TUNISNEWS
7 ème année, N° 2400 du 17.12.2006
AISPP: Communiqué Association des Tunisiens de France: Communiqué L’ATF: Congrès de l’UGTT – L’ATFinforme AFP: Marche silencieuse à Nantes à la mémoire de Taoufik el-Amri L´Humanité: Tunisie . Climat mouvementé pour le 21e congrès de l’UGTT Moncef Marzouki: Cette grande bibliothèque tunisienne qui vient de brûler Malta Today: Extradition deal with Tunisia upsets human rights watchdogs
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L’ATF: Congrès de l’UGTT
L’ATF vous informe :
Le congrès de l’Union Générale de Travail de Tunisie (UGTT) vient de se dérouler à Monastir du 13 au 17 décembre 2006.
La nouvelle équipe du Bureau exécutif de la centrale syndicale issue des élections est la suivante par ordre de voix obtenues :
Abdesslam JRAD, Ali ROMDHANE
Houcine ABBASI
Mohamed SAAD
Mohamed CHENDOUL
Mohamed TRABELSI
Ridha BOUZRIBA
Belgacem AYARI
Mohamed SHIMI
Abid BREIKI
Moncef EZZAHI
Mouldi JENDOUBI
Moncef YACOUBI
Dans cette nouvelle équipe, on remarque quatre nouveaux. Il s’agit de
– Monsieur Houcine ABBASI, secrétaire Général de l’URT de Kairouan
– Monsieur Belgacem AYARI, secrétaire Général de l’URT de Ben Arous
– Moncef EZZAHI, secrétaire Général du Syndicat Général de l’Enseignement de Base
– Mouldi JENDOUBI, secrétaire Général de l’URT de Jendouba
Le Bureau National de l’ATF, félicite les élus et souhaite bon vent à cette nouvelle équipe au service des travailleuses et des travailleurs de Tunisie.
Le Bureau National de l’ATF
Paris le 17 décembre 2006
Marche silencieuse à Nantes à la mémoire de Taoufik el-Amri
Tunisie . Climat mouvementé pour le 21e congrès de l’UGTT.
Cette grande bibliothèque tunisienne qui vient de brûler
Par Moncef Marzouki
Un célèbre proverbe africain dit que « lorsque meurt un vieux sage, c’est toute une bibliothèque qui a brûlé ». Ce triste 16 décembre 2006, avec la disparition de Hammadi Farhat, une grande bibliothèque tunisienne est partie en fumée. Un de nos proverbes dit que « tout mort voit ses jambes se rallonger ». Que c’est facile en effet de grandir par des éloges post-mortem quelqu’un qu’on a essayé parfois de rapetisser toute sa vie. Mais Hammadi Farhat n’a nul besoin qu’on lui rallonge les jambes dans son cercueil. Il les avait bien longues durant toute sa vie. Je suis bien placé pour en témoigner puisque j’ai fréquenté ce grand seigneur de façon continue, depuis notre première rencontrée en 1981, jusqu’à la dernière… l’avant-veille de son départ définitif.
L’homme a commencé par susciter en moi une immense reconnaissance.Ce grand chirurgien de l’Hôpital universitaire de Sousse était l’un des rares praticiens à soutenir le projet de médecine communautaire que j’essayais de faire vivre dans un environnement sceptique pour ne pas dire méprisant. Lui, le brillant chirurgien était convaincu que le combat pour la santé se jouait dans les dispensaires, par la prévention et des soins de qualité donnés aux plus pauvres. Un jour, je suis allé le voir en lui expliquant que trop de cas de chirurgie bénigne étaient transférés dans de mauvaises conditions des dispensaires au CHU, faute de formation et de petits moyens, qu’on pouvait diminuer ce débit absurde et coûteux en formant, ou en recyclant , internes, médecins et infirmiers dans la petite et la chirurgie d’urgence.
Hammadi Farhat s’enthousiasma pour le programme. Il forma sans rien demander en retour , des dizaines de professionnels ravis par la présence dans leurs dispensaires miteux de ce grand maître. Le transfert facile vers l’hôpital décrût de façon spectaculaire, à la grande fierté de tous et au soulagement de nombreux malades.
