19 mars 2006

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TUNISNEWS
6 ème année, N° 2127 du 19.03.2006

 archives : www.tunisnews.net


LTDH:: Info Express
LTDH: Communiqué Abdeljabbar Maddouri: Communiqué à l’opinion publique
Parti Tunisien du Travail : 50 ans après … la lutte pour la dignité continue AP: Tunisie: le «dragon» de l’Afrique du Nord AP: Tunisie: l’emploi, grand défi des années à venir AP: Tunisie: la démocratie, seul remède contre l’extrémisme, selon un ancien ministre AP: Tunisie – diplomatie: la voix de la modération AP: Une réussite économico-sociale, une démocratie lente Houcine Ghali: M. Abdeziz Ben Dhia a mis les points sous les  » i  » Guysen, Israel News: Ils ont eux aussi marché sur la tête La Presse: « Il Corriere di Tunisi » fête son 50e anniversaire Arabies: Un élan patriotique Le Figaro: Anouar Brahem, les mariages du oud

 

Décès suspect

 

Le jeune Tarek Ayari, 22 ans, demeurant à Kabbaria, est décédé à la suite d’une agression perpétrée par les forces de police le 10 mars à proximité de son domicile.

 

L’Association de Lutte contre la Torture en Tunisie (…) a vigoureusement condamné cette agression et exigé qu’une enquête soit ouverte et que les meurtriers de jeune soient poursuivis.

 

(source : El Maoukif n °351 du 17 mars 2006)

 

(Traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version originale, LT)


 

Ligue Tunisienne pour la Défense des Droits de l’Homme

21 rue Baudelaire

El Omrane, 1005

 

INFOS EXPRESS

 

Lors de sa réunion tenue mercredi 15 mars, le comité directeur de la LTDH a (…) et tient à informer l’opinion publique des faits suivants :

–         La LTDH a appris de sources concordantes le décès du jeune Tarek Ayari à Kabbaria à la suite de son arrestation par la police du lieu-il était suspecté d’avoir commis des actes punis par la loi. Sa famille a dit qu’il a été torturé par les agents et qu’il en est mort. Lors de ses funérailles, les familles du quartier, venues en nombre, ont émis de bruyantes protestations.

 

La ligue exprime sa solidarité avec la famille de la victime. Elle exige l’ouverture immédiate d’une enquête et le procès des personnes impliquées dans ce crime.

 

–         La Ligue fait part de sa profonde consternation à la suite du décès du citoyen Ali Ouerghi, père de quatre enfants, originaire de Mateur, qui s’est immolé par le feu le 9 mars 2005. Il était au chômage et avait demandé aux autorités locales de lui trouver un emploi. Il avait commencé, en vain, une grève de la faim en ce sens.

(…)

 

–         La Ligue dénonce l’agression ignominieuse perpétrée contre l’ex prisonnier politique, monsieur Abdeljabbar Maddouri, mardi 11 mars 2006, par un groupe d’agents de la Sûreté. Il lui ont barré la route et lui ont occasionné plusieurs lésions corporelles. Il s’est repris et a contacté le siège de la Ligue pour l’informer de l’agression, ainsi que du vol par ses agresseurs de son portable, d’une somme de 50 dinars et de documents. Suite à une perte de conscience quelques heures après l’agression, il a dû être hospitalisé.

La Ligue condamne ce type d’agression, devenu monnaie courante contre les militants et en fait porter au pouvoir la responsabilité. Elle exige (…) l’arrestation des coupables et leur traduction en justice.

 

– La Ligue est préoccupée par la situation de Madame Afef Bennacer, ex prisonnière d’opinion, qui est en grève de la faim depuis le 10 mars 2006 à son domicile de Gafsa. Elle exige que soit respecté sont droit au travail. Professeur d’arabe, elle a été détachée par le ministère de l’Education et de la Formation en tant qu’institutrice. Elle a été nommée, puis l’administration a refusé qu’elle exerce, tandis que tous ceux qui avaient été détachés en même temps qu’elle prenaient leur poste, et ce, sans que soit avancée la moindre raison. Madame Afef Bennacer estime que cet interdit professionnel repose sur des raisons politiques et sécuritaires. (…)

La Ligue, qui craint pour la vie de Madame Afef Bennacer, exige le respect de son droit au travail et la satisfaction immédiate de ses revendications

 

(Traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)


 

Ligue Tunisienne pour la Défense des Droits de l’Homme

 

Tunis, le 17 mars 2006

 

Communiqué

 

Maître Mohammed Abbou, avocat et prisonnier politique, a commencé une grève de la faim le 11 mars pour protester contre ses conditions de détention à la prison du Kef. Sa situation s’est détériorée en raison des traitements offensants qui lui sont appliqués par les agents pénitentiaires et les personnes qui ont été placées dans sa cellule. Les agents vont jusqu’à venir dans la cellule la nuit sous prétexte de fouiller la pièce tandis que le reste des prisonniers se chargent de proférer des propos grivois et des commentaires offensants sur sa famille.

 

De surcroît, l’administration empêche la famille de Mohammed Abbou de lui rendre visite de façon normale. Sa mère a ainsi été empêchée de lui rendre visite plus de trois minutes. Son épouse voit se dresser devant elle des obstacles divers avant même d’arriver au Kef, puis devant la prison et jusque pendant la visite. Elle a donc décidé de ne plus lui rendre visite et de camper devant la prison.

Maître Abbou a été arrêté le 1er mars 2005 et condamné à une peine d’emprisonnement de trois ans lors d’une audience n’ayant pas respecté les standards d’un procès équitable.

 

La Ligue réaffirme son entière solidarité avec Maître Mohammed Abbou, elle exige sa libération immédiate ainsi que la fin des tracasseries imposées à sa famille.

 

Pour le Comité Directeur

Le Président

Mokhtar Trifi

 

(Traduction ni revue ni corrigée par l’auteur de la version en arabe, LT)


Abdeljabbar Maddouri  

Communiqué à l’opinion publique

 

Je soussigné, Abdeljabbar Maddouri, écrivain, membre de la « Ligue des Ecrivains Libres » et ex prisonnier politique, porte à la connaissance de l’opinion publique les faits suivants :
Alors que je me rendais chez madame Radhia Nasraoui, avocate et présidente de l’Association de Lutte contre la Torture en Tunisie, et monsieur Hamma Hammami, porte parole officiel du PCOT, j’ai été surpris, au niveau du campus universitaire d’El Manar, vers l’Ecole Nationale d’Ingénieurs, par un groupe important d’agents de la police politique dont le nombre avoisinait vingt individus, qui m’ont encerclé et m’ont pris à partie par des propos grossiers. Ils ont exigé que je les informe de ma destination.
Ils m’ont attrapé violemment et emmené dans un lieu loin des regards où ils m’ont abreuvé de coups de poing et de pied sur toutes les parties du corps, notamment la tête, le torse et les jambes. L’un d’eux m’a provoqué sexuellement en attouchant mes fesses de son doigt. Il m’a demandé de répéter « Les policiers sont des hommes, moi je ne suis pas un homme ». Comme j’ai refusé et que j’ai commencé à crier et à appeler à l’aide les passants-les agents de la sûreté universitaire assistaient à l’agression sans réagir-, le dénommé Yousri s’est mis en tête de me couper la respiration avec ma veste qu’il a serrée autour de ma tête, au point que j’ai senti que j’étouffais et que je perdais connaissance.
Ils m’ont laissé à terre, non sans s’être emparés de papiers personnels, de mon portable et d’un somme de cinquante dinars environ. Notons qu’ils ont utilisé mon portable pour prendre à partie mon épouse, une ex prisonnière politique, par des propos grossiers.
Parmi ces agresseurs, certains récidivaient, (la dernière fois remontant au 24 février à la station de métro de la place de Barcelone à l’occasion du rassemblement appelé par le comité du 18 octobre pour les droits et les libertés), notamment les dénommés Yousri et Mourad.
Cette agression m’a causé d’importantes lésions au torse, à la tête et à la jambe droite. J’ai dû être hospitalisé pour recevoir des soins.
Cette agression a été menée en représailles alors que je me rendais au domicile de monsieur Hamma Hammami. Même lorsque j’ai tenté de revenir sur mes pas, ils ne m’ont pas laissé, m’ont entraîné dans un endroit isolé et m’ont agressé. Ils me répétaient alors qu’ils me frappaient que leur objectif était de me discipliner pour que je ne reprenne pas mes activités politiques. Cette agression aurait pu être mortelle, car les coups ont été portés sur des zones sensibles (la tête et le cœur) et le dénommé « Yousri », qui m’a asséné des coups extrêmement violents, m’avait déjà agressé et menacé de meurtre il y a environ quatre ans, quelques semaines après ma sortie de prison en novembre 2002.
Cette agression s’inscrit dans une série d’autres, dont j’ai été victime dans le passé, et dans le cadre de la privation de mes droits : au travail, à un passeport, à un carnet de soins. Je considère que ma vie est en danger. Je fais porter aux autorités tunisiennes l’entière responsabilité de ce qui m’est arrivé, ainsi que d’éventuelles agressions dans le futur.   Tunis, le 14 mars 2006   Signature : Abdeljabbar Maddouri   (Source « El Badil El Ajil, liste du site du PCOT du 16 mars)   (Traduction ni revue ni corrigée par l’auteur de la version en arabe, LT)


