6 février 2001

البداية

 

 


Rien de plus, rien de moins en Tunisie dorénavant qu'un peuple souverain et un état légitime.
Dr. Moncef Marzouki, sousse, le 25 janvier 2001.


TUNISNEWS
 
7519 personnes reçoivent en même temps que vous cette liste de diffusion multilingue qui publie ce 6 février 2001 son 162éme numéro.

 


LES TITRES DE CE JOUR:


  • Haroun torturé (ASSOCIATION DES DROITS DE LA PERSONNE AU MAGHREB )

  • La Presse Canadienne:Demande d’enquête dans l’affaire de l’étudiant expulsé en Tunisie
  • Petition
  • A.V.T.T: lettre de protestation à l’encontre des organisateurs du salon du tourisme à Genève
  • FREDERIC MITTERAND AURAIT OBTENU LA NATIONALITE TUNISIENNE!

  • La police chez J.Zoghlami
  • C.N.L.T: Jalel Zoghlami violemment agressé

  • Lemonde :La Tunisie ne vit pas un cauchemar + Commentaire:de tunisews

  • On lui en veut d’être fugitif (LA 5éme  » CHRONIQUE DU MOUCHARD « . Taoufk Ben Brik.

  • LA MILICE EST A L’OEUVRE DE NOUVEAU A TUNIS


LE COMITE DE SOUTIEN CONSTITUE à MONTREAL POUR SOUTENIR LE JEUNE TUNISIEN DEPORTE PAR « IMMIGRATION CANADA » A SES TORTIONNAIRES S’ACTIVE.
IL EXIGE QUE L’AMBASSADE CANADIENNE à TUNIS SUIVE DE PRES CE CAS TRES DOULEUREUX.
HAROUN M’BAREK REAPPARAITRA DEVANT UNE COUR LE 21 FEVRIER COURANT!
 
 
ASSOCIATION DES DROITS DE LA PERSONNE AU MAGHREB
330-2660 Southvale Cres. Ottawa, ON K1B 4W5
Tel : 001 613 –736 8349, Fax : 001 613 – 736 8490
courriel : cmtnes@attcanada.net
Université Laval, 4 février 2001

HAROUN TORTURÉ

Haroun M’Barek, étudiant en droit commercial de l’Université Laval, a été sauvagement et longuement torturé au ministère de l’Intérieur dès son arrivée en Tunisie le 7 janvier. Incarcéré à la Prison du 9 avril sans soins médicaux adéquats, il est brisé physiquement et moralement.

M. M’Barek doit comparaître à nouveau le 21 février prochain, car il a fait opposition au jugement prononcé en son absence, en 1996, et dont il ignorait l’existence autant que nous lors de sa déportation par les autorités canadiennes.

Ce jugement le condamnait à 12 ans de prison : 6 ans pour « formation de bande de malfaiteurs » et 6 ans pour « participation à un projet collectif visant à attaquer des personnes et des biens ». C’est donc pour un délit de droit commun que le syndicaliste étudiant Haroun M’Barek a été jeté en prison, comme cela arrive à des personnage publics mieux connus tels que le chef de l’opposition, Mohamed Moada, et le Dr. Moncef Marzouki, porte-parole du Conseil national pour les libertés en Tunisie, par exemple.

Le procédé est, en effet, communément utilisé par les autorités tunisiennes pour masquer le caractère politique des procès et pour donner l’impression que les prisonniers politiques ne sont que de simples criminels.

Le Comité de soutien à Haroun M’Barek demande que l’Ambassade du Canada à Tunis intervienne d’urgence auprès des autorités tunisiennes, pour réclamer qu’il soit mis fin aux tortures que subit M. M’Barek, qu’il soit hospitalisé d’urgence, et que le procès du 21 février soit équitable au sens des engagements internationaux pris par la Tunisie en matière de droits de la personne.

Nous demandons également que l’Ambassade soit présente à l’audience du 21 février.

Me Radia Nasraoui, avocate à Tunis, a visité Haroun M’Barek à notre demande et s’est constituée pour le défendre, aux côtés de deux autres avocats, Me Samir Ben Amor de Tunis et Me Mohamed Ali Belaid de Sousse. Haroun M’Barek, on s’en souvient, a été déporté sur la Tunisie par Immigration-Canada le 6 janvier, après avoir été débouté de sa demande d’asile politique et avoir épuisé tous les recours. En vain : Immigration-Canada refusait de croire que son retour forcé à Tunis représentait des risques pour sa sécurité et sa liberté.

Source : le Comité de soutien à Haroun M’Barek
Pour informations :
Lise Garon, porte-parole
tel : 001 (418) 656-2131 # 7709


LA PRESSE CANADIENNE FAIT SON TRAVAIL CORRECTEMENT. ELLE CONTINUE A ENQUETER SUR LE SCANDALE DE LA DEPORTATION DU JEUNE HAROUN M’BAREK EN TUNISIE. L’ARTICLE DU JOURNAL QUEBECQUOIS « LA PRESSE ».
 

Demande d’enquête dans l’affaire de l’étudiant expulsé en Tunisie

Gilles Paquin
La Presse

LE COMITÉ de soutien à Haroun M’Barek demande à la ministre fédérale de l’Immigration Elinor Caplan de faire enquête sur l’expulsion de cet étudiant de l’Université Laval vers sa Tunisie natale au péril de sa vie.

Arrêté et «sauvagement torturé» dès son arrivée à Tunis le 7 janvier, Haroun M’Barek doit purger une peine de 12 ans d’emprisonnement pour «formation de bande de malfaiteurs», a déclaré Lise Garon, porte-parole du groupe et professeur de communication publique à Laval.

Le jeune homme qui avait vainement revendiqué le statut de réfugié politique au Canada a été «livré aux autorités tunisiennes» même si la loi interdisait son renvoi vers un pays où il risquait la persécution, a dit Mme Garon.

Ancien secrétaire de l’Union générale tunisienne des étudiants, Haroun M’Barek avait obtenu un visa d’étudiant au Canada en 1994, échappant du même coup à la répression dans son pays. La Commission d’immigration et du statut de réfugié a ensuite refusé de lui accorder l’asile politique.

«Haroun M’Barek n’avait pourtant jamais commis aucun crime, ni au Canada ni ailleurs, au sens de la loi canadienne», affirme le Comité de soutien dans une lettre à la ministre de l’Immigration.

