12 mai 2006

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TUNISNEWS
7 ème année, N° 2181 du 12.05.2006

 archives : www.tunisnews.net


Déclaration commune des Verts français et tunisiens

L’ association   Droit à la Différence: Déclaration

Hommage  Adel ARFAOUI a l·occasion de la 7eme Assemblée Générale du Reseau Euromediteraneen des Droits de l·Homme

AFP: Altercations d’avocats en sit-in avec la police, démenti des autorités

Verbatim de la conférence de presse annonçant la naissance de l’Alliance Maghrébine pour la Démocratie (AMD)  du 27 avril 2006

Le Temps : Mohamed Harmel , secrétaire général d’Ettajdid :  » Nous refusons toute instrumentalisation du sacré religieux dans les luttes politiques « 

Reuters: Méditerranée – Dix ministres esquissent une stratégie commune

Réalités: Les Tunisiennes se (dé)livrent sur le Net

Quebec micro: Tunisie : trouver l’amour sur le Web

Communiqué de Human Rights Watch: Maroc: Les condamnations montrent les limites imposées sur la liberté de la presse

Astrubal: Quelques Observations relatives aux résultats des élections au Conseil des droits de l’Homme

M’hamed JAIBI: La confiance des Nations unies 

La Presse : Une œuvre de progrès et de liberté

LA TUNISIE AU MONDIAL (DOSSIER)

 

Déclaration commune des Verts français et tunisiens

 

Paris, le 10 mai 2006

Les Verts français et tunisiens se sont réunis mercredi 10 mai au siège national des Verts, respectivement représentés par Patrick Farbiaz, délégué aux relations internationales des Verts et Abdelkader Zitouni, coordinateur national de «Tunisie Verte ».

 

 Les Verts français et tunisiens ont constaté leur identité de vues quant à leurs orientations en faveur du développement soutenable, de la démocratie, des droits de l’Homme, de la justice sociale et de la justice Nord/Sud, notamment dans le cadre des rapports euro-méditerranéens.

 

Ils ont réitéré la vive protestation qu’ils ont déjà exprimée aux autorités tunisiennes quant à l’absence de légalisation du parti «Tunisie Verte » plus de deux ans après qu’il l’ait requise en remplissant toutes les conditions légales et quant à la légalisation subite cette année d’un faux parti Vert et vrai thuriféraire de la dictature de Ben Ali.

 

 Ils se sont félicités des résultats positifs de la tournée en Europe de M. Abdelkader Zitouni qui a participé notamment au Conseil du Parti Vert européen à l’occasion duquel l’ensemble des partis Verts européens ont apporté leur soutien à «Tunisie Verte » et protesté contre le hold-up ;politique dont ce parti a été victime

 

Ils ont convenu de continuer à œuvrer en commun en faveur de leurs buts communs, au premier rang desquels la démocratisation en Tunisie, et à renforcer leur coopération, notamment dans le domaine de la formation des militants.

 

 

Pour les Verts                                                                                  Pour « La Tunisie Verte »

 

Patrick Farbiaz                                                                                Abdelkader Zitouni

Délégué aux relations internationales                                         Coordinateur national


 

DECLARATION

De l’association   Droit à la Différence    (D.A.D)
A l’occasion des 2 années écoulées depuis la date du dépôt du dossier pour l’obtention du visa de l’existence légale.
v                Dimanche 25 avril 2004, et à la suite d’une réunion qui s’est tenue à Kairouan, nous avons décidé la Fondation d’une Association Non Gouvernementale (O.N.G) que nous avons dénommée   Droit  à la  Différence   (D.A.D) dont il s’agit, pour quelques uns de ses objectifs fondamentaux de :
* Lutter contre toute forme de discrimination : telles que la distinction pour la race….. la religion ou l’opinion publique…;
* Faire de sorte que des êtres humains se rencontrent et s’enrichissent mutuellement;
* Répandre la culture de l’ouverture sur les différentes civilisations et cultures;
* Développer la mentalité de la reconnaissance du droit de chaque être humain à la différence vécu sans recours à la violence ou l’appel à son usage;
* Intervenir auprès des autorités pour faire de la différence un droit que la loi garantit et protége;
v                 Mercredi 28 avril 2004 nous avons remis au Gouverneur de Kairouan (Bureau des relations avec les associations) un dossier comprenant tous les documents exigés par la Loi sur les Associations pour l’obtention du visa prévu par la même Loi sur les Associations et au moyen duquel, et seulement, l’existence de l’association devient légale.
Mais le Gouverneur de Kairouan ne nous a délivré même pas le récépissé que l’article 3 de la même loi lui impose de nous remettre.
 Le 28 mai 2004 nous avons envoyé au Ministre de l’Intérieur une lettre où nous avons cité-entre autres-la décision du Président de la République Tunisienne de reporter le Sommet des Chefs d’Etats Arabes, afin que le Sommet admette par principe dans le communiqué final « l’engagement d’oeuvrer pour le renforcement de l’exercice démocratique et insiste sur le rôle de l’ensemble des Composantes de la Société Civile, y compris les Organisations Non Gouvernementales dans la conception des contours de la Société de Demain »  (cf déclaration de Tunis. Parag 2)
* nous avons alors écrit en date du 28 août 2004 au Président de la République, sur le même sujet et nous avons passé en revue les précédentes étapes et nous avons également rappelé la teneur du 2ème paragraphe de la déclaration de Tunis.
Mais, cette fois encore, et jusqu’à ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse.
Il est à rappeler que le Président du Comité Fondateur de notre association a présenté à deux reprises, deux demandes d’audience au Gouverneur de Kairouan qui n’ont donné lieu à aucune réponse.
                                                                     Le Président du Comité Fondateur de D.A.D.
                                                                                               Ahmed KILANI

                                                                                   Cité Protection de l’Environnement
                                                                              2, Rue de l’Osier, 3100 Kairouan (Tunisie)
                                                                                            Tél. 216 (22 80 30 70)


 

Hommage  Adel ARFAOUI a l·occasion de la 7eme Assemblée Générale du Reseau Euromediteraneen des Droits de l·Homme

 

La 7ème A.G du Réseau Euroméditéranéen des Droits de l·Homme

( REMDH) réunie a Madrid (Espagne) le 12 Mai 2006 a rendu  hommage a la mémoire du militant tunisien des droits humains Adel ARFAOUI décèdé hier jeudi 11 mai 2006 des suites d·une grave insuffisance rénale .

A l· heure oû Adel ARFAOUI  ,membre du Comite Dirécteur de la LTDH ,était enterré a Jendouba (nord Ouest de la Tunisie) la 7ème Assemblée Générale du Réseau Euroméditéranéen des Droits de l·Homme observait une minute de silence a sa mémoire  .Maitre Mokhtar Trifi président de la LTDH ,a rendu a cette occasion un émouvant hommage a l·engagement du défunt pour la promotion et la protection des droits humains depuis près de 20 ans au sein de la LTDH .

Le REMDH regroupe plus de 70 associations et instances de défense de droits humains du Nord et du Sud de la Méditerrannée.Sa 7ème Assemblée Générale(du 12 au 14 Mai 2006) sera suivi de la 1ère Consultation du Conseil des représentants de la session régulière du Conseil d·administration de la Fondation Euroméditéranéenne de Soutien aux défenseurs des droits humains :

 


Protestation

Moncef MARZOUKI

 

Je regrette que vous ayez considéré le communiqué du CPR si peu important que vous l’ayez fait passer après tant d’autres nouvelles plus importantes , il est vrai que rien dans notre pays n’a plus d’importance et que tout se vaut

 

(Source : e-mail reçu le 12 Mai 2006 à 08:23:58)


 

 

Altercations d’avocats en sit-in avec la police, démenti des autorités

 

AFP, le 12 mai 2006 à 20h45

TUNIS, 11 mai 2006 (AFP) – Des échauffourées se sont produites jeudi à Tunis entre des forces de police et des avocats qui observent depuis mardi un sit-in contre l’adoption d’une loi organisant la profession, a-t-on appris auprès des protestataires.

 

Les altercations ont commencé lorsque les forces de l’ordre sont intervenues pour empêcher l’approvisionnement des avocats en nourriture et matelas, alors qu’ils poursuivaient leur sit-in à la Maison du Barreau, située en face du Palais de la justice, ont indiqué à l’AFP des avocats témoins.

 

Mes Abderrazak Kilani et Ayachi Hammami, ont été admis aux urgences pour quelques heures, à l’hôpital Charles Nicole, près du Palais de Justice qui est encerclé par un important dispositif de sécurité, a-t-on constaté.

 

Une source officielle a qualifié jeudi de « mensongères et totalement infondées », « les allégations faisant croire à une quelconque altercation entre avocats et forces de l’ordre ».

 

« Aucune altercation et a fortiori aucune violence n’a eu lieu entre aucun avocat et les forces de l’ordre. Il ne s’agit en réalité que de mises en scènes destinées à induire l’opinion en erreur », a-t-on ajouté de même source.

 

Les avocats observent un sit-in à l’appel du Conseil de l’Ordre des avocats (CNOA) pour protester contre l’adoption mardi par la chambre de députés d’une loi portant création d’un Institut de formation du barreau, objet de litige entre le CNOA et le ministère de la Justice.

 

Le CNOA considère ce projet comme étant préjudiciable à l’indépendance de la profession et affirme qu’il a été « conçu de façon unilatérale » par le ministère de la Justice accusé d’avoir ignoré les propositions de la profession.

 

De source gouvernementale à Tunis, on a assuré que le projet avait été « élaboré en concertation avec toutes les parties concernées, y compris les représentants du barreau ».

 

« Si l’inscription au barreau fait partie des prérogatives du Conseil de l’ordre, il est naturel que la formation des avocats relève des institutions publiques, comme c’est le cas pour toutes les autres professions libérales », souligne-t-on de même source.

 

AFP


 

Verbatim de la conférence de presse annonçant la naissance de l’Alliance Maghrébine pour la Démocratie (AMD)  du 27 avril 2006

 

Dans une salle de presse archi comble du Centre d’Accueil de la Presse Etrangère,  cinq membres du Bureau Exécutif de l’Alliance Maghrébine Pour la Démocratie ont répondu jeudi 27 avril aux questions des  journalistes. Autour du Président (  le tunisien Omar S’habou) ont pris place  le vice-président ( le mauritanien Jamel Ould Mohammed),  le secrétaire général (  le marocain Samad Filali)  ;  le trésorier ( l’algérien Ahmed Kaci) et  une représentante de la femme maghrébine( la marocaine Asma Chraïbi membre du Bureau Exécutif chargée de la culture et des arts). A gauche du président, l’ancien ministre tunisien  Tahar Belkhoja au  titre de signataire de l’appel de Tanger d’avril 1958.   A l’ouverture le Président de l’AMD a prononcé  une allocution  dans laquelle il a notamment déclaré :   «  Je voudrais dans ce mot d’introduction évoquer brièvement la genèse de ce projet… Eh bien  les 100 fondatrices et fondateurs de l’AMD étaient en train de pousser une sorte de cri d’écœurement et de quasi désespoir. Passez moi l’_expression triviale que je vais utiliser mais elle est tellement éloquente : Ils  avaient « marre » de  l’immobilisme qui fige leur région. Ils étaient presque dégoûtés  ou honteux de s’observer comme des chiens de faïences chacun dans son petit coin  alors que la plupart des nations du monde, conscientes des enjeux futurs, s’organisaient à qui mieux mieux. Un état  proprement tragique comme le prouve deux faits  tragiques : les échanges commerciaux intermaghrébins ne représentent que 2 % de l’ensemble de leurs échanges commerciaux avec le reste du monde ; tandis que pour qu’un algérien puisse se rendre au Maroc et vice versa il leur faut mesdames et messieurs un visa ! Traités en somme réciproquement comme de potentiels terroristes ! Nous étions tous conscients  que le salut réside dans un Maghreb uni, démocratique et moderne. Et c’est cette conviction unanimement partagée qui constitue le soubassement à la fois intellectuel et psychologique de notre initiative.