PARTI TUNISIEN DU TRAVAIL

50 ans après … la lutte pour la dignité continue

 

En célébrant le 50e anniversaire du 20 mars 1956, le PTT tient à rendre hommage à la mémoire de tous les martyrs de la cause nationale et s’incline devant la sourance et la tragédie qui était celle du peuple tunisien en lutte contre la puissance coloniale française pour sa libération et son indépendance. Il tient à honorer les victimes du 26 janvier 1978 et celles de la révolte du pain de janvier 1984 au même titre que les martyrs de la lutte nationale, et notamment celles des journées semblables du 9 avril 1938 et du Jellaz en 1911.

Cette date, en plus du fait qu’elle marque l’indépendance politique de notre pays, inscrit le début de la mise en place du projet national : l’abolition de la monarchie, l’instauration de la république et la mise en place de l’Etat du peuple tunisien. Le projet de la constitution qui trouve son origine au 19e siècle avec kheireddine et le mouvement réformiste a été celui du mouvement national et de toutes les organisations nationales. Le puissant sentiment de liberté, d’égalité et de justice pour l’accomplissement de chaque tunisien et tunisienne a été l’âme de cette constitution qui doit ainsi garantir l’authentique et réelle démocratie tunisienne. Les projets éducatifs, sociaux, économiques, d’associations… sont en adéquation avec les vraies aspirations du peuple tunisien. Le choix

de l’entreprise nationale n’était pas seulement stratégique pour consolider l’indépendance nationale du pays mais aussi un engagement pour garantir la dignité et l’épanouissement du citoyen tunisien. L’ancrage de la Tunisie dans son environnement maghrébin et arabe est une réalité et une nécessité pour l’avenir de nos peuples.

L’appropriation de l’Etat par le clan anti-populaire, l’emprise du PSD ( rebaptisé RCD) sur le pays, l’oppression et la surveillance de la société sont des violations agrantes de l’esprit et de la lettre de cette constitution. La présidence et l’immunité à vie en sont dautres.

Le Pouvoir et les libéraux, partisans convaincus de l’orientation capitaliste, comme le démontre leur collaboration active à la mise en échec de la politique des années soixante et les eorts qu’ils ont engagés en commun pour mettre le pays sur la voie économique du libéralisme le plus débridé au début des années soixante-dix, ont toujours combattu, malgré les querelles de personnes et les rivalités de clans, avec la même vigueur toutes les forces progressistes dont la vocation est l’instauration d’une politique économique et sociale en faveur des couches populaires.

Cette occasion doit rappeler à ceux qui n’ont pas retenu les leçons de l’histoire récente de la Tunisie au cours de laquelle le peuple tunisien a donné plus d’une fois la preuve de sa maturité politique et la mesure de sa capacité à s’organiser et de mener à bien diérentes batailles pour arracher ses droits et défendre sa liberté.

Si pendant la période coloniale, la lutte nationale exigeait des partis d’être fortement structurés et capables de mener des actions de masses multiformes, l’organisation syndicale nationale, fondée par Farhat Hachad, a toujours su mettre en avant l’engagement politique et la participation aux actions de masses dans la lutte de libération nationale. C’est pourquoi de nos jours, la lutte pour la démocratie authentique et la défense des intérêts de notre pays passent par la consolidation de la seule et grande organisation de masse, l’UGTT, et la constitution d’un front qui regroupe toutes les forces populaires seules capables de diriger le combat politique pour le vrai changement.

Saisissant la porté du combat politique et parce qu’il

• est engagé aux côtés des forces populaires qui se sont élevées au cours de la révolte du pain, de Gafsa et celle du 26 janvier 1978, toutes noyées dans le sang, qui sont aussi des révoltes de la dignité,

• est engagé actuellement dans une lutte contre la répression et les humiliations qui s’abattent sur les masses populaires,

• considère que l’impasse où se trouve aujourd’hui la Tunisie ne laisse aucune perspective d’avenir pour les masses populaires,

• considère que l’ouverture de notre pays au sionisme et à l’armée américaine est une atteinte grave à la sécurité et à l’indépendance de notre pays et à toute la région : la pénétration de ces criminels, ennemis déterminés du peuple arabe, ne se justie que par le soutien qu’ils apportent à ce régime pour se maintenir au pouvoir, le PTT réa‑rme que la délité aux martyrs de la cause nationale engage la poursuite du combat pour la dignité

et l’indépendance.

Le PTT sait que le peuple tunisien, qui a brisé les chaînes du colonialisme et qui refuse les chaînes modernes de la croissance affairiste , de lexclusion, de la répression et de la régression sociale est prêt à consentir tous les sacrices et qu’aucun obstacle n’arrêtera sa marche en avant.

Tunis, le 20 mars 2 006

 


Voici le nouveau numéro d’ELKHADRA , spécial 20 mars.

Bonne lecture. www.elkhadra.org

Sommaire : INTERVIEW DU PROFESSEUR MONCEF MARZOUKI A L’OCCASION DU 20 MARS 2006 http://www.elkhadra.org/interviewduprof.htm ********************************************* PÉTITION http://www.elkhadra.org/petitionpourcompatriote.htm ********************************************* Lizerbou Métou Par BIJU http://www.elkhadra.org/zerboumetou.htm ******************************************** Briser les chaînes Par Bilel http://www.elkhadra.org/briserleschaines.htm ******************************************** Si j’étais dictateur Par Nejib http://www.elkhadra.org/sijetait.htm ********************************************* L’écume de la mémoire Par Ali Noubli http://www.elkhadra.org/ecumedelamemoire.htm *********************************************** LETTRE A MA SŒUR Par Sonia .D http://www.elkhadra.org/lettreamasoeur.htm ************************************************ VIVA LA VIDA Par Nasser Hammami http://www.elkhadra.org/vivavida.htm ********************************************** Et l’indépendance, dans tout ça ? Par Faouzia http://www.elkhadra.org/independanceou.htm ************************************************* LES MAURES ET LES CHRETIENS par Hortensia Galvis Ramirez http://www.elkhadra.org/maureschretien.htm ****************************************** Ce qui reste du colonialisme Par CHOKRI http://www.elkhadra.org/cequireste.htm ****************************************** Au nom de nos vérités Par Sonia.D http://www.elkhadra.org/aunomdevosverite.htm *********************************************** 2 ARTICLES DE HOUSSINE http://www.elkhadra.org/houssine.htm

 

 

Tunisie: le «dragon» de l’Afrique du Nord

 

Associated Press, le 18 mars 2006 à 20h25

TUNIS (AP) — Pour avoir très tôt fait le choix d’investir dans son potentiel humain, à défaut de disposer de ressources naturelles conséquentes, la Tunisie est parvenue à ériger une économie de »dragon» et à se hisser au rang de pays émergent en cinquante ans d’indépendance.

 

Depuis plus de 15 ans, elle se prévaut d’un taux de croissance annuel de 5% en moyenne, de l’un des meilleurs revenus per capita dans la région avec 4.000 dinars (environ 2.500 euros) par tête d’habitant et un taux d’inflation contenu à 2,5%.

La généralisation de l’enseignement qui a favorisé la formation des compétences et l’émancipation de la femme impliquée de manière agissante dans la vie active ont constitué assurément une plate-forme favorable à un tel essor.

Les fondements de l’Etat naissant prenaient progressivement forme avec la mise en place des infrastructures de base, accompagnée par la structuration et la diversification de l’économie.

Le pays s’attelait aussitôt à moderniser l’agriculture avec la construction d’un total de 14 grands barrages et de systèmes hydrauliques qui ont porté les superficies irriguées de 50.000 hectares en 1956 à 385.000 hectares actuellement.

