeables mais il ne s’agit pas non plus de centaines de millions d’euros », a expliqué Mme du Castillon. « La Belgique n’est pas l’Eldorado du clan Ben Ali », mais la justice vérifie si des fonds issus de la corruption n’y ont pas été blanchis, comme dans d’autres pays, par l’intermédiaire de sociétés écran, a-t-elle expliqué. La justice française a saisi mardi un avion privé appartenant à la famille Ben Ali, tandis que la Suisse a décidé de geler le 19 janvier pour une durée de trois ans les avoirs que le président tunisien déchu pourrait détenir dans la Confédération, qui s’élèveraient à plusieurs millions de francs suisses. Les enquêtes belges ont été ouvertes à la suite des informations transmises par la cellule belge de lutte contre la fraude, qui a sondé des banques, des assureurs et une vingtaine d’autres secteurs économiques qui sont tenus d’effectuer des contrôles sur les biens détenus en Belgique par des chefs d’Etats étrangers. « Il est possible que tout le monde ne suivait pas correctement les procédures de contrôles », a expliqué Mme du Castillon. L’Union européenne a décidé lundi de geler les avoirs de l’ex-président tunisien et de son épouse, le couple faisant l’objet d’une enquête judiciaire des autorités tunisiennes pour « détournement de biens immobiliers et mobiliers, ouverture de comptes bancaires et détention d’avoirs financiers dans plusieurs pays dans le cadre d’opération de blanchiment d’argent ».
Egypte-Tunisie: une revendication de liberté et de dignité » (évêques)
La ministre Michèle Alliot-Marie « peut rester », selon Matignon
Tunisie: le nettoyage continue, relance des contacts internationaux
Par Sofia BOUDERBALA TUNIS, 03 Fev 2011 (AFP) – Une semaine après avoir écarté les derniers caciques du régime Ben Ali, le gouvernement tunisien fort du soutien international, poursuit la purge des administrations et entreprises, un oeil rivé sur la situation sociale. Jeudi la tendance était à la reprise des activités à Tunis et dans le pays, répondant apparemment à l’appel lancé mercredi soir du Premier ministre Mohammed Ghannouchi après les « flottements des derniers jours ». « Ce gouvernement vous invite à préserver son indépendance en reprenant le travail, sinon le pays risque de s’écrouler », avait-il martelé, évoquant des « milliers de postes menacés par le désordre » qui a paralysé divers secteurs depuis la fuite du président Ben Ali, le 14 janvier. Après avoir nettoyé la police héritée du président déchu, le gouvernement a poursuivi la purge dans les grandes entreprises et dans les régions. Les gouverneurs des 24 provinces du pays ont été limogés et remplacés par des technocrates inconnus du grand public. Le tour du corps diplomatique pourrait venir, avec une « liste en préparation », selon une source des affaires étrangères tunisiennes. Conscient de la grogne à l’intérieur du pays, M. Ghannouchi a promis mercredi des programmes spéciaux d’aide et d’investissements pour les régions défavorisées du centre-ouest, bastion du soulèvement qui a emporté le régime Ben Ali. La ville de « Kasserine a payé un lourd tribut à la révolution, a donné son sang et ce sang versé n’est pas reconnu par le gouvernement. Kasserine doit avoir sa place dans le nouvel Etat démocratique ou alors la colère des habitants risque d’être ravivée », avertissait jeudi à l’AFP Mohamed Rhimi, un avocat de cette ville. « Il y a de la souffrance et de la rancoeur qui peuvent faire sauter le couvercle, car les gens ont un sentiment très fort de spoliation. Mais nous avons une grande chance: l’Etat n’est pas disloqué », estime de son côté jeudi dans le quotidien français Le Monde le ministre tunisien du développement régional Néjib Chebbi. La presse saluait jeudi matin ce « premier ancrage dans les régions », le quotidien La Presse parlant « d’hommes nouveaux pour mettre en oeuvre des politiques nouvelles ». Parallèlement les contacts entre Tunis et ses partenaires, surtout européens, se multiplient. Une délégation de 25 députés du Parlement européen devait commencer jeudi une mission de quatre jours conduite par l’Espagnol Jose Ignacio Salafranca. « L’UE doit envisager de revoir profondément sa politique de voisinage en Méditerranée », a-t-il déclaré lors d’un débat avec la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, elle-même attendu en Tunisie dans une quinzaine de jours. « Nous attendons que Paris use de son influence au sein de l’UE pour pousser à une accélération, faire progresser rapidement le dossier sur le statut avancé de la Tunisie », ajoutait jeudi à l’AFP une source proche du ministère tunisien des Affaires étrangères. Après une halte mercredi à Bruxelles le nouveau chef de la diplomatie, Ahmed Abderraouf Ounaïs, sera vendredi à Paris pour un déjeuner avec son homologue Michèle Alliot-Marie, au centre d’une « tempête tunisienne ». Une affaire « close » selon le gouvernement français. Mme Ashton avait confirmé à M. Ounaïs la détermination de l’UE à revoir à la hausse le niveau de ses relations avec la Tunisie, en citant notamment l’éventualité de l’octroi d’un « statut avancé » qui offre des tarifs douaniers privilégiés sur le marché européen. Une mission préparatoire d’experts européens doit également se rendre en Tunisie prochainement pour aider à la préparation des premières élections de l’après-Ben Ali dans six mois. Enfin une délégation du parti socialiste français étaient attendue jeudi à Tunis manifester son « soutien au processus démocratique ».
Le Parlement européen demande le renforcement de la coopération avec Tunis
Les troubles dans le monde arabe depuis la révolution tunisienne
Ayachi Hammami, militant des droits de l’Homme pourchassé par l’ancien régime
«Revoir la composition de la Commission des réformes politiques»
Figure militante des droits de l’Homme, membre du collectif du 18 octobre, ayant observé la grève de la faim qui a duré un mois à l’occasion de la tenue à Tunis du Sommet mondial des technologies de l’information et des communications, Me Ayachi Hammami a été interdit de parole pendant le règne du président déchu. Aujourd’hui nous lui donnons ici la parole. Interview.
Le Temps : Que pensez-vous de la composition du gouvernement de transition ?
Me Ayachi Hammami : Elle contient des compétences. Mais ce qui assombrit le tableau c’est la présence du Premier ministre, figure marquante de l’ancien régime. Pour les jeunes c’est une spoliation de leur révolution.
• Et pour ce qui est des commissions ?
-Je vais parler de celle des réformes politique, c’est une commission chargée de préparer notamment la réforme du code électoral pour l’organisation des élections présidentielle et législatives. Elle doit donc choisir le mode de scrutin adéquat proportionnel, majoritaire ou panaché. Comment va-t-elle choisir et de quel droit va-t-on décider de ce mode de scrutin ? Il fallait constituer un conseil national représentant toutes les parties qui composent la société tunisienne. Ce conseil après une large concertation choisira le mode de scrutin et soumettra sa proposition a des juristes pour rédiger le projet de loi. Le problème réside dans le fait que la composition de cette commission n’obéit pas au critère de la représentativité.
• Comment jugez-vous la situation actuelle dans le pays ?
Aujourd’hui il y a trois dossiers qui doivent être examinés d’urgence sinon le danger de l’échec de cette révolution est à craindre. Le premier est celui de la sécurité. A mon avis il faut au plus vite restructurer les services du ministère de l’Intérieur. Le service de la sûreté de l’Etat doit retrouver sa véritable mission celle de protéger l’Etat et non les personnes ou les familles. Il faut aussi éloigner de ce ministère tous les fonctionnaires chargés des affaires politiques. Le deuxième dossier est celui de l’information il faut mettre à la tête des entreprises publiques de ce secteur des directeurs indépendants et compétents parce que les organes d’information appartiennent au peuple et non à l’Etat. Le troisième dossier est celui de la magistrature c’est un corps de métier qui a besoin d’une véritable opération de « nettoyage ». Il y a des magistrats qui n’ont plus leur place dans cette profession.
Propos recueillis par Néjib SASSI
(Source : « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 3 février 2011)
A quand la séparation de la religion de l’Etat ?
Par Abderrahman Jerraya
C’est une chance extraordinaire (un miracle diraient certains) qu’aujourd’hui nous pouvons nous exprimer librement, sans contrainte, sans risque d’être maltraités, sanctionnés, sans crainte d’être traînés devant une « justice » aveugle et inhumaine. Ce bien précieux, ce don du ciel, cette ère nouvelle porteuse d’espérance, nous les devons d’abord à notre peuple et notamment à notre jeunesse. Je voudrais ici m’associer à ceux qui ont exprimé leur immense reconnaissance et leur profonde gratitude à ce peuple courageux et solidaire.
Comme je voudrais saluer le rôle exemplaire de notre armée nationale qui s’est montrée à la hauteur de l’événement qui a fait basculer la Tunisie, du jour au lendemain, dans les rangs des pays démocratiques, des droits de l’Homme, de la justice et des libertés individuelles. C’était pour beaucoup un rêve qui est devenu réalité.
Cette réalité s’est manifestée avec éclat par la liberté d’expression et d’information, par les mesures prises en matière d’amnistie générale à l’égard des prisonniers politiques, d’une aide multiforme pour les sans emploi et les plus démunis, par la mise en place de commissions à qui il est confié de faire des propositions de réforme institutionnelle, d’identifier et de traduire devant la justice, à la fois, les criminels, les fauteurs de troubles et les responsables de l’ancien régime, impliqués dans des affaires de corruption, de vols de biens publics et privés et d’atteintes aux droits de l’Homme.
Tout cela était de nature à répondre aux aspirations et aux attentes de notre peuple n’eût été l’autisme quasi général à propos d’une question qui, à mon sens, me paraît essentielle à savoir la nature de la relation qui devrait être établie entre la religion et l’Etat. Si on a mis en lumière les agissements du président déchu et de son entourage en matière de transgression de la loi, de népotisme et de corruption, leurs injonctions dans le domaine religieux n’en étaient pas moins répréhensibles En fait de tout temps, les souverains grands et petits, les tyrans et les dictateurs de tout acabit ont instrumentalisé la religion à des fins politiques. Lors de son expédition en Egypte, Napoléon Bonaparte, ayant appris une certaine résistance de la part des « Oulémas », a fait venir ces derniers pour leur expliquer qu’il était le messager de Dieu avec pour mission de défendre l’Islam menacé par une invasion imminente venant des Anglais. Ce même Napoléon estimait que la religion permettait de faire supporter et même accepter les inégalités sociales. Ce qui a fait dire à certains qu’elle pouvait être considérée comme « l’opium des peuples », susceptible de créer en eux un sentiment de résignation, de torpeur, voire de soumission inconditionnelle. Le régime de Ben Ali s’est attaché à mettre en pratique cette conception cynique de la religion.