«Les faits sont là, clairs et tragiques: le ministère de l’Immigration a été incapable de veiller efficacement au respect des engagements internationaux du Canada en faveur des réfugiés», ajoute le Comité.

Aux yeux du Comité, de l’Association des droits de la personne au Maghreb et de l’Association des étudiants de Laval, la ministre doit maintenant faire enquête sur les raisons de cet échec. Elle doit aussi essayer de réparer le tort immense causé à M. M’Barek et prendre des mesures pour éviter d’autres erreurs semblables.

En plus de réévaluer les pratiques d’Immigration Canada dans les dossiers des demandeurs d’asile, Mme Caplan est priée d’intervenir auprès de la Tunisie pour connaître le sort de M. M’Barek. L’ambassade du Canada à Tunis devrait aussi s’activer en sa faveur afin de protéger sa santé et sa sécurité, estime le Comité.

Personne n’était en mesure de répondre à ces demandes hier au cabinet de la ministre. L’attachée de presse de Mme Caplan, Isabelle Savard, a accusé réception de la missive du Comité et noté que toute intervention de l’ambassade relevait des Affaires étrangères.

Solidaires de M. M’Barek, les étudiants et professeurs de l’Université Laval manifesteront mercredi matin devant les bureaux du ministère fédéral de l’Immigration à Québec. La manifestation se terminera par une vigile à la chandelle en soirée.

Une enquête sur les services d’immigration s’impose d’autant plus qu’une trentaine de Tunisiens en attente du statut de réfugié ont été refoulés l’an dernier, ajoute l’Association étudiante.


PÉTITION

Québec le 7 Février 2001

Honorable John Manley

Ministre des Affaires étrangères

Chambre des communes

Bureau 418-N, édifice du Centre

Ottawa (Ontario) K1A OA6

Monsieur le Ministre,

C’est avec consternation que nous avons appris le sort de M. Haroun M’Barek expulsé du Canada par les services de l’immigration le 6 janvier dernier.

Malgré les mises en garde et les efforts déployés par Amnistie internationale et l’Association des droits de la personne au Maghreb, pour prévenir les autorités canadiennes des dangers d’une telle déportation, M. M’Barek a été  » arraché  » de l’Université Laval sans même avoir pu y compléter ses études et expulsé vers la Tunisie où il a été sauvagement et longuement torturé et il purge actuellement une peine de douze années d’emprisonnement.

Nous tenons le Canada responsable de cette terrible situation, résultat d’une analyse de risque de renvoi déficiente. En conséquence, nous vous demandons instamment monsieur le Ministre, d’intervenir auprès des autorités tunisiennes, par le biais de l’ambassade canadienne en Tunisie, afin de vous assurer que M. M’Barek soit détenu dans des conditions acceptables et que des représentants de l’ambassade soient présents lors de son procès reporté au 21 février prochain.

Signature

NOM (lettres moulées)

ADRESSE

 

 

 

 

AMNISTIE INTERNATIONALE

Section canadienne francophone

www.amnistie.qc.ca


 

A.V.T.T
Association des Victimes de la Torture en Tunisie
1290 Versoix  Genève
Tel: 022 / 755 28 33
 

lettre de protestation à l’encontre des organisateurs du salon du tourisme à Genève

Genève, le 03 – Février – 2001
 
Monsieur,
Dominique Vonbourg, redacteur en chef de la Tribune de Genève,
 
L’Association des Victimes de la Torture en Tunisie, trouve l’invitation de la Tunisie comme hôte d’honneur à l’occasion du (3e) salon du bien-être et du tourisme de santé un acte gratuit, irresponsable et choquant de la part des organisateurs du salon, Toute en ignorant la situation alarmante des violations des droit de l’homme en Tunisie, et l’acharnement du régime de ben Ali contre les prisonniers politiques, et contre tous ceux qui militent pour une Tunisie libre et démocratique où tous les citoyens, quelques soit leurs convictions trouveront leur dignité, leurs libertés et leurs considérations.
Si toutes cette cascade de grèves de la faim et d’autres formes d’action, partout dans les prisons du général ben Ali et arrivant à plusieurs capitales Européennes dont Genève*, les rapports des ONG, la résolution du parlement européen du 14-12 2000, n’a pas convaincu nos chers organisateurs du salon du bien-être et du tourisme de santé, qu’ils nous disent pourquoi la Tunisie maintenant? est ce que leurs bien être les intéressent plus que ceux qui croupissent depuis des décennie dans les prisons du général? est ce que leur tourisme = (argent) qui alimente la machine des tortionnaires tunisiens, plus important du calvaire que vit les familles et les proches des prisonniers politiques? est ce que leur santé dépend des cris des torturés dans les locaux da la D.S.T Tunisienne, où de ceux qui n’ont pas le droit à être soigné sauf aprés avoir été amputé?, que sachent nos chers organisateurs que nous les victimes de la torture en Tunisie auront tout le mal du monde à comprendre ce geste gratuit et inadmissible, et qu’ils auront tous le mal du monde à comprendre comment on détruit l’âme d’un être humain, comme on le fait en Tunisie constitutionnellement.
 
Pour l’Association
 
Nait-Liman. Abdennacer
 
*Article sur un mouvement de la grève de la faim à  la Tribune de Genève du 17-18 juin 2000.

FREDERIC MITTERAND AURAIT OBTENU LA NATIONALITE TUNISIENNE!

Une nouvelle publiée par le magazine londonien « AL WASAT » dans sa livraison N° 468 du 15 janvier 2001 (page 7) est passé presque inaperçue.
Al Wasat affirmr en fait que Frédöric Mitterand, le petit fils de françois Mitterand l’ex-president français a obtenu- à l’instar de quelques joueurs brésiliens- la nationalité tunisienne.
Services rendus: le documentaire intitulé  » LA TUNISIE CHANTE ET DANSE », diffusé dans les principales chaines françaises au début des années 90 au moment ou des milliers d’hommes et de femmes tunisiens subissaient les pires tortures et les plus humiliantes brimades par les agents de la tortiocratie régnante sur tout le territoire tunisien.
Mr. Frédéric Mitterand .. vous nous faites de la peine. un point!