Parallèlement, de nouveaux secteurs d’activités voyaient le jour dont celui des services à forte valeur ajoutée qui accapare désormais plus de 56% du PIB.

A la faveur d’une adéquation entre l’économique et le social, les conditions de vie de la population ont connu une amélioration constante.

Selon les chiffres officiels, la classe moyenne a atteint 80% d’une population de 10 millions d’habitants. La même proportion est propriétaire de son logement grâce à des mécanismes de crédit souples.

Dans les zones rurales, les taux d’alimentation en eau potable et d’électrification s’élèvent respectivement à 92,6% et 98,5%.

Autre performance remarquable: le taux de pauvreté a été ramené à 4% en 2005, contre 50% à l’aube de l’indépendance.

Ces atouts permettaient à l’Etat de se désengager progressivement des secteurs non stratégiques en faveur du secteur privé et d’enclencher par là-même l’amarrage de l’économie tunisienne dans l’espace mondial.

En 1995, la Tunisie devenait le premier pays sud-méditerranéen à signer un accord d’association avec l’Union européenne prévoyant l’établissement à terme d’une zone de libre-échange entre les deux parties.

Principal pourvoyeur de devises avec des recettes d’environ 1,6 milliard d’euros et un record de plus de 6 millions de visiteurs en 2005, le tourisme joue, quant à lui, un rôle clé dans l’économie. Sa capacité actuelle est de 226.000 lits.

Ajoutées à une maîtrise de la dette extérieure contenue à 49,2% du PIB et aux notations positives des agences internationales de rating, ces performances ont conduit le Forum économique de Davos à classer la Tunisie au 40e rang mondial, dans son rapport sur la compétitivité.

 

Associated Press


 

Tunisie: l’emploi, grand défi des années à venir

 

Associated Press, le 18 mars 2006 à 20h33

TUNIS (AP) — Résultat de la politique d’enseignement généralisé adoptée à l’aube de l’indépendance du pays en 1956, le problème du chômage représente assurément l’un des défis majeurs que la Tunisie est appelée à relever dans les années à venir.

 

L’acuité du problème a conduit le gouvernement à considérer l’emploi comme «la priorité des priorités» dans ses plans de développement et à accélérer le rythme des créations d’emploi, en adoptant une politique incitative à cet effet.

 

De 700.000 postes créés durant la décennie 1956-1986, le chiffre était porté à 1.160.000 créations de 1987 à 2006.

 

Le taux de chômage, qui a baissé pour la première fois au-dessous de la barre des 14% à 13,9% en 2005, demeure une préoccupation nationale, d’autant qu’il touche un grand nombre de diplômés de l’enseignement supérieur.

 

L’université tunisienne amène sur le marché de l’emploi un nombre croissant de promus dans les diverses branches de spécialisation. De 21.400 en 1999/2000, ce nombre est passé à près de 50.000 en 2004/2005 et tend à doubler en 2013, selon les prévisions.

 

Des mécanismes ont été mis en place pour encourager et aider les jeunes à monter des projets, comme la Banque tunisienne de solidarité (BTS), le Fonds national de l’emploi (FNE) et un système de micro-crédits qui fournissent des prêts à des conditions concessionnelles aux jeunes promoteurs.

Parallèlement, les établissements universitaires ont introduit de nouvelles orientations tendant à adapter l’enseignement aux besoins du marché de l’emploi, d’une part, et à inciter les diplômés à lancer des projets individuels et à s’installer à leur propre compte.

 

»Il n’y a pas d’autre alternative, les capacités de l’administration ainsi que celles des entreprises étant inéluctablement limitées pour pouvoir absorber un tel flux de demandeurs d’emploi», réplique le ministre de l’Enseignement supérieur, Lazhar Bououni.

 

Son collègue du développement et de la coopération internationale, Nouri Jouini, voit, quant à lui, le salut dans le renforcement de la compétitivité de l’économie nationale, seule à même de créer un plus grand nombre d’opportunités d’emploi.

 

La coopération technique notamment avec les pays arabes du Golfe et les pays d’Afrique subsaharienne offre par ailleurs des débouchés à des milliers de compétences tunisiennes.

Ces efforts semblent toutefois insuffisants pour répondre à la masse des demandeurs d’emploi, un problème que le gouvernement veut relativiser, en faisant observer qu’il se pose à l’échelle mondiale, même dans des pays développés.

 

Aussi, une partie des sans emplois se tournent vers l’immigration en Europe. D’aucuns empruntent les canaux réguliers grâce aux accords conclus avec des partenaires européens, comme l’Italie qui accueille annuellement 3.000 Tunisiens.

 

D’autres sont tentés par l’émigration clandestine, parfois au péril de leur vie. En 2005, les autorités ont interpellé environ 1.500 candidats à l’aventure, selon le sociologue Mehdi Mabrouk.

 

Cet expert international en matière de migration note cependant que le nombre des clandestins enregistre une baisse sensible après avoir atteint un point culminant en 2002 à 3.739 interpellés.

 

Il attribue cette régression à deux facteurs essentiels: le »verrouillage» du littoral tunisien grâce à l’acquisition d’unités de surveillance côtière d’Italie et d’Allemagne et l’adoption en 2004 d’une loi «dissuasive» qui a instauré des sanctions «très dures» contre les auteurs de telles tentatives, avec de lourdes peines d’emprisonnement pour les passeurs.

 

Associated Press

 


Tunisie: la démocratie, seul remède contre l’extrémisme, selon un ancien ministre

 

Associated Press, le 18 mars 2006 à 20h47

TUNIS (AP) — Apparue dans les années 80 sur la scène politique tunisienne, la question islamiste revient peu à peu sur le tapis surtout au niveau des formations de l’opposition où des alliances que d’aucuns qualifient de «contre-nature» s’opèrent entre ce mouvement dissous et l’extrême gauche.

 

Le pouvoir, quant à lui, considère que ce dossier est «classé» depuis plus de 15 ans, lorsque le mouvement islamiste Ennahdha a été interdit et qu’un grand nombre de ses dirigeants et militants ont été condamnés à de lourdes peines sous l’accusation entre autres de «tentative de changer le régime par la force».

 

Pour les autorités, il n’est pas question désormais qu’un parti s’arroge le droit de parler de la religion dans un pays où l’islam est la religion d’Etat.

 

Toujours est-il que des voix s’élèvent pour prôner un débat public sur cette question, voire un dialogue avec les islamistes.

 

Ancien ministre à l’époque de Bourguiba, Béji Caïd Essebsi y est d’autant plus favorable qu’il estime que «cette menace islamiste a été correctement contenue et stoppée définitivement par les dirigeants actuels lorsque les choses étaient devenues un danger dans les années 90».

 

»Il est certain que le rempart réel contre tous les extrémistes d’où qu’ils viennent, pas uniquement les islamistes, c’est un pays démocratique, solidaire, qui assume ses responsabilités», soutient-il.

 

Caïd Essebsi qui a été successivement ministre de l’Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères, et président de l’assemblée nationale, a tenu à saluer la mémoire de ceux qui se sont sacrifiés pour l’indépendance de la Tunisie et n’ont pas eu la chance de vivre ce couronnement dont le 50e anniversaire sera célébré lundi.

 

»Le seul remède contre ces extrémistes, c’est la démocratie», a-t-il souligné lors d’un entretien avec l’Associated Press, en faisant valoir que c’est «l’absence de liberté et l’absence de démocratie qui favorise l’extrémisme».

 

Tout comme l’opposant Mohamed Charfi, il se dit favorable à un débat public sur la question. «Il faut accepter le dialogue, surtout avec ceux qui ne sont pas d’accord avec nous, dans la mesure où tout le monde accepte les règles du jeu, sinon cela devient un monologue», suggère-t-il.

 

Pour M. Charfi qui a été ministre de l’Education sous l’actuel président Zine El Abidine Ben Ali, le débat préconisé permettrait de «faire évoluer les mentalités, y compris en coinçant les islamistes, pour que les Tunisiens s’orientent vers un islamiste à l’Erdogan, non pas à la Ben Laden».

 

Selon lui, «une telle évolution ne peut se faire que par le débat, pas à travers les prisons», en allusion aux quelque 300 islamistes encore en détention dont il réclame la libération «pour pouvoir les combattre par la force des arguments».

 

Les autorités soutiennent que ces détenus ont été condamnés pour leur implication dans des «activités terroristes».