Les exhortations des Imams
En témoignaient, entre autres, les prêches prononcées par les imams tous les vendredis et qui se terminaient toujours par des exhortations à la soumission et/ou au soutien au régime en place, souhaitant longue vie et invulnérabilité au Président. Tout ce mélange des genres, toute cette hypocrisie institutionnalisée étaient indignes pour notre pays qui aspirait d’entrer de plain pied dans la modernité avec pour corollaire le respect des libertés individuelles, la transparence dans la gestion des affaires publiques, et la pratique de l’alternance à la tête de l’Etat. Pour les citoyens, les questions religieuses doivent faire partie de la sphère privée de chaque individu qui peut vivre sa foi comme il l’entend, en accord avec sa conscience, selon son intime conviction, sans injonction du politique, sans oppression de quelle que nature que ce soit. Quant à l’Etat, son rôle doit se limiter, entre autres et dans le cadre strict de la loi, à organiser et gérer le temporel ainsi qu’à faire respecter les règles de conduites à valeur universelle, applicables à tout à chacun, indépendamment de son statut social et de la fonction administrative qu’il occupe, aussi importants soient-ils.
Force est de reconnaître que ceci n’a rien d’utopique pour notre pays dont la religion est l’Islam. L’exemple turc est là pour nous le rappeler. Le fondateur de la Turquie moderne Mustapha Kamel Atatürk, a eu le courage de rompre de façon radicale avec le système politique d’alors, avec la suppression du Khalifat et l’instauration de l’Etat laïc. Ce modèle a fait preuve de sa solidité et de sa viabilité, ayant résisté à tous les soubresauts qu’a connus la Turquie post-kaméliste. Il n’a pas empêché les Turcs de remplir leurs pratiques religieuses. J’ai eu l’occasion de me rendre en Turquie en 1996 et pu voir les fidèles à Istanbul faire leurs prières dans la rue, tellement les mosquées étaient bondées.
Bien plus, il a permis à un parti d’obédience islamique à s’organiser et à accéder au pouvoir pour un 2ème mandat, à travers des élections libres et démocratiques. Une fois au gouvernement, ce parti n’a pas cherché à remettre en cause les fondements institutionnels de l’Etat laïc. Cela signifie qu’il n’y a pas incompatibilité, en terre d’Islam, à séparer la religion de l’Etat. Bien au contraire, c’était l’amalgame entre le spirituel et le temporel et l’usage malsain, hypocrite et mensonger de la religion par le politique, qui étaient à l’origine de l’image négative que certains esprits mal intentionnés ont voulu donner de l’Islam.
Je suis convaincu que le fait de soustraire la religion de la tutelle de l’Etat est de nature à lui permettre de retrouver sa pureté originelle, n’étant interprétée, expliquée et encadrée que par les « foukaha ». C’est la raison pour laquelle j’appelle à méditer le modèle turc et pourquoi pas à s’en inspirer, en perspective de la réforme des institutions politiques, voulue et réclamée par le peuple.
Cette proposition n’est pas une première, ni originale. La constitution limitant le pouvoir absolu du Bey, adoptée pour la 1ère fois dans l’histoire millénaire de la Tunisie en 1864, avait pour source d’inspiration, un texte constitutionnel connu sous le nom de « Tandhimet », élaboré et publié à Istanbul, marquant le début d’ouverture de l’empire ottoman aux principes des droits de l’Homme, de liberté, d’égalité et de justice sociale, développés par le siècle des lumières.
Quant à la constitution tunisienne, dénommée « Aahd El Amène », elle ne fut guère sérieusement appliquée, en dépit de l’engagement solennel de Sadok Bey de respecter scrupuleusement ses différentes dispositions. Cela rappelle tristement le peu de cas que fit sans excuses, sans explication et sans scrupule, le Président déchu, de sa déclaration audiovisuelle du 7 novembre 1987, prononcée devant la nation toute entière.
Pour le peuple tunisien, la plupart de ces gouvernements d’avant et d’après l’indépendance n’avaient pas de crédibilité. Et il a raison aujourd’hui de s’en méfier, d’être vigilant et de maintenir la pression. C’est à la commission chargée de la réforme institutionnelle de trouver les garde-fous les plus appropriés pour faire en sorte que désormais, le Président élu par le peuple ne soit pas tenté de garder le pouvoir … à vie.
(Source : « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 3 février 2011)
[Decryptage] Voyager en Tunisie: Retour sur la defence de MAM
La ministre des Affaires étrangères s’est défendue sur plusieurs plateaux télés au sujet de ses vacances en Tunisie. Des explications parfois bien loin de la réalité.
Michèle Alliot-Marie n’en finit plus de s’engluer dans son bourbier tunisien. Devant les députés le 11 janvier, trois jours avant la fuite du président Ben Ali sous la pression de la rue,Michèle Alliot-Marie avait proposé « le savoir-faire » français à la police tunisienne pour « régler les situations sécuritaires » entraînant déjà une vive polémique. Depuis deux jours, Michèle Alliot-Marie se débat, après les révélations du Canard enchaîné, pour justifier ses vacances en Tunisie à Noël. Mercredi soir, la ministre a multiplié les déclarations, sur Canal+ puis sur France 2 donnant une vision très personnelle de la chronologie tunisienn
En gras les déclarations de Michèle Alliot-Marie, puis le décryptage :
« Le suicide s’est produit, il me semble, à la fin de mon séjour. C’est le souvenir que j’en ai. »
– Michèle Alliot-Marie affirme s’être rendue en Tunisie entre Noël et le jour de l’an en compagnie de son compagnon, Patrick Ollier, également membre du gouvernement. Or, Mohamed Bouazizi, s’est immolé le 17 décembre.
– Preuve du retentissement des manifestations qui suivent,le gouvernement est remanié le 29 décembre, et le président Ben Ali appel au calme, soit pendant le séjour de la ministre.
« Il n’y avait aucune répression à ce moment-là »
– Dès le 18 décembre, au lendemain de la tentative d’immolation,des heurts éclatent entre des manifestants et les forces de l’ordre dans la région de Sidi Bouzid.
– Le 31 décembre, le ministère des Affaires étrangères fait état de la situation en Tunisie lors d’un point presse. La France souhaite « l’apaisement des tensions » en Tunisie, en proie à des troubles sociaux depuis le 19 décembre, en particulier dans la région de Sidi Bouzid (centre-est), déclare le porte-parole du ministère.
Aziz Miled est « un homme d’affaires extrêmement respecté en Tunisie », une « victime » du clan Ben Ali
–Aziz Miled est présenté comme un proche de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ex-président Ben Ali. Cet homme d’affaires figure sur une liste de personnalités tunisiennes dont la Suisse a gelé les avoirs le 19 janvier. Il aurait également signé une motion de soutien pour que Ben Ali se présente à la présidentielle de 2014.
Source : « Le Nouvel Observateur » Le 03-02-2011
Turquie-Tunisie, la filiation de l’AKP
Sans présence visible dans les manifestations de la Révolution de Jasmin, les islamistes tunisiens de l’Ennahdha commencent à faire entendre leur voix. Avec pour modèle, disent-ils, le parti islamo-conservateur turc, l’AKP. Une manière de rassurer, mais pas seulement.
Le combattant suprême, Habib Bourguiba, artisan de la laïcité tunisienne, disait admirer et s’être inspiré duPère des Turcs, le très laïcMustafa Kemal.
Un demi-siècle plus tard, ce sont les islamistes tunisiens qui invoquent à leur tour le modèle turc.De retour d’exil, à Tunis depuis dimanche, Rachid Ghannouchi,chef historique de l’Ennahdha (La Renaissance), supposé être un des «durs», compare le projet de son parti à celui de l’AKP, le parti islamo-conservateur du premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis huit ans.
Condamné à mort, sous Bourguiba, à la suite d’un attentat contre un grand hôtel tunisien, Ghannouchi a bénéficié de l’intervention du Parti socialiste français, selon le politologue Alain Chenal qui raconte:
«Dans les derniers mois du pouvoir de Bourguiba, le PS intervient très fortement en faveur notamment des chefs religieux condamnés et menacés de mort. Rached Ghannouchi, libéré ensuite par Ben Ali, tiendra à venir personnellement rue de Solferino remercier le PS de l’avoir sauvé de la potence, avant de s’exiler à Londres.»
Il y restera 22 ans. Ghannouchi est un cas à part parmi les islamistes, le fruit de multiples influences et ruptures, a fait ses études en Syrie, fréquenté les Frères musulmans égyptiens puis s’en est éloigné.
Un temps inspiré par l’expérience iranienne, le numéro 1 d’Ennahdha est désormais en délicatesse avec le régime d’Ahmadinejad, dont il a critiqué le prosélytisme chiite en Tunisie, ce qui a conduit Téhéran à lui refuser un visa il y a deux ans. Rachid Ghannouchi a eu l’oreille de Khadafi, alors aux prises avec une mouvance armée islamique violente. Il a été menacé par le Groupe islamique armé (GIA) algérien après avoir dénoncé ses méthodes. Le rejet assez rapide de la lutte armée et du terrorisme est d’ailleurs l’une des caractéristiques qui rapproche l’Ennahdha de l’AKP.
L’aile externe, l’aile interne
En exil, Rachid Ghannouchi, qui est passé par la France avant de s’installer à Londres, acquiert une expérience internationale. Celui dont l’interview en direct, sur Al-Jazeera en 1999, avait vidé les rues et collé les Tunisiens à leur télé, travaille depuis des années à rassembler les partis islamiques sunnites dans un large mouvement transnational.
Ce qui l’a régulièrement conduit en Turquie où ses livres sont traduits, et à suivre de près l’essor de l’AKP. Ainsi, a-t-il joué le pacificateur entre le jeune et fougueux Tayyip Erdogan et son ancien mentor, l’islamiste Necmettin Erbakan avec lequel l’actuel Premier ministre turc a rompu pour créer l’AKP.
«Pas exclu que Ghannouchi ait pensé à ce qui pourrait lui arriver un jour face à la jeune garde, suggère malicieusement un militant de l’Ennahdha. Le parti est loin d’être homogène. Il possède aussi une aile dure et une aile plus modérée qui, si elle l’emporte, pourrait laisser Ghannouchi sur la touche.»
Mais si l’AKP est le dernier avatar d’une suite de partis islamistes, tour à tour interdits et ressuscités, aucun des cadres turcs n’a dû fuir le pays, tandis que l’Ennahdha est composée d’une aile externe, en exil, coupée de la réalité tunisienne depuis de près de trente ans. Né en 1968, politisé dès l’âge de 13 ans, licencié en philosophie, Hocine Jaziri occupe le poste de porte-parole de l’Ennahdha à Paris.
