26 mai 2011

TUNISNEWS
11 ème année, N°4020 du 26.05.2011


AFP: Tunisie: des élections démocratiques impossibles le 24 juillet (avocat)

AFP: Tunisie: la commission électorale défend un report des élections

Reuters: Tunisie-Cacophonie sur la date des élections à la constituante

Reuters: Tunisian official gives Oct 16 election date

Reuters: Election de la Constituante en Tunisie le 16 octobre

Reuters: Tunisia opposition slam October election date

AFP: Tunisie: le bras de fer continue autour de la date des élections

AFP: Elections-Tunisie: c’est au gouvernement de reporter

AFP: La Tunisie doit redéfinir sa législation antiterroriste pour éviter les abus (rapporteur ONU)

AFP: REPORTAGE-Les Berbères espèrent profiter de la guerre en Libye

AFP: e-G8: Facebook « ni nécessaire, ni suffisant » pour faire la révolution (Zuckerberg)

AFP: Tunisie: enquête 22 ans après sur la mort d’un ingénieur qui en savait trop

AFP: Egypte, Tunisie: le combat reste difficile pour les cyber-militants


REVUE DE PRESSE

 
 
AFP, le 25 mai 2011 à 16h31 GMT

Tunisie: des élections démocratiques impossibles le 24 juillet (avocat)


Copenhague, 25 Mai 2011 (AFP) – L’avocat tunisien Ayachi Hammami, un militant des droits de l’homme très actif pendant la « Révolution du jasmin », a estimé mercredi à Copenhague qu’il était impossible d’organiser des élections libres et démocratiques le 24 juillet, jugeant un report « inévitable ».
« Des élections libres et démocratiques ne peuvent pas avoir lieu dans un laps de temps aussi court. C’est ce qu’a affirmé la Haute instance indépendante chargée de préparer et de superviser ce prochain scrutin, et ce que nous soutenons », a-t-il déclaré au cours d’un colloque organisé par le Parlement danois sur « Le Printemps arabe ».
Déplorant la décision du gouvernement de transition mardi de maintenir la date du 24 juillet contre l’avis de la Commission électorale qui proposait de la reporter au 16 octobre, Me Hammami juge que « la Tunisie est en panne réelle, surtout politiquement ».
Interrogé par l’AFP en marge du séminaire, cet opposant au régime de l’ancien président Zine el-Abidine Ben Ali, devenu membre de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, a estimé qu’un report du scrutin était « inévitable ».
Selon lui, « c’est un jeu politique du gouvernement qui cède un peu sous la pression de partis comme (le mouvement islamiste) Ennahda (Renaissance) », qui plaidait en faveur du maintien de l’élection au 24 juillet en agitant la menace d’une période prolongée d’instabilité en cas de report.
Depuis la dissolution en mars du parti unique de M. Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique, la Tunisie compte désormais 67 partis.
De l’avis de nombreux partis nouvellement créés dans la foulée de la révolution, l’échéance du 24 juillet va surtout favoriser les formations déjà connues des Tunisiens, comme Ennahda, créditée par les experts du meilleur score aux prochaines élections.
Me Hammami s’est dit « convaincu » que le report des élections aurait lieu « dans quelques jours, soit parce que la Commission électorale va démissionner, soit que le gouvernement va reculer ».

 
 
 
AFP, le 26 mai 2011 à 09h57 GMT

Tunisie: la commission électorale défend un report des élections


TUNIS, 26 Mai 2011 (AFP) – La Haute instance tunisienne indépendante chargée d’organiser l’élection-clé de l’Assemblée constituante va se réunir jeudi avec les partis politiques pour défendre sa proposition d’un report du scrutin prévu le 24 juillet, a affirmé à l’AFP une source proche du dossier.
« C’est une réunion fermée pour leur expliquer la démarche. Nous allons exposer des faits et des données techniques pour susciter un débat », a expliqué cette source.
Cette commission électorale avait proposé dimanche le report de la date de l’élection au 16 octobre pour des raisons procédurales et logistiques, mais le débat semblait clos mardi, le gouvernement tunisien se disant décidé à maintenir le scrutin le 24 juillet, en affirmant que le décret-loi de convocation des électeurs entérinant cette date avait été signé par le président par intérim, Foued Mebazaa.
Le gouvernement avait également promis de fournir à la commission « tous les moyens matériels, humains, administratifs et techniques pour assurer l’organisation des élections à la date prévue », dans deux mois.
Le président de la commission électorale Kamel Jendoubi avait expliqué mercredi soir que « la date de l’organisation des élections de la Constituante fera partie du calendrier qui sera présenté, jeudi, aux partis politiques », puis aux médias.
M. Jendoubi, qui s’est entretenu mercredi avec le Premier ministre tunisien Béji Caïd Essebsi et le président par intérim, a assuré que le calendrier proposé était « une feuille de route qui permettra de parvenir à une solution qui pourrait satisfaire toutes les parties ».
Une majorité de partis politiques a salué mardi le maintien de la date des élections au 24 juillet, notamment le parti islamiste Ennahda et le parti démocrate progressiste (PDP), au nom de la stabilité du pays.
D’autres, comme le Parti communiste et ouvrier tunisien (PCOT), souhaiteraient avoir plus de temps pour faire campagne, et mettent en garde contre les risques d’une élection mal préparée.

 
 
 
Reuters, le 26 mai 2011 à 12h03 GMT

Tunisie-Cacophonie sur la date des élections à la constituante


TUNIS, 26 mai (Reuters) – Kamel Jandoubi, président de la commission électorale indépendante, a annoncé jeudi que l’élection d’une assemblée constituante aurait lieu le 16 octobre en Tunisie.
La veille, le gouvernement intérimaire avait pourtant déclaré que le scrutin serait maintenu au 24 juillet, la date initiale.
« Il nous faut beaucoup de temps pour les élections (…) il ne nous reste pas assez de jours pour organiser la consultation. De ce fait, le scrutin aura lieu le 16 octobre », a déclaré jeudi KaJmel Jandoubi
Mercredi, le gouvernement avait maintenu la date du 24 juillet, répondant ainsi favorablement aux demandes exprimées par la rue au début du mois.
Le calendrier des élections devant solder la transition, amorcée par le renversement en janvier du président Zine ben Ali a fait l’objet de longs débats en Tunisie.
Les petits partis, peu connus, plaidaient pour une élection tardive. Mais de grandes manifestations ont eu lieu début mai à Tunis pour réclamer que les élections soient organisées dans les deux mois, au risque d’une instabilité à long terme.

 
 
 
 
Reuters, le 26 mai 2011 à 12h49 GMT

Tunisian official gives Oct 16 election date


* Official contradicts government-announced date of July 24
* Organisers ‘need plenty of time for the election’
TUNIS, May 26 (Reuters) – Tunisia’s first election since the overthrow of former president Zine al-Abidine Ben Ali will take place on Oct. 16, the election committee said on Thursday, contradicting a government announcement of a July 24 vote.
The announcement, by the head of the independent organising committee, came just a day after Tunisia’s interim government announced the vote would take place in July.
Opposition parties and campaigners have taken to the streets protesting against earlier suggestions of a delay to the vote for an assembly to rewrite the North African’s nation’s constitution.
Larger opposition parties are demanding an early vote, many of them saying they fear the interim government may renege on its promise to lead Tunisia towards democracy after the country’s revolution earlier this year.
Smaller parties have demanded a delay, saying they need more time to prepare for the vote.
« We need plenty of time for the election … we don’t have enough days left to have the election on July 24. Therefore, the elections will take place on October 16, » said election committee president Kamel Jandoubi.
« There are many problems, such as the fact that nearly 400,000 Tunisians in the country do not have voting cards… in addition, we have to recruit nearly 24,000 employees to organise the elections… they have to be trained… all that takes a lot of time, » he added.

 
 
 
Reuters, le 26 mai 2011 à 13h47 GMT

Election de la Constituante en Tunisie le 16 octobre


TUNIS, 26 mai (Reuters) – L’élection d’une assemblée constituante en Tunisie aura lieu le 16 octobre, a annoncé jeudi le président de la commission électorale indépendante, Kamel Jandoubi.
Mardi, le gouvernement intérimaire avait pourtant déclaré que le scrutin serait maintenu au 24 juillet, la date initiale.
« Il nous faut beaucoup de temps pour les élections (…) il ne nous reste pas assez de jours pour organiser la consultation. De ce fait, le scrutin aura lieu le 16 octobre », a déclaré Kamel Jandoubi.
« Il y a beaucoup de problèmes, comme le fait que près de 400.000 Tunisiens ne disposent pas dans le pays de carte d’électeur (…) En outre, nous devons recruter près de 24.000 agents pour organiser le scrutin (…) ils doivent être formés (…) tout cela prendra beaucoup de temps », a-t-il ajouté.
Il y a deux jours à peine, le gouvernement avait maintenu la date du 24 juillet, répondant ainsi favorablement aux demandes exprimées par la rue au début du mois.
Le calendrier des élections censées solder la transition, amorcée par le renversement, le 11 janvier, du président Zine ben Ali a fait l’objet de longs débats en Tunisie.
Les petits partis, peu connus, plaidaient pour une élection tardive. Mais de grandes manifestations ont eu lieu début mai à Tunis pour réclamer que les élections soient organisées dans les deux mois, au risque d’une instabilité à long terme.
Le principal parti d’opposition, Ennahda (islamiste modéré), avait critiqué l’idée d’un report et dénoncé une décision politique. Le président du Parti communiste (POCT) s’était dit favorable à la date du 16 octobre, pour laisser aux petits partis le temps de se faire connaître de l’opinion.
Certains partis encore faiblement mobilisés estiment que ce calendrier est trop serré pour assurer l’équité du scrutin. D’autres craignent que la Tunisie ne soit mal préparée à un scrutin démocratique après des décennies de régime autocratique.
La mobilisation politique de la Tunisie, couronnée par la chute et l’exil de Ben Ali et de son clan, a inspiré des mouvements de contestation analogues dans le monde arabe.
Mais ce petit pays de 10 millions d’habitants ne possède pas les ressources énergétiques de ses voisins et estime avoir besoin de milliards de dollars de prêts extérieurs pour surmonter la désorganisation qui affecte durement son marché de l’emploi et son secteur touristique, dont il dépend beaucoup.

 
 
 
Reuters, le 26 mai 2011 à 14h07 GMT
 

Tunisia opposition slam October election date


 
* Official contradicts government-announced date of July 24
 
* Organisers ‘need plenty of time for the election’
 
 
 
By Tarek Amara
 
TUNIS, May 26 (Reuters) – Tunisia’s first vote since the country’s revolution will take place on Oct. 16, election officials said on Thursday, contradicting a government announcement of a July 24 poll and sparking opposition protests.
 
The timing of the vote for an assembly to rewrite the country’s constitution has been highly sensitive.
 
Larger opposition parties are demanding an early poll, saying they fear the interim government may renege on its promise to lead Tunisia towards democracy after the overthrow of former president Zine al-Abidine Ben Ali this year.
 
Campaigners took to the streets earlier this year to protest against the committee’s last suggestion of a delay to the vote.
Thursday’s announcement came just a day after Tunisia’s interim government announced the vote would take place in July.
 
The head of the independent committee organising the vote said officials needed more time to prepare.
 
« We don’t have enough days left to have the election on July 24. Therefore, the elections will take place on October 16, » committee president Kamel Jandoubi told a meeting of political parties.
 
« There are many problems, such as the fact that nearly 400,000 Tunisians in the country do not have voting cards … We have to recruit nearly 24,000 employees to organise the elections … They have to be trained… All that takes a lot of time, » he added.
 
Officials from three large opposition parties — Ennahda, the Progressive Democratic Party (PDP) and the Congress for the Republic — told Reuters they were unhappy about the delay.
 
« It is not reasonable to say there is not enough time, » said Abdel Raouf Al-Ayadi, vice president of the Congress for the Republic. « I want to know on what basis this decision was made. »
 
Some parties have supported a delay, saying they also needed time to prepare their campaigns and candidates.
 
« The arguments presented by the committee are very convincing, » said Khalil Zaouia of the Democratic Forum for Freedom and Labour (FDTL). « We need a lot of time to succeed in having elections that are free and transparent… We must not fail… The eyes of the world are on Tunisia. »

 

Tunisie: le bras de fer continue autour de la date des élections


 
De Kaouther LARBI et Daphné BENOIT (AFP) – 18h15
 
TUNIS — La commission électorale tunisienne est revenue à la charge jeudi en confirmant le report au 16 octobre des premières élections post-Ben Ali, contre l’avis du gouvernement qui avait maintenu deux jours plus tôt la date du 24 juillet, relançant un bras de fer à l’issue incertaine.
 
« La Haute instance indépendante chargée des élections a préparé un calendrier qui fixe au 16 octobre l’élection de l’Assemblée constituante », qui verra pour la première fois les Tunisiens voter librement, a déclaré à la presse son président, Kamel Jendoubi. « La date du 24 juillet ne figure pas dans le calendrier », a-t-il insisté.
 
Mardi, le gouvernement de transition avait pourtant déclaré que ce scrutin-clé serait maintenu le 24 juillet, ignorant la proposition faite dimanche par la commission électorale de reporter l’élection pour des raisons logistiques.
 
Le gouvernement avait précisé que le président par intérim, Foued Mebazaa, avait signé un décret-loi entérinant cette date.
 
Jeudi, le porte-parole du gouvernement, Taïeb Baccouche, a laissé planer le doute sur l’issue du débat. « Le Conseil des ministres se réunira pour en discuter », a-t-il dit à l’AFP.
 
Mais dès jeudi, le ministre du Commerce et du Tourisme Mehdi Houas est monté au créneau en estimant que la décision revenait au gouvernement.
 