La police chez J.Zoghlami

Je viens d’apprendre que le domicile de Jalel Zoghlami a été investi par des policiers aux alentours de 20h30. Toutes les personnes présentes, pour exprimer leur solidarité avec la grève de la faim de Jalel, ont été violemment passées à tabac. Quatre personnes seraient particulièrement mal en point. L’immeuble est complètement cerné par la police et toute personne qui s’en approche est systématiquement rouée de coup. Omar Mestiri (SG du CNLT) a été ainsi extirpé de force de sa voiture et frappé à coup de matraque dans les jambes. Abdelmoumen Belanes (ancien prisonnier politique – POCT) a reçu dans les mêmes conditions des coups très violents sur la tête. Ces informations ne sont évidemment pas exhaustives.

Sadri Khiari

Source:La Liste de discussion et d’information sur les droits humains au Maghreb

LA REACTION DU CNLT A L’AGRESSION SUBIE PAR JALEL ZOGHLAMI


Jalel Zoghlami violemment agressé

Jalel Zoghlami, directeur de la publication non autorisée « Kaws el Karama » (L’Arc de la dignité), a été violemment agressé le 3 février à16h 45, en plein centre de la capitale, av. Hédi Chaker, par 5 individus qu’il a identifié comme faisant partie de la police politique. Ces agresseurs se sont jetés sur lui, armés de matraques et de couteaux, mais Jalel
Zoghlami est parvenu à se dégager, après avoir reçu de nombreux coups, et à se réfugier dans une agence de location automobile. Poursuivi à l’intérieur, il a cherché à se barricader au premier étage mais ce n’est que lorsqu’il a menacé de se couper les veines à l’aide d’un tesson de verre que ces agresseurs se sont retirés. La police officielle « alertée », Jalel
Zoghlami a exigé la présence de ses amis et de son avocat, Maître Mokhtar Trifi, par ailleurs président de la LTDH, pour quitter les lieux. Transporté à l’hôpital, les médecins, qui ont relevé des traumatismes sur différentes parties du corps et notamment au niveau de la tête, lui ont ordonné 15 jours d’arrêt de travail.
Jalel Zoghlami a décidé d’entrer en grève de la faim sur le champ, revendiquant en particulier : que la plainte qu’il a déposé soit dûment enregistrée, que son passeport ainsi que celui de son fils leur soient restitués et que le visa de publication de « Kaws el Karama » lui soit délivré.
On ne peut pas, bien sûr, ne pas faire le lien entre cette agression et la publication dans ce journal, dont le premier numéro a paru le 26-01-01, d’un éditorial intitulé « 13 ans de Ben Ali… Basta ! ».
Le Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) tient à exprimer sa totale solidarité avec Jalel Zoghlami et exige, avec lui, l’ouverture d’une enquête indépendante et le jugement des responsables.
Le Conseil dénonce avec une vigueur extrême cette agression qui confirme la dérive du régime tunisien : à l’instrumentalisation des tribunaux s’ajoute de plus en plus l’utilisation de formes de répression extra-judiciaires, au point qu’on pourrait parler de « tontonmacoutisation » des pratiques de la police.
Cette agression contre un opposant n’est pas la première ; elle s’ajoute à celles d’opposants à l’étranger comme Ahmed Manaï, aux violences subies par le journaliste Taoufik Ben Brik, il y a près de deux ans, à la tentative de meurtre contre Riadh Ben Fadhel, au printemps dernier, aux passages à tabac et aux brutalités dont les défenseurs des droits humains et les militants de l’opposition sont de plus en plus les victimes ces derniers mois.
Le mépris croissant des lois – de ses propres lois ! – par le pouvoir est un symptôme d’une extrême gravité, annonciateur de très graves crises. Il y a urgence à revendiquer le respect des droits humains et la démocratie.

Pour le CNLT,
Le Comité de liaison
Tunis, le 4 février 2001
 

CET ARTICLE PUBLIE PAR LE JOURNAL FRANCAIS  » LE MONDE  » LE 5 FEVRIER 2001 VA SURPRENDRE, IRRITER, FAIRE RIRE ET ENRAGER PLUS D’UN.

LE Dr. MEZRI HADDAD, EX-OPPOSANT AU DEBUT DES ANNEES 90, JOUE MAINTENANT LE ROLE DE L’INTELLECTUEL/DEFENSEUR DU REGIME DE BEN ALI. C’EST SON DROIT LE PLUS ABSOLU, NOUS RE-PUBLIONS SON ARTICLE MAIS AVEC UN COMMENTAIRE.

 
 
La Tunisie ne vit pas un cauchemar

LE MONDE | 05.02.01 | 15h19 | analyse
   
EN lisant la tribune signée par quatorze intellectuels français, publiée dans la page  »  Débats   » du Monde du 19  janvier, je ne peux m’empêcher d’évoquer à la fois Talleyrand ( »  Tout ce qui est excessif est insignifiant  « ) et Lassalle ( »  Le peuple ne sait pas qu’il est malheureux  : nous le lui
apprendrons  « ).

Si le peuple tunisien, dont les pétitionnaires reconnaissent à juste titre la maturité politique, était si abominablement écrasé, il y a bien longtemps qu’il se serait révolté contre ses présupposés oppresseurs, comme il l’a toujours démontré dans sa longue histoire, y compris celle du douloureux épisode colonial. A moins de croire à la servitude volontaire dont La Boétie nous a révélé les secrets, le peuple tunisien est libre, et c’est parce qu’il est libre qu’il a toujours préféré l’évolution à la révolution, la raison à la passion, la pédagogie à la démagogie. Les Tunisiens doivent ce tempérament aux trois mille ans d’histoire qui ont forgé leur caractère et structuré leur personnalité. Je crains, par conséquent, que ce soutien intellectuel et philanthropique aux  »  Tunisiens à bout de patience   » ne dissimule en fait un soutien politique et idéologique à quelques Tunisiens impatients de goûter
aux délices du pouvoir.

En tant qu’intellectuel résolument engagé, depuis bientôt vingt ans, dans le combat pour la démocratie, j’affirme donc que la Tunisie n’est pas cet univers cauchemardesque bariolé par ces zélotes des temps modernes, bien trop engagés dans la course au pouvoir pour être suffisamment objectifs. Elle n’est pas non plus cet univers paradisiaque badigeonné par de zélés
propagandistes.