Ce réfugié politique, dont l’épouse ne se voile qu’en dehors du travail, est le père de deux enfants inscrits dans l’un des meilleurs lycées de Paris. L’exemple-type de ces cadres de l’extérieur, qui n’ont plus mis les pieds en Tunisie depuis leur fuite, citent Foucault dans le texte et sont très au fait de l’islam européen.
Plus ancrés dans la réalité quotidienne tunisienne, les militants de l’aile interne d’Ennahdha ont, eux, connu les arrestations, l’emprisonnement et la torture sous le régime de Ben Ali. «On ne sait pas grand-chose de ces leaders de l’intérieur car la presse était muselée. Ils ont fait profil bas et vont se révéler peu à peu», explique le professeur de droit Habib Slim, qui se souvient de l’activisme islamiste que le campus de l’université de Tunis a connu dans les années 1970-80.
L’un de ses anciens étudiants,Abdelfatah Muru, pourrait bien être l’un de ceux qui succéderont à Rachid Ghannouchi.
«Extrêmement éloquent, Muru haranguait les étudiants lors des assemblées générales; il parlait de l’islam et son projet était clairement d’imposer la charia. Le mouvement islamiste tunisien a commencé dans l’université; c’est seulement ensuite qu’ils ont travaillé la rue. Aujourd’hui Abdlefatah Muru semble plus modéré, plutôt proche effectivement de l’AKP.»
Un autre cadre de «l’intérieur», Hamadi Jebali, expliquait samedi sur une radio tunisienne que l’Ennahdha n’avait «pas l’intention d’imposer la charia, d’ailleurs ma fille n’est pas voilée et nous sommes attachés au pluralisme et aux acquis de la société tunisienne», poursuivait-il. Quasiment un copié-collé des arguments prononcés par les leaders turcs de l’AKP.
L’exemple turc rassure
La référence à la Turquie est parfaitement choisie. Elle rassure les Tunisiens. Ces derniers suivent de près ce qui s’y passe depuis 2002, l’arrivée au pouvoir de l’AKP, et envient son développement économique, sa stabilité politique et son activisme diplomatique. Elle rassure, également, la communauté internationale, européenne et américaine en particulier.
Car le modèle turc est peut-être en train de prouver qu’islam et démocratie ne sont pas incompatibles, d’autant que le parti qui se réclame de l’islam en Turquie (AKP) est lui-même un parti démocrate. A lire et entendre le nombre de fois où la comparaison est reprise à l’envi par journalistes et analystes étrangers depuis le début de la Révolution de Jasmin, il semble qu’Ennahdha ait marqué un premier point dans son opération de communication.
L’Ennahdha n’est pas l’AKP
Mais la comparaison a ses limites. L’AKP est un parti plutôt conservateur, l’Ennahdha se veut progressiste. La base du parti turc est constituée de petits entrepreneurs anatoliens, une classe émergente, traditionnaliste sur le plan des mœurs, et qui voulait avoir sa part du gâteau économique turc. D’ailleurs, le principal soutien de l’AKP provient de «sa» centrale patronale, la Musiad. La base de l’Ennhadha est en revanche plus hétérogène, ouvrière, petite bourgeoise et étudiante. Le syndicat UGTE, reconnu à la fin des années 1980, était très proche de l’Ennahdha. En d’autres termes, pour l’Ennhadha, la fête du 1er mai a un sens , pas pour l’AKP.
Et puis, l’AKP est arrivée au pouvoir «par défaut», à un moment où les anciens partis politiques turcs étaient gangrenés par la corruption et les querelles de personnes. Elle a occupé un vide politique et s’est imposée comme un parti dominant dès qu’elle s’est séparée de son aile islamiste dure, et engagée dans le processus d’adhésion à l’Union européenne.
Si Ennahdha veut asseoir sa position, elle doit faire preuve de realpolitik et s’allier aux autres forces politiques d’opposition. Aujourd’hui, ses responsables précisent bien qu’ils ne briguent ni la Présidence ni des ministères mais qu’ils souhaitent présenter des candidats aux législatives.
«Il est possible, suggère Habib Slim, que le Premier ministre ait obtenu le soutien d’Ennahdha à son gouvernement, sans participation, en échange du retour de Ghannouchi et de l’intégration d’Ennahdha dans le jeu politique, plus tard à l’occasion des élections législatives.»
Feront-ils alors mieux qu’en 1987? Les islamistes avaient alors présenté des candidats «indépendants» et remporté 17% des voix.
«Les élections étaient truquées, nous aurions dû obtenir beaucoup plus, estime Hocine Jaziri. Aujourd’hui notre priorité est 100% politique. Nous voulons faciliter le passage à une démocratie civile, pacifique et ouverte, sans exclusion; un cadre démocratique est un rempart contre la dictature.»
Une stratégie qui trouve un écho au sein de la gauche. Au Grand Journal de Canal+ (video du 17 janvier ) la veille de son retour en Tunisie,Moncef Marzuki prenait position en faveur d’un gouvernement où les islamistes auraient leur place. Même ouverture du côté des syndicalistes, telleNajet Mizouni, universitaire et ancienne de l’UGTT, qui déclare:
«Je suis inquiète pour l’avenir dela laïcité et pour la place des femmes en Tunisie, enrevanche je ne souhaite pas l’exclusion des islamistes du jeu politique et préfère qu’ils participent au jeu démocratique . Les islamistes ont aussi souffert sous la dictature de Ben Ali, ils ont aussi payé et contribué à ce qui se passe aujourd’hui. Pourquoi leur fermer la porte tant qu’on n’a pas vu ce qu’ils pouvaient faire?»
Or c’est, paradoxalement, Ben Ali lui-même qui a nourri hier le terreau sur lequel peut croître l’Ennahdha aujourd’hui:
«Tout en brandissant l’épouvantail islamiste, il a réislamisé la société. Jamais il n’y a eu autant de femmes voilées que sous Ben Ali, s’indigne Najet Mizouni. C’est lui qui a instauré l’appel à la prière à la télévision et à la radio, et construit des mosquées à tour de bras, une banque et une télévision islamique .»
Même constat du Professeur Habib Slim:
«Sous prétexte de verrouiller les islamistes, Ben Ali a également muselé les partis de gauche et du centre. Résultat, les mosquées sont devenues les seuls exutoires. C’est là seulement que les Tunisiens pouvaient exprimer leur révolte et leur opposition au régime.»
Cette réislamisation de la société tunisienne s’accompagne de la montée d’un sunnisme fondamentaliste, un «salafisme satellitaire (via les télévisions étrangères, NDLR) dans les classes bourgeoises aisées tunisiennes», déplore Hocine Jaziri .
Un exemple pour la Turquie?
Le terreau est aussi propice, en Tunisie, parce que l’islam n’y a jamais été présenté comme l’ennemi, à la différence de ce qui s’est fait en Turquie avec Mustafa Kemal, lequel qualifiait l’islam de rétrograde. En Tunisie, Habib Bourguiba et ses héritiers laïcs reconnaissent la dimension morale et humaniste de l’islam. Exemple le 30 janvier: parmi les banderoles brandies par les quelques manifestants anti-islamistes venus également «accueillir Ghannouchi», l’une d’elle prônait «Oui à l’islam, non à la république islamiste».
Parfaitement raccords, les Turcs de l’AKP et les Tunisiens de l’Ennahdha le sont, en revanche, lorsqu’ils refusent qu’on les appelle «islamistes» car, disent-ils, ce terme est utilisé par les Occidentaux sans distinction pour qualifier des réalités très différentes: les mollahs iraniens qui imposent la charia n’ont pas grand-chose à voir avec le gouvernement turc actuel qui se veut «démocrate-musulman» (comme il y des démocrates-chrétiens) lequel n’a pas grand-chose de commun avec les membres d’une organisation terroriste comme al-Qaida.
«Depuis les attentats du 11-Septembre, le mot islamiste se confond avec terroriste. On en a marre de cette représentation sanguinaire lié à ce mot, qui met tout le monde dans le même sac», explique Hocine Jaziri. Qui reconnait que dans son parti, «nous avons toujours du mal à séparer le politique du religieux; il faut que nous trouvions un autre modèle de séparation entre l’Eglise et l’Etat, plus en phase avec l’exception tunisienne».
S’ils devaient y parvenir, les Tunisiens de l’Ennahdha auraient alors, à leur tour, quelque chose à apprendre aux Turcs de l’AKP.
Source : « Slate.fr » Le 03-02.2011
Tunisie : Coup de pub islamiste !
Rached Ghannouchi compte déjà plus de 50 000 fans sur Facebook. Sa page ne tombe pas dans l’amateurisme de ses détracteurs. Le leader du Mouvement Islamiste d’Ennahdha adopte un stratagème fédérant rapidement les masses. Al Jazeera assure le blackout sur ses partisans gifleurs.
«Pour connaitre les news du Cheikh Rached Ghannouchi, le penseur islamique et le président du Mouvement islamique d’Ennahdha. Rejoignez notre page officielle maintenant» c’est ce qu’affiche une pub sur le côté gauche des écrans des Facebookers Tunisiens. Le lien publicitaire pointe vers la page fan de Rached Ghannouchi. L’espace cybernétique du cheikh résident à Londres depuis plus de 20 ans a été créé lundi 17 janvier, soit trois jours après la chute de Zaba.
Et c’est avec un extrait du poème de Belgacem Chebbi également hymne national de la Tunisie que la page en question a été inaugurée. En deux semaines, le nombre des partisans de Ghannouchi sur le réseau social dépasse les 50 000. Et les publications se succèdent. Les liens des articles publiés par Al Jazeera sont privilégiés. Evident ! Comment tourner le dos à l’allié médiatique numéro un de Ghannouchi? La figure de proue de l’islamisme à la tunisienne a bien retenu la leçon qui a contribué à la chute de Zaba.
La stratégie de communication est bel et bien développée. Après l’hymne national et les articles d’Al Jazeera, l’heure de l’«ice breaker» a sonné : Ghannouchi doit sortir du cliché l’emprisonnant dans l’image peu valorisante de l’obscurantisme. Pour atteindre cet objectif, les administrateurs de la page ont publié une série de photos illustrant les apparitions publiques du leader du Mouvement Islamiste d’Ennahdha
Etape suivante? Démentir l’accusation privant Ghannouchi de la sympathie de la moitié de la société tunisienne. Mise au point : «Le problème des Tunisiens et des Tunisiennes est la dictature. Et notre opposition à liberté de la femme n’est qu’une intox».