« Si le gouvernement n’a pas annoncé le report des élections, elles auront bien lieu le 24 juillet », a-t-il affirmé à Alger, en jugeant que la commission électorale était seulement « consultative ».
 
Une majorité de partis politiques est favorable à la date du 24 juillet, notamment le parti islamiste Ennahda et le parti démocrate progressiste (PDP), au nom de la stabilité du pays, dépourvu d’institutions légitimes depuis la chute en janvier du régime de Zine El Abidine Ben Ali.
 
D’autres, comme le Parti communiste et ouvrier tunisien (PCOT), souhaitent avoir plus de temps pour faire campagne et mettent en garde contre une élection mal préparée.
 
La commission a de son côté assuré jeudi qu’un report était impératif pour bien organiser le vote, sous peine de jeter le discrédit sur les résultats.
 
« Nous sommes garants des élections transparentes, libres et démocratiques, qui auront lieu pour le première fois dans notre pays », selon l’un de ses membres, Laarbi Chouikha.
 
« Or, il est impossible de les organiser à la date fixée par le gouvernement », a-t-il affirmé à l’AFP.
 
« Nous souhaitons tous que la date de 24 juillet soit maintenue, nous souhaitons tous voter, mais si on le fait dans des conditions non conformes aux standards internationaux, on risque non seulement de rater la prochaine élection mais aussi toutes les opérations électorales à venir », a-t-il fait valoir, en citant notamment les problèmes d’établissement d’une liste électorale crédible en seulement huit semaines.
 
« Si nous voulons vraiment établir une liste des Tunisiens qui ont le droit de voter, il faudrait entre un mois à 45 jours », a-t-il affirmé.
 
Le pays doit encore se doter de 1.500 centres d’inscription et former 6.000 agents inscripteurs. Il faudra également organiser l’inscription des Tunisiens de l’étranger, appelés à voter pour la première fois. Le jour de l’élection, 8.000 bureaux de vote et 40.000 agents scrutateurs devront être prêts.
 
Sur le plan politique, l’électeur risque aussi de s’y perdre. Après un demi-siècle de quasi parti unique sous Habib Bourguiba et Ben Ali, la Tunisie est passée brutalement d’un système de parti-Etat au pluralisme avec plus d’une soixantaine de formations, souvent inconnues du grand public.

 
 
 

Elections-Tunisie: c’est au gouvernement de reporter


 
AFP / 26 mai 2011 20h35
 
ALGER – Le ministre tunisien du Commerce et du Tourisme Mehdi Houas (bien Mehdi Houas) a déclaré jeudi à Alger que si le gouvernement tunisien n’a pas annoncé le report des élections elles auront bien lieu le 24 juillet, après l’annonce d’un report du scrutin au 16 octobre par la Commission électorale.
 
La commission électorale est une commission consultative et ce n’est pas elle qui décide la date des élections, a déclaré M. Houas lors d’une conférence de presse après un entretien avec le ministre algérien du Commerce Mustapha Benbada.
 
Le gouvernement tunisien dont je fais partie a décidé que les élections auront lieu le 24 juillet et donc si le gouvernement n’a pas annoncé le report des élections, elles auront bien lieu le 24 juillet, a-t-il ajouté.
 
A Tunis, le président de la Haute instance indépendante chargée des élections Kamel Jendoubi avait indiqué dans l’après-midi avoir préparé un calendrier qui fixe au 16 octobre l’élection de l’Assemblée constituante.
 
Selon M. Jendoubi, la date du 24 juillet ne figure pas dans le calendrier.
 
C’est uniquement avec l’autorité du président de la République qu’on peut changer la date, a affirmé M. Houas. S’il y a un communiqué qui annonce le report des élections, l’information est bonne, si c’est la Commission électorale, ce n’est pas elle qui décide, a-t-il dit.
 
Déjà mardi, le gouvernement de transition avait maintenu au 24 juillet ce scrutin alors que la commission électorale proposait pour des raisons de logistique un report à octobre.
 
Une majorité de partis politiques est favorable au maintien de l’élection le 24 juillet, notamment le parti islamiste Ennahda et le parti démocrate progressiste (PDP), au nom de la stabilité du pays, dépourvu d’institutions légitimes depuis la chute en janvier du régime de Zine El Abidine Ben Ali.

 
 
 
 
AFP, le 26 mai 2011 à 14h42 GMT

La Tunisie doit redéfinir sa législation antiterroriste pour éviter les abus (rapporteur ONU)


TUNIS, 26 Mai 2011 (AFP) – Le rapporteur spécial de l’ONU pour la protection des droits de l’Homme dans la lutte antiterroriste, Martin Scheinin, a invité jeudi la Tunisie à redéfinir sa législation antiterroriste, héritée du régime Ben Ali, et à poursuivre les auteurs de crimes et abus commis en son nom.
« La loi antiterroriste instaurée en 2003 est basée sur une définition beaucoup trop large du terrorisme, qui a servi d’outil pour opprimer toute manifestation de dissension politique ou autre », a-t-il déclaré à la presse au terme d’une visite de 5 jours.
« Le gouvernement de transition l’a admis en promulguant une loi d’amnistie » pour tous les condamnés au titre de cette loi, et « j’ai entendu de nombreux interlocuteurs confirmer que la loi contre le terrorisme de 2003, source de tant d’abus, n’avait plus servi depuis les événements du 14 janvier », date de la chute du régime de Zine el Abidine Ben Ali, s’est félicité M. Scheinin.
Toutefois, « à la prison de Mornaguia (30 km de Tunis), on m’a dit que des juges ordonnaient parfois la mise en détention de prévenus au titre de cette loi de 2003 », a-t-il déploré, en invitant la Tunisie à la « remplacer par un cadre législatif approprié » respectueux des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Par ailleurs, « la Tunisie devrait poursuivre ses enquêtes au sujet des allégations de torture et de détention illégale, souvent commis sous prétexte de lutte contre le terrorisme », a souligné le rapporteur de l’ONU, qui a rencontré en Tunisie des membres du gouvernement, des forces de l’ordre et des détenus soupçonnés de terrorisme.
« Mener des enquêtes, poursuivre et juger les responsables de ces crimes pourrait contribuer à restaurer la confiance entre la population et les forces de sécurité du pays », a-t-il fait valoir.
M. Scheinin, qui avait déjà effectué une mission en Tunisie en janvier 2010, a salué la mise en retraite anticipée d’une quarantaine de responsables de la police pour leur comportement du temps du régime du président déchu Ben Ali.
Mais « ce n’est pas assez », a-t-il estimé: « Au ministère de l’Intérieur, j’ai vu de mes propres yeux que des responsables qui étaient en poste l’an dernier et qui savaient certainement ce qui se passait sont toujours en fonction, parfois à un poste hiérarchique supérieur ».
Interrogé sur un risque terroriste en Tunisie, le rapporteur de l’ONU a indiqué que « la Tunisie fait partie des pays dans lesquels la menace est réelle », mais que ce risque relevait plutôt d' »une utilisation du territoire tunisien pour des activités transfrontalières » que d’une « menace imminente » d’attentat.
Le 18 mai, deux hommes « fortement suspectés d’appartenir à Al-Qaïda » ont été tués par les forces tunisiennes, à environ 200 km à l’ouest de Tunis.
Trois jours auparavant, un Algérien et un Libyen suspectés d’appartenance à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ont été arrêtés en possession d’explosifs à 130 km de la frontière avec la Libye.

 
 
AFP, le 26 mai 2011 à 12h47 GMT

REPORTAGE-Les Berbères espèrent profiter de la guerre en Libye


par Matt Robinson
DJADOU, Libye, 26 mai (Reuters) – En pénétrant dans le bâtiment après le début du soulèvement en Libye, le premier geste de Mazigh Bouzakhar et de ses amis fut de mettre hors service les caméras de surveillance et de modifier les paramètres du système internet satellitaire.
Cet immeuble élégamment meublé de la ville occidentale de Djadou appartient à un groupe d’investissement dirigé par Saïf al Islam, l’un des fils de Mouammar Kadhafi. La rumeur voulait qu’il serve d’agence locale de la Sécurité d’Etat.
Puis le groupe a commencé à diffuser sur le Web des messages en berbère, une langue interdite depuis le renversement de la monarchie par un groupe d’officiers, dont l’impétueux colonel, le 1er septembre 1969, au nom de leur panarabisme.
« Pour nous, la révolution actuelle est une révolution pour une Libye nouvelle, avec sa propre identité, ses racines et son histoire à elle – c’est un pays Amazigh », souligne Bouzakhar.
Ce dernier est rédacteur en chef du bulletin d’information Tilleli, une publication bilingue en arabe et en amazigh, la langue vernaculaire de la minorité berbère du djébel Néfoussa, qui a d’emblée rejoint le soulèvement de la Cyrénaïque contre le régime en février.
« Nous ne pouvions exprimer notre culture, notre langue et notre identité amazigh. C’était considéré comme un crime, une menace contre la sécurité de l’Etat », explique ce journaliste de 29 ans formé au Canada et en Australie avant de regagner son pays.
 
Les Berbères, qui se dénomment Amazigh (hommes libres), peuplent l’Afrique du Nord depuis des milliers d’années, soit bien avant la conquête arabo-islamique du nord de l’Afrique, au VIIe siècle.
Il en subsiste des millions au Maroc et en Algérie et de plus petites communautés en Libye, Tunisie, Mauritanie et Egypte – autant de pays où les discriminations dont ils se plaignent ont parfois dans le passé dégénéré en violences – notamment au Maroc et en Algérie.
AMAZIGH FUTURE LANGUE OFFICIELLE ?
Anticipant une Libye débarrassée de Kadhafi, qui affronte aujourd’hui son plus grave défi avec une rébellion soutenue par les Occidentaux, les Berbères libyens disent n’avoir qu’une revendication: que leur langue ait le même statut que l’arabe dans la nouvelle Constitution.
D’ores et déjà, la chaîne de la révolution libyenne émettant du Qatar diffuse des journaux télévisés en amazigh. De leur côté, les rebelles berbères de Djadou, une ville du djébel occidental qui est entre leurs mains, se préparent à lancer leur propre station de radio.
« Nous avons espoir que, dans la nouvelle Constitution pour une Libye libre, l’amazigh sera mentionné comme une langue officielle, enseignée à tous les Libyens, qui ont le droit de l’apprendre et de la parler », déclaré Bouzakhar.
« Pour la première fois en 42 ans nous avons des nouvelles et des émissions en amazigh. Désormais des journaux en amazigh sont aussi distribués dans le Néfoussa et nous espérons qu’ils pourront être un jour diffusés officiellement dans toute la Libye. »
 
Mazigh Bouzakhar raconte que son frère et lui ont été emprisonnés l’an dernier pour avoir établi des contacts avec des groupes d’émigrés berbères en Europe et avoir fait l’apologie du berbérisme. Ils n’ont été libérés que le 19 février, peu après le début du soulèvement en Libye.
Il reste à voir comment tout régime post-Kadhafi arrivera à concilier les revendications concurrentes des groupes hétérogènes qui ont participé à la rébellion contre le régime d’un pays composé de plus de 140 tribus et clans, que le « frère guide » Kadhafi avait réussi à « fédérer ».
Pour le moment, les berbères des montagnes de l’Ouest libyen œuvrent main dans la main pour pousser Kadhafi vers la sortie.
« Nous n’exigeons que notre droit, tout comme l’ensemble du peuple libyen. Notre droit, c’est notre langue. Je suis un Libyen, comme ceux de l’Ouest à l’Est et de la côte jusqu’au fin fond du désert », souligne le colonel Tarek Zanbou, un responsable des rebelles berbères dans la la ville de Kabaou.

 
AFP, le 25 mai 2011 à 18h29 GMT

e-G8: Facebook « ni nécessaire, ni suffisant » pour faire la révolution (Zuckerberg)


 
PARIS, 25 Mai 2011 (AFP) – Facebook n’est « ni nécessaire, ni suffisant » pour faire la révolution, a assuré mercredi son fondateur et patron Mark Zuckerberg lors de l’e-G8, minimisant le rôle joué par le réseau à l’appui des mouvements démocratiques dans les pays arabes, principalement en Tunisie et en Egypte.
« Il serait particulièrement arrogant pour une entreprise de technologie de revendiquer un rôle dans les mouvements de protestation », a déclaré Mark Zuckerberg, 27 ans, lors d’une intervention destinée à clore les deux jours de débats de l’e-G8 à Paris.
 
« Facebook n’a été ni nécessaire, ni suffisant (pour faire la révolution, NDLR), a-t-il poursuivi. Ce qui l’a été, ce sont des populations qui se sont prises en main ».
« Facebook a peut-être contribué et apporté des outils, mais cela aurait pu être autre chose », a-t-il simplement concédé, ajoutant un peu plus tard que son entreprise avait joué dans les révolutions arabes un rôle « beaucoup moins important que ce que disaient les journaux ».
Comme de coutume vêtu d’un simple tee-shirt et d’un jean, Mark Zuckerberg est intervenu pendant plus d’une heure, interrogé par le publicitaire Maurice Levy, l’organisateur du e-G8, devant un parterre fourni et curieux.
Un peu plus tôt, il avait été reçu – en veste et cravate – à l’Elysée par Nicolas Sarkozy.
« C’était marrant. C’est la première fois que je le rencontre, c’est un grand honneur », a-t-il assuré à propos du président français.
Naturellement interrogé sur l’extraordinaire succès de Facebook depuis sa création, il a notamment expliqué que son succès tenait au fait que les gens y étaient « sous leur identité réelle », leur permettant ainsi de retrouver leurs amis très facilement pour partager et échanger avec eux.
« Le partage restera la grande tendance des cinq ou dix années à venir, a-t-il prédit. Nous sommes plus près du début de ce phénomène que de la fin ».
Au sujet de l’usage des données personnelles, déposées par tous les utilisateurs de Facebook, et qui fait vivement débat, Mark Zuckerberg a souligné que ceux-ci devaient « choisir leurs propres limites. Certains partagent tout, d’autres pas grand chose. Il faut que chacun trouve son équilibre au fil du temps ».
Enfin, il a démenti l’ouverture de Facebook aux moins de 13 ans comme cela avait rapporté récemment par plusieurs médias. « Je n’ai jamais dit que je voulais que les enfants de moins de 13 ans s’inscrivent. Et si c’était le cas, nous devrions développer des procédures adéquates. Ce n’est absolument pas une priorité pour nous aujourd’hui ».