La Tunisie, dès 1956, a fait le choix très courageux du modernisme contre l’archaïsme, des lumières contre l’obscurantisme, de l’universalisme contre le communautarisme, de l’autorité sans l’au- toritarisme et de l’ordre sans le totalitarisme. Mais, dans sa marche inexorable vers la démocratie, elle a été malheureusement contrariée, freinée même par la conjuration
islamo-intégriste. Celle-ci, contrairement à ce que laissent entendre nos  quatorze  intellectuels, n’est pas une fiction machiavélique que le prince agite comme un épouvantail, mais un péril bien réel que l’historien peut constater dans l’histoire immédiate du monde arabo- islamique, que le politologue peut observer dans l’attitude des acteurs intégristes déchaînés
en Algérie.

Oui, ce péril islamiste a été une donnée majeure qui explique la lenteur du régime tunisien dans sa marche vers la démocratie. Il le restera aussi longtemps que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits. Car, en cas de triomphe de l’islamisme en Algérie, et par effet de contagion rétroactive, ni la Tunisie ni le Maroc ne seraient épargnés par la déferlante intégriste. Cet hiatus entre marche (vers la démocratie) et démarche (sécuritaire) s’explique donc par la hantise parfaitement justifiée de voir tout le processus démocratique phagocyté par le charlatanisme intégriste, et ses profits basculer dans l’escarcelle des théocrates. C’est ce qui s’est produit en Algérie, pays qui n’a pas fini de payer les égarements de ses gouvernants,
nonobstant la remarquable audace de Bouteflika et sa volonté de rétablir l’ordre sans sacrifier le processus démocratique.

La liberté et l’ordre, nous le savons depuis l’Aufklãrung, ne sont pas incompatibles. Mais nous savons aussi depuis bien avant l’Aufklãrung que, sans la sécurité et le respect des lois – si imparfaites soient-elles -, la liberté n’a aucun sens si ce n’est celui que lui ont assigné les anarchistes. Les philosophes, des présocratiques aux modernes, sont quasiment unanimes là-dessus  : la liberté est secondaire par rapport à la sécurité. Chez les contractualistes, y compris Rousseau que les signataires citent, le but suprême du contrat social n’est guère la liberté de chacun mais aussi la sécurité de tous. La philosophie de Kant, lui aussi invoqué, est sans doute une philosophie de la liberté. Mais la phrase citée, sortie de son cadre conceptuel et de son contexte historique, fait de Kant ce qu’il n’est pas. Car il est aussi le philosophe de la légalité et de l’ordre puisqu’il a, de façon acerbe, dénoncé le droit de résistance à l’oppression que mentionne d’ailleurs la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dans son article  2, juste après le droit à la sûreté.

Loin de moi l’intention d’accréditer l’idée, que les pétitionnaires dénoncent, selon laquelle certains peuples méritent la démocratie et pas d’autres. Cette idée que défendent l’ethnocentrisme et le culturalisme, je l’ai combattue plus d’une fois. Je pense même, comme Pascal Bruckner, que  »  le prosélytisme de l’Ouest est ambigu  : dans le moment même où il proclame l’universalité de la démocratie, on dirait qu’il souhaite secrètement la garder pour lui comme un bien jalousement protégé des convoitises des nations pauvres  « .

Il y a plus d’un siècle et demi, Tocqueville conjecturait l’inexorable marche des sociétés vers la démocratie. Parce qu’il est mature, le peuple tunisien, gouvernants comme gouvernés, est bel et bien mûr pour la démocratie. Mais il n’est pas suffisamment immunisé contre ce virus mortel  : le fanatisme religieux. Aucun peuple au monde n’est d’ailleurs à l’abri du fanatisme  : en 1933, n’est-ce pas au suffrage universel que Hitler a été élu par une foule hystérique à 88  % des voix  ? Depuis ce cataclysme, plusieurs exemples sont venus confirmer cette double prémonition de Rousseau  :  »  La liberté est un aliment de bon suc et de forte digestion  ; il faut des estomacs bien sains pour le supporter   »  ; et,  »  s’il y avait un peuple de dieux, il se
gouvernerait démocratiquement. Un gouvernement si parfait ne convient pas à des hommes  « . C’est sans doute pour cette raison que Tocqueville faisait bien cette différence que nos philosophes modernes ne discernent plus  : la démocratie comme état de la société et la démocratie comme forme du gouvernement. C’est la question fondamentale que posait déjà Socrate à un jeune candidat à la carrière politique  :  »  Penses-tu qu’il soit possible de
savoir ce qu’est la démocratie sans savoir ce qu’est le peuple  ?   »
(Xénophon, Les Mémorables, IV, 2).

Par la restructuration de l’économie dans un sens nettement libéral, par les réformes de l’enseignement dans un sens nettement laïque, par le renforcement du code du statut personnel, par les mesures prises pour réduire la pauvreté, Ben Ali participe incontestablement à l’ancrage de la démocratie comme état de la société. J’ai toutes les raisons de croire qu’en 2004, et peut-être même avant, la démocratie comme forme de gouvernement sera en Tunisie une réalité concrète. Et si je  me trompe, je préfère encore me    tromper avec Ben Ali (et Bouteflika) qu’avoir raison avec Ghannouchi (et son alter ego Abbassi Madani).

Mezri Haddad est chargé de cours en histoire à l’université Paris-VII  –  Jussieu.

 par Mezri Haddad

 

Commentaire:
 
Le Dr. M. Haddad démontre à cette « poignée » d’intellectuels français qui ont « osé » interpeller leur gouvernement sur la situation tunisienne l’étendue de son savoir linguistico-politico-philosophique. Ceci ne nous  impressionne guére et ne nous intéresse point!
Ce qui nous importe, nous citoyens tunisiens, c’est l’avenir de notre pays.
Cet avenir parait à Mr. Haddad serein et radieux avec Ben Ali à la tête de la Tunisie. Il fait confiance à Ben Ali: c’est son affaire. Quant à nous, nous ne demandons qu’à vivre comme citoyens égaux , membres d’un peuple souverain dans un pays dirigé par un gouvernement légitimement élu respectueux de ses lois et comptable de sa gestion devant le peuple.
Le fait que M. Haddad nous ressort en février 2001 l’épouventail de la violence intégriste, nous joue de nouveau l’amalgame R.Ghannouchi/A.Madani, nous fait agiter la conjuration islamo-intégriste (sic!) qui aurait freiné l’inexorable marche de la Tunisie vers la démocratie (re-sic!) est significatif mais trés dangereux.
 