Et les départements d’Ennahdha sont complémentaires. La page Facebook de Rached Ghannouchi publie une mise au point concoctée par la Commission médiatique du Mouvement Ennahdha à Londres. D’autres interviews de Ghannouchi se succèdent ainsi que cette mise au point :
«Le 17 juillet 1988, après mon départ de la prison, j’ai déclaré au journal «Assabah» que le Mouvement Ennahdha approuve le Code du Statut Personnel» martèle-t-il dans une claire tentative de chasser les idées préconçues autour de lui et de son parti politique. Et voilà que la page se met à partager des publications encore plus variées au sujet de ses apparitions à la télé. France 24, Al-Hiwar, Financial Times et autres lui ont donné la parole.
Le 26 janvier 2010 était une date historique pour les milliers de sympathisants virtuels d’Ennahdha. Après être restés en contact avec leur leader via le net, voilà que celui-ci annonce son retour en Tunisie, dimanche 30 janvier.
Photos et vidéos ont été publiées sur la page Facebook de Ghannouchi pour célébrer son arrivée sur le sol tunisien. Al Jazeera a assuré la couverture médiatique de son voyage dès Londres et jusqu’à Tunis. La page en question a relayé son reportage hissant Ghannouchi et ses partisans au dessus de toutes critiques ou controverse. Alors que de nombreux profils Facebook tunisiens relayent la vidéo d’une femme agressée par l’un de ses partisans au moment de son arrivée.
Source: “Tekiano” Le 03-02-2011
Les islamistes, force politique de la nouvelle Tunisie
Le mouvement Ennahda n’a peut-être joué aucun rôle dans le renversement du président Zine Ben Ali en Tunisie, mais l’accueil réservé à son chef Rachid Ghannouchi après 22 ans d’exil a mis en évidence la place qu’occuperont à terme les islamistes tunisiens.
Des milliers de personnes se pressaient dimanche dernier à l’aéroport de Tunis-Carthage pour fêter le retour de Ghannouchi, éclipsant toute manifestation pour d’autres exilés et alarmant les Tunisiens attachés à ce que l’islam reste séparé de l’Etat dans l’ex-protectorat français habitué à une laïcité officielle.
Les sceptiques observeront de près l’attitude d’Ennahda dans les prochains mois pour vérifier si ses actes correspondent à sa rhétorique modérée. Les islamistes assurent ne pas briguer la présidence et se disent prêts à côtoyer d’autres mouvements dans la démocratie qui remplacera l’Etat autoritaire bénaliste.
« La Tunisie ne changera pas pour s’adapter aux islamistes et à leurs idées. Ce sont les islamistes qui doivent s’adapter à la Tunisie moderne« , dit Nedji Bghouri, dirigeant du syndicat des journalistes. « Un courant d’Ennahda commence à s’ajuster à cette réalité, mais il y a aussi ceux qui sont plus extrêmes.«
Malgré la répression qui a envoyé en prison ou en exil des milliers d’entre eux au cours des années 1990, les partisans d’Ennahda (Renaissance) semblent d’ores et déjà mieux organisés que les autres organisations politiques.
Dimanche à l’arrivée de Rachid Ghannouchi, de jeunes bénévoles d’Ennahda polis et bien organisés encadraient la foule en l’absence quasi complète d’agents de sécurité de l’aéroport. Ils semblaient tous se connaître, suivaient un plan et portaient des casquettes de base-ball blanches pour s’identifier.
Ce n’est pas un mince exploit de la part d’un mouvement interdit depuis deux décennies et dans un pays où les femmes qui portaient le foulard islamique étaient exclues du monde du travail ou de l’enseignement, tandis que les hommes qui priaient trop ostensiblement en public étaient interpellés.
« Ennahda ajuste son discours en fonction du moment, et le moment est à la retenue« , note Larbi Sadiki, professeur tunisien à l’université britannique d’Exeter. « Ils seront examinés avec plus d’attention que d’autres, car depuis longtemps on ne pouvait pas conjuguer Tunisie et islamisme.«
Ennahda s’applique à ne pas intervenir publiquement trop vite, de peur d’être accusé de transformer une révolte populaire en révolution islamique comme ce fut le cas en 1979 en Iran après le retour d’exil de l’ayatollah Ruhollah Khomeini.
Rachid Ghannouchi n’est pas rentré immédiatement en Tunisie. Son parti ne présentera pas de candidat à la présidence et, s’il compte participer aux élections législatives, Ghannouchi lui-même ne briguera aucun poste officiel.
Cette position apaise certains Tunisiens qui craignent de voir les islamistes détourner les événements. Mais en obtenant un nombre important de sièges parlementaires, Ennahda pourrait jouer un rôle d’arbitre lors d’une élection présidentielle.
« Khomeini est revenu pour une révolution dont il était l’instigateur. Ghannouchi vient se joindre à une révolution dont il n’a pas été l’instigateur. Il ne peut pas revendiquer cette révolution« , déclare Larbi Sadiki, qui était à bord de l’avion qui a ramené Ghannouchi de Londres à Tunis.
« Ils convoiteront 35 à 40% des voix pour montrer qu’ils ont une légitimité, rien de plus. Ce qu’il faut surveiller, c’est ce qu’ils font au niveau de la société civile, des groupes civiques, des ONG.«
Autorisée à présenter des candidats aux élections de 1989, Ennahda avait obtenu une part respectable des suffrages, ce qui avait amené Ben Ali à l’interdire.
Le mouvement risque d’inquiéter tout autant les groupes d’opposition laïques dont le score n’avait pas dépassé trois pour cent en 1989 et qui peuvent aujourd’hui redouter une correction analogue de la part des islamistes.
Le seul rival d’Ennahda, pour le nombre d’adhérents et l’organisation, est la centrale syndicale UGTT qui s’est ralliée brièvement au gouvernement de transition après la fuite de Ben Ali. L’UGTT avait conclu un accord avec ce dernier mais a fini par se joindre au soulèvement et s’emploie à redorer son image.
Il reste beaucoup à faire en Tunisie. La situation requiert notamment une nouvelle loi électorale, les dispositions en vigueur limitant sévèrement le multipartisme.
Les groupes laïques pourraient militer pour la proportionnelle, qui bride les grandes formations, assure un rôle aux petits partis et favorise les coalitions. Ce qui s’exercerait au détriment d’Ennahda, bien que le mouvement puisse être assez confiant pour accepter une telle concession.
« On dit qu’il y a un problème dans le monde arabe, que nous avons le choix entre des dictateurs et des islamistes. Il nous faudrait la représentation proportionnelle pour ne pas finir avec un seul grand parti, afin que personne ne puisse gouverner seul« , dit l’opposant Fassi Djerbi, professeur d’économie.
Source : « L’express.fr » Le 02-02-2011
Tunisie, Egypte : la revanche d’Al Jazeera
Alors que la chaîne de télévision arabe Al Jazeera était dénigrée par les Etats-Unis, sa couverture médiatique des événements tunisiens et égyptiens et son influence dans les mouvements revendiquant plus de liberté lui donnent une vraie légitimité.
« It is Al Jazeera’s CNN moment », affirment désormais certains journalistes américains. La chaîne américaine avait été propulsée sur le devant de la scène internationale grâce à sa couverture de la guerre du Golfe, en 1990. La chaîne arabe connaît aujourd’hui son heure de gloire, grâce à sa présence en Tunisie et en Egypte.Mieux, Al Jazeera a même servi de référence aux médias occidentaux. Aux premiers jours des émeutes au Caire, non seulement utilisaient-ils ses vidéos, les seules disponibles, mais en plus, ils en parlaient avec un respect « habituellement réservé à la BBC », comme le souligne le Los Angeles Times. La revanche est de taille pour la chaîne qatarienne, qui n’a cessée d’être vilipendée par les médias américains, Fox News en tête. Pour la chaîne ultra-conservatrice américaine, Al Jazeera ne servait que de caisse de résonance au terrorisme et à Al-Qaïda – ne serait-ce que parce qu’elle diffuse les messages vidéos de Ben laden. Bref, elle n’était qu’un outil de propagande, résolument anti-américaine… Et voici qu’Al Jazeera devient un instrument du « regime change », cher aux néo-conservateurs américains ! La chaîne, créée au Qatar en 1996, bénéficie des services d’un bon nombre de transfuges de la BBC, affiche un total de 400 reporters, dans soixante pays. La chaîne touche 220 millions de ménages dans plus de cent pays. Elle a récemment lancé une version en anglais, accessible aux Etats-Unis.
Surce: “La Tribune” Le 03-02-2011
Tunisie, Egypte : la démocratie au risque de l’islamisme radical ?