 
 
 
AFP, le 25 mai 2011 à 18h28 GMT

Tunisie: enquête 22 ans après sur la mort d’un ingénieur qui en savait trop


TUNIS, 25 Mai 2011 (AFP) – La justice tunisienne a ouvert une enquête sur la mort suspecte il y a 22 ans d’un ingénieur qui avait découvert un secret d’Etat dans le système informatique du palais présidentiel, selon sa famille, persuadée d’un assassinat, a indiqué mercredi à l’AFP une source judiciaire.
Selon ses proches, Marouane Ben Zeyneb avait pénétré le système informatique du palais présidentiel de Ben Ali et y avait trouvé une liste des agents des services secrets israéliens, accrédités à Tunis pour surveiller des responsables de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
L’enquête a été ouverte depuis deux semaines par le juge d’instruction Abdelaziz Zribi, a-t-on précisé.
« Une commission rogatoire a été délivrée à la police criminelle pour déterrer le cadavre de la victime et la mettre à la disposition de la médecine légale en vue d’accomplir les recherches nécessaires », a affirmé un représentant du ministère de la Justice, Kadhem Zine El Abidine, lors d’une rencontre interministérielle avec la presse mardi.
« Le défunt ingénieur en informatique Marouane Ben Zeyneb avait réussi pirater l’ordinateur du président déchu et à se rendre compte que (Ben Ali) avait des relations avec des membres de services secrets étrangers », selon l’agence officielle TAP.
Marouane, qui avait obtenu une bourse pour une université d’Amérique du Nord, avait été kidnappé fin juillet 1989, selon sa famille, avant d’être retrouvé huit jours plus tard à la morgue de l’hôpital Charles Nicolle à Tunis.
Les autorités avaient annoncé qu’il était mort dans un accident de la circulation, mais sa famille assure que Marouane avait été torturé à mort et que le crime avait été maquillé en accident de train.
M. Kadhem a affirmé à la presse l’engagement de son ministère à lutter contre la torture et « à sanctionner tous ceux dont l’implication est prouvée dans ces crimes, que ce soit dans les centres de garde à vue, les prisons ou tout autre lieu » notamment après l' »adoption du protocole facultatif à la convention contre la torture et la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ».
Selon la militante des droits de l’Homme Radhia Nasraoui, les pratiques de torture se poursuivent toutefois en Tunisie depuis la chute du régime Ben Ali le 14 janvier.

Egypte, Tunisie: le combat reste difficile pour les cyber-militants


De Jailan ZAYAN (AFP) – Le 26 mai 2011

LE CAIRE — Après avoir contribué avec succès à déloger des régimes autocratiques installés depuis des décennies, les cyber-militants tunisiens et égyptiens continuent de se battre pour préserver des avancées chèrement acquises, dans un climat politique difficile jalonné de revers.

Armés de blogs, de pages Facebook et de comptes twitter, ils avaient stupéfait le monde en mobilisant de larges pans de la jeunesse pour lancer le « printemps arabe ».

Après la chute en janvier du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, suivi un mois plus tard par son homologue égyptien Hosni Moubarak, ils sont pris entre le dépit face aux aléas des progrès politiques, et la volonté de continuer leur combat pour l’avénement de vraies démocraties.

Slim Amamou, blogueur tunisien nommé le 17 janvier secrétaire d?Etat à la Jeunesse dans le gouvernement transitoire, a remis sa démission cette semaine, en faisant le constat que ce type de rôle politique n’était « pas fait pour lui » et qu’il se « sentait plus utile à l’extérieur du gouvernement ».

Sa démission -annoncée sur twitter- survient après un retour de la censure sur internet, avec une récente décision des autorités de fermer quatre sites à la demande de l?armée.

En Egypte, la condamnation le mois dernier d’un blogueur à trois ans de prison au motif d’avoir « insulté » l’armée, qui dirige le pays depuis le départ de M. Moubarak, a fait l’effet d’une douche froide.

Mais cela ne décourage pas de nombreux militants de critiquer le tout-puissant Conseil suprême des forces armées (CSFA), et en exprimant leur frustration devant la lenteur des réformes politiques.

Lundi dernier, près de 400 blogs ont pris part à une action intitulée « Journée sans le CSFA », postant des commentaires contre la haute hiérarchie militaire.

La blogosphère égyptienne est également mobilisée pour appeler à des manifestations vendredi « pour une seconde révolution », après celle de janvier et février.

« Il faut savoir que les sacrifices face à la tyrannie de Moubarak peuvent facilement être consentis à nouveau face à toute autre forme de tyrannie », déclare le blogueur Amr Moneim, en appelant l’armée à « rentrer dans ses casernes ».

Le renversement de M. Moubarak « était une révolution, pas un putsch », écrit-il, en fustigeant « la lenteur des procès des dirigeants de l’ancien régime » et un processus de démocratisation aussi déroutant qu’une « charade ».

En Tunisie, le site Nawaat.org (« noyau » en arabe), un blog collectif indépendant, en pointe lors de la révolte, ne veut pas non plus baisser les bras.

Quatre mois après la chute de Ben Ali, la mission de Nawaat a des contours plus flous, mais le site continue activement d’oeuvrer en faveur de la démocratie.

« Avant les choses étaient plus simples: il y avait les gentils d’un côté, les méchants de l’autre », souligne l’un des ses administrateurs, Riadh Guerfali -Astrubal sur le net.

« Aujourd’hui les choses sont plus subtiles. Mais on continue à défendre la liberté d’expression. C’est un combat de tous les jours », affirme-t-il.

Pour certains, les nouveaux médias électroniques ont encore de beaux jours face à des médias classiques -presse écrite, radio, télévision- qui peinent à retrouver la faveur du public après des années de dictature et de censure.

Sofiène Chourabi, 29 ans, journaliste et blogueur tunisien, estime que les nouveaux médias en pointe dans le soulèvement « continuent d’être actifs jusqu’à présent face à la faiblesse des médias traditionnels ».

Les médias classiques « n’ont pas réussi jusqu’à maintenant à regagner la confiance des Tunisiens, permettant encore l’introduction de nouveaux internautes actifs dans la vie médiatique », assure-t-il.


Article sur T. Salmi

Un article paru dans une revue luxembourgeoise sur l’ex prisonnier Taoufik Salmi, expulsé du Luxembourg il y a quelques années avant de conaître torture et emprisonnement en Tunisie.
Luiza T

Notre transition démocratique doit réussir pour que la révolution se propage ailleurs


 

 

Ignacio Cembrero

(Traduction de l’espagnol : Abdelatif Ben Salem)

 

Il jouit d’un certain prestige, il possède une grande expérience de gouvernement et vient de fêter ses 84 ans, mais l’ambition lui fait défaut. Ces raisons sont probablement à l’origine du consensus qui le fit nommer au poste de Premier ministre du gouvernement tunisien, après que les manifestations massives aient poussées à la démission son prédécesseur Mohamed Ghannouchi, trop compromis avec la dictature de Ben Ali tombée en janvier dernier.

 

Depuis, Béji Caїd Essebsi est l’homme qui dirige un gouvernement de technocrates chargé de parachever la transition vers la démocratie en Tunisie, pays où a débuté la première révolution qui s’etendit plus tard au reste du monde arabe. Il fut successivement ministre de la Défense , de l’Intérieur et des Affaires Etrangères sous Habib Bourguiba, père de l’indépendance tunisienne. A la prise de pouvoir par Ben Ali, Essebsi a occupé pendant un an (1990-1991) la charge de président de la Chambre des députés ; il refusa de se représenter ; il prit ses distances avec la politique et reprit son activité d’avocat. Il ne s’opposa jamais à la dictature de Ben Ali.

 

Nous étions surpris par la légèreté du dispositif de sécurité autour du Palais de la Kasbah , siège du gouvernement et lieu de prédilection des rassemblements et des manifestations quelques semaines plus tôt.

De petite taille, Caїd Essebsi travaille dans un immense bureau au plafond très haut, au milieu duquel il donne l’impression d’être un peu perdu. Cependant dés qu’il se met à parler, il dégage cette assurance qu’on retrouve parmi ceux qui ont servi dans l’administration la plus rodée de l’Afrique du Nord.

 

Question : Pourquoi avez-vous pris vos distances de Ben Ali il y a vingt ans ?

 

Réponse : Parce que j’ai compris que les promesses faites par lui quand il prit le pouvoir, n’étaient pas sincères. Dans la vie, il ya deux partis, le parti de l’ordre et le parti du mouvement. Moi j’appartiens à ce dernier. En ces temps ce fut plutôt le parti de l’ordre qui imposa son hégémonie.

 

Q. : Pourquoi êtes-vous retourné à la politique il y a deux mois ?

 

R. : Parce que tout d’abord ils ont fait appel à moi. Ensuite j’ai estimé qu’il était de mon devoir de veiller à la continuité de l’Etat sur fond de conjoncture chargée d’incertitudes. Et puis mon épouse et principale conseillère m’a donné son accord. La Tunisie connaît des sérieux problèmes de sécurité à cause de certains excès populaires, ce qui est somme toute, bien normal après 23 ans de privation de liberté. La situation était arrivée à un point tel que le Conseil de ministre n’arrivait plus à tenir ses réunions au siège du gouvernement et fut contraint de déménager au palais présidentiel de Carthage. En ce moment même nous pouvons nous réunir. Il s’agit là d’un premier résultat, mais le rétablissement de la sécurité reste pour nous une priorité absolue.

 

Q. : Est-ce pour cela que vos détracteurs vous reprochent de vous conduire comme un gendarme, alors que le pays a plutôt besoin d’un médecin?

 

R. : Il est difficile de prodiguer les soins nécessaires aux patients, quand l’ordre fait défaut dans un hôpital. Nous agissons cependant en tant que médecins ; seulement il faut savoir que notre problème numéro un est le chômage : on compte en effet plus de 700.000 sans emplois, parmi lesquels 150.000 sont porteurs de diplômes. Nous avons lancé un projet pour la création de 60.000 postes d’emplois, nous sommes également en train de donner une nouvelle orientation du budget de l’Etat de façon à ce que 80% des investissements puissent profiter aux régions les plus défavorisées de l’intérieur d’où est partie la Révolution , et où il existe des besoins auxquels il nous faut trouver des réponses.

 

Q. : Ils prétendent (les détracteurs) également que vous êtes un Monsieur âgé, éloigné des problèmes qui préoccupent la jeunesse ?

 

R. : La véritable jeunesse n’est pas la date de naissance inscrite sur la carte d’identité, mais un état d’âme. Je vis avec mes petits enfants et je suis très au fait de leur état d’esprit.

 

Q. : Vous vous rendez aujourd’hui à Deauville en tant qu’invité spécial avec votre homologue égyptien au Sommet du G-8 ?

 

R. : Le G-8 va consacrer une session spéciale au « Printemps arabe » au cours de laquelle j’aurais l’occasion d’exposer notre projet. L’Occident nous a sanctionné par ce que nous n’étions pas démocrates. Aujourd’hui, c’est l’occasion ou jamais pour lui de démontrer qu’il est capable de nous fournir des aides puisque nous sommes désormais devenus démocrates. Je formule le vœu de voir se concrétiser ces promesses, car il est indispensable que la transition réussisse en Tunisie pour que la Révolution puisse se propager. Le succès de la transition est une responsabilité partagée, le nôtre et celle de la communauté internationale. Nous devons en conséquence conjuguer nos efforts.

 

Q. : Le 24 juillet auront lieu en Tunisie les premières élections libres pour lesquelles fut adopté le principe des listes paritaires hommes-femmes ?

 

R. : Quand on commence une révolution, il ne faut pas faire les choses à moitié. J’avoue que j’ai eu de doutes sur la capacité de certaines circonscriptions reculées de satisfaire à cette exigence, car au cas où cette règle ne peut pas être respectée, la liste sera invalidée. Mais les femmes ont dissipé mes doutes en m’assurant qu’elles allaient être à la hauteur du défi.

 

Q. : Se pourrait-il que le parti islamiste al-Nahda emporterait la majorité des sièges de la future Assemblée constituante ?

 

R. : Les partis islamistes ont été utilisés comme un épouvantail pour faire peur aux Européens. Mais ce sont eux qui ont consenti le plus de sacrifices dans le combat contre la dictature. Au jour d’aujourd’hui, ils émergent comme la force politique la mieux organisée, et ils obtiendront un score qui reflétera leur poids politique. Il ne faut ni minimiser ni exagérer ce résultat. Avec le temps d’autres forces politiques parviendront à mieux se structurer.

 

Q. : Est-ce que la guerre en Lybie a des conséquences sur la Tunisie ?

 

Il s’agit d’une affaire quasiment intérieure à la Tunisie. Nous avons accueilli depuis le début de la guerre 417.000 réfugiés. Certains ont pu revenir dans leur pays d’origine, les autres, Erythréens, Somaliens, en des 200.000 Libyens se trouvent encore sur notre sol, dans des camps ou dans les villes parce qu’ils n’ont pas où aller. Entretemps, 22.000 Tunisiens ont émigré à partir de nos côtes, parmi lesquels 40% sont détenteurs d’un titre de voyage octroyé par Rome. Nous recevons peu d’aide extérieure pour subvenir aux besoins de nos réfugiés, tandis qu’en Europe on continue de s’indigner de l’arrivée de nos émigrants. C’est ce que j’appelle, pratiquer la politique de deux poids deux mesures.