…Il importe aussi de préciser  que ce sont les Maghrébins de la diaspora  qui en ont eu l’idée.  Pour une raison à la fois simple et forte tout en étant paradoxale. Le maghrébin découvre et vit son identité maghrébine en dehors de l’espace géographique du Maghreb. Quant  nous sommes chez nous dans nos pays – je parle évidemment de la grande masse des nationaux –  l’identité maghrébine s’assimile à un vague sentiment, un concept mal défini, un idéal lointain. Mais ici en Europe, nous en ressentons, que nous soyons intellectuels ou non,   la vive réalité et ce à travers la perception que les non maghrébins ont de nous. Pour eux nous sommes indistinctement des maghrébins !   Et le fait, en plus, que Paris offre aux élites maghrébins plus d’une opportunité de rencontres et de débat   favorise les contacts entre nous : nous   apprenons  à nous connaître, à  nous  découvrir réciproquement et à  nous apprécier. Ce sont l’ensemble de ces facteurs qui ont concouru à faire naître ce projet….

…Il fallait donc faire quelque chose …Mais quoi ?

Eh bien cela ne pouvait être que quelque chose qui soit dans le droit fil  de l’engagement personnel de ces membres fondateurs en tant que militants démocrates dans leur pays respectif. Le critère basique qui a réuni tout ce beau monde, d’horizons idéologiques et culturels différends, c’est leur incontestable qualité de démocrate. Tous  sans exception  ont rendu,   dans leur parcours universitaire, associatif ou politique, des services – qui leur ont souvent valu des sévices – à la cause de la démocratie et de son avancement dans leur pays. Ils ne pouvaient par conséquent additionner leur énergie que pour la cause d’un Maghreb uni et démocratique…  Uni parce que démocratique et démocratique parce qu’uni…La dialectique est  causale entre l’unité et la démocratie. Seuls des Etats qui sont réellement l’_expression des volontés majoritaires dans les cinq pays, qui sont  les émanations d’aspirations populaires démocratiquement traduites à travers des institutions représentatives  pourront impulser un  processus unitaire  d’autant plus porteur qu’il s’appuiera  non plus sur des mécanismes technocratiques mais  sur la légitimité et la puissance  de la vox populi…. En tant que maghrébins et démocrates nous sommes convaincus que seuls des Etats de droit – ce qui n’est pas le cas des Etats maghrébins actuels –  peuvent faire sortir la région de son interminable sommeil…

…Bien sur, me diriez-vous, cela ressemble fort à une nouvelle incantation plus mystique qu’autre chose à la gloire d’un Maghreb uni et démocratique. Une énième incantation…  Nous  en sommes conscients, mais nous avons quand même pris le pari de faire de notre mieux pour  métamorphoser cette incantation en une énergie réalisatrice…Vous avez peut être lu que nous avons un programme d’action autant ambitieux que réalisable et nous sommes décidés à le mettre en œuvre…

…Une fois le consensus conceptuel établi, le processus classique de création d’une association s’est ébranlé : rédaction d’un projet de plateforme, successivement enrichi des suggestions et des idées des uns et des autres au sein de la diaspora et bien entendu parmi les militants résidants dans les pays du Maghreb… ces derniers ont fini par constituer au final plus des deux tiers des membres fondateurs… En cours du processus, le texte fondateur recueillait des adhésions  résolues et parfois enthousiastes des militants et des personnalités des cinq pays dont six  éminentes personnalités de la société civile libyenne,  toutes résidantes en Libye.  Ce qui est significatif des frémissements qui  gagnent l’élite libyenne  pour le Maghreb et pour la démocratie…  Certains membres fondateurs se sont contentés du  simple énoncé du projet et n’ont même pas éprouvé le besoin de lire au préalable le texte fondateur. C’est dire combien l’aspiration à cet idéal est forte et le besoin de faire quelque chose vital et urgent.

…Nous savons bien  que  d’autres initiatives louables et sérieuses nous ont précédés dans la réalisation de cet  idéal… D’autres  suivraient sans doute. C’est tant mieux ! Evidemment nous ne prétendons  à aucun monopole  sur  cette cause et nous ne jetons l’anathème contre personne. Nous sommes une nouvelle énergie – si  l’on peut dire – qui va renforcer  celles travaillant déjà dans le même  sens. Ensemble nous pourrions créer  une formidable synergie qui pourrait contribuer à libérer  notre région de sa léthargie.

…Nous ne pouvons pas néanmoins ne pas attirer votre attention sur le fait que notre association réunit pour la première fois dans l’histoire contemporaine de la région, des figures représentatives  de tout le spectre politique maghrébin ( de l’islamisme modéré à la gauche marxiste) , de toutes les générations  et  des cinq nationalités. A notre connaissance c’est la première fois qu’une  centaine de figures maghrébines autant représentatives se réunissent dans une association ayant cette vocation là….D’ou peut être la dimension petitement historique de notre  initiative…

 

…Nous avons enfin choisi la date du 27 avril pour  annoncer la naissance officielle de notre association, et ce n’est pas, vous vous en doutiez, un choix arbitraire… Il y a quarante huit ans jour pour jour les chefs historiques des trois mouvements de libération des trois pays centraux s’étaient réunis à Tanger et ont  lancé un solennel appel à l’unité du Maghreb. D’ailleurs nous sommes  heureux de compter parmi nos membres fondateurs un des trois signataires encore vivants de l’appel de Tanger. Il est même présent à nos cotés sur cette tribune, j’ai nommé Monsieur Tahar Belkhoja. Il a été plusieurs fois  ministre et était un des chefs de file de la tendance libérale  du  Néo-destour au temps du très regretté Président Bourguiba (Très regretté de mon point de vue… je sais que d’autres tunisiens ne le regrettent pas et c’est leur droit !) Le fait que Tahar Belkhodja  a  tenu à être présent aujourd’hui avec nous à cette cérémonie en quelque sorte de  naissance officielle de l’AMD  signifie – je crois qu’il est d’accord avec cette signification-  qu’il accepte de passer le relais aux représentants  ( Tahar Belkhoja : «  avec plaisir » )  – parmi d’autres bien sur – des forces vives du Maghreb  à un moment ou les Etats nationaux ne peuvent qu’avouer leur échec à transformer l’appel de Tanger  en une réalité non pas achevée – ce qui serait trop leur demander – mais au moins en une réalité non inerte….

Les questions qui ont été posées  se sont articulées autour de trois thèmes centraux :

Les  questions relatives  au  Sahara occidental :

Réponse : Nous sommes  essentiellement un cadre de débat entre les maghrébins y compris sur l’épineuse question du Sahara.  En débattre, dans un esprit de tolérance, de fraternité et avec une réelle volonté de contribuer à  mettre fin à ce terrible goulot d’étranglement, c’est en soi un bel accomplissement. Nous n’avons pas   arrêté une position définitive ni une doctrine  sur le problème du Sahara.   Ce n’est de toute façon pas dans la vocation de notre association.  Nous en avons bien sur débattu. Un consens réunit déjà les membres fondateurs à ce sujet : en l’état actuel des choses, il n’y pas un Etat sahraoui, mais un problème sahraoui.  Et nous avons constaté que le temps est en train de faire évoluer les esprits les uns vers les autres.  Nous sommes sur cette question et en tant  que AMD raisonnablement  optimistes. Ceci dit,  il existe  entre nous un autre consensus à savoir que  seuls des Etats authentiquement de  droit qui auront pris en charge les destinées de chaque pays, sont en mesure de parvenir à une solution. Nous entendons par Etats de droit des Etats  qui sont l’_expression institutionnelle d’une volonté populaire qui se serait librement exprimée sur les choix fondamentaux des  pays  à travers les instituions réellement représentatives. Des Etats de cette nature et de cette légitimité sont en mesure de dépasser ce problème. C’est pour cette raison que nous comptons – toujours dans les limites de l’action d’une association –   exercer des pressions dans le sens d’une démocratisation effective de nos pays.

Les questions relatives au rapport avec les Etats maghrébins.

 

Réponse : Comme le dit clairement la déclaration fondatrice de notre association, nous ne nous inscrivons dans aucune compétition pour le pouvoir et nous ne soutenons aucun acteur dans cette compétition. Nous ne sommes ni inféodés  aux régimes en place ni à priori hostiles. Nous partons d’un constat simple ; les états actuels des pays maghrébins ne répondent pas aux critères universellement admis d’Etat de droit,  ou démocratiques.   Notre objectif est d’être une énergie parmi d’autres qui activerait le processus de cette démocratisation. Il est par conséquent évident qu’en l’état actuel des choses nous ne pouvons  concevoir des relations avec de tels Etats. Il n’empêche que nous serions les premiers à  prendre note et, au besoin, à saluer, chaque mesure ou avancée séreuses et indiscutable que les régimes maghrébins prendraient  dans le sens de cette démocratisation. De même que nous serions intransigeants quant aux violations des droits de l’homme et des libertés.

 

Les  questions relatives au financement

 

Réponse : nous avons arrêté une doctrine en la matière. Nous ne solliciterons et nous n’accepterons aucun financement   d’un Etat quel qu’il soit. Nous frapperons en revanche aux bonnes portes et de droit. Les bonnes portes sont disséminées à travers le tissu associatif planétaire des ONG, des fondations et de certaines personnalités unanimement reconnues pour leur indépendance et leur engagement sincère en faveur de la défense des libertés et des droits de l’homme. D’une manière générale, nous nous sommes engagés dans notre déclaration fondatrice  à une absolue transparence concernant nos sources de financement et nos dépenses.

 

Couverture de Fatima Kabba, journaliste, membre fondatrice de l’AMD.

 

 


 

Mohamed Harmel , secrétaire général d’Ettajdid

 » Nous refusons toute instrumentalisation du sacré religieux dans les luttes politiques « 

 

Le Conseil national du Mouvement Ettajdid, qui s’est réuni dimanche dernier, a décidé de reporter le 2ème congrès du parti, prévu initialement les 26 et 27 mai, pour la fin de cette année, afin de permettre à des personnalités progressistes et indépendantes de rejoindre le parti et de participer à son congrès . L’objectif est de constituer un véritable mouvement démocratique et progressiste qui regroupe les militants d’Ettajdid et d’autres sensibilités. Pour en savoir plus, nous avons invité le Secrétaire général d’Ettajdid, Mohamed Harmel à nous fournir de plus amples éclairages.

 

Intreview

 

Le Temps : Quel a été l’ordre du jour du Conseil national d’Ettajdid, qui s’est tenu, dimanche dernier à Tunis ?

 

M. Mohamed Harmel : Ce Conseil  s’est tenu, sous la présidence de M’hamed Ali Halwani, pour examiner toutes les questions relatives au prochain congrès du parti. Sur la base du rapport que j’ai présenté et après de très larges  discussions, le Conseil a décidé  de reporter la date du congrès  pour la fin de l’année 2006.

 

• Initialement le congrès  devait se tenir les 29 , 30 avril et le 1er mai. Pourquoi ce nouveau report ?

 

– Nous avons dépassé les soucis étroits et partisans pour une vision nationale, dans l’intérêt du mouvement démocratique dans son ensemble.

 

Nous voulons que le congrès soit un tournant historique dans son  objet, ses décisions et les formes de sa préparation. Après l’annonce des premières dates, nous avons eu des échos très favorables dans les  milieux progressistes   et démocratiques. Nombreux sont ceux qui ont exprimé ouvertement leur désir  de participer avec nous à ce congrès… même de faire le congrès avec nous, pour que ce congrès soit ouvert à tous ceux qui sont convaincus comme nous,  de la nécessité d’un parti progressiste ouvert sur la base, non d’une simple adhésion, mais, d’un véritable partenariat.

 

Il s’agit donc d’une forme inédite et inexplorée, pour un congrès qui ne sera ni rituel ni traditionnel. D’où la nécessité de nous donner encore  le temps pour une véritable préparation, qui doit aboutir  à une synthèse unitaire de sensibilités et de parcours différents… pour un néo Ettajdid ! Nous allons élaborer ensemble  un texte refondateur qui servira de base aux  discussions.