 

Associated Press

 


Tunisie – diplomatie: la voix de la modération

 

Associated Press, le 18 mars 2006 à 20h54

TUNIS (AP) — Depuis son indépendance dont le 50e anniversaire sera célébré lundi, la Tunisie a eu une diplomatie active qu’elle s’est employée à mettre au service des causes de la libération, de la paix et de la sécurité, tant au niveau de sa région qu’à l’échelle internationale.

 

Encore fraîchement indépendante, elle n’hésitait pas à manifester sa solidarité avec l’Algérie dans sa lutte de libération, en donnant notamment refuge aux dirigeants et aux combattants de la résistance de son voisin maghrébin. Ce soutien lui avait valu d’être bombardée en 1958 par l’aviation française. Le raid de la localité de Sakiet Sidi Youssef, à la frontière algérienne, avait fait plusieurs morts tunisiens et algériens.

 

En 1961, l’ancien ministre des Affaires étrangères Mongi Slim était élu président de l’assemblée générale de l’Organisations des Nations unies. Mais c’est dans le conflit israélo-arabe que son rôle a été actif dans le sens de la modération.

 

En tournée au Moyen-Orient, le président Habib Bourguiba marquait l’histoire. Dans un discours qui fera date prononcé à Jéricho en mars 1965, il appelait les pays arabes à reconnaître Israël et à accepter le plan de partage onusien de 1947 qui donnait aux Palestiniens la moitié du territoire de l’Etat hébreu.

 

Cette prise de position, accueillie par des jets de tomates, a suscité un tollé dans le monde arabe. L’ambassade de Tunisie au Caire était incendiée et le chef de la mission diplomatique a failli être lynché par des manifestants en colère. Deux mois après, la Tunisie se retirait de la Ligue arabe.

Plus tard, les arabes se mordront les doigts de ne pas avoir suivi les conseils de celui qu’on qualifie depuis de «visionnaire».

 

Cette approche modératrice que d’aucuns considèrent comme étant le fruit du brassage de plusieurs civilisations qui se sont succédé durant plus de 3.000 ans d’histoire en terre tunisienne, continuait de marquer la politique tunisienne depuis l’arrivée au pouvoir en 1987 de son successeur, l’actuel président Zine El Abidine Ben Ali.

 

A la faveur de la présence de la direction palestinienne en Tunisie où elle a trouvé refuge après avoir fui le siège de Beyrouth par l’armée israélienne, le dialogue américano-palestinien était amorcé pour la première fois en décembre 1989.

 

Ce dialogue devait préparer le terrain aux accords de paix israélo-palestiniens d’Oslo en 1993.

La même année, Mouammar Kadhafi renonçait à son programme nucléaire et chimique. A Washington, le secrétaire d’Etat à l’époque remerciait la Tunisie pour avoir contribué à la prise de cette décision en amenant le dirigeant libyen à modérer ses positions.

 

Avec la montée du terrorisme, la Tunisie exploitait ce capital de confiance et de considération dont jouit sa diplomatie, pour oeuvrer en faveur du dialogue des cultures et des civilisations, en prenant plusieurs initiatives au service de cette cause.

 

En visite à Tunis, le président français Jacques Chirac jugeait que la Tunisie était habilitée à jouer un rôle dans ce sens.

 

En 1995, était adoptée la «Charte de Carthage pour la tolérance», outre la création d’une chaire à cet effet à l’université de Tunisie, appelée «chaire Ben Ali pour le dialogue des civilisations et des religions» et l’organisation de conférences internationales regroupant les représentants des trois religions monothéistes.

 

De leur côté, la communauté juive de Tunisie et celle venue d’Europe et d’Israël célébraient chaque année le pèlerinage de la Ghriba, à la synagogue de Djerba, dans le sud tunisien.

 

Associated Press


Tunisie – cinquantenaire de l’indépendance:

Une réussite économico-sociale, une démocratie lente

 

Associated Press, le 18 mars 2006 à 20h19

TUNIS (AP) — La Tunisie célèbre lundi le 50e anniversaire de son indépendance en affichant une réussite remarquable aux plans économique et social, reconnue à l’échelle internationale, mais avec un bilan plus mitigé en matière de libertés et de démocratie.

 

Le mérite de ce «petit» pays d’Afrique du Nord souvent qualifié de »dragon», prend d’autant plus de dimension qu’il dispose de ressources naturelles modestes.

 

»Des progrès considérables ont été faits dans beaucoup de domaines», reconnaît l’opposant et ancien ministre Mohamed Charfi qui trouve qu’»il n’y a aucune comparaison possible entre la situation du peuple tunisien en 1956 et celle qui est la sienne aujourd’hui».

 

A titre d’exemple, il note qu’»à l’époque, la Tunisie produisait de quoi mal et insuffisamment nourrir 3,5 millions d’individus, alors qu’aujourd’hui elle nourrit beaucoup mieux 10 millions de personnes».

La clé de cette réussite, il la situe dans les «bonnes décisions» prises dès le départ, en investissant dans les ressources humaines, c’est-à-dire, «en allant vers l’essentiel».

 

De fait, avant même l’adoption de la Constitution de l’Etat naissant, le père de l’indépendance tunisienne, Habib Bourguiba, faisait promulguer le Code du Statut personnel (CSP), une mesure »salutaire» et «révolutionnaire» à l’époque qui abolissait la polygamie encore en vigueur dans le monde arabo-musulman.

 

Les dispositions de ce texte accordaient aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes et faisaient en sorte que la société allait déjà pouvoir «respirer par ses deux poumons», selon l’_expression de l’ancien ministre Caïd Essebsi.

 

Parallèlement, l’enseignement était généralisé et des écoles étaient construites jusque dans les coins les plus reculés du pays, tandis que des centres de santé de base se multipliaient dans toutes les régions.

 

L’instruction aidant, la politique de planning familial devait permettre de maîtriser la croissance démographique, condition sine qua non du succès pour un pays démuni de moyens.

Entre-temps, les budgets de la défense et de l’Intérieur étaient demeurés «minuscules».

 

Aussi, son successeur, Zine El Abidine Ben Ali qui a accédé au pouvoir en 1987, a-t-il bâti sur du solide. Tâche ardue, il parvenait tout d’abord à redresser une situation rendue précaire à la fin du «règne» de Bourguiba, déposé pour «sénilité» (84 ans), avant d’engager le pays sur la voie des réformes qui devaient le hisser au rang de pays émergent.

 

Avec une croissance moyenne de 5% au cours des 15 dernières années, l’un des meilleurs revenus par tête d’habitant dans la région à 4.000 dinars en 2006 (près de 2500 euros), un taux de pauvreté ramené à 4% contre 50% en 1956, une espérance de vie de 74 ans, un taux d’analphabétisation réduit à 20,9% contre 84,7% à l’indépendance et une scolarisation maximale (plus de 99%), la Tunisie est citée comme «modèle de réussite» par la banque mondiale, le FMI et ses partenaires occidentaux.

 

Cependant, l’évolution politique n’est pas allée de pair. L’opposant Charfi relayé par Caïd Essebsi, fait valoir que du temps de Bourguiba déjà, la Tunisie «a raté l’occasion où la démocratisation pouvait se faire dans la douceur, sans aucun risque, d’autant qu’il n’y avait pas de parti intégriste qui faisait peur».

 

A son arrivée, Ben Ali amorçait pourtant un processus qui semblait devoir faire rattraper le temps perdu.

 

Il supprimait la présidence à vie et la succession automatique, ainsi que la Cour de sûreté de l’Etat. L’opposition faisait son entrée pour la première fois dans le Parlement et des candidats autres que celui du parti au pouvoir se présentait au scrutin présidentiel.

 

Le régime du président Ben Ali était cependant la cible de critiques de l’opposition radicale et d’ONG locales et internationales qui dénonçaient régulièrement «les atteintes aux libertés et aux droits de l’Homme» et les mesures d’ouverture prises «au compte-gouttes».

 

Tunis n’en rejetait pas moins ces accusations, en affirmant que l’option démocratique était «un choix irréversible».

 

Dans une conjoncture marquée par l’obsession en matière de sécurité, le pouvoir refusait toute «improvisation» et tout «saut dans l’inconnu» qui ont été néfastes dans d’autres contrées, en demeurant attaché à sa «démarche progressive», relativement accélérée, il est vrai, ces derniers temps par de nouvelles mesures en faveur des médias et l’élargissement d’un grand nombre de détenus dont des islamistes.

 

»Je reconnais que le rythme est un peu lent, mais il faut laisser le temps au temps», admet l’ancien ministre de Bourguiba Caïd Essebsi.