 

Q. :S’il n y a pas eu la guerre en Lybie, pensez-vous que Kadhafi aurait tenté de s’attaquer à la Tunisie démocratique ?

 

R. :C’est probable. Nous le connaissons parfaitement. J’ai confié à un ministre britannique que Kadhafi, c’est comme les rhumatismes, cela provoque parfois des crises aigues et parfois cela se calme.

 

Q. : Est-ce que la visite de l’ancien chef de Gouvernement espagnol Felipe Gonzalez a été utile ?

 

R. : C’est un sage. Il m’a rendu visite et nous avons discuté un bon moment. Il s’y connaît en matière de transition démocratique.

 

Courtesy (El PAIS, quotidien espagnol, Madrid, 26 mai 2011)

Traduction de l’espagnol par Abdelatif Ben Salem


 

Cette gifle qui n’a jamais eu lieu…, en hommage à Fadia, fille de Sidi Bouzid


Par Abdelhamid Larguèche
« Que Dieu bénisse son âme, il était victime, tout comme moi, innocente mais victime aussi de toutes les injustices… » 19 avril 2011, Fadia Hamdi quitte la salle d’audience, innocentée mais accablée, cette fille de 46 ans, discrète, célibataire, de Sidi Bouzid, agent municipal devenue tristement célèbre pour avoir giflé, un 17 décembre 2010 Mohamed Bouazizi, devenu, malgré lui, le symbole de la révolution tunisienne, et au delà, de toutes les révolutions en cours. Son nom figure désormais sur les places publiques du monde, dans les journaux et les livres, gravé à jamais dans les mémoires et les imaginaires.
Cette gifle qui a fait couler tant de sang, tant de larmes et d’encre, qui a fait que tant de corps s’immolent sur l’autel de la révolution à Sidi Bouzid même, là où Mohamed Bouazizi, humilié et méprisé s’est immolé au vu de tous sur la petite place municipale, mais aussi ailleurs, à Alger, au Caire, à Sanaa et partout, cette gifle est simplement imaginaire. Pourtant, elle a fait l’histoire parce qu’elle aurait poussé l’homme à l’immolation, acte désespéré dans un contexte culturel où la gifle d’une femme constitue pour l’homme le comble du déshonneur, et l’immolation était en elle même le résultat et le moment qu’attendait toute une société pour s’embraser et faire embraser le monde.
Imaginaire et pourtant, elle a bien joué sa fonction. Une fonction symbolique, n’ayant nul besoin d’ailleurs de la véracité du fait mais d’une résonnance, d’un écho, écho de la honte, de l’humiliation, l’écho de toutes le gifles auparavant encaissées.
Cette gifle symbolique a fait l‘histoire nouvelle qui s’écrit encore et où les principaux acteurs de l’explosion de la colère, ces jeunes chômeurs diplômés, ces familles des régions déshéritées et oubliées, ces populations urbaines désabusées, ces jeunes facebookers mondialisés par la culture avaient fait de Bouazizi, du moins pour un moment, leur héros providentiel victime de toutes les humiliations et symbole de toutes les frustrations et de tous les espoirs brisés.
Au même moment, Fadia, arrachée par la police de son domicile paternel à El-Karba où elle se réfugiait, faisait figure de bourreau, jetée en prison par ceux-là mêmes qui lui avaient désigné son rôle jusqu’à l’infini détail, gisait dans le mépris si ce n’est dans l’attente de la vindicte fatale. Elle fut dit-on tentée de se suicider, elle apprit dans l’obscurité de la geôle les principales séquences de l’histoire déclenchée par son acte : immolation, puis mort de Bouazizi, explosion de la colère, puis diffusion de la contestation et de la résistance civile dans les villes et villages, jusqu’à l’implosion du régime et la fuite du dictateur ; une histoire qui la dépasse, qui la déborde et qu’aucun imaginaire ne peut féconder. Quel lourd fardeau pèse sur ses petites épaules, sur sa conscience ? Son petit monde s’écroule : un crime qui n’a pas eu lieu mais sanctionné par un châtiment si lourd et dont elle doit assumer la part de lion. Un sentiment de culpabilité l’envahit mêlé au désir de vie et de vérité. Son dernier cri d’espoir a fini par avoir raison de ses détracteurs, de l’insouciance d’une opinion en proie aux peurs et à la suspicion.
Finalement reconnue innocente, mais toujours coupable aux yeux de l’histoire qui s’est déjà faite. L’acte irréel, cette gifle est devenue cet acte symbolique qui devait avoir lieu pour expliquer et justifier cette suite d’une histoire bien réelle. Un acte fondateur, souvent symbolique, repris et retravaillé par la fabrique de l’imaginaire collectif qui lui donne son effectivité et toute son épaisseur.
Supposons un instant que la non-réalité de la gifle soit passée inaperçue! Le mythe serait-il passé ainsi pour ultime explication? Jusqu’à un certain point « la gifle » imaginaire a été la cause réelle d’une immolation tout aussi réelle. Il a fallu que toutes les humiliations réelles et restées inefficaces soient réactivées (par une fausse humiliation). L’inventeur de la gifle (un fabulateur anonyme disséminé dans la foule des spectateurs) est le véritable acteur, le premier manipulateur.
Ainsi est faite l’histoire, telle qu’elle est représentée et telle qu’elle est vécue. C’est ainsi que la rude épreuve pour l’historien consiste à déconstruire les mythes qui l’entourent et la nourrissent, en lui opposant le réel, hélas souvent insaisissable parce que sans cesse enfoui dans ces tissus d’imaginaires qui se bousculent et l’enserrent.
Souvent les actes de fondation de nos villes et villages, de nos tribus et nos épopées sont le produit d’un imaginaire collectif fait de légendes et de mythes qu’on se plait à narrer, de Carthage à Kairouan et des Beni hilal jusqu’aux Hmamma . Que serait l’histoire de Carthage sans la légende d’Elyssa où le long exode des hilaliens sans la geste d’El-Jazia ? Une histoire banale et sans âme, intransmissible dans la culture.
Et même notre révolution la plus moderne, celle qui annonce solennellement notre entrée triomphale dans l’histoire sera définitivement marquée du sceau de l’imaginaire et du mythologique.
Dans ce mythe qui se construit au présent, fait de violence, de sacrifice et d’endurance, si Bouazizi symbolise bien par son geste la victime sacrifiée, Fadia dont le nom propre invoque le sacrifice symboliserait à merveille l’endurance qui accompagne dans sa résilience cette tragédie moderne de l’homme tunisien en quête de délivrance.
Le mythe ne condense jamais la vérité de l’histoire, il théâtralise l’histoire en la peuplant de faits imaginaires pour l’inscrire dans le cycle éternel du mythe re-fondateur.
 
L’histoire nous a appris, et la révolution tunisienne n’y fait pas défaut, toutes les batailles pour la justice laissent leurs lots d’injustices derrière elles. Fadia, acquittée mais à jamais coupable, coupable par nécessité, celle de faire sens là où auparavant, peut être, le symbolique seul n’a pu faire flamber l’étincelle.
(Source : « Leaders.com.tn », le 25 mai 2011)

 
 
 

Mon Programme pour la Constituante


Par Ahmed Néjib Chebbi
Née du sacrifice de nos martyrs et du courage de notre jeunesse, la Révolution du 14 janvier marque une étape décisive sur le chemin de l’accession de la Tunisie à la modernité politique. Elle constitue l’aboutissement et le couronnement d’une histoire entamée voilà exactement un siècle et demi : celle du réformisme tunisien. Il appartient à l’Assemblée constituante de franchir l’ultime étape, celle de l’émancipation définitive du peuple tunisien, en relevant notre Etat et en le dotant d’une nouvelle Constitution, démocratique et respectueuse des droits et des libertés.
La deuxième République tunisienne sera une démocratie apaisée et réconciliée. La deuxième République tunisienne sera une démocratie sociale et solidaire, qui protège les plus faibles et veille à l’équilibre entre les régions. Enfin, la deuxième République tunisienne sera une démocratie décentralisée, qui met tout en œuvre pour insuffler le principe électif à tous les échelons de l’Etat, national, régional et municipal, et pour renforcer les mécanismes de participation de la société civile.
La refondation de notre République passe donc d’abord par l’instauration d’un régime pluraliste fondé sur la séparation des pouvoirs. Mais instituer la démocratie ne suffit pas : il faut aussi créer les conditions propices à l’instauration d’un « Etat de libertés ». Une « Déclaration des droits », votée séparément par la Constituante, donnera une consécration politique et juridique au formidable élan du peuple tunisien vers la liberté. Elle permettra de protéger efficacement l’individu contre toutes les formes d’arbitraire, l’arbitraire du pouvoir exécutif comme l’arbitraire du corps législatif. Le juge tunisien, dans la nouvelle architecture institutionnelle, est appelé à devenir le rempart et le bouclier des droits de l’homme. Pour cette raison, l’indépendance de la justice doit être réalisée et assortie de garanties palpables.
1) Une « Déclaration des droits », à valeur supra-constitutionnelle, pour protéger l’individu contre toutes les formes d’arbitraire.
Les libertés individuelles et les droits fondamentaux de la personne doivent être garantis et placés hors d’atteinte, au dessus des droits de l’Etat, afin que celui-ci ne puisse jamais plus se transformer en instrument d’oppression. Ces droits, au premier rang desquels figurera le droit à l’intégrité et à l’inviolabilité de la personne humaine, seront énumérés et consignés dans une Déclaration des droits et libertés, votée par la Constituante, mais distincte de la Constitution. Cette Déclaration ne pourra faire l’objet d’aucune révision ultérieure. Elle sera opposable par le citoyen devant toutes les juridictions. Elle dira l’attachement indéfectible et profond du peuple tunisien à la liberté sous toutes ses formes : liberté de pensée, liberté de conscience, liberté d’association et de réunion, libertés politiques et syndicales. Le recours à la torture et aux châtiments inhumains, cruels ou dégradants sera proscrit à jamais, et le droit à ne pas être inquiété pour ses opinions et croyances affirmé solennellement. La Déclaration proclamera que les femmes et les hommes naissent libres et égaux. Elle garantira le droit au procès équitable et les droits de la défense.
2) Une démocratie pluraliste, fondée sur le principe de la séparation des pouvoirs.
Le président, chef de l’Etat, et chef de l’exécutif, est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Il est garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect de la Constitution, des traités et des lois, et assure la continuité de l’Etat. Il n’a pas l’initiative des lois, sauf les lois de finances, qui ont caractère de loi organique. Il choisit les ministres, les ambassadeurs et les hauts fonctionnaires, mais leurs nominations, pour prendre effet, doivent être entérinées par les commissions des deux chambres du parlement. Il peut être renvoyé devant la Haute cour, pour haute trahison, s’il est mis en accusation par le Congrès à la majorité des deux tiers, et redevient un justiciable ordinaire à l’expiration de son mandat.
Le Parlement est composé de la Chambre des députés et du Sénat, qui assure la représentation des régions. L’une et l’autre des deux chambres sont élues au suffrage universel direct, les députés pour cinq ans, les sénateurs pour six ans. Le Sénat est une assemblée paritaire, chaque gouvernorat y dispose de quatre représentants, deux femmes et deux hommes ; les Tunisiens de l’étranger disposent de deux représentants. Le Parlement ne peut être dissout. Il est l’unique dépositaire du pouvoir législatif, mais le président a la faculté d’exiger une seconde délibération des lois. Le texte, pour entrer en vigueur, doit alors être ré-approuvé à la majorité des deux tiers, par chacune des deux chambres.
3) Une justice indépendante, avec, en son sommet, un Tribunal constitutionnel dont les décisions s’imposent aux pouvoirs publics.
La Tunisie a souffert de la tyrannie parce que les hommes qui la dirigeaient se sont laissés glisser sur la pente du despotisme et parce qu’aucune institution n’a été capable de les freiner et des les arrêter. L’indépendance de la justice doit être instaurée et garantie. C’est la condition de l’Etat de droit. Il ne doit pas exister de tribunaux d’exception et le juge doit être soustrait à toutes les influences, celle du pouvoir exécutif comme celle de l’opinion. L’avancement, la mutation et la sanction doivent être du seul ressort du Conseil supérieur de la magistrature. Le Conseil est composé de treize membres, dont quatre nommés par le Parlement, sept magistrats, désignés par leurs pairs, ainsi que le président du Tribunal administratif et le premier président de la Cour de cassation. Le Tribunal constitutionnel comprend onze membres, nommés pour un mandat unique de neuf ans : quatre juges, désignés par la Chambre des députés, quatre juristes, avocats ou universitaires, choisis par le Sénat, et trois personnalités qualifiées, nommées par le président de la République. Le Tribunal constitutionnel est juge du contentieux électoral et valide l’élection du président de la République. Il statue sur la constitutionnalité des lois. Ses décisions sont rendues sous trente jours. Le président de la République, les présidents des deux chambres, ainsi que dix députés ou dix sénateurs peuvent saisir le Tribunal, avant la promulgation des lois, afin qu’il se prononce sur leur conformité à la Constitution et à la Déclaration des droits et libertés. Les arrêts du Tribunal constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. Les justiciables, quand leurs droits ou libertés fondamentales sont en cause, ont la possibilité de soulever, en cours de procès, une exception d’inconstitutionnalité. Si le motif est jugé sérieux, la juridiction peut saisir le Tribunal constitutionnel.
4) Un double référendum, pour donner au peuple le dernier mot.
Le peuple tunisien sera invité à se prononcer, le même jour, par référendum, sur la Constitution de la deuxième République, d’une part, et sur la Déclaration des droits et libertés d’autre part.
(Source : « Leaders.com.tn », le 20 mai 2011)


 
 

Le printemps arabe au coeur des annonces du G8


 

Les pays les plus riches de la planète vont lancer un « partenariat durable » avec la Tunisie et l’Egypte. Une façon pour Nicolas Sarkozy de relancer son Union pour la méditerranée en perte de vitesse.