Car quand on se présente à l’opinion comme Un Intellectuel on est comptable devant cette opinion. On ne peut pas, cher monsieur, se taire quand il s’agit de torture, de violation des droits élémentaires de dizaines de milliers de ses concitoyens pendant de longues années et venir aujourd’hui nous faire la leçon!
Et puis, de quel droit vous vous permettez d’hypothéquer notre avenir et l’avenir de notre pays en prétendant que:
 

 » le péril islamiste..restera aussi longtemps que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits »  ??????????????????????

Qu’est ce que ça veut dire Monsieur?
Que ben ali est le seul choix possible pour la Tunisie tant que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits? 
Que tout est permis pour la clique criminelle au pouvoir tant que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits? 
Que rien ne doit ètre exigé de ce pouvoir tant que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits? 
Que l’histoire, la politique, les droits, la dignité,le présent , l’avenir doivent attendre tant que l’Algérie n’aura pas retrouvé ses esprits? 
Mais Mr. Mezri Haddad êtes-vous un être humain bien constitué?
 
TUNISNEWS.
 
khaled ben m’barek commente lui aussi cet article et met à nu le personnage du Docteur M.Haddad!!
Chers compatriotes et amis,
Le personnage qui a pondu les lignes ci-après ne vous est peut-être pas familier. Je l’ai connu aux temps de la fondation de l’Audace, de notre ami Slim Bagga, vers 1994. Il ne tardera d’ailleurs pas à tenter un putsch journalistique contre son « ami de trente ans », en faisant paraître, avec force publicité, un numéro orphelin de ce qu’il avait appelé « La Voix de
l’Audace ».Aujourd’hui, je m’en veux affreusement d’y avoir contribué au mépris de nombre de conseils de gens qui m’avaient prévenu… J’avais à cœur de ne pas m’impliquer dans la querelle dece que je considérais comme mes deux amis, puisque j’écrivais également dans l’Audace « historique »… Par la suite, j’avais invité Mezri Haddad à la fondation du CIDT-TUNISIE à Besançon,
toujours en ignorant les conseils. Mezri Haddad se présentait comme « chercheur en philosophie politique et morale », titre assez rare pour être aussi cocasse que suspect. Avec ses
manières affectées et faussement aristocratiques, il ne cessait de coller à la peau du Pr. Marzouki à chaque fois que ce dernier était de passage à Paris. Il se plaignait de ce que l’ambassade et ses officines l’attaquaient sur sa vie privée dans leurs feuilles de choux anonymes et avaient diffusé un document qu’il m’avait procuré lui-même où il était présenté comme un agent du Mossad. C’était réellement le cauchemar pour lui. Et j’étais naturellement porté à me sentir solidaire de lui, malgré les conseils de prudence.Mais surtout, Mezri se plaignait presque d’être affamé, de manquer de l ‘essentiel…
C’est certainement là l’explication première de son revirement exprimé dernièrement dans Afrique-Asie, mensuel pratiquant la prostitution politique dans les mêmes conditions que notre apprenti philosophe. (Il survit grâce aux pub du gouvernement de Tunis et de ses semblables)Remarquez qu’il reprend sans aucune intelligence l’essentiel des thèses, des clichés et des stéréotypes de la propagande officielle depuis Bourguiba. (La Tunisie a fait le choix de…, les trois mille ans d’histoire, l’Algérie-repoussoir, le péril islamiste, le « processus démocratique », « la
sécurité contre la liberté » et son antithèse « la nécessité impérieuse du libéralisme », l’ingérence ethnocentriste… Toutes idées qu’il combattait jusqu’à ce lent revirement pendant lequel il m’avait affirmé vouloir « se faire oublier par les Tunisiens et les oublier »…) Il répond ainsi à l’image du propagandiste de service telle que brossée par Alfred Sauvy : « Il s’agit d’exalter les sentiments qui dicteront l’attitude souhaitée. Dans ce cas, l’individu est méprisé; le propagandiste s’efforce de faire le moins possible appel à sa réflexion et à sa conscience, mais au contraire de créer en lui des réflexes conditionnés. » (In L’Opinion publique. PUF 1956. P. 97) Quant aux motifs étayés et solides d’inquiétude des amis du peuple tunisien qu’il dénigre, notre thuriféraire néophyte ne les a même pas vus, se donnant encore une fois en exemple parfait des thèses d’Alfred Sauvy : « Lorsque les faits sont trop importants pour pouvoir être cachés et que leur présentation est trop délicate, écrit cet analyste de l’animalité politique, le propagandiste détourne la conversation et porte le débat sur un terrain plus solide » (Ibid. P. 102)Ainsi, il apparaît aujourd’hui ce qu’on ne pouvait déceler à l’époque : une prédisposition de girouette et une propension à suivre les voies qui « mènent »… Un de ses ennemis mortels et contre lequel il me prévenait tout le temps, est devenu « chargé de mission » aux Affaires étrangères, avec les conséquences financières et de « notoriété » que l’on imagine. Alors, pourquoi pas lui ? Car, Mezri est en proie à une ambition dévorante. Il s’estime au-dessus du lot et donc avoir droit à une place au soleil bien à lui, unique, comme lui…
C’est ainsi que le monde se métamorphose à ses yeux, que toute pudeur se dissipe et qu’il s’en prend à des alliés du peuple tunisien. L’un des méfaits de la tortiocratie du général Ben Ali est qu’il déleste nombre de Tunisiens de leur honneur, de leur dignité et de « l’eau de leur visage ». En l’occurrence ici, il s’agit d’un exemple des plus grotesques, puisqu’il se drape des oripeaux de la science morale avec un pédantisme voyant comme preuve d’érudition. Il tente d’ériger la trahison en dogme. Là-dessus, notre ami Pr. Marzouki doit être le plus blessé des Tunisiens, car
il va avoir l’impression que l’insignifiant s’est joué de lui. L’honneur des intellectuels tunisiens est meurtri. Que tous ceux qui ont connu ce personnage viennent témoigner en vue de faire taire ce nouveau robot programmé par le pouvoir pour porter ses thèses et suppléer la carence totale de ses propagandistes usés !Je témoigne pour l’Histoire et pour la dignité de mon peuple. En mon âme et conscience.
Khaled Ben M’barek

Je précise que ce témoignage, s’il est faux, comporte ce qui peut tomber sous le coup de la loi comme diffamation. Je suis prêt à m’expliquer devant une juridiction libre.