 

Pour lui, «l’essentiel est de ne pas adopter une démarche statique, mais dynamique, ce qui est le cas du processus actuel».

 

Quant à M. Charfi, il est d’avis que «les Tunisiens ont aujourd’hui les moyens de supporter les difficultés de la démocratisation et sont capables d’être à la hauteur de la tâche».

 

Associated Press

 


« Il Corriere di Tunisi » fête son 50e anniversaire

 

Tanti auguri ! 

I l Corriere di Tunisi est le seul journal en langue italienne qui a pu résister aux aléas du temps dans notre pays. Là où certains  titres tunisiens ont sombré, ce tabloïd bimensuel de langue italienne est  la seule publication en langue italienne sur l’ensemble de la Méditerranée,  en dehors de l’Italie suit normalement sa périodicité.

 

Ce journal, fondé par Giuseppe et son fils Elia Finzi, n’a pu  obtenir l’autorisation qu’en 1956, car les autorités coloniales françaises refusaient depuis les années quarante, la publication d’un organe de presse  qui pourrait être le porte-voix de la communauté italienne assez nombreuse en Tunisie.

 

Obtenue donc de haute lutte, l’autorisation de publier ce tabloïd est venue en même temps que l’Indépendance.  «La Tunisie est indépendante» titrait en manchette le  journal pour sa première édition.

 

Depuis, Il  Corriere di Tunisi a fait du chemin sans interruption, jusqu’à ce jour où ses responsables ont décidé de lui donner une peau neuve. Le tabloïd, dépositaire de l’histoire  de la communauté italienne en Tunisie, passe au format magazine, riche en couleurs et abondant de matières.

 

Dans ce numéro présenté hier par Mme Silvia Finzi, en présence du fondateur, des journalistes et des responsables, et qui marque un tournant dans la vie du journal, un dossier a été consacré à la célébration du 50e anniversaire de l’Indépendance. Une façon de témoigner, de  l’attachement de ce tabloïd à la souveraineté de notre pays comme il l’a déjà montré à sa naissance et tout au long de parcours.

 

Pour célébrer l’événement et annoncer le lancement de ce média nouveau look, une rencontre sur le thème «Les Siciliens en Tunisie dans les pages du Corriere di Tunisi animée par Mme Silvia Finzi, a été une occasion pour revisiter l’histoire des Italiens de Tunisie, notamment de ceux issus de la communauté sicilienne.

 

Cette rencontre organisée à Casa Sicilia, en marge  de la deuxième édition de la manifestation culturelle et gastronomique sicilienne «Saveurs & savoirs du Sud, rendez-vous avec la Sicile», a été suivie d’une dégustation de recettes typiques tirées de l’œuvre en cours de publication «L’alimentation des Italiens en Tunisie».

 

Chokri BEN NESSIR

 

(Source : « La Presse » du 19 mars 2006)

 

Remarque de TUNISNEWS :

Le site web du « Corriere di Tunisi » est le suivant: http://www.ilcorriereditunisi.it/


 

M. ABDEZIZ BEN DHIA A MIS LES POINTS SOUS LES  » i « 

Houcine Ghali, Genève

 

L’hebdomadaire  » Réalités  » N° 1055 du 16 mars 2006 nous a gratifiés d’un article signé S.R. dans lequel Abdelaziz Ben Dhia a dressé un tableau élogieux sur la politique menée par le pouvoir de Ben Ali en Tunisie.

 

Homme du sérail en tant que ministre d’Etat, conseiller de Ben Ali, porte-parole de la présidence de la République et membre désigné du bureau politique du parti RCD qui monopolise le pouvoir, Abdelaziz Ben Dhia ne peut, en portant toutes ces illustres casquettes, faire autrement qu ‘encenser un régime auquel il appartient et duquel il tire de larges profits.

 

L’intervention d’Abdelaziz Ben Dhia s’est faite le samedi 11 mars dernier dans un cadre « maison » puisque ce qu’on a osé nommé « tribune de dialogue sur le travail associatif » a été organisée par le gouvernorat de Tunis où la présence de toute opposition était exclue.

 

 Flatter le pouvoir, défendre sa politique, nier la réalité du pays, jeter l’opprobre sur l’opposition, jouer le conciliateur de circonstances, tous ces rôles ont été dévolus à Abdelaziz Ben Dhia qu’il exécute à merveille. C’est ainsi qu’il s’est occupé sans relâche de tous les problèmes qui surgissent entre le pouvoir destourien et les organisations de la société civile. C’est lui qui a pris en main le dossier de la Ligue tunisienne des droits de l’homme ( LTDH ) dans son conflit avec le pouvoir et la justice, qui a tout fait pour inciter les responsable de l’UGTT à se présenter à l’Assemblée des conseillers, qui a intervenu pour installer la direction du parti de l’UDU après l’inculpation d’Abderrahmane Tlili, qui a solutionné le conflit qui a opposé le syndicat de l’enseignement supérieur aux autorités du pays,etc…

 

Analysons maintenant les arguments qu’Abdelaziz Ben Dhia a utilisés pour fustiger l’opposition radicale dans sa lutte pour l’instauration de la démocratie, le règne de la liberté et la prospérité de l’ensemble du peuple tunisien.

 

Il évoque le patriotisme, ce vieux slogan qui n’est plus mobilisateur idéologique depuis longtemps parce qu’il a fait son temps, en reprochant aux militants tunisiens de gauche de faire appel à l’étranger pour « salir leur pays ». Comment peut-on être ministre, diplômé en droit des universités françaises et se trouver être obligé à faire appel à une argumentation aussi basse pour légitimer un pouvopir aussi répressif et autoritaire que celui qui gère aujourd’hui la Tunisie et dont est issu Abdelaziz Ben Dhia ?

 

Ainsi donc, tous ceux qui critiquent et s’opposent au pouvoir destourien ne sont plus patriotes. Comment expliquer à Abdelaziz Ben Dhia que le long de l’histoire de l’humanité, toute opposition politique a cherché à trouver une solidarité et un appui auprès de pays, de groupes, d’institutions étrangères pour arriver à ses fins, à savoir la prise du pouvoir, l’application de son programme et le partage de ses idées?

 

Et en quoi l’opposition radicale, qu’Abdelaziz Ben Dhia appelle par mépris « ces groupes » et ces « types de gens », sont moins compatriotes que lui, même si elle fait appel à la solidarité de l’étranger pour faire de la Tunisie un pays libre, où règne les droits de l’homme et d’où seront bannis la corruption, le népotisme, l’oppression et la répression?

 

Est-ce que les gens au pouvoir sont vraiment patriotes lorsqu’ils invitent un ministre sioniste dans leur pays, collaborent étroitement avec les Etats Unis et la France dans tous les domaines sécuritaires et sensibles pour avoir leurs faveurs et continuer à régner impunément?

 

Evoquant « l’affaire de la Ligue des droits de l’homme », Abdelaziz Ben Dhia a invoqué la position neutre du pouvoir et les jugements prononcés en défaveur de cette organisation. Alors là, la mauvaise foi est à son comble parce que tout le monde sait que le pouvoir tunisien n’a jamais été neutre depuis l’indépendance du pays en 1956 jusqu’à présent. Et Ben Dhia le sait parfaitement. De la même manière, la justice n’est pas libre en Tunisie pour que ses jugements soient pris au sérieux car les pouvoirs exécutif, législatif et judicaire se trouvent totalement aux mains du président de la République et tous les procès politiques qui ont lieu durant ces 20 dernières années le prouvent aisément.

 

Concernant les prisonniers politiques, Abdelaziz Ben Dhia a bien sûr nié leur existence en Tunisie. Ainsi donc, le monde entier, tous les journaux et mas médias de l’univers, toutes les organisations internationales, les services spécialisés de l’ONU mentent lorsqu’ils parlent de détenus politiques dans le pays. Les militants d’Annahdha n’ont quand même pas tous été « inculpés de crimes commis contre des individus ».

 

Sur ce chapitre, Ben Dhia a ajouté : « Le président Ben Ali n’autorise personne à être en dehors de la loi qui doit rester au dessus de tous ». Mais de quelle loi parle-t-il? Les lois ne sont valables que lorsqu’elles émanent d’un pouvoir qui a été élu démocratiquement par son peuple. Ce n’est pas le cas en Tunisie et toute l’histoire des élections tronquées le prouvent. En invoquant la prépondérance de Ben Ali ( qui n’autorise personne ) dans tout ce qui se fait dans le pays, Abdelaziz Ben Dhia a inconsciemment avoué que le pouvoir en Tunisie est bel et bien autoritaire, dictatorial et monolithique.