Invités d’honneur du sommet du G8 de Deauville, l’Egypte et la Tunisie n’auront pas fait le déplacement en vain. Dans la déclaration finale qui doit être prononcée ce vendredi par Nicolas Sarkozy, les huit pays les plus riches de la planète devraient annoncer un « partenariat durable » avec les deux leaders du printemps arabe. Une série de mesures économiques et politiques pour « soutenir les réformes démocratiques et répondre aux aspirations pour la liberté et l’emploi, en particulier des femmes et de la jeunesse », selon des extraits de la déclaration finale que s’est procurée la presse. Si les détails concrets de ce programme de soutien ne sont pas encore connus, Le Caire a d’ores et déjà réclamé entre 10 et 12 milliards de dollars d’ici mi-2012 pour relancer son économie et consolider la démocratie naissante. Pour sa part, Tunis estime ses besoins à 25 milliards de dollars sur cinq ans.

Alors que les pays du G8 ont du mal à s’accorder sur les autres sujets d’actualité brûlants -la politique internationale sur le nucléaire après la catastrophe de Fukushima au Japon, ou la réaction vis-à-vis de la Libye ou de la Syrie-, ce consensus sur un dossier fort est une bouffée d’air frais pour Nicolas Sarkozy. L’hôte du sommet, en quête de stature internationale à un an de la présidentielle française, a ainsi l’occasion d’afficher son volontarisme en relançant l’Union pour la Méditerranée (UpM), crée en 2008 sous sa propre impulsion. « Il faut dire les choses, l’UpM est une montagne qui a accouché d’une souris. La chance de Nicolas Sarkozy est de pouvoir incarner, grâce à sa casquette de président du G8, une coopération entre les pays industrialisés et les pays de la rive sud de la Méditerranée », décrypte un diplomate français. « Alors que l’UpM n’avait pas réussi à devenir indispensable, les évènements en Egypte et en Tunisie lui donnent une raison d’être inespérée pour Sarkozy », poursuit ce spécialiste.

Soutien officieux à Christine Lagarde

Ce programme de soutien aux deux foyers des révoltes arabes vient appuyer d’autres annonces plus symboliques. Les pays du G8 affichent leur « confiance » dans la capacité du Japon à surmonter la catastrophe de Fukuskima. Ils appellent également la Syrie et à la Libye à «mettre un terme aux violences», et condamnent l’usage de la force au Yémen, autre pays arabe au bord de la guerre civile dont la répression de la contestation sociale a causé 28 morts depuis le début de la semaine.

A moins d’une mesure sortie du chapeau qui aurait été tenue secrète jusqu’à demain, la nouveauté de Deauville 2011 sera la reconnaissance du rôle des Etats dans la réglementation d’Internet. Comme souvent dans ce genre de sommets, les évènements à la marge suscitent plus de passion que les sujets inscrits sur l’agenda. Même si la déclaration finale ne fera pas référence à la succession de Dominique Strauss-Kahn à la tête du FMI, les différents dirigeants ont apporté un soutien officieux à Christine Lagarde. L’accord franco-russe sur la livraison de quatre avions Mistral après plusieurs années de négociations a également constitué un petit évènement en soi. Mais rien de comparable avec l’émoi suscité par le ventre rond de Carla Bruni-Sarkozy, radieuse sous les crépitements des flashs des photographes.

Source: “La Tribune” Le 26-05-2011

La Révolution tunisienne est-elle en panne ?


 

La croissance de la Tunisie devrait passer au dessous de 1% en 2011. Est-ce préoccupant ?

– C’est vrai. Notre économie n’est pas florissante, mais petit à petit, elle se redresse. Les Tunisiens se remettent au travail. J’espère que la saison touristique sera moins mauvaise que prévu. L’amélioration de la sécurité dans le pays devrait encourager les visiteurs étrangers à revenir.

La Tunisie sera présente au G8 le 27 mai à Deauville. Qu’attendez-vous de cette réunion ?

– Avec l’appui du président du G8, M. Nicolas Sarkozy, nous espérons que la Tunisie sera entendue. Nous avons établi un plan de développement de 125 milliards de dollars. La plus grande part sera financée par les Tunisiens eux-mêmes. Nous demandons à la communauté internationale de ne couvrir qu’une petite partie de cette somme : 25 milliards sur cinq ans. Mais nous traversons actuellement une conjoncture difficile. Pour la première tranche, un décaissement immédiat serait souhaitable.

La France est-elle toujours critiquée en Tunisie pour son soutien à Ben Ali ?

– Cette mauvaise image est effacée. Mon gouvernement regarde, lui, vers l’avenir, beaucoup moins vers le passé.

On parle d’un report des élections en octobre. Y êtes-vous favorable ?

– Pour des raisons de crédibilité, je souhaite que les élections pour l’assemblée constituante aient lieu à la date prévue du 24 juillet. Mais cette décision ne relève pas de la compétence du gouvernement. Elle appartient à la commission indépendante qui sera chargée d’organiser et de contrôler le scrutin. A l’avenir, nous nous bornerons à lui apporter un appui logistique.

L’ex-ministre de l’Intérieur, Farhat Rajhi, a évoqué la menace d’un putsch militaire si les islamistes d’Ennahda remportaient le scrutin.

– Il ne savait pas ce qu’il disait. D’ailleurs, il a déclaré que les propos qui lui avaient été attribués ne correspondaient pas véritablement à sa pensée. Nous avons la chance d’avoir une armée républicaine qui ne cherche pas le pouvoir. Autrement, elle l’aurait pris le jour du départ de Ben Ali.

Farhat Rajhi doit être traduit devant un tribunal militaire pour ses propos. Cela ne risque-t-il pas d’envoyer un signal négatif ?

– Une action a été engagée pour outrage à l’armée. Elle suit son cours. On ne peut pas porter sur la place publique des accusations pareilles contre une institution respectable.

Le couvre-feu a été réinstauré à Tunis. Des manifestations ont été réprimées. La transition démocratique est-elle en panne ?

– Le couvre feu vient d’être levé. Dans toutes les manifestations, il y a des casseurs, y compris chez-vous. Mais il y a aussi une jeunesse qui s’inquiète. L’avantage en Tunisie, c’est que tout le monde s’exprime dans un cadre légal. Et ceux qui s’en écartent, tombent sous le coup de la loi.

Des groupes liés à l’ancien régime cherchent-ils à saper le processus démocratique ?

– De qui parle-t-on ? S’il s’agit du parti lui-même, le RCD, il est dissout. Quand aux individus, ils ont leurs droits et leurs devoirs, comme tout le monde. Ceux qui ont occupé des responsabilités sous l’ancien régime ne pourront pas participer aux élections. Les choses sont en train de s’estomper. Aujourd’hui, tout le monde s’inscrit dans le cadre du processus électoral.

Et la menace terroriste ? Deux militants d’al Qaïda auraient été tués récemment par vos forces de sécurité.

– Les forces de sécurité et l’armée sont particulièrement vigilantes, surtout le long de nos frontières. Des personnes infiltrées de Libye viennent d’être interceptées. Il y a eu cet échange de feu. Nous avons eu à déplorer nous aussi des morts.

Craignez- vous des tentatives de déstabilisation de la part de Kadhafi ?

– Par le passé, il a cherché à nous déstabiliser. Aujourd’hui, dans la situation, qui est la sienne, je ne crois pas qu’il en soit capable, à moins qu’il veuille détourner l’attention sur ce qui se passe chez-lui. Mais c’est peu probable.

Des bars, des vendeurs d’alcool, des maisons closes ont été attaqués. Y a-t-il un danger islamiste en Tunisie ?

– Il existe une minorité extrémiste. Mais elle est très marginale. Aucun pays au monde n’est épargné par ce phénomène. Il y a par contre les partis islamiques qui ont une existence légale et qui veulent participer aux élections, comme tout le monde.

Ennahda est-t-il, selon vous, devenu un parti légitime ?

– En tout cas, il a l’autorisation d’exercer. Il est un parti légal. Légitime, c’est un mot très différent. Mais il s’active, tient des réunions, publie ses programmes, il s’affiche comme un mouvement légaliste. Il dit clairement qu’il va respecter le code personnel. Donc pour l’instant, ça va.

Ses engagements démocratiques sont-ils sincères ?

– Est-ce qu’en politique, on peut parler de sincérité ? Mais nous n’avons aucune raison de mettre sa parole en doute.

Source : « Le Nouvel Observateur » Le 25-05-2011

Tunisie : la date de l’élection de la Constituante divise toujours


La commission électorale indépendante tunisienne a décidé que l’élection de l’Assemblée constituante serait reportée au 16 octobre, contre l’avis du gouvernement qui avait fixé la date du 24 juillet, a annoncé, jeudi 26 mai à la presse, son président,Kamel Jendoubi.

« La haute instance chargée des élections a préparé un calendrier qui fixe au 16 octobre l’élection de l’Assemblée constituante », qui verra pour la première fois les Tunisiens voter librement, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, à l’issue d’une réunion avec les partis politiques tunisiens. « La date du 24 juillet ne figure pas dans le calendrier », a-t-il insisté.

Mardi, le gouvernement de transition avait pourtant déclaré que ce scrutin-clé serait maintenu le 24 juillet, en affirmant que le décret-loi de convocation des électeurs entérinant cette date avait été signé par le président par intérim, Foued Mebazaa.« La haute instance a décidé le report des élections au 16 octobre pour des raisons techniques et logistiques », a précisé un de ses membres, Arbi Chouikha.

« IMPOSSIBLE D’ORGANISER LES ÉLECTIONS SELON LA DATE QUI A ÉTÉ FIXÉE PAR LE GOUVERNEMENT »

« Nous sommes les garants des élections transparentes, libres et démocratiques qui auront lieu pour le première fois dans notre pays », a-t-il affirmé. Or « il est impossible de les organiser selon la date qui a été fixée par le gouvernement », a-t-il assuré en affirmant que « la décision finale est entre les mains de la haute instance ».

Le porte-parole du gouvernement, Taïeb Baccouche, a déclaré que « le Conseil des ministres se réunira pour en discuter ». « Si nous sommes convaincus par la commission de l’impossibilité de la tenue des élections le 24 juillet, nous pouvons promulguer un autre décret » pour remplacer celui fixant au 24 juillet la date de l’élection, a-t-il précisé.

Une majorité de partis politiques était jusqu’ici favorable au maintien de l’élection le 24 juillet, notamment le parti islamiste Ennahda et le parti démocrate progressiste, au nom de la stabilité du pays. D’autres, comme le Parti communiste et ouvrier tunisien, souhaitaient avoir plus de temps pour faire campagne et mettaient en garde contre les risques d’une élection mal préparée.

Source: ”Le Monde.fr” Le 26-05-2011

Tunisie : visite de François Hollande au Mouvement Ettajdid


 

Une délégation du PS français, conduite par François Hollande, a rendu visite au Mouvement Ettajdid, mardi 24 mai 2011. Au cours de cette rencontre, François Hollande a exprimé la détermination des forces démocratiques françaises à soutenir activement la transition de la Tunisie vers la démocratie.

La France, par-delà ses clivages, a-t-il affirmé, doit aider la Tunisie à affronter les difficultés économiques et sociales auxquelles elle est confrontée dans un environnement régional et international difficile. Il a déclaré sa confiance dans le peuple tunisien et dans sa capacité, fort de ses nombreux acquis depuis l’indépendance, à fonder une démocratie stable et le respect des libertés. Il a également mis l’accent sur la nécessité de l’union des forces démocratiques tunisiennes, en particulier les partis qui se sont battus contre le régime déchu, pour apparaître comme la principale force politique et fonder une Constitution à la hauteur des sacrifices consentis par le peuple tunisien et répondre à ses aspirations. En réponse, Ahmed Brahim, premier secrétaire du Mouvement Ettajdid, a rappelé que son parti n’a cessé d’œuvrer pour la création d’une large alliance des forces démocratiques, progressistes et modernistes. Malgré les réserves exprimées par les partis concernés, il poursuit ses efforts et ses contacts pour faire réussir le rassemblement le plus large. Il s’est félicité de la convergence d’analyses avec le PS sur la situation qui prévaut actuellement en Tunisie et sur les exigences qu’elle requiert. Il a ainsi affirmé sa confiance dans la capacité du peuple tunisien de réussir la transition démocratique en toute souveraineté tout en consolidant les relations de coopération avec la France et l’Europe.

Source : « Investir en Tunisie » Le 26-05-2011

François Hollande en Tunisie. Qu’est-il venu nous dire?


 

Par Emmanuelle Houerbi

Pendant sa visite de deux jours à Tunis, François Hollande a évoqué tous les sujets. Décryptage du message d’un homme en campagne prônant un partenariat renouvelé entre la Tunisie et la France.

M. Hollande a parlé de la préparation des élections en Tunisie, l’aide internationale et le G8, la question de la dette, l’immigration, ou la place des jeunes dans la société, tout y est passé… Sans oublier bien sûr les ambitions présidentielles de l’actuel favori du Parti Socialiste français. En marge de ses rencontres avec des jeunes, des leaders de la transition démocratique et les principaux responsables politiques, François Hollande a participé, mardi, à un débat sur l’avenir des relations franco-tunisiennes.