 
 
C’EST LE MARDI, RSF EST à L’HEURE. VOICI LA 5éme  » CHRONIQUE DU MOUCHARD « . BONNE LECTURE.
 

On lui en veut d’être fugitif

Taoufik Ben Brik


Une irrésistible démangeaison d’irrévérence s’empare de quiconque se dispose à discourir de Hamma Hammami, leader du Parti communiste ouvrier tunisien (PCOT), en cavale depuis le 27 février 1998.

En raison de la démesure de sa situation de fugitif et du soupçon qu’ils ont qu’il ne fût fait  » héros  » qu’à partir de cette stature, Hamma suscite la hargne du microcosme. Cet homme qui n’a pour lui, disent-ils, que d’être si l’on veut, hors la loi, les transforme tous en poules mouillées.

Quand apparaît une interview de lui, ou qu’un de ses brûlots circule sous le manteau, les contestataires éprouvent de la gêne de voir leur sexe nu. Car si les autres leaders du microcosme avaient un sexe, Hamma en serait l’obscène échantillon agrandi.

Nos fines bouches font mine de trouver à Mustapha Ben Jaâffar, leader du forum démocratique (parti non reconnu), l’autre balance du microcosme, plus de poids, plus de charisme et des masses d’adhérents (sic) ; afin que leur bonne foi ne soit pas mise en doute et que, tout décompte d’apothicaire à part, elles aient l’air, en la matière, de n’avoir d’autre souci que le redressement des volontés collectives.

Ainsi Mustapha Ben Jaâffar bénéficie de ce genre de suffrages qui s’abattent, dans un système cohérent, sur un élément voisin qu’on dénigre. Par exemple, il est de mise que tel qui déclare ne pas être d’accord avec Hamma Hammami, ajoute aussitôt :  » Mais quel téméraire ! « 

Dans une lettre qu’il m’a adressée, Hamma me parle du  » temps qui ne pèse pas… « , du  » pain nu  » du romancier marocain Mohamed Chokri et de  » couscous aux fèves sèches  » pour gaver les affamés.

 » Moi, j’irai au manège, toi tu restes enfermé « .

Lettre de Hamma Hammami :

Quelque part en Tunisie, été 2000

De Hamma Hammami à Taoufik Ben Brik

Cher Taoufik,

Je suis ravi de t’écrire. J’espère que ton état de santé s’améliore, après ta grande « épopée » qui a fait bouger beaucoup de choses. Profite bien de ton séjour à Paris. Reprends ton souffle et reviens nous car tous les amis t’attendent pour continuer ce qui a déjà été entamé. Je t’envoie ce que tu m’as demandé. J’espère que cela répondra à ton attente.

Chroniques d’un évadé de l’Alcatraz tunisien

Je ne pourrais jamais oublier le geste de plusieurs amis (hommes et femmes) qui, dès que je suis entré en clandestinité, ont exprimé leur prédisposition à m’accueillir chez eux, faisant fi des représailles qui les attendaient au cas où je serais arrêté (torture, emprisonnement, licenciement etc.). Ces amis ne sont pas tous des militants ou des opposants à la dictature policière de Ben Ali. Parfois, ce sont de simples gens, de milieux populaires, mais honnêtes et opposés à l’injustice et à la répression. Leur geste m’a fait découvrir, une fois de plus, à quel point cette dictature est haïe par le peuple, à quel point elle est faible et fragile.

Ma grande joie, c’est lorsque je débarque dans une maison et que j’y découvre des enfants. Très vite, nous devenons amis. Intuitivement, ils comprennent qu’un danger me guette. Du coup, ils deviennent mes protecteurs et complices. Ils sont contents de garder le secret, même à leurs grands-mères et grands-pères.
Je dois te dire que tous les amis chez qui j’ai séjourné ont tout fait pour moi et ont consenti beaucoup de sacrifices pour que je me sente à l’aise chez eux, pour que je ne manque de rien. Quant à moi, j’ai essayé, et j’essaie toujours d’être le moins encombrant possible. Je fais de mon mieux pour au moins aider les personnes qui m’accueillent à résoudre certains problèmes de leur vie quotidienne. Ce qui fait mon bonheur, c’est lorsque mes amis rentrent et trouvent le ménage fait, la maison bien rangée et bien propre et les enfants en pleine forme.

J’ai toujours aimé apprendre à préparer les plats spécifiques de chaque région de la Tunisie. Ainsi, chaque fois que je suis de passage dans une famille, je suis attentif à ce qu’elle prépare. Je suis fier maintenant de pouvoir préparer le couscous de douze ou quinze manières différentes, selon les régions, les traditions et les milieux sociaux. Tu sais, je ne vis pas vraiment isolé de la réalité tunisienne. La vie est devenue très chère. Il n’est plus donné à n’importe qui, même pour ce qu’on appelle la classe moyenne, d’assurer une ration de viande chaque jour ou de manger un fruit à chaque repas.

Le temps ne pèse pas beaucoup sur moi. Parfois, je souhaite que la journée s’allonge pour que je puisse terminer ce que j’avais à faire. Vivre dans la clandestinité, ce n’est pas se cacher pour ne pas être arrêté, mais c’est se donner les moyens pour continuer la lutte dans un pays gouverné par une dictature policière. Ainsi, mon temps est organisé de la façon suivante : je consacre entre neuf à dix heures par jour à mes occupations politiques et intellectuelles. Je dors six à sept heures et le reste, je le consacre à faire la cuisine, ranger et nettoyer la maison, m’occuper des enfants, quand je suis dans une famille, et lire. Je ne regarde pas souvent la télé parce qu’il n’y a plus rien à voir. Même pas des matchs de football, car le foot et le sport, en général, sont malheureusement atteints par la gangrène maffieuse. Certains dirigeants proches du palais ont tout pourri : racket d’argent auprès des privés et des sociétés d’Etat, main basse sur les meilleurs joueurs des petits clubs, manipulation du calendrier, corruption des arbitres, etc. Bref, cela ne donne plus envie de suivre les actualités sportives.