 

Enfin, Ben Dhia a évoqué la situation de la presse en ventant la liberté d’__expression et en affirmant que la Tunisie publie 253 titres. Faut-il lui rappeler que le président de la République lui-même a dit que lorsqu’il lit les journaux chaque jour, il ne voit aucune différence entre eux tellement ils écrivent la même chose? Et puis, le nombre de publications ne veut pas dire liberté d’__expression puisque les 99% d’entre eux sont sous la coupe du pouvoir. La liberté de la presse est totalement absente en Tunisie et tous les observateurs étrangers l’ont démontrée. Les journaux dits indépendants, comme Ecchourouk, Le Temps, Réalités,etc.. n’ont d’indépendant que le nom et tous les écrits doivent passer devant le ministère de l’intérieur avant d’être imprimés. La publicité n’est donnée qu’aux publications sous les ordres du pouvoir mais jamais à celles de l’opposition, comme Ettajdid et le PDP par exemple.

 

Et la corruption M. Ben Dhia, est-ce qu’elle fait ravage en Tunisie ou pas? Et tous ces membres des clans au pouvoir, qui ne possédaient rien avant le 7 novembre 1987 mais brassent maintenant des milliards, possèdent des hôtels 5 étoiles, des sociétés de tous genres, comment se sont-ils tout d’un coup enrichis?

 

Et puis êtes-vous allé, M. Ben Dhia, voir comment vivent les pauvres gens de « manatek edhoul » pour constater la grandeur de leur misère tandis que des commis du pouvoir et des arrivistes de tout poil viennent se pavaner à Genève, passent des vacances à 10.000 dinars la semaine, achètent des montres à 50.000 dinars la pièces et investissent leur fortune dans l’immobilier et les restaurants?

 

Houcine Ghali, Genève

18 Mars 2006


 

OPINION

Ils ont eux aussi marché sur la tête

Par Albert Bellaïche pour Guysen Israël News

 

Il s’est passé ces jours-ci à la Manouba, petite banlieue nord de Tunis, un événement qui mérite d’être relevé dans la mesure où il a tordu le coup à la symbolique qui fait du Président tunisien Zine El Abbidine Ben Ali une des figures marquantes du monde arabe face au conflit israélo-palestinien.

 

 Nul n’ignore, en effet, sa position d’ouverture non seulement au regard de tous les Juifs d’origine tunisienne, dont l’accueil dans leur ancienne patrie a toujours été plus que cordial ou amical mais tout simplement fraternel, mais aussi à l’égard de la guerre du Moyen Orient.

 

Les nombreuses visites du Grand Rabbin de France Joseph Haïm Sitruk, l’arrivée par avion direct en provenance de Tel Aviv des touristes ou des pèlerins israéliens, l’invitation faite par le Président Ben Ali à Ariel Sharon à l’occasion d’une conférence internationale, sont autant de signes qui indiquent l’orientation franchement réaliste de la politique tunisienne dans ce conflit.

 

Le peuple tunisien de son côté, n’a jamais manifesté à l’égard des Juifs d’origine tunisienne la moindre hostilité ou antipathie, restant fidèle à la ligne forte du combattant suprême, Habib Bourguiba et bien sûr de son successeur, de les considérer comme des tunisiens à part entière, sans aucune discrimination, de quelque sorte que ce soit.

 

L’affaire, car s’en est une, se résume en deux mots simples : Cérémonie symbolique !

En effet, à l’occasion de la donation à l’Université de la Manouba de la bibliothèque de l’historien et sociologue juif tunisien Paul Sebag, décédé en 2004 et auteur de deux ouvrages, « Tunis, histoire d’une ville » et « Tunis au XVII siècle », des manifestations antisémites et anti-israéliennes se sont produites qui apportent la preuve de la forte radicalisation existant aujourd’hui dans le monde arabo-musulman.

 

Ce regrettable incident, qui a contrarié l’esprit dans lequel cet événement devait s’inscrire, s’est rapidement transformé en cris de haine tels que « A bas Israël », « Vive la Palestine », « Les Juifs à la mer » ou « Nous ne voulons pas de la bibliothèque d’un juif. »

 

Officiellement la police n’ayant pu intervenir car n’étant pas admise sur le campus, les autorités tunisiennes qui ont fait de leur mieux pour empêcher les choses de dégénérer, se sont confondues en excuses.

 

La fille de Paul Sebag et Claude Nataf président de la Société d’histoire des Juifs tunisiens venus spécialement de France, ainsi que l’attaché culturel français et des professeurs tunisiens en renom, assistèrent impuissants à cette regrettable péripétie.

 

« Ils ont eux aussi marché sur la tête » devait déclarer une des personnalités présentes consternées par cet incident, parce que parfaitement inattendu !

 

Un peu plus de 2000 juifs vivent encore en Tunisie, la plupart d’entre eux à Djerba, une île fort touristique du sud tunisien où ils n’ont jamais connu le moindre problème avec leurs concitoyens musulmans.

 

De plus, Djerba la douce, abrite une des synagogues les plus anciennes et les plus emblématiques du judaïsme local, qui reçoit tous les ans des milliers de pèlerins venant du monde entier pour célébrer le pèlerinage le plus charismatique des Juifs orientaux.

 

Ne dit-on pas aussi que l’histoire, très compliquée voire controversée de cette synagogue, participe par son mystère, à son inexplicable engouement.

 

Le gouvernement tunisien qui a toujours essayé de tenir à l’écart son pays et son peuple de tout penchant islamique dur, va sans doute avoir du pain sur la planche et prendre les mesures qu’il jugera utile pour enrayer une possible montée de ce courant endémique.

 

(Source : Opinion publiée sur le portail « Guysen, Israel News », le 18 mars 2006 à 23h10)

URL: http://www.guysen.com/articles.php?sid=4315


Numéro special d’ “ARABIES” http://www.arabies.com/

à l’occasion du cinquantenaire de l’Indépendance du Maroc et de la Tunisie.

 

 

 

SOMMAIRE

 

• Maroc histoire

mémoire collective

Grâce à une implication de toute sa société, notamment sa jeunesse, le Maroc se souvient cinquante ans après des heures glorieuses et tragiques qui l’ont mené vers l’indépendance.

Par Samir SOBH

 

• habib bourguiba

LE LIBÉATEUR

 

Bourguiba, le combattant suprême, a libéré la Tunisie, modernisé le système éducatif et oeuvré à l’émancipation des femmes.

Par Philippe BERNARD

 

• ZINE EL-ABIDINE BEN ALI

UN LIEN ENTRE DEUX MONDES

 

Deuxième président de la Tunisie depuis l’indépendance, Zine el-Abidine ben Ali en tient les rênes depuis 1987. Il a créé un modèle économique viable et a préservé la stabilité.

Par Guillaume COCONNIER

 

• mohamed v

L’HABILETÉ POLITIQUE

 

Mohamed V a conduit son pays à l’indépendance et a fait de la monarchie de centre du  pouvoir au Maroc.

Par Guilain DENOEUX

 

• HASSAN II

UN LOURD PASSIF

 

Son bilan en politique étrangère n’aura pas empêché le règne d’Hassan II d’être une période d’atteinte aux libertés.

Par Philippe CENDRIER

 

• MOHAMED VI

LA LUEUR D’ESPOIR

 

Mohamed VI a montré des signes d’ouverture probants dans nombre de domaines même si le chemin est encore long.

 

• maroc tunisie focus

À L’ÉPREUVE DU TEMPS

 

Deux indépendances, mais pas un même destin. Le Maroc et la Tunisie n’ont pas connu  des boulversements et des avancées similaires, chacun ayant avancé avec ses spécificités. L’évolution de deux nations passée au peigne fin, de 1956 à nos jours

Par Farid AL-ITTIHAD


 

 

Tunisie

Un élan patriotique

 

L’accès de la Tunisie à l’indépendance fut le fruit d’une longue bataille politique externe et interne. Retour sur une période sombre, mais porteuse d’espoir.

 

Par Moncef MAHROUG

 

La plupart des jeunes Tunisiens l’associent probablement à une explosion de joie et à des festivités grandioses marquant la fin du protectorat instauré par le Traité du Bardo de 1881, mais les plus vieux ont un souvenir plus contrasté du 20 mars 1956, « l’Independance Day » tunisien.