Appel à un rassemblement immédiat de la gauche Après avoir rencontré le président de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution et les représentants des principaux partis de gauche (Ettadjid, Etakatol, et Pdp), M. Hollande a pointé le danger de l’éparpillement et l’urgence de constituer un front commun entre des partis qui partagent le même projet et les mêmes valeurs démocratiques.

Il a rappelé que le scrutin proportionnel choisi pour les prochaines élections fait la part belle aux grands partis en excluant les autres de la scène politique, comme lors du deuxième tour de la présidentielle de 2002, où les Français ont eu à choisir entre Chirac et Le Pen. Tout en comparant la poussée de l’extrême-droite en France au celle des partis islamiste en Tunisie.

Sans avenir pour les jeunes, pas de démocratie Faisant à la fois référence aux révolutions arabes et à la révolte qui gronde en ce moment en Espagne, il a rappelé que les jeunes sont le levier de la réussite d’un pays et que, lorsqu’on ne leur donne pas la place qu’ils méritent, ils finissent forcément par se soulever et à se détourner de la démocratie.

M. Hollande a prôné un pacte entre les générations, une pyramide des âges équilibrée dans l’entreprise et rappelé l’importance majeure de la formation. Il a aussi pointé la situation alarmante des jeunes issus de l’immigration en France, stigmatisés et majoritairement exclusde la société, malgré le plus souvent un passeport français en bonne et due forme ! Dénonçant un repli de l’Europe sur elle-même, M. Hollande a particulièrement fustigé les dernières déclarations de la droite française et rappelé les vrais chiffres de l’immigration: sur les 200.000 immigrés arrivant en France chaque année, près de la moitié viennent de plein droit dans le cadre de l’immigration familiale et du rapprochement des conjoints. Viennent ensuite 60.000 étudiants, dont la France a besoin pour son rayonnement et son dynamisme, les universités souhaitant même en recevoir plus. Vient enfin l’émigration économique, la fameuse «immigration choisie», que Sarkozy voulait voir augmenter précédemment, et que l’actuel ministre de l’Intérieur veut à présent réduire de 30.000 à 15.000 individus: un chiffre dérisoire par rapport aux 4 millions de chômeurs! Pour M. Hollande, le vrai problème concerne les clandestins en France, pour lesquels il préconise la régularisation au cas par cas.

Une aide immédiate de la communauté internationale Lors du G8, jeudi et vendredi à Deauville, François Hollande compte plaider la cause d’une aide immédiate de 500 millions d’euros destinée à soutenir l’organisation des élections du 24 juillet, ainsi qu’une aide de 25 milliards sur 5 ans, sous forme de prêts ou de dons. Il a aussi prôné un audit de la dette, tout en rappelant que celle-ci ne représente «que» 37% de la richesse nationale, contre 85% pour la France! Il a toutefois proposé, vu la situation actuelle, de dispenser la Tunisie du paiement des intérêts, mais sans suspendre complètement les paiements de la dette elle-même, pour ne pas voir baisser la notation de la Tunisie. Candidat avant tout, François Hollande a régulièrement émaillé son discours d’allusions aux primaires socialistes et à l’élection présidentielle de 2012, et de piques bien senties à l’adresse de la droite française, évoquant successivement l’hystérie provoquée par l’arrivée de 25.000 Tunisiens à Lampedusa, l’Union pour la Méditerranée (UpM) initiée par Sarkozy et ses grands amis Ben Ali et Moubarak, les dernières déclarations du ministère français de l’Intérieur ou la réaction catastrophique de la France lors de la révolution tunisienne. Tout cela pour le plus grand plaisir d’une salle, composée principalement de Français et de binationaux, visiblement déjà acquise à sa cause. Un public auquel il n’a pas manqué de rappeler que tous les Français, et non pas seulement les militants socialistes, pourront voter aux primaires le 9 octobre prochain. Avis aux amateurs.

Source : « Kapitalis » Le 26-05-2011

Tunisie : Election de la constituante – Pas droit à l’erreur


La Tunisie entre dans la dernière ligne droite avant l’élection cruciale d’une Assemblée constituante. Le gouvernement de transition a maintenu la date au 24 juillet contre l’avis de la commission électorale pour qui les conditions logistiques de l’organisation de ce scrutin ne seront pas remplies à temps.

Sera-t-elle une décision ferme et définitive ? Pas du tout sûr. Quelques partis politiques continuent à communiquer et même harceler pour dire qu’une élection à la date de 24 juillet sera de toute façon une élection condamnée à l’échec. Pour le POCT- extrême gauche, les partis politiques ne sauront pas prêt à cette date pour s’organiser pour mener une compagne permettant aux tunisiens de choisir en connaissance de cause et en toute responsabilité. Pour le Parti ETTAJDID, le renouveau (ancien parti communiste tunisien), le maintien de cette date pour organiser la première élection libre et démocratique est une décision irresponsable qui mettrait en danger les fondamentaux de la révolution et rappelle la responsabilité du gouvernement transitoire en cas de l’échec des élections.

En revanche, comme Ennahdha – le parti islamiste, le CPR son allié, le PDP, le FTDL – centre gauche, saluent tous cette décision du gouvernement et appellent ce dernier à mettre le paquet pour raccourcir les délais et respecter la date du 24 juillet.

Croyant que la stabilité, la reprise économique du pays et la confiance du tunisien à ses institutions sont tributaires à la légitimité de ces dernières, j’ai toujours appelé à travers mes différents Twittes au non report de cette date. En dépit des critiques de ces dernières semaines adressées au Premier Ministre Tunisien BCE et le retour des manifestations contre le gouvernement transitoire qui avait conduit ce dernier à réinstaurer le couvre feu durant une semaine, j’ai exprimé à maintes reprises mon soutien à ce gouvernement et à ce premier ministre et ce jusqu’au 24 juillet, date de fin de mission de ce gouvernement.

Il était certain qu’une nouvelle démission du gouvernement transitoire conduirait le pays à une crise profonde, nul ne pourra prévoir ses conséquences. Je suis convaincu que ce scénario catastrophe conduirait à la rupture de confiance de l’armée envers nos politiques pour assurer la transition démocratique. Ce qui amènerait l’armée tunisienne à prendre en main les commandes, et l’unité du pays en serait donc ébranlée. On serait, dès lors, à des années lumière de la démocratie et des libertés tant convoitées par le peuple tunisien.

Nous voilà donc fixé, au moins à ce jour, sur la date de la première élection libre et démocratique en Tunisie. Pour autant, rien n’est encore gagné. La commission chargée d’organiser ces élections évoque des contraintes logistiques immenses liées à la formation de 20 000 personnes qui seront chargées d’administrer ces élections, à l’établissement des listes électorales…etc. Rien d’étonnant, vu qu’on parte du néant. Mais, il est de la responsabilité du gouvernement de mettre tous les moyens matériels, humains et surtout financiers. J’insiste sur les moyens financiers car tout le monde sait qu’avec plus de ressources financières les délais se contractent exponentiellement. Il est également de la responsabilité de la communauté internationale d’apporter leur savoir faire et leurs expériences dans ce domaine pour soutenir cette jeune future démocratie. Il est urgent aujourd’hui de passer de la bonne parole aux actes. Nous continuons à entendre ici et là-bas le soutien de l’union européenne, des Etats Unies d’Amérique mais nous voyons peu pour ne pas dire pas d’actes concrets.

La Tunisie est en attente du savoir faire Européen et Américain dans l’organisation de tel scrutin.

La Tunisie est toujours en attente de l’apport logistique : matériels et experts.

Ceci étant dit, l’attentisme, face aux échéances, serait une erreur fatale pour l’atteinte de l’objectif final à savoir organiser une élection libre et démocratique le 24 Juillet. C’est pour cela, nous pouvons saluer la bonne volonté de l’ensemble des acteurs qu’il s’agit des partis politiques, des différentes commissions indépendantes et du gouvernement pour conduire une démarche scientifique et politique pour organiser ce scrutin.

Le peuple tunisien est à la fois acteur, observateur et juge final de la réussite ou de l’échec de ce scrutin. Ce peuple qui a donné de son sang ne pourra accepter une réussite mitigée ou douteuse de scrutin du 24 juillet. En dépit des contraintes et des obstacles qui nous attendent dans les jours et les semaines à venir, je reste optimiste et persuadé que la Tunisie aura à la veille de la fête de la république sa première élection libre, que la Tunisie marquera l’histoire et donnera la ligne de conduite non seulement aux autres peuples arabes souffrant de la dictature mais également aux peuples européens inspirant récupérer leur pouvoir complètement décimé par les institutions soit disons représentatives.

La responsabilité de la Tunisie et des Tunisiens vis-à-vis de l’Histoire des peuples libres et dignes, ne leur donne pas droit à l’erreur. Alors travaillons, travaillons, travaillons la liberté est au bout du chemin.

Source : « AgoraVox » Le 26-05-2011

La Tunisie doit redéfinir sa législation antiterroriste pour éviter les abus


TUNIS – Le rapporteur spécial de l’ONU pour la protection des droits de l’Homme dans la lutte antiterroriste, Martin Scheinin, a invité jeudi la Tunisie à redéfinir sa législation antiterroriste, héritée du régime Ben Ali, et à poursuivre les auteurs de crimes et abus commis en son nom. La loi antiterroriste instaurée en 2003 est basée sur une définition beaucoup trop large du terrorisme, qui a servi d’outil pour opprimer toute manifestation de dissension politique ou autre, a-t-il déclaré à la presse au terme d’une visite de 5 jours. Le gouvernement de transition l’a admis en promulguant une loi d’amnistie pour tous les condamnés au titre de cette loi, et j’ai entendu de nombreux interlocuteurs confirmer que la loi contre le terrorisme de 2003, source de tant d’abus, n’avait plus servi depuis les événements du 14 janvier, date de la chute du régime de Zine el Abidine Ben Ali, s’est félicité M. Scheinin. Toutefois, à la prison de Mornaguia (30 km de Tunis), on m’a dit que des juges ordonnaient parfois la mise en détention de prévenus au titre de cette loi de 2003, a-t-il déploré, en invitant la Tunisie à la remplacer par un cadre législatif approprié respectueux des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, la Tunisie devrait poursuivre ses enquêtes au sujet des allégations de torture et de détention illégale, souvent commis sous prétexte de lutte contre le terrorisme, a souligné le rapporteur de l’ONU, qui a rencontré en Tunisie des membres du gouvernement, des forces de l’ordre et des détenus soupçonnés de terrorisme. Mener des enquêtes, poursuivre et juger les responsables de ces crimes pourrait contribuer à restaurer la confiance entre la population et les forces de sécurité du pays, a-t-il fait valoir. M. Scheinin, qui avait déjà effectué une mission en Tunisie en janvier 2010, a salué la mise en retraite anticipée d’une quarantaine de responsables de la police pour leur comportement du temps du régime du président déchu Ben Ali. Mais ce n’est pas assez, a-t-il estimé: Au ministère de l’Intérieur, j’ai vu de mes propres yeux que des responsables qui étaient en poste l’an dernier et qui savaient certainement ce qui se passait sont toujours en fonction, parfois à un poste hiérarchique supérieur. Interrogé sur un risque terroriste en Tunisie, le rapporteur de l’ONU a indiqué que la Tunisie fait partie des pays dans lesquels la menace est réelle, mais que ce risque relevait plutôt d’une utilisation du territoire tunisien pour des activités transfrontalières que d’une menace imminente d’attentat. Le 18 mai, deux hommes fortement suspectés d’appartenir à Al-Qaïda ont été tués par les forces tunisiennes, à environ 200 km à l’ouest de Tunis. Trois jours auparavant, un Algérien et un Libyen suspectés d’appartenance à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ont été arrêtés en possession d’explosifs à 130 km de la frontière avec la Libye.

Source : « Romandie » Le 26-05-2011

Tunisie : un expert de l’ONU appelle à renforcer la lutte contre l’impunité


26 mai 2011 –

Après une visite de quatre jours en Tunisie, du 22 au 26 mai, le Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme, Martin Scheinin, a appelé les autorités transitoires à renforcer la lutte contre l’impunité et à garantir que les auteurs de violations des droits de l’homme soient traduits en justice.

« Je demande que des mesures soient prises pour lutter contre l’impunité, afin de garantir que les auteurs des crimes et violations des droits de l’homme commis au nom de la lutte contre le terrorisme rendent des comptes », a déclaré Martin Scheinin dans un communiqué.

« Je salue les efforts du gouvernement car j’ai pu mener des entretiens ouverts et constructifs avec de nombreux agents de l’Etat, y compris au niveau le plus élevé. J’insiste sur le besoin d’entreprendre des réformes nécessaires dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, conformément au droit international des droits de l’homme », a-t-il ajouté.

Au cours de sa visite, l’expert indépendant a pu effectuer des entretiens avec le ministre de la justice et des droits de l’homme, le ministre de l’intérieur et du développement local, le secrétaire d’Etat pour les affaires étrangères, le procureur-général pour l’administration de la justice, le président de la commission d’établissement des faits sur les abus des droits de l’homme depuis le 17 décembre 2010, le porte-parole du Conseil de l’instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, ainsi qu’avec des hauts représentants des agences chargées du maintien de l’ordre.

Martin Scheinin a pu rencontrer des représentants de la société civile, y compris des avocats. Il s’est également rendu dans le centre de détention de Bouchoucha et à la prison de Al Mornaguia où il a pu s’entretenir en privé avec des suspects de crimes de terrorisme.

« Mon mandat met l’accent sur la protection des droits de l’homme tout en luttant contre le terrorisme. Je constate quelques mesures liminaires qui indiquent que la Tunisie a rompu avec son passé. C’est avec intérêt que j’ai entendu de nombreux interlocuteurs confirmer que la loi sur la lutte contre le terrorisme de 2003, source de tant d’abus, n’avait plus servi depuis les évènements du 14 janvier, notamment à l’encontre du peuple tunisien qui exigeait le changement », a souligné l’expert indépendant.