Outre mes lectures politiques (journaux, revues, livres…), je suis un grand amateur de littérature et d’histoire. Car il ne faut pas oublier que j’étais professeur de littérature et de civilisation arabo-musulmane. Mes amis me procurent tout. D’ailleurs, je viens de terminer la lecture d’Alkobz-al-Hafi, un roman autobiographique du Marocain Muhammad Choukri et du roman Dhakirat al-jasad (Mémoire du corps) de l’Algérienne Leila Mostaganmi. Mais je dois t’avouer qu’il y a un roman que je relis souvent. Il s’agit du Vieil homme et la mer d’Ernest Hemingway. Je suis fasciné par le héros (the old man) et de cette épopée américaine. Je me rappelle toujours de cette réflexion qu’il a faîte à un moment crucial de cette épopée : « Man is not made for defeat… A man can be destroyed, but not defeated » (« L’être n’est pas fait pour être vaincu… Il peut être détruit mais pas vaincu »). Abou Nawâs al-Mâari, al-Mûtanabbi, al-Sayyab, al-Bayati, Nazim Hikmet, Pablo Neruda, Paul Eluard, Federico Garcia-Lorca et beaucoup d’autres poètes sont mes compagnons de tous les instants. A n’importe quel moment du jour ou de la nuit, j’ouvre un recueil de poésie et je plonge, errant dans le monde particulier de tel ou tel poète. Franchement, à l’heure actuelle, il n’y a pas grand-chose à lire en Tunisie. La littérature et l’art tunisien n’ont jamais été aussi coupés des réalités tunisiennes, des réalités du pays et du peuple, qu’au cours des dix dernières années. Dans les années 60, 70, 80, les écrivains, les poètes, les gens de théâtre, les cinéastes, les troupes musicales et les peintres étaient plus ou moins impliqués dans les luttes populaires et exprimaient à leur façon et avec les moyens dont ils disposaient les aspirations des différentes classes et couches sociales. A l’heure actuelle, c’est la désertification culturelle totale. La dictature sévit comme dans tous les autres domaines de la vie, utilisant soit l’arme de la répression, soit celle de la corruption. Rares sont ceux qui ont pu préserver leur dignité et sauver l’honneur de leurs âmes. Le profil de l’intellectuel, de l’écrivain, de l’acteur, du cinéaste et du chanteur de « l’ère nouvelle » est semblable à celui du journaliste, c’est le propagandiste-indicateur. Il doit courtiser l’autocrate et surveiller ses pairs. C’est « la chute dans le royaume de la contre-façon et du factice » comme l’a bien exprimé le romancier algérien, Tahar Wattar, dans une intervention sur la littérature tunisienne d’aujourd’hui. Les quelques voix discordantes dans tous les domaines culturels sont totalement boycottées par les médias.

Sans aucun doute, mes filles souffrent beaucoup. Tout d’abord parce que nous n’avons pas pu vivre beaucoup de temps ensemble. Prends Ousseima, elle a maintenant douze ans. Nous n’avons vécu ensemble que pendant cinq ans.
Quant à la petite Sarah qui éteindra, le 18 juin, sa première bougie, je ne l’ai jamais vue. Elles souffrent aussi parce que, filles d’opposant politique et de militante des droits de l’homme, elles sont surveillées et harcelées continuellement par la police politique. Ce qui me console, cependant, c’est que, d’une part, elles ont une mère exceptionnelle et que, d’autre part, leur souffrance les a rendues très tôt conscientes des problèmes de leur pays et de leur société (je parle ici de Nadia, 17 ans, et d’Ousseima). Lorsque Ben Ali ou l’un de ses courtisans parle de « l’enfance heureuse de l’ère nouvelle », mes filles les couvrent d’injures. Evidemment, elles ne sont pas les seules à souffrir. Des milliers d’enfants de prisonniers politiques, d’exilés, d’opposants et de militants des droits de l’homme vivent dans la même situation. La dictature benaliste est un enfer pour tous, tant pour les adultes que pour les enfants.

Des années que j’ai passées en prison, un fait qui peut paraître anecdotique est resté gravé dans ma mémoire. C’était en janvier 1992. Je venais d’être arrêté et incarcéré à la prison civile de Tunis. Etant un habitué de la maison, j’ai demandé à d’anciens détenus ce qui avait changé depuis ma dernière libération. On m’a appris, en autres, qu’un gardien au grade de sergent-chef a été nommé officiellement comme le nouveau bourreau de toute la Tunisie. Il faut savoir qu’un bourreau reçoit entre 20 et 50 kilos de farine à chaque pendaison. On m’a appris également qu’il s’occupe quotidiennement de la fouille des détenus qui reçoivent la visite de leurs avocats. Le lendemain, j’ai reçu la visite de l’un de mes avocats et je me suis trouvé face à ce nouveau bourreau. On s’est tout de suite reconnu. Instantanément, ses yeux se sont fixés sur mon cou. Il l’a prospecté avec beaucoup d’intérêt. Il a certainement imaginé la corde autour. Un frisson a parcouru mon corps… et je n’ai pas pu me retenir d’éclater d’un rire nerveux. A sa question sur les raisons de ma réaction, je lui ai répondu qu’il m’avait chatouillé en passant ses mains sous mes aisselles.

Combien de temps je pense tenir dans cette situation ? Une éternité, s’il le faut. Tu dois savoir qu’il s’agit pour moi d’une conviction. La vie d’un être humain n’est-elle pas quelque chose de précieux ? Alors, à quoi bon la gâcher dans des futilités ? Ne vaut-il pas mieux la consacrer à quelque chose de noble, tel que la cause de la liberté, de la justice sociale et du progrès? Cela importe peu, pour moi, que ce but soit atteint de mon vivant. L’essentiel, c’est de participer autant que possible à lui frayer un chemin. Certes, tu dois te rappeler des vers du célèbre poète turc, Nazim Hikmet :

Si je ne brûle pas,
Si tu ne brûles pas,
Si nous ne brûlons pas,
Qui illuminera la voie?

Néanmoins, je suis convaincu que la victoire sur la dictature benaliste n’est pas difficile car elle n’est pas aussi forte qu’on le croit.