 

Certes, la signature du protocole d’accord par lequel la France reconnaissait solennellement l’indépendance de la Tunisie – deux semaines après celle du Maroc – est loin d’être passée inaperçue dans le pays. Cependant, « ce n’était qu’une simple déclaration sans effet immédiat, puisque l’armée et les colons français étaient encore sur le sol national, il s’agissait d’un texte auquel il allait falloir donner progressivement un contenu », relativise Me Béji Caïd Essebsi. De plus, le cœur n’était pas tellement à la fête, car l’accession à l’indépendance se faisait dans une ambiance de quasi-guerre civile.

 

Alors jeune avocat, Me Caïd Essebsi se souvient du 20 mars 1956. Il était à Jendouba (ex-Souk el Arba), dans le Nord-Ouest, pour présider un meeting électoral – en vue de l’élection de l’Assemblée constituante fixée pour le 25 mars – dans le fief de son patron, Me Fethi Zouheir.

 

Un brin provocateur, l’orateur surprit en s’adressant à l’assistance par un « indépendants, indépendantes », alors que les gens avaient l’habitude qu’on les appelle « Destouriens, Destouriennes », en référence au Néo-Destour. Un moment ébahis, les participants répondirent par une ovation lorsque le jeune Caïd Essebsi leur rappela que ce 20 mars 1956 marquait leur accession et celle de leur pays à l’indépendance.

 

Loin d’avoir été un long fleuve tranquille, la reconquête de l’indépendance totale dura en fait près d’une décennie. Tout commence le 31 juillet 1954 lorsque, à la surprise générale, le président du Conseil, Pierre Mendès France, se rend en Tunisie. Il y annonce que « l’autonomie interne de l’État tunisien est reconnue et proclamée sans arrière-pensée par le gouvernement français qui entend l’affirmer dans son principe et lui permettre dans l’action la consécration du succès ».

 

Unis au début de l’année 1954 dans leur rejet du plan de réforme – prévoyant notamment l’élection de deux assemblées, l’une au suffrage direct pour les Français, et l’autre indirect pour les Tunisiens – que proposait Pierre Voizard, nouveau résident général qui succédait à de Hautecloque, Bourguiba et Ben Youssef divergent lorsque, face à l’aggravation de la situation en Tunisie où les opérations des fellaghas se font de plus en plus spectaculaires, la France finit par se résoudre à accorder l’autonomie interne à son protectorat.

 

Les conventions tuniso-françaises sur l’autonomie interne sont signées le 29 mai 1955. Le bras de fer entre Bourguiba et Ben Youssef – qui, au-delà de l’enjeu des négociations avec la France, oppose deux ambitions inconciliables – se poursuit après leurs retours respectifs en Tunisie, le 1er juin et le 13 septembre 1955. La rupture est consommée le 7 octobre, lorsque Ben Youssef s’en prend violemment à son adversaire et réclame l’accession immédiate du pays à l’indépendance, entraînant dès le lendemain son exclusion du parti. Le malaise est alors très grand, notamment chez les militants du Néo-Destour. « L’affrontement fratricide nous a beaucoup tourmentés », se souvient Mohamed Belhaj Amor, qui a milité au sein de cette formation politique avant de rejoindre l’opposition et de créer le Parti de l’unité populaire dans les années 80.

 

L’Union générale des étudiants de Tunisie (Uget), dont Mohamed Belhaj Amor faisait partie en tant que membre du bureau exécutif, « s’est abstenue de prendre parti afin de ne pas impliquer l’organisation et semer la discorde au sein de la famille estudiantine ! » Mais il se rappelle aussi que la réalité était tout autre : « Avec tout ce que nous savions sur la personne, les procédés et les alliances de Salah ben Youssef, nous étions avec Bourguiba, mais sans le déclarer au nom de l’organisation. »

 

Au début de février 1956, la Tunisie s’installe dans une véritable guerre civile. Bourguiba – qui explique « nous avons accepté le compromis des Conventions parce que nous savions qu’il contenait, en puissance, tout le reste » – s’envole pour Paris afin que le gouvernement français ouvre des négociations débouchant sur l’accession du pays à la pleine souveraineté. Après son refus de remettre en cause les accords conclus huit mois plus tôt, Paris finit par céder.

 

Salah ben Youssef, quant à lui, déclare en mars 1956 : « Avant toute discussion, la France doit proclamer l’abrogation du Traité du Bardo et la déchéance des conventions de 1955, et l’occupation doit cesser avant d’examiner les futurs rapports franco-tunisiens. » Tunis et Paris signent, le 20 mars, le protocole d’accord selon lequel la France « reconnaît l’indépendance de la Tunisie qui doit s’accompagner de l’interdépendance entre les deux pays ».

 

Bien qu’étant une avancée importante, « l’indépendance dans l’interdépendance », que proposait la France, était en fait une forme de dépendance camouflée dans laquelle Paris entendait retenir la Tunisie, du moins pour quelque temps et dans certains domaines. Aussi, le gouvernement tunisien a-t-il dû longtemps batailler pour parfaire sa souveraineté, par exemple, en matière de représentation diplomatique à l’étranger. Une tâche que Paris voulait se réserver. Les deux parties ne sont arrivées à un accord à ce sujet qu’en juin 1956, trois mois après l’indépendance officielle.

 

L’accord prévoyait l’échange d’ambassadeurs extraordinaires et « la représentation éventuelle, par la France, des intérêts et ressortissants tunisiens dans certains pays étrangers » – à condition que la partie tunisienne le juge utile –, la candidature de la Tunisie aux organisations internationales, l’échange d’informations et la consultation « sur les questions d’intérêt commun ».

 

Bourguiba réussit toutefois à mettre entre parenthèses la question de l’interdépendance en faisant du règlement du problème algérien un préalable à la conclusion d’une alliance.

 

Malgré tout, la proclamation d’indépendance est bien accueillie par certaines franges de la population, mais elle en inquiète d’autres. Les plus sceptiques sont sans aucun doute les Français de Tunisie que le gouvernement veut rassurer.

 

De retour de Paris, après la signature de la convention d’indépendance, Dr Sadok Mokkadem, président du Conseil par intérim, lance un appel à la population « pour qu’elle se montre digne des circonstances exceptionnelles et historiques qu’elle est en train de vivre ». Puis, il s’adresse à tous ses concitoyens français : « L’indépendance n’est nullement incompatible avec une coexistence dans la concorde, l’amitié et le respect de la souveraineté nationale. Les Français peuvent poursuivre en toute quiétude leurs activités. Les personnes et les biens sont garantis par les lois du pays. »

 

Sans raisons particulières de craindre le changement profond que la Tunisie était appelée à connaître, d’autres franges, comme les israélites et les catholiques, se sont rapidement positionnées et ont fait acte d’allégeance au nouveau gouvernement.

 

Premier à réagir, dans une allocution radiodiffusée à l’occasion de la Pâque israélite, M. Charles Haddad, président de la communauté israélite, relève : « Par un heureux symbole, cette fête sera célébrée à l’heure où la Tunisie vient d’avoir son indépendance et met en place l’Assemblée constituante que son peuple a élue et qui doit forger ses institutions démocratiques. » Assemblée où siège justement André Barouch, industriel de confession juive, élu sur la liste de Tunis-Ville et qui fera partie du premier gouvernement dirigé par Bourguiba, en tant que ministre des Travaux publics. Tout comme Roger Bismuth, aujourd’hui parmi les membres de la Chambre des conseillers. S’associant à la célébration de la Fête de la jeunesse, la Fédération de la jeunesse juive publiera un appel à tous les mouvements qui lui sont affiliés pour y envoyer une délégation.

 

D’autres Tunisiens, très heureux de l’indépendance, n’en sont pas moins un peu déçus. Mohamed Harmel, secrétaire général du Parti communiste, puis du mouvement Ettajdid, est l’un d’eux. Entré dans la lutte par la distribution de tracts à Tunis alors qu’il faisait ses études, il est arrêté en 1949 et détenu pendant un mois à la prison civile de Tunis, après une manifestation. Instituteur à partir de 1951, il est arrêté la même année et envoyé dans un camp, à Teboursouk. Libéré en 1953, il se retrouve en prison après avoir incité des dockers à boycotter un navire français transportant de l’équipement militaire et n’en sortira qu’au moment de la venue de Mendès France.

 

« Tout en étant heureux de l’indépendance, je me suis retrouvé d’emblée dans l’opposition parce que n’appartenant pas au Néo-Destour, se rappelle-t-il. Il s’est tout de suite posé un problème de cohabitation avec le Néo-Destour, qui prenait le pouvoir après avoir dirigé la lutte, et était de plus en plus hégémonique et intolérant. » D’ailleurs, il se souvient que « l’ambiance a chauffé entre militants destouriens et communistes, durant notre emprisonnement à Teboursouk, et, ensuite, à chaque fois qu’on allait sur le terrain pour distribuer notre matériel ».