L’attitude des gouvernants à l’égard des évènements tunisiens et égyptiens est emblématique du dilemme entre volonté d’ingérence et respect du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, explique le blogueur Romain Pigenel. Avec les risques induits…
ébullition qui, partant de laTunisie, secoue aujourd’hui l’Égypte sur ses bases (en attendant peut-êtred’autres pays) interroge doublement les démocrates, les progressistes, et la gauche en particulier. Premier doute : faut-il se mêler de ce qui se passe dans ces pays, au nom d’un droit d’ingérence démocratique, ou agir avec plus de prudence (et s’abstenir de soutenir un débouché plus précis que l’exigence de démocratie en général), au nom du respect de la souveraineté des pays étrangers, et du refus de ce qui pourrait ressembler à du colonialisme ou du paternalisme ? Deuxième doute : faut-il pousser à fond en faveur des soulèvements, et réclamer que table rase soit faite, quoi qu’il puisse en surgir ensuite, ou au contraire se soucier de l’après, et mettre dans la balance le pouvoir en place, mal que l’on connaît, avec les maux peut-être pires encore qui pourraient lui succéder ? La démocratie vaut-elle le risque de l’islamisme radical – puisque c’est decette crainte qu’il s’agit – et donc de sa propre négation ? Deux tensions : universalisme contre souverainisme, morale des principes contre morale des conséquences. On comprend pourquoi la gauche semble discrète et timide, si ce n’est prudente, depuis le début de ces révoltes. A l’instar d’unJean-Luc Mélenchon condamnant l’empressement de Jeannette Bougrab à demander le départ de Moubarak, et se livrant à une bien complexe casuistique (« Le militant que je suis dit à Moubarak « dégage!« ; si j’étais le président de la République, je me garderais bien de tenir un tel discours à l’égard d’un autre peuple souverain et libre »). Au bout du compte, ces deux tensions se rejoignent et se résument à un débat sur le sens d’une formule qui met tout le monde d’accord – le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. La démocratie doit-elle être défendue dans l’absolu et jusqu’au bout, ou au contraire être soumise à des considérations de souveraineté, et évaluée à l’aune des risques qu’elle ouvre – dans le cas présent, celui de l’islamisme ? Ceux qui se réclament plutôt d’une approche que l’on qualifiera de conséquentialiste – se méfier de la révolution pour ce qu’elle peut entraîner derrière elle – le font au nom d’un plus grand souci du concret. Naïfs Occidentaux, nous nous réjouirions, tout à notre eurocentrisme, de voir des dictatures renversées, sans imaginer que cela va entraîner de bien pires régressions, pour le droit des femmes notamment. On se souvient d’articles sur le « miracle tunisien » sous Ben Ali : la Tunisie pays opprimé certes, mais dont les citoyennes ne se voient pas contraintes d’arborer le voile. Outre le fait que ce raisonnement se fonde sur une appréciation de risques (non d’une fatalité inexorable) et que le spectre d’une révolution à l’iranienne, dont on ne connaît finalement qu’un exemple dans la région, n’a rien de certain, on peut se demander de quel droit, et en faveur de qui, des hommes et des femmes étrangers et extérieurs à ces pays peuvent juger ainsi de leur avenir. Que redoute-t-on quand on redoute une « dérive islamiste » ? Premièrement, une menace globale qui nous toucherait tous, le développement d’une forme de fondamentalisme politico-religieux considéré comme hostile aux pays occidentaux et à ce qu’ils représentent. Deuxièmement, une menace plus locale, la déstabilisation de la région et la mise en danger, par exemple, d’Israël. Troisièmement, qu’un régime contraire à nos principes (delaïcité, de mixité …) soit imposé, au bout du compte, aux Egyptiens. Disons-le franchement, les deux premières considérations n’ont pas à entrer en ligne de compte si l’on se soucie vraiment du sort des Egyptiens pour eux-mêmes. Reste donc la troisième considération. De deux choses l’une : soit la mise en place d’un Islam politique dur à la tête du pays se fait via un coup de force contre la volonté générale, et alors c’est un retour à la dictature, et à la case départ ; soit cela se fait par la voix des urnes, et alors c’est simplement le résultat de la démocratie, qu’il nous plaise ou non.Mais veut-on vraiment reconnaître la volonté populaire pour ce qu’elle est ? Peut-être à tort, j’ai cru discerner dans le rendu des événements plusieurs biais réguliers servant plus ou moins consciemment à diminuer ce fait massif, rare, et donc difficile à appréhender : ces révoltes qui tournent en révolutions sont d’abord possibles grâce à la mobilisation effective d’individus de chair et de sang, qui descendent dans la rue au risque de vraies balles et d’une vraie mort. Je me méfie en cela des comptes-rendusenthousiastes d’une « révolution Internet » (ce seraient Twitter et Facebook qui auraient rendu possible ce qui se passe aujourd’hui), ou de leur version conspirationniste-wikileakienne (« c’est le lâchage par les Etats-Unis qui a permis les soulèvements »). Si ces facteurs ont évidemment joué un rôle, leur mise en avant permet aussi de reléguer le peuple à un second rôle et de poser moins nettement la question de son droit à s’auto-déterminer. La limitation de ce droit au nom d’un risque d’issue malheureuse est par ailleurs extrêmement douteuse. Suspend-on la démocratie en Europe quand on voit la nouvelle-extrême droite progresser dans les sondages ? Faut-il introniser Nicolas Sarkozy caudillo pour faire barrage à Marine Le Pen ? La crainte de la démocratie est une peur de l’incertain, soulignant le pire pour effacer la chance du mieux. On peut se demander en quelle mesure elle ne se fonde pas également sur l’idée insidieuse qu’il y aurait des peuples mûrs, et d’autres non, pour la démocratie. L’idée que le risque de la démocratie est acceptable en Europe, car porté par des citoyens responsables – les récents événements hongrois devraient pourtant nous inciter à plus de modestie – mais qu’il y aurait d’autres peuples, Arabes notamment, qui ne pourraient y accéder que par un lent processus de transition, guidé par des tuteurs (armée, despotes plus ou moins éclairés) les préservant, malgré eux, de dérives condamnables à nos yeux. Outre le fait que l’on se demande sur quelles données concrètes repose ce type de jugement, il en vient à violer un universalisme – celui de l’égalité des êtres humains et de leur droit à la liberté – au nom d’un autre universalisme – celui de nos valeurs que nous voudrions voir triompher. Pense-t-on sérieusement que c’est la meilleure façon d’aider le développement de ces dernières ? Est-ce logique, pour défendre de grands idéaux, de craindre une situation pouvant voir leur réalisation comme leur défaite, et de cultiver la nostalgie d’un état antérieur, la dictature, où ils étaient de fait (et par principe) inatteignables ? Il faut choisir entre une vision de stratège et de diplomate (avec un regard de surplomb et des calculs incertains), passant par-dessus les peuples pour penser un « intérêt général » très discutable, et une conception plus respectueuse de l’individu. Entre la certitude d’une situation intenable, la dictature ; et le risque, l’imprévisibilité de la démocratie, qui lui sont consubstantiels.
On en revient au bout du compte à la première des deux tensions que je signalais au départ : une fois sa religion faite, si j’ose dire, comment agir concrètement ? N’y a-t-il pas pour le coup un fossé infranchissable entre l’envie d’aider des voisins à se libérer, et la reconnaissance de leur souveraineté comme principe fondamental ? C’est ici pour la gauche qu’est posée la question de l’internationalisme. On n’épiloguera pas sur l’état de déréliction de l’Internationale socialiste, incapable d’apparaître comme un acteur audible et efficace dans la crise financière mondiale, comme de purger ses rangs des dirigeants politiques autoritaires mis récemment sous les projecteurs de l’actualité. Sans appeler aussi solennellement que vainement, de l’extérieur, à soutenir telle ou telle option politique, les partis de gauche pourraient intervenir, sur le terrain, en soutien de leurs homologues, faciliter le rétablissement de contacts normaux entre les pays, aider par la base au développement de projets conjoints (économiques, sociaux, culturels) pour fortifier les nations fraichement débarrassées de l’ordre ancien. Il ne s’agit pas d’ordonner autoritairement la mise en œuvre des idées que nous défendons, mais d’accepter que leur défense passe par le respect du jeu démocratique local (re)naissant. Pour faire en sorte que l’on passe du risque, à la certitude, de la démocratie.
Source: ”Marianne2” Le 03-02-2011
Egypte, Tunisie : quelles alternatives ?
Alors que la situation instable en Egypte et en Tunisie a conduit les tour-opérateurs à suspendre les départs jusqu’au lundi 7 février inclus, la question des destinations de substitution se pose à l’approche des vacances de février, qui débutent le 12 février, mais aussi des vacances de Pâques, qui débutent le 09 avril, dont les réservations se font dès à présent. Tour-opérateur leader sur la Tunisie et l’Egypte, Marmara enregistre à ce jour des hausses significatives (+50%) des réservations vers l’Espagne (Andalousie et Majorque), la Grèce (Crète et Rhodes), et dans une moindre mesure (+30%) la Turquie (Antalya, Izmir et Bodrum). Les voyagistes commencent donc à s’organiser pour trouver des alternatives à l’Egypte et à la Tunisie. Marmara affrète des vols supplémentaires vers l’Andalousie avec un vol depuis Paris tous les vendredis du 11 février au 31 mars, et un vol Paris/Agadir tous les samedis du 5 février au 31 mars avec XL Airways. Enfin, sur Marrakech, un vol supplémentaire au départ de Paris tous les samedis du 5 février au 31 mars et un autre depuis Nantes tous les mercredis du 9 février au 31 mars. De son côté, Fram renforce ses fréquences sur les Canaries. A compter du 19 février et jusqu’au 30 avril 2011, le tour opérateur toulousain met en place chaque semaine un vol supplémentaire au départ de Paris à destination de l’île phare des Canaries. Deux autres vols, l’un de l’aéroport Lyon et un autre de celui de Toulouse viennent augmenter les possibilités de départs hebdomadaires de province à destination de l’île de Fuerteventura, qui correspond parfaitement à une destination balnéaire de proximité susceptible de palier à la Tunisie ou à l’Egypte. Mais ce n’est pas tout : Fram annonce également des vols supplémentaires à destination des Baléares (Majorque et Ibiza) à partir du 23 avril, de la Turquie (Bodrum) à compter du 24 avril, de la Sicile (Palerme) et de la Sardaigne (Olbia) dès le 27 avril et jusqu’au mois de septembre vers Malte pour les deux mois d’été de juillet et août. Au total, ce sont près de 17 000 sièges supplémentaires proposés par le voyagiste par rapport à la programmation initiale ! Membre du groupe Transat France, Look Voyages augmente les capacités hôtelières et aériennes de plusieurs destinations. On retrouve les Canaries, décidément très en vogue, notamment Tenerife, où le voyagiste ajoute un vol supplémentaire tous les samedis au départ de Paris. Notez que cette nouvelle destination Look Voyages devait être lancée en avril, mais son ouverture a été avancée au 12 février pour répondre à la forte demande des clients sur les vacances de février. Sur le Maroc, Look Voyages augmente ses capacités hôtelières sur ses deux Clubs Lookéa (à Marrakech, il s’agit du Club Lookéa Royal Issil 4* et, à Agadir, le Club Lookéa Agadir Royal Tafoukt 4*). Le Maroc permet de palier en urgence aux événements en Tunisie et en Egypte, mais l’incertitude concernant l’ensemble des pays arabes (Jordanie et Maroc compris) limite la pertinence d’un choix vers ces destinations pour les vacances de Pâques. En République Dominicaine, Look Voyages augmente la capacité hôtelière de son Club Lookéa Samana. Spécialiste de cette destination Caraïbes, Vacances Transat augmente également sa capacité hôtelière, notamment sur la belle et authentique région de Samana, au nord de l’île. Thomas Cook a également renforcé ses capacités de vol à destination de Tenerife avec une rotation supplémentaire par semaine du 5 février au 22 mai au départ de Paris, du 26 février au 26 mars au départ de Nantes, et du 27 février au 2 mai au départ de Lyon et Marseille. Une rotation supplémentaire par semaine sur Fuerteventura, au départ de Paris, a également été mise en place du 14 février au 7 mars. Ce afin d’absorber les départs de dernières minutes ou les reports issus de la suspension actuelle des départs vers l’Egypte ou la Tunisie. . Par ailleurs, Thomas Cook propose du 2 au 19 février une opération Prix Fous sur les Baléares pour des séjours entre mai et octobre, avec des séjours en formule tout compris ou demi-pension à partir de 389 euros TTC et un prix exceptionnel de 699 euros TTC en juillet et août, ainsi que – 25 % pour les enfants. Cette offre est valable sur les marques Thomas Cook, Aquatour ainsi que Jet tours.A Bali, Jet tours propose une offre de séjours (7 et 12 nuits) à partir de 789 euros, en hôtel 3 ou 4 étoiles sur les plages du sud de l’île, pour des périodes de départ en avril, mai, juin, septembre et octobre, incluant les vacances de Pâques et de la Toussaint. L’occasion de découvrir l’Indonésie en couple, en famille ou entre amis à des tarifs exceptionnels. Un kit « 2 excursions à 99 euros » est également proposé pour partir à la découverte des sites essentiels de Bali, entre temples, rizières et culture balinaise. De leur côté, les croisiéristes évitent de faire escale en Tunisie et en Egypte, à l’instar de Costa Croisière, qui propose désormais des ports d’escales alternatifs. Ainsi, pour les croisières en Méditerranée, l’escale d’une journée à Alexandrie sera remplacée par une escale d’une journée en Grèce ou en Israël, alors que l’escale d’une journée à Tunis sera remplacée par Palma de Majorque, aux Baléares, Malte, ou Cagliari en Italie. Chaque année, la Tunisie et l’Egypte accueillent respectivement 600 000 et 270 000 touristes français pour des séjours vols et séjours compris. Les enjeux sont donc importants pour les voyagistes français, qui ont déjà eu à subir l’épreuve du volcan.