Avec mes amitiés
Hamma Hammami

 


  LA MILICE EST A L’OEUVRE DE NOUVEAU A TUNIS. les barres de fer, les gourdins et la violence haineuse sont les seuls moyens encore à disposition d’un régime hideux incapable de réaliser qu’il va à sa perte.
description des événements du soir du 6 février à travers communiqués et e-mails publiés sur le web:

C.R.L.D.H.  Tunisie

Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie

communiqué

 

Des centaines de policiers encerclent le domicile de Jalel Zoghlami et préparent l’assaut de l’appartement dans lequel il poursuit la grève de la faim, soutenu par son épouse et  par plus d’une vingtaine d’amis et de défenseurs des droits de l’homme.

 

Des centaines de policiers encerclent depuis 20 heures 15minutes le domicile de Jalel Zoghlami et ont empêché ce dernier de se rendre à la clinique où il devait faire des examens médicaux. La police a chargé avec une violence inouïe blessant plusieurs personnes qui accompagnent le gréviste de la faim dont deux sont dans un état jugé grave. Armés de barres de fer, usant de propos injurieux et d’insanités à l’encontre des défenseurs des droits  de l’homme, ils ont étalé leur violence à l’ensemble du quartier interdisant à toute personne de se rapprocher de l’immeuble ou se trouve l’appartenant de Jalel Zoghlami et demandant aux habitants de dégager leurs voitures des lieux.  Abdelmoumen Belannes, ancien détenu politique et membre du PCOT,  qui était en compagnie  de Maître Radhia Nassraoui  a été ainsi sauvagement frappé et grièvement blessé.

A l’heure ou ce communiqué est rédigé (23h20 heure française) plus de vingt personnes se trouvent dans l’appartement de Jalel Zoghlami. Il s’agit de son épouse Ahlem Belhaj,  Fethi Zoghlami, Maitre Anwar Kosri, membre du comité directeur de la LTDH, Afifa Ben Souisse, Selim El Barghouthi, Wassila Ayachi, Nejib Zoghlami, Zoubir Amami (qui souffre d’un malaise cardiaque) Slah Henid, Saida Zoghlami, Lotfi Zohghlami, Féthi Ben Ali, Mondher Dhib, Dr Sami Souihli, Tarek Makhdhaoui, Kamel Dridi, Ridah Khédiri, Mahmoud Chatti , Hichem Nighaoui.

Cette action policière s’apparente à l’évidence à une expédition massive  et punitive comme si la chasse à l’homme qui a visé Jalel Zoghlami il y a trois jours  ne suffisait pas à créer un climat de terreur et de peur.. Démonstration est ainsi faite que cette dégradation violente de la situation obéit à un choix délibéré de la part des autorités tunisiennes de réprimer sauvagement des opposants et des défenseurs des droits de l’homme qui revendiquent pacifiquement l’exercice de  leur liberté d’association et d’expression  et ce en violation flagrante de tous les droits souscrits par le pays comme l’inviolabilité du domicile privé, l’interdiction de mauvais traitements et de la torture.

Les faits qui se sont déroulés ce soir à Tunis marquent un tournant grave dans la politique répressive des autorités tunisiennes qui ont fait le choix de faire de la Tunisie une grande prison en brisant par la force et la violence la résistance des forces démocratiques et associatives afin de  maintenir une politique et un régime discrédités sur le plan national et international.

Cette logique de fuite en avant n’est pas fortuite mais obéit à une stratégie éprouvée qui ne tolère aucune expression différente en Tunisie et ne concède rien sur l’essentiel c’est-à-dire la jouissance par les Tunisiens de leur liberté toute et entière.

Le CRLDHT considère qu’il est plus que jamais du devoir des Tunisiens et des amis de la Tunisie de redoubler d’efforts pour dénoncer dans les enceintes nationales et internationales les méfaits des autorités tunisiennes et les amener ainsi à changer de politique  dans un sens qui soit plus conforme, dans les paroles et dans les actes, aux engagements souscrits par la Tunisie.

Paris, le 6 février 2001
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From:  chokri.latif@netcourrier.com
Date:  Wed, 7 Feb 2001 00:51:36 +0100 (MET)

   L’immeuble et le quartier ou habite jalel zoghlami en grève de la faim en protestation à l’attaque dont il a été victime samedi dernier est encerclé et complètement isolé par des dizaines de policiers depuis 20h30 et jusqu’à cette heure. Des actes innomables d’intimidation,d’insultes,et d’agressions sanglantes ont eu lieu,en vue d’interdire à toute personne
l’accés à l’immeuble. Des appels SOS alarmants sont constamment envoyés par Ahlem belhaj,épouse de J-zoghlami de chez elle par téléphone,demandant du secours pour plusieurs personnes apparament dangereusement bléssées,et bloquées chez elle sans pouvoir ni recevoir des soins,ni ètre transportées vers des hopitaux.
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From:  Cidtunisie@aol.com
Subject:  [maghreb-ddh] TERREUR SUR TUNIS !
Date:  Tue, 6 Feb 2001 19:04:04 EST

Chers compatriotes, Au moment où vous serez en train de lire ces lignes, l’assaut des miliciens RCD sera encore en cours. Ils encercelent le domicile de Jalel Zoghlami depuis les alentours de 20h30. Ils l’ont attendu à son retour de l’hôpital où il a subi des examens. Ils lui sont sautés dessus et ses accompagnateurs ont tenté de s’interposer. Les miliciens étaient armés de barres de fer et autres gadgets du genre. Actuellement, la maison est encerclée et la milice exige son évacuation  (il s’agit d’un domicile privé !) 20 personnes y sont retranchées et
refusent de se livrer à la vindicte des nervis du caporal de Tunis. Bilan provisoire :
* Jalel a été mis à terre et tabassé
* Abdelmoumen Belanec est blessé à la tête
* Omar Mestiri a été sévérement frappé
* Fathi Ben Ali a un bras cassé
* Salah Nid a le cuir chevelu ouvert
* Zoubeir Hammami, cardiaque, a eu un malaise
* Tarek Mahdhaoui a été atteint au bas ventre.
Maître Chawki Tabib est entré dans la maison avec l’accord de la milichia.
C’est la dernière nouvelle disponible. La terreur s’accentue, mais le courage citoyen n’a jamais atteint de tels sommets. La milice elle-même ne sert plus à grand chose…
Khaled


  

 
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