L’homme suscita en moi très rapidement un immense respect. Le maître ne faisait pas, à l’instar de presque tous ses collègues dans le commerce du bistouri. Il opéra gratuitement de nombreuses années à l’hôpital de Mahdia . Il était dévolu corps et âme à la nouvelle faculté de Sousse et à l’hôpital public. Or qu’advient-il dans notre système de tels hommes : les responsabilités et les honneurs ? Bien sûr que non, sinon en quoi serions nous des sous-développés ? Le sous-développement n’est-il pas dû en partie au pouvoir absolu qu’exercent les fidèles sur les compétents ? Exit Hammadi Farhat de l’hôpital et de la faculté. Trop critique, trop exigeant, trop encombrant, trop grand pour les petits chefs fidèles et incompétents.
En le voyant partir au milieu des années 80 , je ne savais pas que j’étais moi-même en sursis et que je ne tarderai pas à connaître le même sort. Hammadi Farhat, ne faisait pas partie de ces médecins pointus et obtus, le nez sur l’organe et faisant abstraction de la société. Il était avant tout un médecin citoyen. La table du dialogue social lui était aussi familière que la table d’opération. Il présida pendant de longues années la section de Sousse de la Ligue Tunisienne des droits de l’Homme, apporta son soutien à la création du Forum pour les libertés et le travail, à celle du Congrès pour la République. Il a été pendant plus de deux décennies dans la région du Sahel la figure emblématique du médecin engagé pour promouvoir la santé des plus pauvres, la démocratie et les droits de la personne.
L’homme finit à la longue par susciter en moi une immense affection…une affection quasi filiale. Sa maison de Hergla, devenue le long des années un véritable caravansérail où se bousculaient sa grande tribu, ses innombrables amis, représenta pour moi, surtout lors de dix terribles dernières années, un véritable havre .
C’est auprès de lui, et de sa merveilleuse femme Monique, médecin dévolue corps et âme pendant quatre décennies à la santé des plus pauvres, que je trouvais le soutien et le réconfort de l’amitié et de la solidarité.
Ah, ici je dois avouer que Hammadi Farhat suscita aussi en moi une immense exaspération. Rendez-vous compte, en vingt ans de parties d’échecs, je n’ai gagné contre lui que deux ou trois fois (dont une fois en trichant un peu, juste un tout petit peu…). Une semaine avant son départ, il traversa le cordon de police autour de ma maison sans un regard pour les innombrables zombies qui m’assiègent depuis deux mois, le vieil échiquier de nos mémorables batailles sous les bras. Je l’ai prévenu que durant ces cinq années à Paris, je m’étais frotté aux logiciels les plus avancés et que ses chances de me battre étaient nulles. Il sourit et remporta avec élégance deux parties. Bravo l’artiste, bravo maître.
C’est à la fin de la deuxième partie qu’il se sentit mal et que j’ai dû appeler Monique pour qu’il soit transféré d’urgence à la clinique. Puis il nous a quitté. J’aurais presque envie de le lui reprocher, un peu comme s’il nous avait tous laissé tomber.
Je ne jouerai plus aux échecs avec mon maître, mon ami, mon collègue, mon frère d’armes, mais je porterai comme tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître sa mémoire à jamais intacte. Comment pourrait-il en être autrement puisque Hammadi Farhat est une figure de notre avenir et non de notre passé. Cet homme appartient à une race très spéciale de Tunisiens, dont faisait partie aussi Mohamed Chakroun et Hachemi Ayari. De telles personnes, comme d’autres moins connues, ont été, et sont les dépositaires discrets et tenaces de valeurs morales salvatrices aujourd’hui méprisées, rejetées en arrière plan, mais patientes : l’intelligence de l’esprit, l’élégance de l’âme, la générosité du cœur et la force de la volonté. Hammadi Farhat fait donc partie des gardien du feu, de cette lumière qui un jour dissipera les ténèbres qui enveloppent aujourd’hui la Tunisie.
Extradition deal with Tunisia upsets human rights watchdogs
(Source: “Malta Today”, le 17 décembre 2006)