Source: ”easyvoyage” Le 03-02-2011
Trabelsi: les Canado-Tunisiens s’impatientent
Deux semaines après l’arrivée à Montréal de Belhassen Trabelsi, beau-frère du président déchu de la Tunisie, Zine el-Abidine Ben Ali, la communauté canado-tunisienne s’impatiente et demande des comptes au gouvernement fédéral.
En conférence de presse à Ottawa, le Collectif de solidarité avec les luttes sociales en Tunisie a déploré que le Canada n’ait pas encore gelé les actifs de M. Trabelsi ni extradé l’homme vers la Tunisie, comme le réclame le gouvernement provisoire de Tunis. «Nous demandons au gouvernement canadien de cesser de tergiverser dans le dossier tunisien et de respecter ses engagements internationaux», a souligné Sonia Djelidi. Bien qu’il n’existe pas de traité d’extradition entre les deux pays, le groupe exhorte Ottawa à collaborer avec les autorités tunisiennes pour que M. Trabelsi, visé par un mandat d’arrêt international, soit rapidement renvoyé dans son pays. D’autre part, le collectif prétend que la Convention des Nations unies sur la corruption, que le Canada et la Tunisie ont ratifiée, pourrait aider Ottawa à accélérer le gel des actifs de l’homme d’affaires afin que l’argent qu’il est soupçonné d’avoir volé au peuple tunisien «ne soit pas dilapidé». «Si le gouvernement canadien a pris les devants, il faut qu’il agisse en toute transparence et qu’il démontre quelles sont les mesures qui ont été prises», a réclamé Vincent Valaï, avocat associé au collectif. Ottawa reste prudent Malgré les critiques, le gouvernement est toutefois resté prudent dans ses commentaires. «On est dans un régime de droit. La Loi sur les renseignements privés m’empêche d’aller dans le fin détail du dossier», a indiqué le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon. «Nous allons déployer tous les efforts pour que, dans le cadre de la législation existante, nous puissions accommoder les besoins du gouvernement tunisien.» Le député libéral Denis Coderre, qui accompagnait le collectif, estime que le gouvernement pourrait faire des gestes immédiats et qu’il s’agit surtout de volonté politique. Le critique du Bloc québécois en matière d’affaires étrangères, Jean Dorion, a quant à lui réclamé que l’on confie le dossier à un seul ministre du gouvernement, pour éviter le «cafouillage».
Source: “cyberpresse” Le 03-02-2011
« Nous vivons la vraie indépendance de la Tunisie »
Fares Mabrouk est un entrepreneur tunisien, spécialisé notamment dans le mobile banking et la logistique pétrolière. Diplômé de la Kennedy School à Harvard, il a été attaché de cabinet au Ministère tunisien de l’Energie et de l’Industrie. Il est également chercheur à l’Université de Yale, aux Etats-Unis, et directeur de l’Institut arabe d’études politiques, qu’il a par ailleurs fondé. Il a notamment été un acteur de l’offensive internet pendant la révolution de Jasmin. Entretien.
On a beaucoup parlé des réseaux sociaux comme d’un élément essentiel de la révolution tunisienne. Dans quelle mesure ont-ils joué sur le mouvement ? Quel fut l’impact réel des révélations Wikileaks ?
Internet et les réseaux sociaux ont effectivement joué un rôle essentiel pour mobiliser les Tunisiens. Dans un pays où la presse était muselée et les médias strictement contrôlés par l’Etat, les Tunisiens ont trouvé à travers ces outils le moyen d’exprimer leur frustration, une sorte de caisse de résonnance à leurs revendications. Au début de la révolte les gens étaient mobilisés contre l’injustice des inégalités. A fur et à mesure que les langues se déliaient, la mobilisation augmentait, les gens prenant de plus en plus de risque, et enfin les revendications ont évolué jusqu’à aboutir au départ de Ben Ali. Les révélations Wikileaks ont apporté une preuve officielle, en tous cas perçues comme telles, des abus et aberrations que tous les Tunisiens soupçonnaient. Pourtant, je ne pense pas que ces révélations aient joué un rôle déterminant dans la mobilisation des Tunisiens.
Si Internet et les nouvelles technologies de la communication ont été des acteurs influents de la révolte, les nouveaux acteurs politiques ont-ils prévu de les intégrer dans leurs actions futures ?
On observe des tentatives, souvent maladroites des partis politiques, de mobiliser sur internet ou de rallier les leaders d’opinion du web tunisien. L’erreur, à mon sens, est que l’approche est uniquement marketing. Les partis politiques considèrent le web comme un segment ou au mieux comme un média et non pas comme une culture. Aucun de ces partis n’a intégré dans son programme des volets répondant aux attentes et aspirations des cyber-citoyens. Nous sommes en attente des programmes électoraux, peut être nous parlerait-on de Tunisie 2.0, comme il a été question de révolution 2.0
Vous avez exprimé des réserves dès la formation du nouveau gouvernement. Pourquoi ? Comptez-vous jouer un rôle dans le processus démocratique qui débute dans votre pays ?
Lorsque viendra le jour des débats politiques et des confrontations d’idées, chacun de nous jouera un rôle dans la Tunisie démocratique. Pour l’heure, il nous faut passer ce cap d’incertitude et nous diriger le plus rapidement possible vers des élections, seules capables de restaurer la légitimité et la crédibilité de l’Etat. Je me suis opposé et reste très sceptique quant au gouvernement dirigé par Mohamed Ghannoushi. J’estime que ce gouvernement n’est pas en mesure de gérer la transition avec à sa tête un homme qui a été durant 23 ans et sans interruption ministre de Ben Ali. En tant que Premier ministre, Ghanoushi avait et a toujours la charge de la commission supérieure des investissements, de la commission d’assainissement des entreprises publiques ainsi que des privatisations. Je ne vois pas la commission anti corruption ou celle chargée d’enquêter sur les événements travailler dans la transparence lorsque la première personne à interroger est à la tête du gouvernement. Je ne mets pas nécessairement en cause l’intégrité de Ghannoushi, la justice statuera, mais je pense que sa présence à la tête du gouvernement discrédite davantage cet Etat fragile et que nous ne pouvons nous permettre cela en ce moment. Une des leçons à tirer de cette révolution est le rejet du modèle économique qui consistait à favoriser les régions côtières au détriment des régions du centre. La présence dans ce gouvernement des mêmes ministres qui ont été à l’origine de cette politique montre bien que le message n’a pas été compris ou qu’il a été sciemment ignoré. Un gouvernement illégitime et faible peut faire l’affaire de certains partenaires sociaux ou partis politiques mais constitue un risque en cette période de trouble. Le gouvernement doit clarifier son message et sa mission. Nous n’avons toujours pas de date pour les élections présidentielles ni une feuille de route claire pour y arriver. Ce manque de clarté fragilise d’autant plus le gouvernement.
Etes-vous optimiste quant aux mois à venir ? Quels sont, selon vous, les pièges à éviter pour la Tunisie ?
Je reste très optimiste pour la Tunisie. Je vois chaque jour naitre et se développer des initiatives, des projets, des partis, des mouvements. Les Tunisiens, portés par le désir de renouveau, veulent contribuer à l’essor national et s’y attellent. J’ai l’impression ou plutôt la conviction que nous vivons la vraie indépendance de la Tunisie. Au lendemain des élections, que j’espère pour le plus tôt, la Tunisie connaitra telle l’Espagne durant la Movida ou le Portugal après sa révolution des œillets une période faste de développements économiques, culturels et artistiques. Pour l’heure, il nous faut rassurer et nous rassurer, maitriser nos peurs, dépasser les tensions internes qui subsistent et se forment au sein de notre société. Il nous faut apprendre à vivre ensemble dans la diversité et exprimer nos différences à travers les débats et les élections à préparer. Telle est la mission, et uniquement, du gouvernement de transition.
Quel peut être le rôle de l’Europe dans l’avenir de la Tunisie ?
Un nouvel ordre est en train de s’imposer dans le monde arabe. L’Europe et la France semblent s’en accommoder. L’idée d’un statut avancé pour la Tunisie est très favorablement accueillie à Tunis et peut constituer le socle pour un nouveau départ et pour une nouvelle forme de collaboration et de partenariat. Il ne faut pas craindre ces changements ; ils sont portés par une volonté de justice et d’éthique et prouve la maturité et la sagesse du peuple tunisien Source : « Affaires strategiques » Le 03-02-2011
En Tunisie, « reprendre une vie normale est un acte militant
Trois semaines après le départ du président déchu Zine El-Abidine Ben Ali, les internautes du Monde.fr présents en Tunisie nous racontent leur quotidien.