 

• Ce sera comme une sorte de parti mosaïque ?

 

– Non, ce n’est pas exactement le qualificatif adéquat . Mais c’est un parti où toutes les sensibilités progressistes agiraient ensemble. N’oublions pas que lorsque nous avions fondé  » Ettajdid « , nous nous étions fixé pour objectif d’en faire  un parti  ouvert à d’autres sensibilités que  la nôtre. Nous  avions donc laissé les portes  ouvertes et les chances intactes pour laisser mûrir  cette possibilité nouvelle et cette mutation certes complexe mais nécessaire. L’émergence de l’initiative  démocratique, à l’occasion des élections de 2004 qui se poursuit  encore comme une alliance, a fait mûrir cette idée unitaire.

 

Le mouvement démocratique souffre depuis l’indépendance d’une atomisation et d’un éparpillement des énergies progressistes et démocratiques et c’est le maillon qui manque pour constituer  un véritable mouvement  progressiste et démocratique uni et agissant et d’une opposition démocratique forte et liée au peuple. Le projet d’un parti progressiste constitue  un élément  essentiel de cette dynamique unitaire.

 

• Mais, ceux qui vont participer à ce congrès, et qui ne sont  pas pour le moment des adhérents à Ettajdid, seront-ils des congressistes et vont-ils participer aux élections ?

 

– Absolument,  ils participeront sur un pied d’égalité à la préparation du congrès et à ses travaux, à ses décisions et aux élections des instances dirigeantes  à tous  les niveaux. Tout se fera sous la responsabilité d’un comité de pilotage et de parrainage,  dans une coopération fructueuse entre les militants d’Ettajdid et les autres.

 

Nous nous sommes engagés pour que ces choix soient intégralement respectés et réalisés.

 

• Vous avez déclaré que vous alliez vous retirer de toute responsabilité ?

 

– C’était dans un autre contexte. C’est une aspiration de tout militant à un moment ou un autre de vouloir cultiver  son jardin d’autant plus qu’il nous arrive d’être gagné  par le désenchantement et même par un certain pessimisme. Mais je ne suis pas un fonctionnaire , je suis  un militant qui assume des responsabilités importantes. Aujourd’hui, je suis engagé avec  » Ettajdid  » dans un projet qui me tient à cœur depuis des années  et je suis partie-prenante dans un processus qui n’est pas encore achevé et je contribuerai à le faire aboutir  tant que mes forces physiques et intellectuelles le permettent. Je continuerai à assurer mes responsabilités  pour faire aboutir ce projet. Evidemment le congrès est souverain pour élire une direction à la fois unitaire et plurielle où la continuité  des acquis  et des symboles doit se conjuguer  avec les nouveaux acquis de rénovation et de nouveaux symboles.

 

• Mais, ce parti sera ouvert à tout le monde ?

 

– Le projet d’un parti ouvert. C’est le projet d’un parti moderne et moderniste qui doit être  dans la continuité et la rénovation de l’héritage réformiste et progressiste de notre pays marqué par de grandes figures. Nous nous inscrivons dans cette lignée et refusons les tendances qui se manifestent actuellement  pour contrecarrer  les acquis modernistes et  » se venger  » en quelque sorte de toute l’histoire de notre pays avant, pendant et après le mouvement national. C’est pourquoi nous refusons toute  instrumentalisation du sacré-religieux  dans les luttes politiques et toute remise en cause des acquis modernistes.

 

Nous refusons toute alliance  qui peut conforter ces tendances négatives, tout en défendant les libertés pour tous.

 

 Interview réalisée par Néjib SASSI

 

(Source : « Le Temps » du 12 mai 2006)


 

Méditerranée – Dix ministres esquissent une stratégie commune

par Gérard Bon

 

REUTERS, le 12 mai 2006 à 14h43

NICE, 12 mai (Reuters) – Dix ministres de l’Intérieur des pays riverains de la Méditerranée occidentale ont décidé vendredi à Nice d’élaborer une « stratégie commune de lutte antiterroriste » et de renforcer leur coopération contre les filières d’immigration.

 

Le ministre français de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, a souligné que les Etats membres voulaient transformer cette structure connue comme la CIMO en un outil capable de prendre à l’avenir des décisions « opérationnelles ».

 

« Il y a une volonté commune des dix ministres de l’Intérieur de transformer la CIMO en organisation opérationnelle, de prendre des décisions concrètes pour lutter contre la criminalité, pour lutter contre les filières d’immigration clandestine et pour lutter contre les terroristes », a-t-il dit lors d’une conférence de presse.

 

Créée en 1995, la Conférence des ministres de l’Intérieur de la Méditerranée occidentale (CIMO) réunit l’Espagne, la France, l’Italie, Malte, et le Portugal au nord, ainsi que l’Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie au sud.

 

Nicolas Sarkozy, qui présidait la douzième édition, a insisté sur le souci des participants de faire en sorte que la Méditerranée devienne « une zone de paix et de stabilité ».

Il a reçu l’appui du commissaire européen à la justice, à la liberté et à la sécurité, Franco Frattini, invité spécial de la conférence.

 

« Je suis prêt à apporter le soutien de la Commission », a dit Franco Fratini en soulignant l’importance que l’Union attachait à la CIMO.

 

Le nouveau ministre espagnol de l’Intérieur, Alfredo Pérez Rubalcaba, a lui aussi souligné la résolution des participants à « prendre des décisions plus concrètes qu’auparavant ».

 

« PETITS NUAGES PASSAGERS »

 

La France a insisté sur le fait que les dix pays avaient « un espace commun, celui de la Méditerranée occidentale, qui les oblige à traiter les problèmes de façon transversale ».

 

« Dans le domaine de l’immigration, nous avons tous les mêmes problèmes, car, tous, nous sommes devenus des pays d’immigration ou de rebond », a souligné Nicolas Sarkozy.

 

Il a ajouté qu’aucun « démantèlement de réseaux terroristes en France n’aurait été possible » ces dernières années « sans la collaboration » de pays du Maghreb.

 

Alfredo Pérez Rubalcaba a abondé dans son sens, soulignant que l’Espagne commençait à « entrevoir le bout du tunnel » face aux séparatistes basques de l’Eta grâce « à la collaboration de la police et de la justice françaises ».

 

Prié de dire si, à l’échelle de la CIMO, il ne s’agissait pas de vœux pieux, Nicolas Sarkozy a reconnu les limites de tels sommets internationaux, tout en soulignant que celui de Nice avait arrêté « plus de décisions concrètes que d’habitude ».

 

Renvoyant à la déclaration finale, il a notamment mis en avant la décision des ministres de charger leurs services respectifs de procéder à la mise en place d’une stratégie commune de lutte antiterroriste, avec une « évaluation périodique » de la menace.

 

Il a également cité la décision de doter la conférence d’un secrétariat permanent, de la réunir plus souvent – il y a actuellement une à deux rencontres par an – et d’élargir les sujets.

 

Il a ainsi manifesté son souci d’évoquer dans les prochaines réunions « les questions qui tournent autour des religions, la question de l’islam et de son intégration dans les pays d’Europe ».

 

Interrogé sur le récent différend franco-algérien à propos de la colonisation, Daho Ould Kablia, ministre algérien délégué aux Collectivités locales, a estimé que les relations entre les deux pays « ne souffrent pas de petits nuages passagers ». « Cela n’entrave en rien nos relations et en particulier le (futur) traité d’amitié », a-t-il dit.

 

Un imposant dispositif de sécurité avait été déployé pour cette conférence, qui se tenait au Palais des Rois Sardes, au coeur de la vieille ville de Nice.

 

REUTERS

 


 

 

Les Tunisiennes se (dé)livrent sur le Net

Selima Mnasser

 

Elles ont entre 20 et 40 ans. Etudiantes ou femmes actives, voire les deux à la fois, elles sont férues d’Internet et ont tant de choses à raconter qu’elles ont choisi de le faire dans un journal secret virtuel. Pas si secret que ça puisque tout internaute y a accès librement. Les blogs sont des journaux intimes qui ont donné la parole à tous (lire encadré), y compris leurs visiteurs. C’est ce qui en fait l’originalité.

 

Le tsunami, universel, a également emporté des femmes tunisiennes qui ont sauté sur l’occasion de dire tout haut ce qu’elles n’en pensaient pas moins tout bas. A la faveur d’un anonymat quasi-total et derrière des pseudonymes originaux (Aquacool, A girl in the moon , Infinity, Troubadour, etc.), elles y racontent (presque) tout : doutes et certitudes, coups de cœur ou révoltes, angoisses et bonheurs, sexe, famille, travail… Le Net devient caverne d’Ali Baba. Sésame en main, on pénètre cet univers à pas de loup. Véritables trésors, certains textes sont puissants. On frémit. Les larmes montent. On éclate de rire. On sourit. On se reconnaît…

 

Les Tunisiennes y réagissent sur l’actualité, la politique ou encore la société. Elles postent des poèmes ou des images, font rire ou pleurer. Dans les deux cas, elles sont touchantes et ne laissent pas indifférent. Elles ont le mérite d’être riches de cœur et d’esprit, et de partager leur richesse intérieure avec d’autres. Blog à part… qui sont-elles et pourquoi se livrent-elles ainsi sur Internet, lieu hautement public, au regard et au jugement (pas toujours tendre) des autres ? Pour vivre heureuses, pourquoi ne vivent-elles plus cachées ?

 

« Femmes » a décidé d’en savoir plus. Enquête dans les méandres du Net…

 

«Vous vous demandez sûrement : c’est quoi ce truc dans son nez au bébé, ba voilà ce ptit boutchou ilé malade, une maladie héréditaire qui é la glycogénose, il a un gros pb au foi ki refuse de distribué le glucose indispensable au corps humain, et le truc au nez c une sonde nasogastrique. Voilà pour mieux comprendre…»

 

Mon p’tit cœur d’amour, je t’aime

 

Ecrit dans un style «sms», l’étendard du blog de Foufa et de «Batbouti» annonce immédiatement la couleur. A 25 ans, Foufa, étudiante en informatique de gestion, également employée du département gestion des achats, des ventes et des stocks d’une entreprise de la place, a pris sous son aile protectrice un petit bébé atteint de glycogénose. Lorsque la maman de ce dernier, issue d’un milieu modeste, vient le soigner à Tunis, c’est Foufa qui les prend en charge, les héberge et joue à la maman de celui qu’elle appelle tendrement batbouti. Cet amour infini, elle le déverse aussi dans un «blog»… qui en dégouline (d’amour) afin de partager une expérience dont elle espère faire des émules. Son contenu : des photos tendrement commentées du petit garçon, prises au cours de ses visites de soins dans la Capitale.

 

Touché, coulé : on ne peut s’empêcher d’être retourné par cette histoire d’amour pas banale, de craquer aussi pour «batbout» et de fondre d’admiration pour Foufa.

 

Drôles de blog

 

Emma Benji est enseignante en marketing. A 28 ans, toujours pas mariée, toujours pas d’enfants, elle dit ses états d’âme, ses rencontres, ses frustrations, ses grands et petits bonheurs, ses révoltes… avec humour sur un blog à ajouter à votre kit de première urgence pour les jours de déprime. On rit sans relâche des aventures de cette future desperate housewife. Point de départ : le blog d’un journaliste qu’elle découvre en lisant un magazine. Elle se jette à l’eau au mois de novembre dernier, d’abord sur MSN avec un blog privé. En janvier 2006, c’est le grand saut : elle déménage sur canalblog et présente son bébé au public, un blog qui fait «partie de (sa) vie et dont c’est la première préoccupation au réveil. Tous les matins, (elle) va consulter les éventuels commentaires postés par (ses) visiteurs». Abordant, sans pudeur ni tabou, des sujets «chauds» comme la masturbation ou l’infidélité, elle use sans abuser d’un anonymat qui lui autorise toutes les libertés : «Je peux me lâcher sans la censure de ma famille, de mes élèves ou encore de mes collègues. Dans mon blog, je me permets de parler de tout et de rien sans être jugée» (lire son «post» dédié aux lecteurs de Femmes, en encadré).