« Dans le souci de donner au peuple tunisien toutes les garanties de sécurité qu’il mérite, je mets mes services et ceux de mon mandat à disposition pour remplacer la loi de 2003 par un cadre législatif approprié qui règlemente les efforts déployés par la Tunisie pour lutter contre le terrorisme, conformément aux conventions et protocoles internationaux de lutte contre le terrorisme, tout en garantissant le respect des droits de l’homme et les libertés fondamentales », a-t-il proposé tout en réaffirmant que « la menace mondiale que pose le terrorisme est bien réelle ».

Martin Scheinin s’est félicité de la dissolution de la Direction pour la sécurité de l’Etat qui jouissait d’une impunité et qui était, selon l’expert, la principale instance responsable des actes de torture et de détention arbitraire.

« Néanmoins, mon rapport précédent insistait aussi sur le fait qu’il n’existait pas d’information aisément disponible au sujet de plusieurs organes de sécurité de l’Etat tunisien. La culture du secret était un élément essentiel créant une véritable d’impunité permettant à ces agents d’agir », a-t-il dit.

Pour l’expert, ces premières étapes sont positives. Mais il a rappelé la nécessité pour le pays « d’affronter les pages noires de son passé ».

« Certains agents continuent de nier que des bureaux du Ministère de l’intérieur aient servi de salle d’interrogatoires et de torture. On m’a fait savoir qu’à ce jour, 60 agents de sécurité ont été arrêtés, 7 cadres supérieurs poursuivis et 42 agents contraints de prendre leur retraite ou partis volontairement à la retraite. La Tunisie devrait poursuivre ses enquêtes ex officio au sujet des allégations de torture et de détention illégale, autant d’actes souvent commis au prétexte de la lutte contre le terrorisme. Le fait de mener des enquêtes, de poursuivre et de juger les responsables de ces crimes pourrait contribuer à reconstruire la confiance entre la population et les forces de sécurité du pays », a recommandé Martin Scheinin.

Enfin, il a appelé les autorités tunisiennes à mettre en place des règles de protection lors des gardes à vue notamment l’accès à un avocat de son choix dès l’arrestation et sa présence à chaque interrogatoire.

Il présentera son rapport complet au Conseil des droits de l’homme de l’ONU en 2012.

Source: ”Centre d’actualites de l’onu” Le 26-05-2011

Marouane Ben Zineb, l’autre martyr de la révolution tunisienne


 

Par Ridha Kéfi

Qui est ce martyr dont Kadhem Zine El Abidine, représentant du ministère de la Justice, a annoncé, mardi, l’autopsie du corps pour savoir les raisons exactes de sa mort brutale… il y a douze ans, probablement tué sur ordre de… Ben Ali?

L’histoire tragique de ce génie de l’informatique, mort à 27 ans dans des circonstances troubles, a été racontée par deux auteurs: Ahmed Mannaï, ancien militant d’Ennahdha emprisonné sous Ben Ali, dans un ouvrage intitulé ‘‘Supplice tunisien. Le jardin secret du général Ben Ali’’ (éd. La découverte, Paris, 1995), puis par Béchir Turki, ancien officier de l’armée tunisienne, dans ‘‘Ben Ali le ripou’’ (édité à compte d’auteur, Tunis, 2011). C’est à partir de ces deux ouvrages que nous reprenons, ici, les détails de cette histoire sur laquelle la justice tunisienne ne manquera pas de faire la lumière, puisque de nombreux témoins sont encore en vie.

Les fréquentations israéliennes du président de la république

En juillet 1989, Marouane Ben Zineb, grand féru d’informatique, a eu le malheur de s’introduire par inadvertance dans le système informatique de la présidence de la république. A sa grande surprise, il a découvert que Ben Ali avait des relations avec des agents du Mossad israélien accrédités à Tunis pour surveiller les chefs de l’Organisation de libération de la Palestine (Olp), dont le siège était alors à Tunis, ainsi que de nombreux militants tunisiens et arabes de la cause palestinienne. A-t-il fait d’autres découvertes? Possible, mais c’est tout ce qu’il a raconté à sa sœur, qui s’en souviendra et en parlera à sa famille, le jour où Marouane, après une disparition de huit jours, a été enfin ramené à la maison dans un cercueil sur lequel il était écrit «Défense d’ouvrir». La jeune femme et son père, Habib Ben Zineb, juge à la retraite, ancien président du tribunal administratif, ont alors tout compris. Marouane a été assassiné. Et c’était un crime d’Etat. Quelques années plus tard, le malheureux père eut une attaque cérébrale. Atteint de tétraplégie, il mourut immobilisé dans son lit, au bout de trois années de paralysie complète. Ironie de l’histoire: ne sont-ce pas les technologies de l’information et Internet, dont il a voulu faire un instrument d’embrigadement et d’abêtissement du public, qui ont finalement causé la perte du dictateur? Mais c’est là une autre histoire, que les historiens raconteront sans doute un jour…

Chronique d’une mort annoncée Pour revenir à Marouane Ben Zineb, en ce 27 juillet 1989, le jeune homme rangé et bien dans sa tête doit se rendre à l’hôpital pour une séance de rééducation, nécessitée par un récent accident de la circulation. Il emprunte la vieille R12 de son père. Sur le chemin, il prend un ami qu’il dépose quelques kilomètres plus loin. Puis plus rien… Une longue absence de huit jours. On imagine le désarroi de la famille Ben Zineb, qui se mobilise, dès la tombée de la première nuit d’absence, pour rechercher le jeune homme. On va voir ses amis, la police, la garde nationale et jusqu’aux morgues des hôpitaux de Tunis. En vain. Pas un renseignement utile. Pas un signe de vie. Au troisième jour, le malheureux père obtient une audience auprès de Chedly Neffati, ministre de l’Intérieur de l’époque. Ahmed Mannaï raconte la rencontre entre les deux hommes: «Le père rappela au ministre la longue liste des services qu’il a rendus à l’État durant sa carrière de juge et l’assura qu’il consentirait bien à lui sacrifier encore le fils si cela était nécessaire: pourvu qu’on lui dise que c’était l’État qui en disposait. Le ministre lui fit la réponse qu’il a entendue trois jours durant de la bouche des chefs de poste de police: Marouane n’a pas été arrêté, n’a jamais été recherché et n’a été signalé dans aucun accident de la circulation. Cela a été dit sur un ton dont la fibre mensongère n’échappa pas au vieux juge. En quittant le ministère, Habib Ben Zineb était convaincu que son fils était passé par là, et que s’il n’y était plus, il devait être déjà enterré, ou quelque part dans une morgue d’hôpital» (‘‘Horizon 94’’, n° 1, août 93).

Un jeune homme bien rangé… jusque dans la mort Marouane était en effet décédé et son corps déposé dans la morgue de l’hôpital Charles Nicolle, à Tunis. Il était inscrit sous un faux nom, cinq jours plus tôt. Motif officiel du décès: accident de la circulation. Le jeune homme a donc passé trois longs jours dans les geôles du ministère de l’Intérieur. On imagine l’acharnement de ses tortionnaires et les souffrances inhumaines qu’ils ont dû lui faire subir. Par un curieux hasard, le même jour où le cadavre du jeune homme a été découvert, la vieille R 12 du père était découverte, elle aussi, à Hammam-Lif, «au niveau de Bou-Kornine à quelques mètres de la voie ferrée et à moins de 50 mètres du poste de police de la circulation!», précise Ahmed Mannaï L’auteur relève d’autres détails bizarres et qui rappellent une scène de crime dans un film de série noire. «Dans le coffre de la voiture, il y avait les papiers, les lunettes, la montre et d’autres effets personnels, rangés avec un grand soin. Mais il y avait surtout les clés de la voiture miraculeusement déposées sur l’enjoliveur de la roue droite avant», écrit-il. Il ajoute avec une pointe d’ironie douloureuse: «Avant de ‘‘se jeter’’ sous le train, Marouane avait pris soin de tout mettre en ordre. Mais jamais un mort n’a eu autant de mal à gagner sa sépulture. Il attendit encore huit jours pour être porté en terre. Jamais la police n’a autant honoré de sa présence les funérailles d’un simple et anonyme citoyen. La veille de son inhumation, elle investit le quartier et se mêla à la famille pour veiller le corps. Elle assura pendant des semaines la protection rapprochée de la tombe, à l’affût d’une quelconque révélation outre-tombe de Marouane». Version officielle servie par les sbires du dictateur à la famille du défunt : Marouane a été retrouvé mort sur les rails du train à la gare d’Ezzahra, non loin du lieu de son habitation.

La justice peut (et doit) se racheter Le jeune homme, qui se préparait à partir aux Etats-Unis, où il a réussi à décrocher une bourse d’études, aurait-il eu la mauvaise idée de se suicider à quelques jours de son départ pour la grande aventure? Nous espérons (nous exigeons) que la justice fasse enfin aujourd’hui le travail qu’elle aurait dû faire il y a douze ans. Pour la mémoire de Marouane et de celle son père, mais aussi afin que les autres membres de sa famille encore vivants puisse faire enfin leur deuil. Et pour que la vérité sur cette affaire éclate enfin et que les ordonnateurs de ce meurtre ignoble, à commencer par l’ex-président, et les exécuteurs soient traduits devant les tribunaux d’une Tunisie enfin libérée du joug de la dictature, de l’injustice et, nous osons l’espérer aussi, de l’impunité.

Source : « Kapitalis » Le 26-05-2011

« La Tunisie sortira de la crise plus forte en 2012 »


 

Par Anis Mili

Alors que le G8, qui débute ce jeudi à Deauville, devrait décider de l’aide à apporter aux pays du Moyen Orient touchés par les révoltes populaires, Said Aidi, ministre tunisien de la formation et de l’emploi fait le point sur la situation du pays et les projets du gouvernement de transition.

L’économie tunisienne est-elle encore à l’arrêt ?

Pas du tout. Nous avons certes enregistré une croissance inférieure à 1% sur premier trimestre mais les usines tournent de nouveau normalement et les exportations n’ont pas ralenti contrairement à ce qui a pu être dit. Le secteur des nouvelles technologie a été très peu touché par les révoltes. En revanche, le gros point noir aujourd’hui est le tourisme. Il s’est effondré sur les trois premiers mois de l’année, mais heureusement ce sont des périodes creuses. Nous espérons que le secteur repartira cet été mais nous ne nous faisons pas d’illusion, l’activité sera très mauvaise cette année. D’une part parce que les touristes occidentaux auront peur de venir dans le pays qui est pourtant loin d’être à feu et à sang. D’autre part, la situation en Libye est toujours critique or plus d’un million de touristes libyens visitent notre pays chaque année et ils sont particulièrement dépensiers. Cette chute d’activité pèsera fortement sur l’emploi, le secteur du tourisme employant près de 700 000 personnes en temps normal, notamment des saisonniers.

Justement, quelle est la situation de l’emploi dans le pays ?

Le chômage avec les inégalités sociales a été la principale cause de la Révolution sociale. Surtout le chômage des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur qui atteint 24% aujourd’hui et était à 22% avant la révolte. Et ce n’est qu’une moyenne: il peut atteindre près de 40% dans certaines régions à l’intérieur des terres. Pendant des années, nous avons formé trop de jeunes dans les sciences sociales, la géographie, les langues… car il fallait remplir les universités. Ce sont ces jeunes désespérés et frustrés qui sont à l’origine des révoltes populaires. Notre constat aujourd’hui, c’est qu’il y a un vrai besoin de main d’oeuvre en Tunisie, et qu’il est urgent d’adapter l’offre à la demande. Pour cela nous avons identifié six pôles de forte employabilité (les hautes technologie, l’agroalimentaire, la santé, les énergies renouvelables, la santé, la logistique et le tourisme durable) sur lesquels nous allons orienter nos efforts via des formations pour les chômeurs. Nous avons également décidé de créer une allocation à la reconversion. Attention, pas une allocation chômage car nous ne voulons pas tomber dans l’assistanat. Elle prendra la forme d’une aide financière de 100 euros par mois. En contrepartie, le chômeur devra accepter de suivre une formation sur un des pôles à forte employabilité. Pour les jeunes, nous allons revaloriser l’image de l’apprentissage et favoriser l’entrée dans cette filière dès le collège.

Ces mesures pourront-elles améliorer rapidement la situation du marché de l’emploi dans le pays ?

Il est clair que le taux de chômage ne baissera pas avant la fin de l’année. Il devrait même continuer à augmenter. De 16% aujourd’hui, il passera vraisemblablement à près de 20% d’ici le quatrième trimestre 2011. A cause des problèmes dans le secteur touristique comme je l’ai déjà dis, mais aussi parce que la révolution en Libye incite bon nombre de nos compatriotes expatriés (35 000 environs) à revenir en Tunisie. Ce qui fait gonfler un peu plus les rangs des demandeurs d’emploi. Mais dès 2012, le pays repartira plus fort avec une croissance qui devrait atteindre 5% l’an et une forte baisse du chômage.

Vous prévoyez de nombreuses mesures dans la formation mais aussi dans l’aménagement du territoire, l’aide à la création d’entreprises…Vos finances publiques vous permettent-elles vraiment de mener à bien ces réformes ?

Même si nous allons faire un gros effort pour rationaliser notre administration et réduire les dépenses de fonctionnement, nous aurons besoin d’aide. Un plan d’action sera présenté pour moderniser l’économie tunisienne au G8 de Deauville, en fin de semaine, et nous demanderons une aide de 25 milliards de dollars sur 5 ans.