- « Le pire est déjà derrière nous » par Mouadh
La vie reprend peu à peu son cours normal à Tunis. Les actes de pillage se raréfient. […] Ingénieur de profession, je me déplace quotidiennement entre ma ville natale Hammamet (60 km au sud de la capitale) et Tunis (où je travaille dans une multinationale française). Le travail chez nous a repris depuis le 17 janvier avec 60 % du personnel présent sur place. On a très vite atteint les 100 % dès le 19 janvier. […] Je pense que le pire est déjà derrière nous. On reconstruira notre pays avec nos propres mains. […]
- « C’est le prix à payer ! » par Mehdi
Depuis l’interview qu’a donnée le ministre de l’intérieur, les gens sont de plus en plus confiants. Personnellement, j’ai repris le travail depuis le 17 janvier. Travaillant dans une société offshore, on ne peut pas se permettre de ne pas livrer nos clients ! Nous avons toutefois été très pénalisés. Mais bon, c’est le prix à payer par tout le monde pour que notre révolution réussisse. […] Aujourd’hui ce qui me réjouit, c’est que tous les restaurants et les bars sont de nouveau ouverts. Mais jusqu’à 21 heures seulement, couvre feu oblige ! […]
- « Le ciel est plus silencieux cette semaine » par Samer
Je travaille dans le centre de Tunis pour une organisation internationale. Nous avons repris le travail dès le 20 janvier, et un rythme normal depuis le début de la semaine dernière. Après des survols quotidiens du centre-ville par des hélicoptères la semaine dernière, le ciel est plus silencieux cette semaine. La vie à Tunis a repris son souffle également, les cafés sont pleins, les commerces ouverts. On sent cependant une inquiétude encore diffuse, alimentée par les innombrables rumeurs qui circulent chaque jour, des lycées pris pour cibles, des enfants enlevés, des braquages. […]
- « Reprendre une vie normale : un acte militant » par Rached
Dans la société qui m’emploie […], nous avons essayé de reprendre le travail dès le 18 janvier malgré le couvre-feu et la relative insécurité. Ce choix fait en concertation a deux raisons. La première est le fait qu’en tant que société totalement exportatrice, une trop longue interruption aurait mis en péril jusqu’à nos emplois. La deuxième est que nous souhaitions reprendre une activité normale comme geste militant pour montrer que notre liberté ne serait pas remise en cause par des actes terroristes. Nous avons dû interrompre le travail prématurément ou annuler des jours de travail, mais nous avons tenu à aller au bureau dès que les conditions s’amélioraient. […]
- « A l’université, les choses sont rentrées dans l’ordre » par Ichrak
Je suis enseignant-chercheur en biologie à l’université de Tunis El-Mana. En ce qui concerne la vie universitaire, les choses sont rentrées dans l’ordre et depuis jeudi il y a eu reprise des examens du 1er semestre. Les cours du second semestre vont reprendre la semaine prochaine, et tous les collègues participent à l’encadrement psychologique des étudiants. Le but est d’éviter tout débordement à la reprise des cours en multipliant les réunions entre enseignants et étudiants.
Source: “Le Monde.fr” Le 0-02-2011
Source: “Le Temps” Le 03-02-2011 Pourquoi l’Egypte n’est peut-être pas la Tunisie
Bien sûr, il y a des points communs entre la révolution du jasmin en Tunisie et la révolte, aujourd’hui, de l’Egypte. Le despotisme de Moubarak au moins aussi abject que celui de Ben Ali. Le même mur de la peur qui tombe, les cent fleurs d’une liberté de parole tout aussi inédite et qui s’épanouissent un peu partout – ne disait-on pas, en Egypte, que le seul endroit où l’on avait le droit d’ouvrir la bouche, c’était chez le dentiste ? La beauté de l’insurrection ; sa dignité ; cette chaîne humaine, par exemple, qui s’est spontanément organisée pour protéger le musée du Caire après que des pillards s’y étaient introduits. La demande de démocratie ; depuis le temps que l’on nous serinait qu’il y a des peuples ontologiquement étrangers à la revendication démocratique et qui n’y ont pas droit ! eh bien, la preuve est faite que non ; et elle se fait, cette preuve, au Caire autant qu’à Tunis. Et je ne parle pas du malaise des grandes puissances, égal dans les deux cas : jusqu’à la Chine (qu’il faudra bien s’habituer à placer au premier rang des plus puissantes des grandes puissances) qui a bloqué le mot » Egypte » sur son réseau de micro-blogging Sina ! Reste que les situations ne sont pas, pour autant, les mêmes et que les différences, n’en déplaise à la pensée toute faite, l’emportent sur les points communs. Moubarak, d’abord, n’est pas tout à fait Ben Ali et, despote pour despote, offrira une résistance plus coriace : en témoigne l’habileté diabolique avec laquelle il a, dès les premières heures du mouvement, retiré sa police, ouvert les portes de ses prisons et laissé la pègre déferler sur la capitale et terroriser les classes moyennes. Le régime de Ben Ali, ensuite, était un régime policier quand celui de Moubarak est une dictature militaire : or les régimes policiers, avec leurs réseaux de mouchards, d’agents doubles et de flics infiltrés, tiennent tant que les peuples ont peur et tombent quand ils se révoltent ; les dictatures militaires, révolte ou pas, tiennent tant que tient l’armée et ne s’effondrent que quand l’armée les lâche. L’armée égyptienne, justement, n’est pas l’armée tunisienne : elle fut l’accoucheuse du régime avec Nasser ; son pilier, sous Sadate ; elle est, aujourd’hui, au terme de trente années d’état d’exception, l’ossature, non seulement de l’Etat, mais d’une part de la société – l’imagine-t-on, cette armée, poussant Moubarak dans son avion aussi vite que cela se fit avec Ben Ali ? La démocratie s’apprend vite ; rien ni personne, je le répète, ne peut faire qu’une société soit condamnée à la non-démocratie ; sauf qu’il serait absurde de nier que la maturité du peuple tunisien, sa culture politique, son niveau d’alphabétisation ne se retrouvent, pour l’heure, ni dans les zones rurales de Haute-Egypte ni dans la mégalopole du Caire avec ses quartiers à l’abandon où, comme à Choubra, au nord, des millions d’habitants ont pour seul horizon les 2dollars par jour qui leur permettront de survivre jusqu’au lendemain. D’autant que pèse enfin sur l’Egypte une hypothèque qui pouvait, en Tunisie, être tenue pour négligeable et qui est celle de l’islamisme radical : que les Frères musulmans du Caire aient été, jusqu’ici, d’une extrême prudence, c’est certain ; mais non moins certain demeure leur poids politique (en 1987, la confrérie fut le moteur de l’Alliance islamique qui, malgré la fraude massive, remporta 60sièges au Parlement !) ; non moins certain est leur quadrillage des organisations sociales du pays (n’ont-ils pas, en mars 2005, conquis pas exemple la majorité des sièges dans le syndicat des avocats ?) ; certaine encore est leur présence, depuis le soir du 27, dans toutes les manifestations (comparez, sur les rares images qui nous arrivent à travers les réseaux sociaux, le nombre de voiles et de robes noires à leur quasi-absence à Tunis) ; et non négligeable, donc, est le risque de les voir ramasser la mise après la chute de Moubarak (avec la perspective d’une Egypte virant au fondamentalisme d’Etat et devenant au sunnisme ce que l’Iran est au chiisme…). Tout cela pour dire que les révoltés du Caire n’ont pas un ennemi mais deux : Moubarak et les Frères musulmans. Tout cela pour dire que ce n’est pas un événement qui advient sous nos yeux,mais deux : une révolution réussie à Tunis et une autre, au Caire, qui se cherche. Et tout cela pour souligner que, pour penser ces événements, pour les concevoir dans leur singularité et les aider à accoucher, surtout, de la meilleure part d’eux-mêmes, il faut se débarrasser des idées toutes faites : à commencer par celle d’une » révolution arabe » unique, émettant sur une longueur d’onde unique, et qu’il faudrait, de Tunis à Sanaa en passant par Alexandrie, saluer dans des termes identiques. La Révolution française, après tout, a connu sa phase démocratique, puis terroriste, puis thermidorienne – sans compter, avec le culte de l’Etre suprême, son moment théocratique. Et si c’était cela qui se produisait, mais à l’échelle, non d’un pays, mais d’un monde ? Et si le même monde pouvait être le théâtre, au même moment ou presque, de révolutions spontanément démocratiques (Tunis), immédiatement terroristes (Téhéran) ou possiblement théocratiques (une Egypte où l’on ne barrerait pas la route, tout de suite, aux Frères) ? Et si l’on osait, dans ce monde comme dans les autres, rêver de révolutions sautant leurs funestes étapes pour aller droit à un Thermidor heureux (aspiration, à l’heure où j’écris, des forces vives de la révolution en marche en Egypte) ? C’est une hypothèse. Mais qui a le mérite de dire pourquoi l’on se bat et contre qui. Source:”Le Point.fr” Le 03-02-2011 De Tunis à Téhéran
En dépit des apparences et de réelles similitudes, l’Égypte n’est pas la Tunisie, pas plus que Moubarak ne ressemble à Ben Ali. Taille du pays, enjeux stratégiques, poids de l’influence américaine, tout diffère de Tunis au Caire, hormis bien sûr la juste colère des populations et le rôle central de l’armée. Mais on voit bien là encore que si les militaires tunisiens avaient rapidement poussé Ben Ali, un ancien de la police, hors de Tunisie, leurs homologues égyptiens hésitent à faire de même pour l’un des leurs, Hosni Moubarak. Quand ce dernier cherche à gagner du temps et annonce qu’il ne se représentera pas à la prochaine élection (comme Ben Ali la veille de sa fuite), lui parvient à s’accrocher encore au pouvoir. En tout cas, vingt-quatre heures après son discours, qui a laissé tout le monde sur sa faim, il y était toujours. Mais pour combien de temps ? Et à quel prix ? Les affrontements violents qui se sont produits au Caire font planer sur l’Égypte le spectre de la guerre civile. Peut-être est-ce ce que l’armée attend pour prendre la main. Depuis le coup d’État des colonels qui a porté Nasser au pouvoir en 1953, les militaires n’ont jamais vraiment quitté le pouvoir – encore une différence avec la Tunisie. Terrible sujet d’interrogation pour nos démocraties occidentales, qui se perdent en conjectures. Les États-Unis eux-mêmes ne savent plus à quel imam se vouer. Jusqu’à quel point se montrer solidaire des peuples en lutte pour leur liberté ? Jusqu’à quel point soutenir des dirigeants alliés mais autocratiques jusqu’alors gages de stabilité ? Barak Obama donnait le sentiment mardi soir d’avoir lâché Hosni Moubarak, du moins de le pousser vers la sortie, mais il cherche encore l’alternative. Si l’Égypte sunnite et arabe n’a guère en commun avec l’Iran chiite et perse, les Américains n’ont aucune envie de rééditer leur erreur de 1979, lorsqu’ils avaient abandonné le chah pour se retrouver face aux ayatollahs. Ainsi vont les diplomaties occidentales, qui oscillent d’un extrême à l’autre. La France est passée du néocolonialisme à la vraie-fausse repentance, laissant le peuple tunisien sur le bas-côté. Les États-Unis louvoient entre le devoir d’ingérence, ingérence molle façon Carter ou brutale façon Bush, et le réalisme d’État qui commande de soutenir ses amis. Mais le premier des réalismes ne serait-il pas d’anticiper les aspirations des peuples et de savoir se tenir à leurs côtés au bon moment ? Source: “Sudoust.fr” Le 03-02-2011 Interview with Rachid Ghannouchi
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Rachid Ghannouchi speaks with Al Jazeera about his political strategy and reaching out to the country’s youth.