 

«A girl in the moon», 22 ans, est étudiante à l’Institut d’agronomie. Suite à un reportage télévisé, la jeune fille découvre l’univers des blogs. Encouragée par ses parents, son père est également un internaute passionné, elle se lance dans l’aventure début 2005… Sans le leur dire ! Pour elle, il s’agit avant tout d’un excellent moyen de « communiquer (ses) pensées et tergiversations ». Son blog est un exutoire où elle peut parler de sujets tabous, qu’elle ne veut ou ne peut aborder avec son entourage : la mort, en particulier à travers la description émouvante de celle ses grands-parents, les tarifs de Tunisie Télécom, sa phobie des camions, etc. Extrait de l’un de ses post intitulé «La mort !!!!»: «On m’a laissé embrasser son front avant qu’on l’enveloppe dans son linceul blanc. On m’a dit qu’on allait l’enterrer et que je pourrai visiter sa tombe plus tard…Ce jour là j’ai compris ce que signifiait la mort et j’ai compris qu’elle (ndlr : sa grand-mère) ne reviendrait pas de dessous la terre pour nous rendre visite de notre vivant… ». Le blog demeure toutefois son jardin secret et elle y est pour l’instant de manière anonyme, sans qu’aucun membre de sa famille ne puisse l’identifier. «Non que j’ai quelque chose à cacher, précise-t-elle, mais pour maintenir un champ d’action large, ne pas être freinée dans les thèmes abordés ». Son papa la reconnaîtra-t-il au hasard de ses surfs?… Qui sait…

 

La blogueuse

 

Megamix de tout et de rien, le blog de… «La blogueuse» (sans blague ?) est orienté stars news. Mais pas n’importe lesquelles : des histoires pas piquées des vers pour faire découvrir la face cachée de la lune. Les stars comme vous ne les avez jamais vues, les potins pas gentils : du ta9ti3 taryich pur et dur ! Le côté culturel y est aussi pour cette étudiante de 26 ans qui défend avec un acharnement touchant et en vrac les rencontres de jazz de Carthage, les produits Avon et, seul point noir, «Fleur d’oubli», le seul film réalisé sans boire une seule goutte de khochkhach. Beaucoup d’humour au programme également. Extrait (en style « sms ») : «Il parait que notre stade de Radès a accueillit le 11 février des artistes de grande renommée tel que Saber Errba3i, (hmhm) Haifa Wahby (hmmhmmhmm) Marouen ché plus comment, pour célébrer le 50ème anniversaire de l’indépendance, la soirée a été baptisée «Farhat Chabab Tounes». 3alech ma koltounech rana fra7na m3akom ! Hassilou …» ou encore «Heureusement que quand une année est finie, il y en a une autre qui commence !». A découvrir également, ses aventures avec la tarte aux fruits de Ben Yedder: édifiant, vous ne regardez plus jamais la pâtisserie située à Cité Jardin de la même façon (ça ne sert à rien de rester calme, c’est bien vrai !).

 

Pour ne rien gâcher, elle a une idée du cerveau de l’homme très personnelle à découvrir en même temps que ses vœux pour Noël, ses déboires avec les voisins de son job etc.

 

Celles du meet up

 

Aquacool est jordanienne mais elle a sa place dans la blogosphère tunisienne parce qu’elle vit dans notre pays et y a épousé un Tunisien, également célèbre blogueur connu sous le pseudonyme Subzero. Pourtant, son admission dans la «communauté» n’a pas été aussi simple que cela. Il est vrai qu’il s’agit de l’un des rares blogs tunisiens en langue anglaise. Toutefois, la barrière de la langue n’a pas été l’obstacle principal. Réservée aux Tunisiens, l’entrée du blog d’Aquacool dans le sacro-saint site fédérateur de blogs tunisiens, qui en est la vitrine en quelque sorte, a d’abord fait l’objet d’âpres discussions. Finalement, grâce aux meet up (lire encadré) qui lui ont permis de sympathiser «en vrai» avec les autres blogueurs, puis à une pétition lancée par un blogueur tunisien, la jordanienne a été intégrée au groupe.

 

Troubadour est superviseur formatrice dans un centre d’appel. Dans l’un des posts, «Sale journée», elle s’insurge : «Chacun son heure de gloire… Je le répète sans cesse… A quand la mienne? Elle a un peu tardé.». Dans d’autres, elle se fait poète, «Elle tend la main et touche les failles sur la face de l’âge/Les rides enveloppent le monde de leurs empreintes» ou encore «L’âme dispersée en grandiose pyramide», «J’aimerais être une mouche pour me poser sur ta bouche/Et sans en avoir l’air/Comprendre tes mystères/M’envoler dans tes mots/Et me rouler dans le flot de tes paroles éphémères». Il s’agit là des textes plus faciles à lire. Imperméable, incompréhensible ? Plutôt surréaliste. Pour Troubadour, «le blog constitue un espace de créativité permettant d’offrir une vision différente de la réalité et du quotidien.» Elle y sème ses «pensées surréalistes lasses de la réalité, jetées en l’air, saisies au vol, transformées en mots et saupoudrées sur un écran.» Le champ est libre pour différentes lectures, différentes interprétations… Dans la mesure où elle ne soucie pas particulièrement de l’audience, elle se permet de poster des écrits dont seuls quelques fidèles apprécient l’opacité. Cri de révolte permanent, les mots sont l’arme principale de ce blog de la 5ème dimension…

 

Les pionnières célèbres

 

Infinity… Tout un programme. Sous ce mystérieux pseudo se cache une trentenaire sympathique et ouverte. Son blog, c’est du sérieux : des textes pas piqués des vers, du sexe et plus si infinité… pardon, «affinités» ! C’est également elle qui organise parfois les meet up, rencontres en chair et en os des membres de la blogosphère tunisienne dans un restaurant ou café branché des Berges du Lac. Elle fait partie des pionnières avec un premier post daté du 6 octobre 2003 où elle remercie Hou Hou –il fallait bien en parler une fois dans cet article-, le « papa » des blogueurs tunisiens de l’avoir aidée à se lancer (sans filet).

 

Sa définition du blog : « une vitrine, une interface de séduction mais aussi un piège à plouc ». Un seul (petit) frein mais sur lequel elle oublie maintenant d’appuyer : sa mère connaît l’existence de son blog et en est une fervente lectrice.

 

Assez plaisanté ! Infinity, c’est la puissance à l’état pur, un puits sans fond. On plonge dans son âme avec délectation, on puise sans fin dans ses mots la force de vivre la même chose, on s’enivre à l’écouter écrire. En ouvrant quelques-unes de ses portes au visiteur, c’est en réalité lui qu’elle pénètre, faisant remonter à la surface tous les démons de la terre : «ça», «moi» et «surmoi», tout est source de jouissance intellectuelle. Son cœur bat à travers chaque parole, son pouls affole les neurones de ceux qui s’égarent dans son paradis secret, un haut lieu d’infini vertige qui attire chaque jour 400 visiteurs !

 

Les nouvelles

 

J’ai rencontré Absolut par hasard. Sur la page d’accueil «Haut et Fort», un hébergeur de blogs. Pas que ce soit une célébrité. Mais parce qu’elle a créé son blog ce jour-là. Un pur hasard. Une vraie chance. Cette mère de famille de 37 ans est sur Internet depuis six ans. Cadre auprès du service juridique d’une entreprise spécialisée dans l’agroalimentaire, elle a décidé de raconter une vie pas banale qui tient plus de la sitcom « Un gars, une fille » que de « La vie est un long fleuve tranquille ». Soraya s’est lancée dans l’aventure « pour laisser une trace de sa vie à ses enfants et petits-enfants, pour amuser la galerie, pour jouer au chat et à la souris avec ses connaissances ». Mais aussi parce que cela fait 25 ans qu’elle se promet de tenir un journal de sa vie et qu’elle ne le fait pas… : «Grâce au blog, on peut publier instantanément les événements qui nous ont marqué et les partager avec d’autres bien que je ne sois pas sûre d’avoir envie que tout le monde lise ce que j’écris ». Enfin, ajoute-t-elle, « j’ai envie d’écrire 10 fois par jour au journal La Presse pour raconter tout ce qui me révolte. Mais je ne le fais pas non plus, par défaitisme ou par paresse. Là, je vais pouvoir me défouler!» Les trois premiers textes qu’elle a postés sont surprenants. Un blog à suivre de près !

 

Les pros

 

Passons à la vitesse supérieure… Nawarat… Du vrai travail de «pro» avec aussi une «vraie» adresse: « www.nawarat.net »… A la base, il s’agit d’un blog comme les autres avec les coups de gueule (sur «le shopping en Tunisie», le dernier, ou encore «Yerzikom fi les moules ye touenssa !»), les cris d’amour («Aujourd’hui j’ai reçu des messages MSN de mon fils: Son premier chat, ses premiers ‘’messages’’ en ligne. C’est tellement émouvant. Je vous montre une capture d’écran de notre première e-conversation.» ndlr : il a 30 mois !), les angoisses existentielles («Est-ce juste la crise de la trentaine ? J’ai pas encore 30 ans mais ça ne saurait tarder ! Suis-je irresponsable ? Quitter son travail sans en avoir un autre alors que j’ai une famille ! Suis-je folle ? Se laisser guider par une folle envie de changement à mon âge!») et les sautes d’humour («Selfti ettalyena», «Mon mari a une maîtresse», ou encore le dîner de réveillon de maman : «A table, elle nous répète chaque année la même phrase «nous ne sommes pas obligés de tout manger d’un coup : prenons notre temps»). Puis, la jeune femme de 30 ans a fait évoluer son blog qui s’est transformé en un véritable portail (recettes, conseils beauté, revue de presse etc.), tout en préservant le côté «technique» des blogs c’est-à-dire la possibilité de réagir immédiatement aux billets postés par l’auteure. De plus, Nawara, de son vrai prénom Nejla, est maman. Elle a donc également des préoccupations bassement matérielles comme se demander quelle est la meilleure recette d’aassida. Avec un avantage certain : Nawara en chef connaît les bonnes vieilles recettes de grand-mères, celles qui sont vraiment délicieuses comme celles de Nana. Elle a également ouvert un forum de discussion pour rassembler les Tunisiennes. Sa devise, «unies nous sommes encore plus fortes».

 

C’est un «peu beaucoup» cela, le blogspirit, la solidarité à travers l’écriture, la (re)découverte de soi et la rencontre des autres. Il sera très difficile de résister à l’envie de… poster mes « refusés » ! Rendez-vous peut-être bientôt sur la blogosphère !

 

PS :

 

Pardon aux femmes blogueuses que je n’ai pas citées dans mon article… d’autres trésors à découvrir sur tn-blogs.com/blogs : chouchitou (chouchitou.blogspirit.com), très drôle, A woman in love (awomaninlove.hautetfort.com), émouvante, etc.

 

Merci aux hommes blogueurs qui m’ont permis de mieux comprendre le blogspririt et qui m’ont reçue au Biwa comme une amie, un certain dimanche de janvier… Adib, le beau vétérinaire dont le blog est devenu une véritable référence pour les professionnels (adibs1.hautetfort.com/), Subzero (un blog très « pro » également pour ce spécialiste du management de projets Web www.subzeroblue.com /), Nostradamus (nostradamus.hautetfort.com), Petit Dragon (qui est, accessoirement et pour la petite histoire le mari de «LA blogueuse», même s’il y trop de blond jokes sur son blog : evildrako.blogspot.com/), et tous les autres…

 

Un pour tous et tous pour un !

 

Où les blogueurs se rencontrent-ils ? Sur Internet, certes, mais aussi en chair et en os, dans les cafés branchés de Tunis ou lors d’excursions organisées par les « anciens ». Il y a les pour et les contre : au meet up, on perd un peu du charme de l’anonymat. On découvre que Infinity n’est pas une sex bomb, contrairement à ce que son blog et son pseudo pourraient laisser croire, ou que Aquacool a un joli petit accent ou encore que Emma Benji est une jeune fille réservée, moins prolixe dans ses paroles que dans ses écrits… Mais on y rencontre aussi des personnes avec qui l’on a des affinités. Certaines blogueuses affirment qu’elles ont connu ainsi leurs uniques et meilleur(e)s ami(e)s. On met un visage sur les mots.