 

Le 28 janvier 1956, le gouvernement annonce la découverte d’un complot ourdi par les partisans de Salah ben Youssef en vue d’assassiner cent quarante-neuf responsables du Néo-Destour. Presque toutes les régions sont touchées par les affrontements.

 

Février est particulièrement sanglant. Nullement affaiblis par les arrestations, les fellaghas défient le gouvernement. Alors que Ben Youssef est en Libye, où il a obtenu l’asile politique, Tahar Lassoued publie un « Manifeste du Commandement général de l’armée de libération nationale tunisienne » dans lequel il invite le peuple à « combattre le bureau politique et le gouvernement ».

 

Les autorités ripostent. Un Haut comité de défense est créé pour élaborer une législation sur l’état de siège. L’Assemblée constituante est également saisie du dossier de la sécurité. Vice-président de cette instance, Ben Salah donne lecture d’une motion sur « le respect de l’ordre public et le retour de la paix dans les cœurs ». Il demande ainsi de « prendre toutes les mesures pour assurer la sécurité et protéger l’État ».

 

L’un des députés, Mohamed ben Romdhane, propose de « lancer un appel à ceux qui ont été entraînés dans la dissidence, alors qu’ils ont été trompés, et qui ont cru bien faire », et de leur accorder l’aman (le pardon). Nullement d’accord, Mongi Slim, un des deux ministres d’État – avec Mohamed Masmoudi – dans le premier gouvernement, puis ministre de l’Intérieur et représentant du pays aux Nations unies, affirme que ce serait « encourager les futurs dissidents ».

 

Habib Bourguiba, chef du gouvernement, tranche : « Tous ceux qui ont commis des crimes doivent être jugés. Quant aux égarés, un délai doit leur être accordé pour qu’ils rentrent dans la légalité. »

 

Élue sur fond d’insurrection armée, l’Assemblée constituante entame ses travaux alors que le calme est loin d’être revenu dans le pays. Bourguiba présente le programme de son premier gouvernement. Le chef du Néo-Destour s’assigne quatre tâches : libérer et développer l’économie, organiser la défense nationale, réformer et « tunisifier » l’administration ainsi que développer la coopération internationale.

 

Dans le domaine économique, l’ambition est de « mettre en œuvre une politique hardie et judicieuse pour libérer l’économie nationale des carcans de l’immobilisme et du chômage et lui fournir les moyens d’un véritable essor ». La Défense figure aussi parmi les priorités, parce qu’elle est « le meilleur garant de notre indépendance et la sauvegarde la plus sûre pour notre régime constitutionnel ». L’administration doit être « tunisifiée » pour lui insuffler un élan patriotique et l’adapter aux priorités de l’ère nouvelle. Enfin, la coopération internationale s’impose, parce que la Tunisie « ne doit ni ne peut vivre à l’écart du monde ».

 

Aussitôt en place, le 14 avril 1956, le gouvernement – à propos duquel Bourguiba avait dit devant la Constituante que la décision à prendre à propos de la dissidence youssefiste lui revenait – passe à la contre-attaque. Alors que jusqu’en juin, les opérations militaires et policières se poursuivent aux quatre coins du pays, la Haute cour de justice commence à juger les fellaghas arrêtés et prononce plusieurs condamnations à mort.

 

Deux mois après, le gouvernement annonce la fin de la rébellion au bout d’une campagne qui a fait 195 morts parmi les insurgés, permis l’arrestation de 221 autres, alors que 433 ont déposé les armes. Le 12 août 1961, Salah ben Youssef, condamné à mort à deux reprises, est assassiné dans un hôtel à l’étranger. Seize mois plus tard, c’est le dernier soubresaut de la dissidence youssefiste. Le 20 décembre 1962, on découvre un complot visant à assassiner Bourguiba. Ainsi a pris fin un douloureux chapitre de l’histoire de la Tunisie. Un passage sur lequel les manuels scolaires ne s’attardent pas trop, probablement par pudeur.

 

Bourguiba avait une autre priorité : démanteler le régime beylical et mettre en place une République, mais l’idée était loin de plaire à tous. Certains ne cachaient pas être plutôt favorables à un réaménagement évoluant vers une monarchie constitutionnelle. C’est le cas d’Ahmed ben Salah, alors vice-président de l’Assemblée constituante et secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui déclarait : « Ce choix ne pourrait se poser que dans un cadre plus vaste que celui de la Tunisie, notamment dans l’hypothèse d’une organisation de l’ensemble nord-africain en fédération. Nous n’en sommes pas là et bien que la Tunisie n’offre, par son caractère et ses coutumes, aucun trait commun avec la Grande-Bretagne, c’est vers une monarchie de type britannique que nous penchons. »

 

Aussi, la « débeylicalisation » s’est-elle faite progressivement par un processus qui commença avec l’adoption, en avril 1956, du premier article de la Constitution – qui consacre la souveraineté du peuple – et se termine par la proclamation de la République, le 25 juillet 1957, en passant par un autre moment clé : la fin des privilèges de la famille beylicale, le 30 mai 1956.

 

(Source : « Arabies », N° 227 du mois de Mars 2006)

URL: http://www.arabies.com/Encouveture.htm

 

Anouar Brahem, les mariages du oud

Bertrand Dicale

 

Le luthiste tunisien présente ce soir «Le Voyage de Sahar», avec le pianiste François Couturier et l’accordéoniste Jean-Louis Matinier.

 

Certains musiciens ne sont qu’ailleurs, hors des normes et des prévisions. Depuis une quinzaine d’années, Anouar Brahem semble cheminer par le travers dans le maquis des musiques d’aujourd’hui. Ni tout à fait musicien savant, ni jazzman, ni world music, ni musicien traditionnel, mais tout cela à la fois, avec une manière singulière d’échapper à l’insouciance, à la futilité, à la gratuité du discours.

 

Avec son nouvel album, Le Voyage de Sahar (chez ECM-Universal), qu’il porte ce soir à la scène à la Cité de la musique, puis en tournée, le joueur de oud tunisien retrouve ses complices, le pianiste François Couturier et l’accordéoniste Jean-Louis Matinier. Leur dialogue n’a aucun souci de la couleur locale, de démonstration instrumentale. Au contraire, même : il y a quelque chose de cistercien dans cet Orient, une ascèse dans cette floraison sonore qui confronte les timbres et les matières musicales tout autant que des instruments de tradition hétérogènes.

 

Il avait déjà sorti avec Couturier et Matinier, en 2002, Le Pas du chat noir, mais n’imaginait pas de retrouver les mêmes musiciens pour une nouvelle aventure. «J’étais convaincu pendant deux ans que ce que j’écrivais n’avait rien à voir avec le piano et l’accordéon, mais l’idée contraire s’est imposée à moi très lentement. Et il est si difficile de trouver des musiciens dont la sensibilité et la manière de jouer conviennent…»

 

Ainsi, Anouar Brahem navigue en compagnie de jazzmen (John Surman, Dave Holland, Jan Garbarek, Richard Galliano) ou de grands musiciens traditionnels (le clarinettiste turc Barbaros Erköse, le tabliste pakistanais Shaukat Hussain, le violoniste tunisien Bechir Selmi), écrit pour le cinéma ou pour Maurice Béjart…

 

Enraciné chez ECM

 

Venu au oud par la passion d’une musique classique arabe qui, dans les années 70, souffre de la désaffection du public tunisien, il avoue avoir «fait un voyage de l’écoute. Je me suis intéressé à ma propre diversité – le folklore du Sud marocain est à des années-lumière de la musique du Yémen – puis à la diversité du monde». Il plonge dans le flamenco, la musique indienne, le jazz, joue en écoutant les 33-tours de Paco de Lucia… Arrivé à Paris au début des années 80, il y multiplie les croisements, à l’aube du grand mouvement world music. Retourné depuis quelques lustres en Tunisie, enraciné chez le prestigieux label ECM, il préfère avouer sa singularité plutôt que se dissoudre dans une grande catégorie naïve et générale. «Comme si, au Caire, on voyait dans un bac de disquaire Pierre Boulez et Britney Spears ensemble.»

 

Le 24 mars à Annecy, le 30 à Amiens.

 

(Source : « Le Figaro » (France) du 17 mars 2006)


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