Source : « L’express » Le 26-05-2011

Tunisie : du faux départ à la contre-révolution


Par Ghazi Mabrouk

Ghazi Mabrouk est conseiller spécial de l’Observatoire européen du Maghreb.

«La République des copains et des coquins ! » Une terrible formule du Français Michel Poniatowski pour évoquer, il y a trente-cinq ans, l’État-UDR. La Tunisie a vécu la « République des coquins » durant vingt-trois ans. Elle connaîtrait maintenant la « République des copains », celle des clans et des « visiteurs du soir ».

Certes, de telles accusations sont la conséquence directe de l’impression d’opacité que donnerait un pouvoir tenu par l’élite et par l’establishment, provoquant inévitablement la suspicion de la base populaire et augmentant les risques de contestation et de blocages.

Certes, ceux qui ont immédiatement « succédé » au dictateur ont commis l’erreur de s’appuyer sur la Constitution de l’ancien régime : exit le Comité de salut public adossé à l’armée – qui est légitimiste – et la purge politique du système au nom des aspirations populaires.

Certes, le peuple a l’impression que les autorités provisoires tergiversent, que la liberté et la justice ne sont pas au rendez-vous, que des personnalités emblématiques de l’ancien régime et leurs acolytes sont ménagés.

Certes, pensent certains, le temps faisant son œuvre, le peuple se lassera et passera à autre chose. La grande révolution aura été que Ben Ali et sa mafia soient partis : maintenant, on peut aller se coucher. Circulez, il n’y a rien à voir !

Certes, les caciques de la politique comprennent difficilement que la donne a changé, et que le peuple risque de considérer que sa révolution est inachevée après ce faux départ et une contre-révolution rampante que les nervis du passé tentent d’alimenter par la politique de la terre brûlée et la violence.

Certes, certes, certes, mais il va bien falloir avancer.

L’intérêt supérieur de la Tunisie commande de s’engager « haut les cœurs » dans la phase nouvelle qui se dessine : celle d’un processus électoral inédit. Une nouvelle République pourrait émerger del’élection de l’Assemblée constituante. La plupart des partis légalisés ont les yeux tournés vers cette élection, qu’ils croient déterminante pour eux, car ils pourront enfin mesurer leur poids. Mais cela ne sera qu’indicatif : ce sera plutôt lors des élections législatives que l’avenir politique des partis « croupions » se jouera. C’est là que les alliances et les coalitions prendront toute leur importance, pour dégager une majorité de gouvernement. D’ici là, ces partis auront eu le temps de s’organiser.

Une Constituante n’est pas une Assemblée nationale, sa gouvernance reste transitoire. La Constituante pourrait choisir la solution de facilité, celle d’un gouvernement d’union nationale transitoire, mais qui risquerait d’être paralysé. Elle pourrait aussi choisir l’apprentissage « grandeur nature » de la démocratie, avec un système de coalition post-électorale, une majorité gouvernementale et une opposition républicaine.

Le Premier ministre transitoire serait alors issu de la coalition majoritaire de la Constituante, tandis que le président élu de la Constituante pourrait cumuler la fonction de président de la République transitoire, afin de ne pas la personnaliser, le temps d’élaborer une nouvelle Constitution et d’organiser des élections législatives et présidentielle.

« De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace » pour que la magie tunisienne puisse opérer à nouveau. À défaut de donner à la dynamique de la révolution du 14 janvier « des gages », c’est « Dégage ! » que les dirigeants entendront encore crier sous leurs fenêtres.

Un gage politique d’ouverture serait l’introduction du concept de référendum populaire. Un autre gage en direction du développement régional serait l’adoption du principe de Conseils régionaux élus : ils bénéficieraient d’affectations budgétaires spécifiques décentralisées, autogérées par chaque région, sous le contrôle d’un Sénat constitué en Seconde Chambre des représentants des régions.

Les métamorphoses audacieuses sont désormais requises : il ne faut pas hésiter à souffler sur la braise si l’on veut que les cendres s’éparpillent ! C’est ce que la lutte pour l’indépendance nationale nous avait appris. L’esprit de Bourguiba n’a-t-il pas plané sur la Tunisie en ce 14 janvier, pour la seconde libération du pays ?

Source : « Jeune Afrique » Le 26-05-2011

Quel avenir pour les révolutions arabes ?

Après cinq mois de contestation, voici venue l’heure d’un bilan provisoire et contrasté. Deux pays, la Tunisie et l’Égypte, ont obtenu la chute des régimes autoritaires en place. Ce n’est qu’une étape pour des peuples qui veulent plus de libertés et de justice sociale.

Après la Tunisie puis l’Égypte, c’est le Yémen qui semble tout près de la victoire. Samedi, l’opposition a accepté de signer un accord devant en principe mettre fin à la première phase d’un soulèvement populaire qui s’exerce depuis le mois de janvier. Selon cet accord « parrainé » par le Conseil consultatif du Golfe, le président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis trente-trois ans, devait démissionner en échange d’une garantie d’immunité. Mais, dimanche, ce dernier, qui n’en est pas à sa première manœuvre, a posé de nouvelles conditions à son départ. Isolé sur la scène internationale, où l’on craint un effet de contagion dans les pays voisins du Golfe, et notamment en Arabie Saoudite, il semble cependant condamné.

D’autant que la mobilisation populaire ne cesse de croître. Mais la situation en Tunisie, en Égypte et maintenant au Yémen pose une autre question : où doit s’arrêter le curseur de ces révolutions ? La chute de régimes autoritaires est-elle synonyme de victoire pour le peuple ? Quand auront lieu des élections libres ? Quels régimes sortiront des urnes ? De quelles libertés jouiront enfin les peuples ? Et ces libertés pourront-elles renforcer la lutte sociale ? Car il est évident que tel est l’objectif des mouvements révolutionnaires qui, depuis le mois de décembre, agitent le monde arabe : la liberté pour la justice sociale. Or, il y a parfois loin de la chute d’un dictateur à l’établissement d’un système politique garantissant davantage de libertés et de justice sociale.

C’est pour répondre à ces questions que nous avons donné une place particulière à la Tunisie, là où tout a commencé et là où les choses sont les plus avancées. On n’oubliera pas non plus les trois pays où les régimes en place résistent, parfois férocement : Bahreïn, la Libye et la Syrie. Trois situations et trois histoires de nature différente. Mais où le sang a déjà beaucoup coulé. Après l’heure déjà lointaine de l’enthousiasme à Tunis et au Caire, voici venu le temps des doutes et des questions. Sans oublier un détour par le conflit israélo-palestinien, au cœur politique et symbolique de tous les conflits qui parcourent le monde arabo-musulman

Source : « Politis » Le 25-06-2011

Tunisie: Quand les Magistrats font de la politique


Par Dr. Farouk Ben Ammar

Le 6 Décembre 1946, une brochette d’éminents magistrats tunisiens, pères fondateurs de la magistrature tunisienne moderne, ont crée une association baptisée « Amicale des Magistrats Tunisiens » afin de militer pour l’indépendance de la magistrature et la non-ingérence de l’exécutif dans ses missions, pour l’égalité entre les magistrats Tunisiens et les magistrats Français, (certaines affaires sensibles étaient confiées exclusivement à des magistrats français) et pour paver le terrain de la lutte pour une Tunisie indépendante et souveraine. La présidence de cette noble institution a été confiée, pendant plusieurs années au Magistrat Feu Sidi Mohammed Ben Ammar, connu pour être « aussi sage que savant » dixit le célèbre journaliste français Géo London dans un article « Critiques Judiciaires » paru dans le premier quotidien français « France-Soir ». Cette institution a, en outre, rédigé le fameux manifeste adressé au ministre français des affaires étrangères pour protester contre les événements de 1952, ainsi que contre la circulaire qui touchait de plein fouet à la souveraineté tunisienne et à la dualité de la magistrature. Ces braves magistrats faisant, aussi, partie du comité des « sages quarante » qui avaient institué sur les accords tuniso-francais concernant l’autonomie interne de la Tunisie et ont finalisé la rédaction de la constitution de 1956 qu’a présentée, devant l’assemblée constituante le président feu Mohammed Ben Ammar, ou siégeaient H.Bourguiba et S.Ben Youssef. Durant les premières années de l’indépendance, Bourguiba conscient de la puissance de cette association et de son hégémonie sur les magistrats tunisiens ; n’avait ménagé aucun effort afin de la diviser en mettant à la retraite anticipée plusieurs magistrats. Hélas pour lui, la grande cohésion du corps judiciaire et leur courage légendaire a fait de sorte que ladite association puisse survivre à toutes les tentatives de saper son unité et intégrité qui constituent sa principale force. Derechef, durant, le gouvernement de Ben Ali, qui voulait compléter la besogne inachevée de Bourguiba, a vu tous ses efforts se solder par un échec cuisant, et ce, encore une fois, grâce à l’unité des magistrats et à leur indéfectible cohésion. La révolution de la dignité du 14 Juillet 2011, dont une des principales revendications était l’indépendance de la magistrature, a permis à certains individus de saisir l’occasion afin d’affaiblir ladite association par la création d’un « syndicat des magistrats » ! Chose inadmissible qui ne ferait que fragiliser et affaiblir l’association, existante depuis 65 ans et rogner sa légitimité et saborder son indépendance, et de surcroît mettant en cause le principe même de la démocratie et ses trois pouvoirs, à savoir : L’exécutif, le législatif et le judiciaire ! Dans la même veine on devrait aussi créer « un syndicat du gouvernement » et « un syndicat de l’assemblée nationale », ce qui pousserait notre démocratie naissante sur la bordure dangereuse du populisme. Bref, M. F.Rajhi, magistrat de son état, n’était pas fait pour la politique, technocrate qu’il est ! C’était une erreur dés le début, une fatalité sans exemple. Un magistrat ne doit jamais s’immiscer dans la politique au risque d’aviliser la noble mission qui lui est dévolue : c’est un principe quasi universel. Les conséquences sont patentes, nous en avons tous constaté les dégâts.

Source : « Espace Manager » Le 26-05-2011

 

 

AFP, le 25 mai 2011 à 23h51 GMT

Barack Obama nie que l’Occident soit en déclin


Par Stephen COLLINSON
LONDRES, 25 Mai 2011 (AFP) – Le président américain Barack Obama a prononcé mercredi un plaidoyer pour l’alliance transatlantique, devant les deux chambres du Parlement britannique exceptionnellement réunies, niant que la percée des puissances émergentes signe le « déclin » de l’influence américano-européenne.
Evoquant la croissance exceptionnelle dont bénéficient « la Chine, l’Inde et le Brésil », M. Obama a souligné qu’il était « devenu à la mode de se demander si la montée en puissance de ces pays s’accompagnera d’un déclin de l’influence américaine et européenne dans le monde ».
« L’argument voudrait que ces pays représentent l’avenir et que notre rôle dirigeant a vécu. Cet argument est erroné », a martelé le président Obama dans le cadre majestueux et quasi-millénaire du hall de Westminster.
« Nous restons les plus importants catalyseurs d’une action à l’échelle de la planète », a-t-il insisté, devant un impressionnant parterre d’actuels et d’anciens dirigeants, notamment l’ex-Premier ministre britannique Tony Blair (1997-2007), qui avait entretenu des liens très serrés avec l’ancien président américain George Bush.
L’honneur de prononcer un discours devant les deux chambres de Westminster n’a été réservé qu’à un nombre très restreint de personnalités, et jamais jusqu’alors à un dirigeant américain: le pape Benoît XVI, les anciens présidents sud-africain Nelson Mandela et français Charles de Gaulle.
L’allocution présidentielle était annoncée par les conseillers de M. Obama comme le « discours-phare » de sa tournée européenne de six jours, qui s’achèvera ce week-end en Pologne.
Peu avant, lors d’une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre britannique David Cameron, le président américain a reconnu « les limites » des opérations en Libye, circonscrites à des frappes aériennes.
« Dès lors que vous excluez le recours à des troupes au sol, vous êtes confrontés aux limites inhérentes aux opérations aériennes ». Mais « nous continuerons ces frappes jusqu’à ce que les attaques de (Mouammar) Kadhafi contre les populations civiles cessent (…) Le temps travaille contre Kadhafi », a assuré le président américain.
Pour accroître la pression, Londres et Washington vont promouvoir un « programme de soutien » politique et économique au « printemps arabe » lors du G8 de jeudi à Deauville, en France, a annoncé M. Cameron.
Paris souhaite faire de Deauville le « moment fondateur » d’un nouveau « partenariat de longue durée » entre les pays arabes qui soutiennent la démocratie et le G8 (Etats-Unis, Russie, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Canada), selon l’Elysée.
 
L’Egypte et la Tunisie, dont les saisons touristiques s’annoncent désastreuses, ont chiffré leurs besoins: 10 à 12 milliards de dollars pour Le Caire jusqu’à la mi-2012, tandis que Tunis demande 25 milliards de dollars sur cinq ans.
Barack Obama a en revanche appelé le président du Yémen Ali Abdallah Saleh à céder le pouvoir « immédiatement », qualifiant par ailleurs d' »erreur » le projet des Palestiniens de demander à l’ONU de leur reconnaître un Etat sur la base des frontières de 1967.
Peu auparavant, et sur une note plus légère, MM. Cameron et Obama avaient tombé la veste: sous un soleil radieux, ils ont servi des saucisses et des steaks à des militaires lors d’un barbecue organisé dans le jardin du 10, Downing Street.
Dans la soirée le président Obama a offert un dîner de gala à la reine Elizabeth à la résidence de l’ambassadeur des Etats-Unis à Londres auquel ont assisté plusieurs étoiles de Hollywood, sportifs de renom et autres personnalités.
Etaient notamment présents le footballeur anglais David Beckham, les acteurs Tom Hanks et Colin Firth et l’auteure de la saga de Harry Potter, J.K. Rowling.

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