 

Dans l’esprit «l’union fait la force», la rencontre des blogueurs tunisiens s’effectue également et surtout au sein du site agrégateur fédérateur de leur papa spirituel Houhou, de son vrai prénom Houssein, avec qui ils entretiennent une relation quasi ombilicale et qui chapeaute de loin (il vit au Canada) la blogosphère tunisienne.

 

C’est aussi là que l’on trouve tous les derniers post ou billets des blogueurs tunisiens

 

L’idée d’une fédération de blogs maghrébins a également vu le jour dernièrement à l’initiative d’une blogueuse marocaine (eh oui, encore une femme…). Maghreb Blog essaie de fédérer les blogs algériens, marocains et tunisiens…

 

Le blog des blogs tn-blogs.com/blogs  Maghreb Free Spirit www.maghreblog.com/home.php 

Suite Dossier : * Un post spécial… pour les lecteurs de Femmes * Pour leur rendre visite…

 

Dans l’ordre où ils sont cités dans notre reportage : Maman d’adoption

Foufa et Batbouti :

foufa0205.skyblog.comEmna Benji emmabenji.canalblog.com

Dans la lune

A girl in the moon :

agirlinthemoon.hautetfort.com

La blogueuse (is back)

lablogeuse.blogspot.comAquatique aquacool.subzeroblue.comTroubadour wordwing.blogspot.comInfiniment vôtre

Le blog de Infinity :

www.rundom.com/infinity

A consommer sans modération

Absolut : absolute.hautetfort.com/

Fleurs à ne pas… oublier

Le blog pro de Nawarat :

nawarat.blogspirit.com ou www.nawarat.net

* Le petit lexique du blogueur

 

(Source : « Femmes », supplément du Magazine « Réalités » N° 1062 du 4 mai 2006)


Tunisie : trouver l’amour sur le Web

Par Guillaume Serries 

 

L’Internet pour trouver l’âme sœur ? Les sites de rencontre pullulent sur la Toile. Dans les pays où le choix du futur conjoint reste la prérogative des parents, l’apparition de ces services provoque des remous sociaux, surtout en Tunisie.

 

Mohamed Battar est un internaute tunisien et selon lui, sans Internet, il n’aurait jamais rencontré l’âme sœur. « Elle a son charme bien personnel et elle a trouvé le chemin de mon coeur. Nous allons fonder une famille très bientôt », raconte Mohamed dans un langage des plus fleuri. Il semble que la belle histoire de ce Tunisien soit de moins en moins une exception dans ce pays. Pourtant, comme dans d’autres pays du Maghreb, les traditions familiales font que, souvent, les futurs époux sont choisis par les familles, ce qui pose des problèmes quand un internaute trouve l’amour sur le Web. Mais ces traditions semblent être des obstacles de moins en moins infranchissables pour les jeunes.

 

Trouver l’âme soeur, et partir ?

Ils sont des milliers à fréquenter les cybercafés des villes tunisiennes et, entre autres activités, la recherche de l’âme sœur occupe un grand nombre d’entre eux. De l’aveu de quelques internautes, ces rencontres virtuelles permettent de vaincre leur timidité naturelle envers les personnes de l’autre sexe. Pour d’autres, rencontrer quelqu’un sur le réseau des réseaux permet d’immigrer dans des conditions idéales. Adnen, 27 ans, barman de son état, s’est vu offrir un aller simple pour la Belgique après une rencontre virtuelle avec une jeune fille belge.

 

Amour.fr

En novembre 2005, la Tunisie accueillait une conférence internationale sur Internet. À cette occasion, des chiffres ont été publiés sur l’entrée de la société tunisienne dans l’ère Internet. Dix pour cent des millions de Tunisiens sont connectés au réseau et 30 % d’entre eux possèdent une adresse électronique. L’objectif des autorités tunisiennes est de mettre en place un cybercafé dans chaque village et de doter chaque personne d’une adresse courriel d’ici à 2009. Déjà plus de 25 % des 20 000 inscrits sur le site amour.fr sont des Tunisiens, selon les statistiques du site.

 

Ouvrir les barrières

« Je passe quatre heures par jour à faire du « chat ». Ce n’est pas honteux de faire la connaissance d’autres personnes et de créer des relations à travers Internet. La technologie est faite pour en bénéficier et c’est ce que nous faisons », dit Imen, une étudiante tunisienne. Pour Mimi, 28 ans, les sites de rencontre par Internet sont même des moyens d’ouvrir les barrières entre les différentes cultures et les différentes religions. Cela lui permet d’élargir son champ de recherche pour rencontrer l’homme idéal.

 

L’Internet, un masque ?

« Les jeunes Tunisiens sont si ouverts aux différentes cultures avec des normes diverses que les relations par Internet sont devenues un simple fait du quotidien », explique Mehdi Mabrouk, un sociologue tunisien. Mais il explique aussi que l’Internet permet à certains de rechercher l’amour sans pour autant dévoiler leur véritable personnalité. « Nous ne devons pas oublier que l’Internet est une espèce de masque, qui encourage un grand nombre de jeunes et d’adultes à tenter des expériences sans craindre les résultats ».

 

L’amour… à défaut de la liberté

En discutant plus en avant avec les internautes tunisiens, on s’aperçoit cependant que l’engouement pour les sites de rencontre cache une réalité de l’Internet local bien plus sombre. La censure des autorités tunisiennes est en effet importante. Malgré les dénégations des autorités, un rapport de l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch publié l’an dernier mentionnait le fait que près de 10 % des sites Web sont bloqués en Tunisie. La plupart d’entre eux sont des sites de nouvelles et d’actualité. Parler d’amour sur la Toile semble moins dangereux pour les autorités tunisiennes que de se tenir informé. 

 

(Source : « www.quebecmicro.com », mai 2006)

URL: http://www.quebecmicro.com/technologie/3498/tunisie-trouver-lamour-sur-le-web.html


 

 

Communiqué de Human Rights Watch

Maroc: Les condamnations montrent les limites imposées sur la liberté de la presse

 

(Bruxelles, 10 mai 2006) – Les poursuites engagées contre des hebdomadaires indépendants pour des motifs politiques restreignent la liberté de la presse au Maroc, a déclaré Human Rights Watch dans un document d’information publié aujourd’hui.

 

Hier matin, la cour d’appel de Casablanca a confirmé la condamnation au paiement d’une amende à l’encontre de l’hebdomadaire al-Michaâl (Le Flambeau), ainsi que la peine d’un an de prison avec sursis à l’encontre de son directeur, pour avoir « insulté » un chef d’état étranger, le président

algérien Abdelaziz Bouteflika.

 

Au cours de cette année, les tribunaux du ont condamné quatre hebdomadaires ou leurs journalistes à de lourdes amendes ou à des peines

de prison avec sursis. Un cinquième procès est en cours.  

 

« Les poursuites qui ont eu lieu récemment montrent que les autorités utilisent le Code de la presse pour restreindre la liberté d’_expression, notamment sur des questions telles que la monarchie et le Sahara Occidental », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de Human Rights Watch pour le Maghreb et le Moyen-Orient. « Cette cascade de peines d’emprisonnement avec sursis et de lourdes amendes risque d’avoir des conséquences néfastes pour la presse indépendante ».  

 

Le Code de la presse marocain prévoit en effet un arsenal d’outils répressifs, notamment des peines d’emprisonnement pour des délits d’_expression vaguement définis, comme par exemple « porter atteinte » au régime monarchique, à l’Islam ou à « l’intégrité territoriale » du pays, « offenser » le roi ou des chefs d’Etat étrangers, ou encore « outrager » des diplomates étrangers. Les juges peuvent également envoyer les journalistes en prison pour diffamation ou pour avoir publié des nouvelles

fausses « qui troublent l’ordre public ».  

 

Le magazine d’actualités aujourd’hui confronté aux pressions les plus fortes est Le Journal Hebdomadaire, qui risque de devoir fermer ses portes s’il est forcé de verser le montant record de 3,1 millions de dirhams (356 500 $) qu’il a été condamné à payer au terme d’un procès inéquitable.

La cour a estimé que Le Journal avait diffamé le European Strategic Intelligence and Security Center, un centre de réflexion basé à Bruxelles, en qualifiant le rapport sur le Sahara Occidental publié récemment par ce de tellement pro-marocain que les autorités marocaines auraient bien pu

l’avoir commandé et payé.  

 

Les condamnations prononcées lors des récents procès en diffamation contre Le Journal et son concurrent TelQuel autorisent à penser que les tribunaux se servent de l’argument de la diffamation pour punir des hebdomadaires qui remettent en cause les politiques gouvernementales.

Tout en reconnaissant le droit des parties diffamées à réclamer des dédommagements devant les tribunaux, Human Rights Watch a sévèrement jugé le fait que lesdits tribunaux ne se donnent pas la peine de justifier le montant des dommages-intérêts.  

 

En février, Le Journal a dû faire face à des pressions encore plus fortes lors de manifestations de colère à son égard, manifestations que les autorités publiques avaient aidé à orchestrer et que la télévision publique avait retransmis avec un œil favorable. Ces mouvements de protestation, attisés par de fausses accusations selon lesquelles Le Journal avait reproduit les fameuses caricatures du Prophète Mahomet, ne présagent rien de bon dans un pays qui s’était pourtant forgé une réputation de nation ayant l’une des presses les plus libres de la région.  

 

Par ailleurs, la cour d’appel a confirmé aujourd’hui la condamnation et la peine à l’encontre d’al-Machâal pour un papier et une caricature jugés « insultants » envers le président algérien Abdelaziz Bouteflika. En février, un tribunal de première instance a reconnu al-Ayyam (« Les jours ») coupable d’avoir publié de « fausses informations » dans un article portant sur le harem royal sous les monarques marocains antérieurs. Enfin, al- Ousbou`iyya al-Jadida (« Le nouvel hebdomadaire ») est actuellement jugé pour avoir « porté atteinte à la monarchie » lors de la publication d’une interview dans laquelle Nadia Yassine, une islamiste marocaine également poursuivie pour le même chef d’accusation, avait déclaré que la monarchie ne convenait guère au pays.                     

 

Human Rights Watch recommande instamment au gouvernement marocain de: 

 

*                     adopter des amendements au Code de la presse qui abolissent ou limitent radicalement les peines pénales prévues pour les délits d’_expression; 

*                     faire en sorte que les affaires de diffamation soient traitées strictement au civil; 

*                     supprimer les dispositions qui punissent les déclarations

considérées « offensantes ou outrageantes » pour les responsables marocains et étrangers; 

*                     abolir ou restreindre la portée des dispositions qui punissent les

déclarations considérées comme « portant atteinte » à la monarchie, à l’Islam ou à l’intégrité territoriale du pays, ou comme contenant « de fausses nouvelles » qui « troublent l’ordre public ».

 

 

Human Rights Watch a également déclaré que les autorités devraient conseiller aux juges chargés de statuer sur les affaires de diffamation de prendre en considération les conséquences néfastes que pourraient avoir les amendes ou le paiement de dommages-intérêts sur la liberté d’_expression. Les juges devraient s’assurer que les montants fixés sont proportionnels aux préjudices réellement subis et ils devraient envisager la possibilité de compensations non financières telles que la publication de

rectificatifs.    