Rachid Ghannouchi returned to his homeland on Sunday, after nearly twenty years in exile.
Al Jazeera’s Nazanine Moshiri sat down with the leader of Tunisia’s al-Nahda movement – a pro-democracy Islamist party which remains illegal, even in post-Ben Ali Tunisia – to discuss his party’s ambitions for the future.
Were you surprised by the welcome that you received, the thousands of people at the airport there to welcome you back to your homeland?
No, I was not surprised, I always had belief that the Tunisian people were faithful, and that Ben Ali’s attempt at distorting our image was not successful.
What were your feelings when you landed and arrived and saw your country for the first time in more than twenty years?
I felt great joy and pride in the Tunisian people, who succeeded through their peaceful, popular revolution to topple a dictator who was supported by external powers.
I was proud that I came back holding my head high, not having submitted to anyone but my creator and not having offer any compromises or anything to the toppled dictator.
How do you feel about the situation now, that your movement is not part of the interim coalition government? Do you feel that they are moving in the right direction towards election right now?
The situation is still vague. The dictator has been toppled, but the remains of the dictator are still there. Through the constitution which was tailor made for the dictator, through the parliament which was the fourth parliament which was made by the dictator, through the laws that restrict all freedoms, through the political police that are still harassing people, so the situation is still serious.
But do you feel that the government has made some concessions at least? There are only two junior ministers that are part of the old ruling party, and the prime minister himself has said that he will stand down when there is an election.
This government is still not stable, every time there is pressure that is exerted by the street protests it throws some members and replaces them with new members, so it is still unstable.
So what do you think this government needs to do to bring some stability back, and are you willing to contribute to that through your movement?
There must be a real national unity government that includes all political parties as well as civil society institutions, including the trade unions, the union of lawyers without excluding anyone. This government still has the same features of exclusion and containment of the revolution.
You have said that you are not going to run for president. Is that still the case, now that you have seen some of the support in this country?
The support that I have seen will not change my decision because my decision was not based on any fear of a lack of popularity. I always had trust in the Tunisian people, it’s for other reasons, that is, that Tunisians need a younger leadership and there are younger generations within al-Nadha who will be more appropriate.
How popular do you think your movement is now? It’s a long time since you were here, a long time since you took part in an election. Many things have happened to your movement, many of your members have been imprisoned. A new generation has grown up not really knowing about your movement… Do you think you stand a chance in the elections?
There were tens of thousands who came to the airport, mostly young women and men – some of the women not wearing head-scarves – all testify to the failure of the previous regime to destroy the memory of the Tunisian people who are faithful to the respected figures. I could give you any figure, but the only figure that could reveal the extent of the popularity of any party is the elections.
Let’s talk about the ideology of your party. Would you say that it’s similar to the AKP in Turkey?
Since you mention Turkey, most of my books and my articles have been translated to Turkish, and form part of the reference point for the AKP. The Turkish experience remains the closest to the Tunisian situation, culturally, politically and socially, Turkey is the closest case to Tunisia. So al-Nahda, if you were to compare it [with another movement], cannot be compared to the Taliban or Iran, the closest comparison would be to the AKP.
So if you party won, would you like to see Tunisia similar to how Turkey is right now?
There are similarities, but obviously each country has its specific conditions, we admire the Turkish case and those who are in charge of it are our close friends.
It’s very interesting that you said that some women who came to the airport had no head-scarves. There have been women protesting, concerned about perhaps your movement and what it would mean for them, whether you would want women in this country to wear head-scarves, to cover up their heads. Can you just explain what your feelings are on this issue?
We have continuously defended the right of women and men to choose their own lifestyle, and we are against the imposition of the headscarf in the name of Islam and we are against the banning of the headscarf in the name of secularism or modernity.
We have seen some people preaching on Avenue Habib Bourghuiba. In the name of your movement, could you just explain who these people are and what they’re preaching about?
I have not heard about them.
So you do not think that there’s a grassroots movement growing in Tunisia, trying to gain support for your movement? It’s nothing that you have, perhaps, instigated?
There are many that have grown up while we were absent, we have been forced to be absent from the scene for thirty years … and generations have grown up and been influenced by our thoughts. Many have, for example, set up Facebook groups in our name, but officially they are not members.
What are you doing now to gain support around Tunis for your party? What exactly is your movement doing to gain support amongst young people around the country?
Now that dictatorship has been toppled, there is great interest in al-Nahda and we are unable to encompass all the … who are interested in joining. We need our own media, our own channels, to educate new generations following the moderate, democratic Islam which we want to become mainstream, not just among our members, but among Tunisian society.
Let’s talk about the security situation. We have spoken to other opposition leaders who are concerned about their own safety, and that they feel unsafe as they did during Ben Ali. Can you just tell us how you feel since you are back? Do you feel safe? Do you feel secure?
Yes, security at the moment is out of control, to the point that each person feels at risk of any attack. But not from these people, we are amongst our people, and we do not feel that any attack will happen…I feel protected, in addition to divine protection, I feel the protection of the Tunisian people and by this revolution.
Let’s talk about Egypt. First of all, what is your message to the Egyptian people who are uprising against Hosni Mubarak. As a Tunisian, what is your message to them?
I am very proud of the Egyptian revolution. I am optimistic the Tunisian people have given a model for how, through a peaceful revolution, people can topple the strongest dictatorships.
The success of the Egyptian revolution would be a gift for the Tunisian people because it would protect their own revolution, so I hope the Egyptian revolution will not stop until it achieves its aims of toppling dictatorship and establishing a democratic transitional government.
Do you think the Muslim Brotherhood will play more role in the uprising?
It’s clear that the Muslim Brotherhood are present strongly in this revolution but it’s also clear that they did not raise any particular Muslim Brotherhood slogans and neither did any of the other opposition parties, and this is again a Tunisian lesson, that the revolution cannot be contained or exploited by any political party, that it’s a revolution of the people and should remain so. The Muslim Brotherhood has learnt this lesson and others have learnt it as well.
Do you feel like that’s how you have had to represent yourself in Tunisia coming back – it’s interesting to see you wearing Western suit, and when you came off the plane, you were wearing a Western suit as well. Do you feel that that has influenced you in the way you come back to Tunisia?
That has no relationship to this, I always dressed like this.
How close do you feel to the Muslim Brotherhood in Egypt?
Islam is the common point, and our moderate view of Islam. However, each country has its specific condition and independent decision-making processes.
People are extremely concerned about what the future holds. What is your message to them?
The people must protect their revolution if they value the important achievement of toppling the dictator. The blood of the martyrs is trusted in their hands, and not all their goals have been achieved. The street must remain mobilised, the genuine opposition and civil society institutions must coordinate to build a common vision, on which a national unity government will be formed to rebuild a political, democratic life in this country.
Source: “Aljazeera.net” Le 03.02-2011
It feels good to be Arab these days
The revolutions in Tunisia and Egypt are a great awakening for Arabs led to believe they were incapable of change
The Arab awakening, for that is what it is, which began in Tunisia and is now gripping Egypt, has taken western powers, and indeed the world, by surprise. Yet it is the Arab people themselves, myself included, men and women of all ages, who have been most surprised by what is happening – perhaps even more than the region’s dictators and regimes. Until now, it has been accepted and tacitly taught in Arab society that Arabs are weak, incapable of change, of holding their destiny in their own hands. It is said that since the great Arab conquests of the first millennium andSaladin’s victories, Arabs have known only defeats, decline and degeneration, a fate doomed to persist. What is happening today has great political significance: in one form or another, there will be political change in Egypt, which will affect the whole region. But this revolution is also cultural: bringing an incredible shift in Arabs’ perception of themselves and what they’re capable of achieving. I am a Lebanese descendant of the generation that has seen the rise and fall of Arab nationalism. Carried by the idealism of the 1960s, we saw Nasser as the personification of those values of freedom, justice and dignity that spread across the world, from Cuba to Vietnam. But after his fall, and the defeat inflicted by Israel in the 1967 six-day war, the dreams of unity, self-determination and nationalism slowly disappeared. Not until the late 1990s did a powerful and inspiring figure appear to Arabs in the form of Hassan Nasrallah, leader of the Lebanese Shia resistance group Hezbollah. Through Hezbollah’s ending of the 25-year Israeli occupation of south Lebanon, he became the Middle East’s most popular figure. However, perhaps due to its Shia nature, its close relationship to Iran and Lebanon’s complex politics, Hezbollah’s victories failed to lift the morale of Arabs. This, combined with the autocratic leaders, monarchs and dictators, created a lack of belief in us Arabs, that we could aspire to belong to countries in which freedom, justice, creativity and democracy prevail. We have been led to believe that these are not Arab attributes. Instead, we are mostly known for our dictators, oil, conservatism, religious fundamentalism,illiteracy rate and last but not leastultra-consumerism (that old Gucci outfit underneath the burqa). This is the « Arab malaise », to use the expression of the late Lebanese journalistSamir Kassir in his remarkable essayBeing Arab. It penetrates to our core, to our history, eating away at our pride, even to our relation with Arabic. In Lebanon, more and more people take pride in not being able to speak Fusha (classical Arabic) properly – because the degree of one’s inability corresponds to how westernised (ie non-Arab) one is, which is seen as the aspirational goal. Parents address their children in English or French, leaving Arabic for school. As a result, for many young Lebanese, Arabic is not a language of the heart but a formal, impersonal language – only for TV news and old books no one reads. So the revolutions in Tunisia and Egypt – the most populous Arab country and one-time leader of Pan-Arabism – are an incredible awakening for every Arab, a seismic shift in the way we perceive ourselves. How wrong I was to think thatMohamed Bouazizi, the young Tunisian who set himself on fire, was just another victim of Ben Ali’s cruel regime. Little did I know he was a hero in the revolution to come. Gripped by my Arab malaise, my mind could not see that real change was happening, until the day Ben Ali fled the country. And how wrong I was, to feel sorry for those Egyptians who also committed self-immolation, how my disbelief persisted until just a few days ago. The Egyptian revolution, though not yet over, has also taught us something about the Arabs that Kassir had clearly foreseen: « While the internet may be the prerogative of a new, albeit growing, elite, satellite channels, whatever their orientation, give the majority access to a visual and information culture, which thereby situates the Arab world in a composite global geography. This shows how, contrary to a fearful vision of Arab identity, cultural globalisation could be Arab culture’s great chance. » And so it has been. It feels good all of sudden to be Arab these days.
Source: “The Guardian” Le 03-02-2011
Lien:http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2011/feb/03/arab-feel-good-revolutions-egypt-tunisia