 

« Depuis une décennie, le Maroc a fait des progrès en matière de liberté de la presse », a conclu Whitson. « Mais les récentes poursuites montrent que, tant que le Code de la presse n’est pas réformé et que les juges ne reconnaissent pas pleinement le droit à la liberté de la presse, le gouvernement peut restreindre cette liberté comme bon lui semble. » 

 


 
 

Quelques Observations relatives aux résultats des élections au Conseil des droits de l’Homme

Par : Astrubal

 

Face à l’extraordinaire machine de désinformation de la dictature, il n’est pas inutile de faire ces quelques observations. Si effectivement la majorité requise pour être élu au Conseil des droits de l’Homme est de 96 voix, cela ne veut pas nécessairement dire que le pays qui atteint ou dépasse les 96 voix se trouve automatiquement élu. En effet, des pays comme la Finlande (ayant obtenu 133 voix), le Portugal (122), la Grèce (117), la Thaïlande (120), le Nicaragua (119) et le Liban (112) n’ont pas été élu. Pour le cas de la Finlande, un des pays les plus démocratiques de la planète, celui-ci a obtenu le suffrage de plus des 2/3 des membres de la communauté internationale. Idem pour le Portugal et la Grèce qui avoisinent ce même taux ! Ces pays, malgré leurs scores très honorables, n’ont pas été élus, car ils appartiennent à des groupes où la concurrence existait avec un nombre de candidatures qui dépassait le nombre des sièges à pourvoir. Pour le cas de la Tunisie, celle-ci fait partie du groupe Afrique, pour lequel en définitive, il n’y avait que 13 candidats pour 13 sièges à pourvoir. Certaines dépêches avaient parlé d’une 14e candidature, celle du Kenya. Le décompte final des élections parle pourtant de 13 candidatures. Le Kenya s’est-il retiré juste au dernier moment ? Je ne sais pas, c’est à voir … Toujours est-il que, sur les 13 candidats du groupe Afrique, tous, manifestement, se devaient d’être élus par défaut. La seule incertitude qui demeurait, c’était celle du décompte des voix. Or, ce décompte effectué, il positionne la Tunisie parmi les trois derniers de la liste : Ghana : 183 voix ; Zambie : 182 voix ; Sénégal : 181 voix ; Afrique du Sud : 179 voix ; Mali : 178 voix ; Maurice : 178 voix ; Maroc : 178 voix ; Gabon : 175 voix ; Djibouti : 172 voix ; Cameroun : 171 voix ; Tunisie : 171 voix ; Nigeria : 169 voix ; Algérie : 168 voix ; A noter également, que certains pays Africains qui n’étaient apparemment pas candidats tels l’Égypte, Madagascar et la Tanzanie ont obtenu chacun une voix … (ont-ils voté pour eux-mêmes ou sont-ce des votes pour narguer l’esprit de ces élections !) Voilà comment la Tunisie élue par défaut, dans un groupe où il n’y avait pas de concurrence, et quand bien même comptant parmi les pays (de son groupe) ayant obtenu le moins de voix, devient une occasion rêvée pour la propagande officielle qui fanfaronne et clame sur tous les toits « Brillant succès », « majorité écrasante » etc. Je vous parie qu’il y aura bien quelqu’un qui va oser crier encore plus que les autres, pour expliquer que du fait que la Tunisie ait obtenu plus de voix que la Finlande, le Portugal ou la Grèce, cela incarne indiscutablement un hommage de la communauté internationale rendu à la Tunisie, dont le régime de son «guide éclairé» est autrement plus estimable que celui de ces pays. Du reste, ce matin, ceux qui ont consulté les médias, n’ont-ils pas eu un avant-goût en ce sens dans les messages de félicitation adressés à Ben Ali… du style : « Les signataires de ces messages font part, au Chef de l’Etat, de leur fierté pour ce brillant succès réalisé, au niveau international, par la Tunisie, en obtenant une forte majorité de voix à cette élection. Il s’agit d’une reconnaissance du bien fondé de la politique du Chef de l’Etat et de la clairvoyance de sa vision des droits de l’Homme, ainsi que de ses efforts inlassables pour les enrichir, en consacrant la complémentarité entre leurs dimensions politiques, économiques, sociales et culturelles, indiquent les signataires. La Tunisie est digne de cet hommage rendu par la communauté internationale pour l’intérêt majeur accordé aux droits de l’Homme par le Chef de l’Etat qui en a fait une constante au niveau des orientations, des programmes et dans la pratique quotidienne et le vécu des Tunisiens, ce qui a permis de consolider les libertés et d’enraciner les valeurs de tolérance, de solidarité et d’entraide. » (Cf. cette dépêche ) Aux auteurs de ces messages, n’allez surtout pas leur dire que beaucoup parmi ceux qui désirent « avoir la peau » de l’ONU, avant même d’exposer les résultats de ces élections, nous présentent la liste honteuse des pays élus… pourtant connus pour leurs graves violations des droits humains.

 

Voici le récapitulatif des résultats des élections au Conseil des droits de l’Homme

Source : crin.org

 

(Source de ce tableau : le site du CRIN : Child Rights Information Network)

URL : http://www.crin.org/resources/infodetail.asp?id=8217


[NEW YORK, 9 May 2006] – Find below the list of the 47 elected members as well as results for the first elections to the Human Rights Council. Preparations will now begin in Geneva for the first meeting of the Council on 19 June 2006.

A. Elected members by region:

Africa (13 seats): Algeria, Cameroon, Djibouti, Gabon, Ghana, Mali, Mauritius, Morocco, Nigeria, Senegal, South Africa, Tunisia, Zambia

Asia (13 seats): Bahrain, Bangladesh, China, India, Indonesia, Japan, Jordan, Malaysia, Pakistan, Philippines, Republic of Korea, Saudi Arabia, Sri Lanka

Eastern Europe (6 seats): Azerbaijan, Czech Republic, Poland, Romania, Russian Federation, Ukraine

Latin American/Caribbean States (8 seats): Argentina, Brazil, Cuba, Ecuador, Guatemala, Mexico, Peru, Uruguay

Western Europe/Other (7seats): Canada, Finland, France, Germany, Netherlands, Switzerland, United Kingdom

B. Elected members by term:

1 year term (14): Algeria, Argentina, Bahrain, Czech Republic, Ecuador, Finland, India, Indonesia, Morocco, Netherlands, Philippines, Poland, South Africa, Tunisia

2 year term (15): Brazil, France, Japan, Gabon, Ghana, Guatemala, Mali, Pakistan, Peru, Republic of Korea, Romania, Sri Lanka, Ukraine, United Kingdom, Zambia

3 year term (18) : Azerbaijan, Bangladesh, Cameroon, Canada, China, Cuba, Djibouti, Germany, Jordan, Malaysia, Mauritius, Mexico, Nigeria, Russia, Saudi Arabia, Senegal, Switzerland, Uruguay

 

First Members of the Human Rights Council: Human Rights Council Election Results (47 seats, 96 votes required)

Candidates: 64 total

 

Final Result

 

1st Ballot Votes: 191 Member States voting

 

2nd Ballot: Restricted to 6 counties with highest results in last ballot, 189 Member States voting

3rd Ballot: Restricted to 2 countries with highest results in last ballot, 189 Member States voting

Term length (years)

 

African States: 13 Seats; 13 candidates

1. Ghana

Elected

183

 

 

2

2. Zambia

Elected

182

 

 

2

3. Senegal

Elected

181

 

 

3

4. South Africa

Elected

179

 

 

1

5. Mali

Elected

178

 

 

2

6. Mauritius

Elected

178

 

 

3

7. Morocco

Elected

178

 

 

1

8. Gabon

Elected

175

 

 

2

9. Djibouti

Elected

172

 

 

3

10. Cameroon

Elected

171

 

 

3

11. Tunisia

Elected

171

 

 

1

12. Nigeria

Elected

169

 

 

3

13. Algeria

Elected

168

 

 

1

Asian States: 13 Seats; 18 candidates

1. India

Elected

173

 

 

1

2. Indonesia

Elected

165

 

 

1

3. Bangladesh

Elected

160

 

 

3

4. Japan

Elected

158

 

 

1

5. Malaysia

Elected

158

 

 

3

6. Pakistan

Elected

149

 

 

2

7. Republic of Korea

Elected

148

 

 

2

8. China

Elected

146

 

 

3

9. Jordan

Elected

137

 

 

3

10. Philippines

Elected

136

 

 

1

11. Bahrain

Elected

134

 

 

1

12. Saudi Arabia

Elected

126

 

 

3

13. Sri Lanka

Elected

123

 

 

2

14. Thailand

Not elected

120

 

 

 

15. Lebanon

Not elected

112

 

 

 

16. Kyrgyzstan

Not elected

58

 

 

 

17. Iran

Not elected

58

 

 

 

18. Iraq

Not elected

52

 

 

 

Eastern European States: 6 Seats; 13 candidates

1. Russia

Elected

137

 

 

3

2. Poland

Elected

108

 

 

1

3. Czech Republic

Elected

105

 

 

1

4. Azerbaijan

Elected

95

103

 

3

5.  Lithuania

Not elected

92

86

 

 

6. Slovenia

Not elected

91

88

80

 

7. Ukraine

Elected

91

109

 

2

8. Romania

Elected

89

95

98

2

9. Hungary

Not elected

79

48

 

 

10. Armenia

Not elected

70

 

 

 

11. Latvia

Not elected

50

 

 

 

12. Georgia

Not elected

35

 

 

 

13. Albania

Not elected

31

 

 

 

Latin American and Caribbean States: 8 Seats; 10 candidates

1. Brazil

Elected

165

 

 

2

2. Argentina

Elected

158

 

 

1

3. Mexico

Elected

154

 

 

3

4. Peru

Elected

145

 

 

2

5. Guatemala

Elected

142

 

 

2

6. Uruguay

Elected

141

 

 

3

7. Cuba

Elected

135

 

 

3

8. Ecuador

Elected

128

 

 

1

9. Nicaragua

Not elected

119

 

 

 

10.  Venezuela

Not elected

101

 

 

 

Western European and Other States: 7 Seats; 9 candidates

1. Germany

Elected

154

 

 

3

2. France

Elected

150

 

 

2

3. United Kingdom

Elected

148

 

 

2

4. Switzerland

Elected

140

 

 

3

5. Netherlands

Elected

137

 

 

1

6. Finland

Elected

133

 

 

1

7. Canada

Elected

130

 

 

3

8. Portugal

Not elected

122

 

 

 

9. Greece

Not elected

117

 

 

 

 

Astrubal, le vendredi 12 mai 2006

 

(Source: article publié par “Astrubal” sur le forum That Essour de nawaat.org, le 12 mai 2006 à 12:45 PM)

URL: http://www.nawaat.org/forums/index.php?showtopic=11366


.. De son côté, la « Diarrhée médiatique » se poursuit à Tunis…

 

La confiance des Nations unies

Par M’hamed JAIBI

 

Les droits de l’homme sont un tout. Et la conception globale à laquelle s’est attachée la Tunisie en la matière a su générer une dynamique générale visant leur promotion, qui est partagée aussi bien par l’Etat que par les différentes forces politiques et sociales, et l’ensemble de la société civile. 

De sorte que les Tunisiens sont aujourd’hui pratiquement unanimes autour des valeurs des droits de l’homme et de l’impératif de les diffuser et d’en faire une véritable culture, une référence incontournable pour tous.

 

Cette culture naissante, dont les contours se clarifient et s’enracinent, s’érige de jour en jour en acquis national dont se réclame tout un chacun, par-delà les nuances et les particularismes.

 

La stabilité de la Tunisie, la paix sociale qui y règne, la sécurité qui y prévaut et le sentiment de primauté du droit et des institutions auquel s’attachent les citoyens et les visiteurs sont significatifs d’un état de fait national qui renvoie sans faute à une certaine idée de la République, de la préservation des droits fondamentaux et de la paix civile.

 

Le vote massif auquel a eu droit notre pays lors de l’élection des membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU n’est pas étranger à ce climat serein que dégage la Tunisie où le progrès des valeurs républicaines et les avancées enregistrées en matière d’extension et de diversification des droits de l’homme marquent la maturation d’un processus en profondeur.

 

De la même manière que la libéralisation de l’économie s’est attachée à faire s’équilibrer les considérations purement économiques et les impératifs sociaux, l’avancée des droits de l’homme dans notre pays s’est appliquée à concilier leurs différentes dimensions et à tenir compte de la nécessité de consolider leurs assises économiques, sociales et culturelles, afin d’assurer au processus la solidité et la pérennité nécessaires.

 

Le fait que la Tunisie ait eu droit à un si grand nombre de voix dans un scrutin secret onusien où les enjeux n’échappent à personne est un indice éloquent de la confiance dont bénéficie l’expérience tunisienne, conduite par le Président Ben Ali, auprès de l’ensemble des pays membres de l’Assemblée générale de l’ONU.

 

Cette confiance est le fruit des réformes multiples enregistrées en matière de consolidation des notions de droits de l’homme et de diffusion de leurs nobles valeurs dans les domaines les plus divers.

 

Les droits de l’homme sont, aujourd’hui, une boussole pour tous les Tunisiens et une préoccupation majeure pour l’Etat et les institutions républicaines, qui s’appliquent à les faire évoluer en fonction des opportunités et des exigences, pour que notre pays soit et reste un modèle en la matière.

 

La Tunisie l’a montré, les droits de l’homme sont un tout. Et pour ce faire, la Tunisie a dû se battre pour faire admettre à tous qu’il s’agit de promouvoir, sans exception, tous les droits de l’homme. En l’élisant par 171 voix des quatre points cardinaux, la communauté internationale ne fait pas que la couronner pour services rendus aux droits de l’homme, elle marque solennellement son appui à une démarche, à une image et à un modèle parmi les pays du Sud et l’ensemble arabo-musulman. Un modèle de quiétude, de tolérance et de convivialité où les droits de la femme sont pleinement garantis et promus, où les droits de l’enfant s’enracinent, où les handicapés montent au créneau et où la solidarité a fait des miracles, allant jusqu’à inspirer un Fonds mondial qu’ils n’ont pas manqué d’adopter.

 

 (Source : « La Presse » du 12 mai 2006)

 


Une œuvre de progrès et de liberté

 

La fierté exprimée par la société civile, à la suite de l’élection de la Tunisie par l’Assemblée générale des Nations unies au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, illustre l’attachement des Tunisiens au projet de société initié par le Président Ben Ali. Les organisations et les associations tunisiennes ont été unanimes à constater que ce nouvel hommage rendu à la Tunisie et à l’approche de son Président pour la promotion des droits de l’homme et la diffusion de leur culture à une échelle très large de la société tunisienne constitue une grande reconnaissance internationale à l’œuvre de progrès et de liberté que connaît la Tunisie depuis plus de 18 ans.

 

Les signataires de ces messages ont également relevé la grande estime de la communauté internationale des acquis majeurs de la Tunisie en matière de droits de l’homme, à la faveur d’une vision globale fondée sur la complémentarité et la solidarité entre les dimensions politique, économique, sociale et culturelle de l’œuvre de développement que traduisent, aujourd’hui, un niveau de vie appréciable, un processus démocratique de plus en plus évolué et des espaces de liberté et de dialogue sans cesse élargis et approfondis. Les avancées considérables en matière de droits de l’homme, reconnues par la communauté internationale, représentent en Tunisie une réalité tangible et des faits concrets que ressentent tous les Tunisiens à tous les niveaux, dans un pays où règnent concorde, esprit de consensus et solidarité.

 

C’est une action de longue haleine qui a été menée depuis le Changement et dont la Tunisie recueille aujourd’hui les fructueuses retombées.

 

Un pays dont le rayonnement et les succès diplomatiques accompagnent une œuvre de progrès, de modernité et de liberté. Autant d’indicateurs qui illustrent le bien-fondé de la démarche présidentielle et de la grande vision qui l’anime.

 

Ce nouveau succès que la Tunisie a, brillamment, remporté aux Nations unies vient, ainsi, s’ajouter à bien d’autres initiatives historiques qui ont pour objectif de base l’instauration d’un nouveau monde qui consacre les valeurs universelles de paix, de justice, d’égalité et de solidarité, pour le bien-être de tous les peuples et pour l’épanouissement de tous les hommes.

 

(Source : Edito de « La Presse » du 12 mai 2006)


 

LA TUNISIE AU MONDIAL (DOSSIER)

 

 

AFP, le 12 MAI 2006

Mondial-2006 – La Tunisie en bref

 

TUNIS, 12 mai 2006 (AFP) –

 

TUNISIE

 

Capitale: Tunis

 

Habitants: 9,9 millions d’habitants

 

Licenciés: 27.463

 

Fédération: Fédération Tunisienne de Football, fondée le 29 mars 1957

 

Couleurs: Maillot et short blancs à liserés rouges, bas rouges et blancs

 

Principaux clubs: Espérance Sportive de Tunis, Etoile Sportive du Sahel, Club Sportif Sfaxien

Participations en Coupe du monde: 4 (1978, 1998, 2002, 2006)

 

Participations à la Coupe d’Afrique des nations: 12 (1962, 1963, 1965, 1978, 1982, 1994, 1996, 1998, 2000, 2002, 2004, 2006)

 

Palmarès à la CAN: vainqueur (2004), finaliste (1965, 1996)

 

Comment la Tunisie s’est qualifiée: 1re du Groupe 5 avec 21 pts, devant le Maroc (20), la Guinée (17), le Kenya (10), le Botswana (9) et le Malawi (6), 10 matches joués, 6 victoires, 3 nuls, 1 défaite, 25 buts marqués, 9 encaissés

 

Meilleurs joueurs: David Jemmali, Hatem Trabelsi, Santos

 

Sélectionneur: Roger Lemerre (FRA)

 

AFP

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Mondial-2006 – La Tunisie compte sur ses Brésiliens

 

AFP, le 12 mai 2006

TUNIS, 12 mai 2006 (AFP) – La Tunisie compte sur « l’esprit samba » de ses deux Brésiliens naturalisés, Santos et José Clayton, pour franchir pour la première fois en quatre participation le premier tour d’un Mondial de football cette année en Allemagne.

 

Pour chacun de ces deux joueurs, la polémique qui entoure traditionnellement ce type de « transfert » s’est vite éteinte. Leur apport à la sélection de leur nation d’adoption à tôt clos les débats: Clayton a apporté sûreté et expérience au flanc gauche de la défense tunisienne, et Santos beaucoup de buts.

 

Santos, 27 ans, naturalisé en vitesse en décembre 2003, peu de temps avant le coup d’envoi de la Coupe d’Afrique des nations (CAN-2004) qu’organisait la Tunisie, a même été décisif. Ses précieux buts ont conduit les Aigles au sommet de l’Afrique. Il a même marqué en finale contre le Maroc (victoire 2-1).

 

Encore décisif à la CAN-2006 en Egypte, Santos a lancé son équipe vers les quarts de finale en réussissant un triplé contre la Zambie et un but contre l’Afrique du Sud lors des deux premiers matches de poule (la Tunisie fut ensuite éliminée en quarts).

 

Il avait même marqué l’année précédente un quadruplé contre le Malawi, en match qualificatif, égalant sur le continent noir la légende Roger Milla, le seul jusqu’alors à avoir réussi cette performance.

 

« Moustique »

 

« C’est un de nos petits moustiques », place le sélectionneur Français des Aigles de Carthage, Roger Lemerre, pour qualifier l’aiguillon de son attaque. « Il s’est très bien intégré à la sélection », ajoute-t-il.

 

Petit format (1,72 m, 68 kg), le buteur de Toulouse (1re div. française) a honoré sa nouvelle nationalité en marquant plus d’une quinzaine de buts depuis sa première sélection. Il avait joué vers 20 ans deux saisons pour l’Etoile Sportive du Sahel de Sousse, en Tunisie, y conquérant une Coupe d’Afrique (la CAF 1999).

 

De l’autre côté de l’équipe, le plus ancien des Brésiliens (32 ans, sous le maillot blanc depuis 1998) a disputé trois Coupes du monde avec la Tunisie.

 

Lui aussi est passé par l’ESS Sousse, avant Santos, et après avoir suivi le parcours classique des nombreux jeunes joueurs brésiliens qui franchissent l’Atlantique en rêvant. Il a quitté son pauvre Etat de Maranhao (Nordeste) pour faire fortune dans le football professionnel de l’Europe. « Au Maranhao, tu peux jouer pendant 20 ans et ne toujours pas avoir assez d’argent pour t’acheter une voiture », explique-t-il.

 

Pourtant, il déchante vite. Parachuté en rase campagne en Belgique, sans argent, sans club, il est sauvé par un de ses anciens manageurs, qui travaille alors en Tunisie.

 

Rêver

 

« Il a entendu que j’étais en Belgique et m’a invité à jouer. Je n’ai pas hésité ». Et Clayton passe quatre ans à Sousse et relance sa carrière avant de rejoindre, après le Mondial français, Bastia (1re div. française). Peu de temps avant le début du tournoi, les autorité tunisiennes ont accéléré sa naturalisation.

 

« Je n’avais jamais pensé qu’une telle chose arriverait, avoue-t-il. Il y a des choses que seul Dieu peut donner ».

 

En 2001, il retourne en Tunisie, chez le « géant » du pays: l’Espérance Tunis, avant de partir au Qatar (Al-Saad). Il a même disputé les jeux Olympiques 2004.

 

Reparti dès la fin du premier tour du Mondial en 1998 comme en 2002, il espère faire mieux dans un groupe qui permet aux Nord-Africains de rêver (le H: avec l’Espagne, l’Ukraine, et l’Arabie Saoudite).

 

Mais il refuse de dire que les Aigles dépendent beaucoup de leurs Brésiliens: « C’est ridicule de penser que deux joueurs font la Tunisie. Il y a des joueurs de talent à tous les postes dans notre équipe.

 

AFP

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Mondial-2006 – Tunisie: Lemerre veut faire oublier le désastre de 2002

 

AFP, le 12 MAI 2006

TUNIS, 12 mai 2006 (AFP) – Un titre de champion d’Europe en 2000 avec la France, un titre de champion d’Afrique en 2004 avec la Tunisie mais, entre les deux, une désastreuse Coupe du Monde de football 2002 avec les Bleus que tentera d’oublier le sélectionneur tunisien Roger Lemerre lors du Mondial-2006.

 

Trois matches, deux défaites, un nul et aucun but marqué: le bilan de la France lors du dernier Mondial en Asie est bien pâle, surtout pour un champion du monde en titre. Et voilà Roger Lemerre, champion d’Europe deux ans auparavant, prié par la Fédération française de faire ses valises. Il les posera de l’autre côté de la Méditerranée, à Tunis.

 

Si les titres continentaux semblent lui sourire, l’ancien adjoint d’Aimé Jacquet lors du sacre de 1998 connaît donc des fortunes diverses lorsqu’il s’agit d’aller défier le reste du monde, même s’il remporta la Coupe des Confédérations en 2001 avec la France.

 

En Allemagne, Lemerre compte bien prouver à tous qu’il faut désormais compter avec les « Aigles de Carthage ». Et la déculottée asiatique de 2002 pourrait bien avoir dopé le technicien. « Comme tout le monde, je me sens mieux en vainqueur qu’en perdant, mais parfois la défaite peut vous faire revenir encore plus fort », souffle le coach tunisien, comme pour faire trembler ses adversaires du groupe H: l’Espagne, l’Ukraine et l’Arabie Saoudite.

 

Une Coupe du monde pour l’Afrique

 

Depuis la victoire lors de la Coupe d’Afrique des Nations à domicile, la Tunisie en a fait son héros. Un costume un peu large pour ce Normand de 57 ans: « Je ne me vois pas en faiseur de miracles, mais plutôt comme un professeur. Si nous réussissons, c’est parce que les joueurs eux-mêmes veulent bien faire », lance-t-il.

 

Et Lemerre sait qu’il peut s’appuyer sur ses Brésiliens Santos et Clayton, naturalisés tunisiens, mais aussi sur quantité de joueurs évoluant en Europe comme Karim Hagui (Strasbourg/FRA), Hatem Trabelsi (Ajax Amsterdam/NED), Selim Benachour (Guimaraes/POR), Adel Chedli (Nuremberg/GER) et Heykel Gmamdia (Strasbourg/FRA).

Le Français estime que la Tunisie bénéficie pleinement de l’effort consenti par les autorités du pays. Un effort qui pourrait s’avérer payant.

 

« Quand vous voyez comment le Cameroun, le Nigeria et le Sénégal se sont comportés dans le passé, pourquoi est-ce qu’une équipe africaine ne remporterait une Coupe du monde? Ca va bien finir par arriver », se risque même le technicien.

 

AFP

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Mondial-2006 – Tunisie: Trabelsi, l’arrière qui monte (DOSSIER, PORTRAIT)

 

AFP, le 12 MAI 2006

TUNIS, 12 mai 2006 (AFP) – Depuis ses débuts sous le maillot de la Tunisie en 1998, Hatem Trabelsi, virevoltant arrière latéral, est devenu l’un des piliers des « Aigles de Carthage » qui s’apprêtent à disputer leur troisième Coupe du monde de football d’affilée en 2006.

 

Milieu de terrain au CS Sfaxien, Trabelsi recule très vite d’un cran car ses entraîneurs ont décelé en lui des qualités physiques et un style de contre-attaquant plus adaptés au poste d’arrière droit.

 

C’est dans ce rôle qu’il participe au Mondial-1998 en France. Encore jeune, il ne joue qu’un match, le premier, perdu face à l’Angleterre. C’est sur le banc qu’il verra son équipe s’incliner face à la Colombie puis arracher le nul devant la Roumanie. Un bilan négatif synonyme d’élimination au premier tour.

 

Mais les qualités d’Hatem Trabelsi ne passent pas inaperçues. Intraitable en défense, auteur de montées rageuses sur le flanc droit, le jeune Tunisien intéresse de nombreux clubs européens. En 2001, il signe à l’Ajax d’Amsterdam.

 

Dès sa première saison aux Pays-Bas, il s’adjuge le doublé Coupe-Championnat avant de s’envoler pour l’Asie et son deuxième Mondial. Mais la Tunisie sort encore au premier tour. Trabelsi, lui, prouve qu’il est une valeur sûre.

 

Le relais de Lemerre

 

Ce que confirment ses premiers pas en Ligue des champions lors de l’édition 2002-2003. L’Ajax se hisse en quarts de finale avant d’être battu de justesse par le futur vainqueur, l’AC Milan. Fin 2003, Trabelsi figure parmi les 50 candidats au Ballon d’Or européen.

 

Le Tunisien entame la saison 2003-2004 avec une blessure à un genou. Pas totalement rétabli, il est tout de même convoqué pour la Coupe d’Afrique des nations organisée début 2004 dans son pays.

 

Le sélectionneur Roger Lemerre en fait un de ses principaux relais sur le terrain. Ménagé, Trabelsi ne fait que de brèves apparitions, mais il est titularisé pour la finale contre le Maroc.

 

Son calme et son assurance font merveille et permettent aux Tunisiens d’endiguer les assauts des Lions de l’Atlas (2-1). Et les Aigles de Carthage remportent la première CAN de leur histoire, après deux échecs en finale en 1965 et 1996.

 

Le retour aux Pays-Bas sera plus délicat. Le nouveau champion d’Afrique, pisté notamment par Arsenal, ne cache pas ses envies de départ à l’été 2004. Le conflit s’envenime et ses dirigeants le privent de compétition pendant six mois.

 

Depuis, la situation s’est apaisée et Trabelsi a attaqué sa cinquième saison à l’Ajax pour préparer sereinement le Mondial. Probablement une occasion de se mettre en valeur pour émigrer sous d’autres cieux.

 

AFP

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Football et politique à Tunis

Franck MOROY  

Franck MOROY est allocataire de recherche à l’Institut d’Études Politiques et à l’IREMAM à Aix-en-Provence. Au cours d’un séjour de 16 mois à l’IRMC, il a réalisé une recherche sur les relations entre le football et la politique à Tunis. Une partie de ses travaux a été publiée dans Monde Arabe Maghreb-Machrek, Les Cahiers de l’Orient. Par ailleurs, il anime le comité de rédaction de la Revue Méditerranéenne d’Études Politiques.


 

Le sport ne se résume pas uniquement en un affrontement codifié de deux ou plusieurs acteurs, en un spectacle permettant à une communauté de reconstituer un tissu social altéré ou en un rituel au cours duquel une foule partisane se « met en scène »1. Il est aussi un inépuisable réservoir de capitaux symboliques et de registres d’identifications dans lequel puisent volontiers les acteurs – sportifs et/ou politiques – ou qu’ils s’efforcent de maîtriser ou de s’approprier à des fins de légitimation. Prisme d’étude original et privilégié, il se pose comme un précieux « détour » dans l’analyse pour qui souhaite appréhender des phénomènes politiques.

« Aujourd’hui, si le match de football conserve ses dimensions guerrières, ce n’est plus nécessairement la nation qui est au coeur de l’affrontement sportif. (…) la guerre, avec ses drapeaux, ses clairons, ses cartons rouges, ses joueurs « crucifiés », ses chants de haine ou d’amour, est redevenue, du moins à ce niveau, une affaire de cités » soulignait récemment Pierre Milza2. Adopter cet angle et cette échelle d’investigation revient à placer au coeur de l’analyse les clubs et les associations sportives. Les clubs sont les acteurs d’un vaste réseau de relations symboliques et incarnent à la fois l’histoire et le destin de villes et de communautés (nationales, religieuses, ethniques, etc.), de cultures et d’identités locales ou régionales, souvent rivales. Comme le souligne C. Bromberger, « à l’arrière-plan de ces engouements [les matchs de football] (…) se profilent des histoires singulières de villes (…) »3.

 

 Appréhendé dans une perspective de sociologie politique, le club ne se présente pas comme le simple lieu de pratique d’une discipline sportive ou physique : il est aussi et surtout un espace politique où interagissent des individus et où se confrontent et se mettent en place leurs stratégies et leurs réseaux. Il n’existe pas seulement une homologie entre l’espace des clubs de football et les différents espaces sociaux qu’il exprime (homologie qui expliquerait, par exemple, que « le capital de reconnaissance acquis par certains présidents de clubs de football possède des propriétés directement agissantes dans les domaines de la direction d’entreprise ou de la politique »4). Le club est un espace de mise en forme de la politique et un lieu d’_expression du politique.

 Il ne constitue pas non plus cette entité monolithique qui tend parfois à l’ériger en un être collectif. L’association sportive est un lieu formalisé rassemblant un agrégat d’acteurs individuels (présidents, personnels administratifs, joueurs, supporters, techniciens du sport, sponsors, etc.) parmi lesquels s’établissent des échanges sociaux contribuant à la transformation de la société locale et (…) à la définition de trajectoires [personnalisées] de promotion sociale5. L’association sportive constitue donc un espace et un observatoire privilégié de mise en place de stratégies individuelles et collectives : il est possible d’y positionner plus ou moins formellement des individus ou des groupes qui organisent et imposent des visions concurrentes du football, selon des rapports de force susceptibles d’évoluer selon les lieux, les conjonctures et les époques ; mais aussi d’y repérer, gravitant autour d’elle, des communautés – politiques ou non – identifiées à des équipes sportives.

 L’étude des deux équipes de football de Tunis que sont l’Espérance Sportive de Tunis et le Club Africain (CA) met en exergue le déploiement de telles stratégies et, à cette fin, la mobilisation de ressources spécifiques par des acteurs individuels ou collectifs. Ces dernières prennent une dimension et un sens tout particulier de par le cadre dans lesquelles elles s’inscrivent : le derby.  

LE DERBY COMME CONFIGURATION DE L’ANALYSE

 

Ce type de confrontation est le théâtre d’un combat factice en ce sens qu’il donne l’occasion d’assister à un affrontement sans ses risques et ses dangers – par conséquent « ritualisé », mais avec ses hymnes, ses soldats et ses étendards. Le match de football si particulier fait figure d’une « bataille mimétique » contrôlée et non violente. L’opposition à l’autre qu’il exacerbe et qu’il « met en scène » permet de forger un sentiment d’appartenance et de marquer ou de rappeler les spécificités d’un groupe vis-à-vis d’un autre. En ce sens, le derby participe à la genèse de deux ensembles humains opposés, mais il aiguise les termes de cette opposition.

 Il recouvrirait ou réinterpréterait ainsi une opposition d’un autre type située dans un ou des champs extra-sportifs. Quels sont les ressorts de l’antagonisme que ces deux formations de onze joueurs se chargent de traduire symboliquement dans l’aire circonscrite du terrain de football? Loger le ballon dans les filets du but adverse et remporter la partie de football n’est assurément pas le seul enjeu. Derrière ce spectacle, ne se cache-t-il pas une opposition d’une autre nature ? Telles sont les interrogations originelles qui guideront la démarche de ce travail.  

LE MATCH DE FOOTBALL, VECTEUR D’UNE OPPOSITION EXTRA-SPORTIVE

 

A l’instar d’autres configurations similaires (derby de Glasgow entre le Celtic et les Rangers, de Turin en la Juventus et le Torino, de Barcelone entre le « Barça » et l’Español, de Madrid entre le Real et l’Atletico, de Gênes entre la Sampdoria et le Genoa), le derby tunisois entre l’EST et le CA recouvre une opposition d’ordre extra-sportif. Tantôt, il en est le réceptacle, la caisse de résonance et ne contribue qu’à l’illustrer (rôle passif) ; tantôt, il la réinterprète, la reconstruit selon des modalités propres au champ sportif et lui donne ainsi une nouvelle consistance (rôle actif). Si l’opposition religieuse doit d’ores et déjà être écartée, un antagonisme politique, territorial, de classe sociale, de groupes particuliers, ou d’origine régionale peut en revanche servir de matrice explicative pour identifier l’origine et les termes de la confrontation.

 Néanmoins, la relation entre le signifiant et le signifié, entre un fait et la représentation qui en est faite ou le sens qui lui est conféré, n’est pas univoque. En fonction des individus, de leur sensibilité et de leur expérience, l’opposition sera chargée de valeurs multiples – éventuellement contradictoires – sur lesquelles ces derniers insisteront selon le contexte et les situations. La lecture du derby est par conséquent plurielle et il ne saurait y avoir une seule causalité en amont de cette confrontation sportive tant les représentations qui l’entourent relèvent de la subjectivité des acteurs.

 

L’inscription des clubs dans une opposition territoriale préexistante

 

Pour l’anthropologue urbain, la capitale tunisienne offre une configuration assez spécifique. Les quatre équipes tunisoises participant aujourd’hui au championnat national de première division s’identifient à un quartier : le Club Olympique du Transport  au quartier de Mélassine, le Stade Tunisien au Bardo, le Club Africain au faubourg sud de la ville ancienne (et plus exactement à Bab Jedid) et l’Espérance Sportive de Tunis au faubourg nord matérialisé par le triangle Bab Souiqa, Bab Saadoun, Bab El-Khadra.

 

Les clubs s’associent si étroitement à ces « territoires » urbains que soutenir le Club Africain et habiter Halfaouine relève de l’anomalie, voire de l’hérésie et du « péché » (comme le souligne un dirigeant « espérantiste »). Le soutien à l’équipe du quartier est devenu un élément constitutif de l’identité locale et ne semble permettre aucune alternative : « Si tu es de Bab Souiqa, alors tu es Espérantiste ». Bien que l’absence d’enquête statistique empêche de confirmer cette association quartier-club, celle-ci devient crédible au regard du marquage territorial constaté. La présence de photos de l’équipe ou du joueur préféré, de fanions ou des couleurs des clubs dans les échoppes et dans les magasins, pratique généralisée en Tunisie, établit – de manière quasiment infaillible – l’affiliation sportive de l’individu qui les affiche 6.

 Les ressorts de l’identification entre l’Espérance et le quartier de Bab Souiqa-Halfaouine sont néanmoins complexes. Avancer une explication univoque paraît en effet peu vraisemblable dans la mesure où les processus de construction identitaire résultent en grande partie d’une accumulation de facteurs et d’expériences personnelles et collectives capitalisées sur la longue durée.

 

Aussi les ressorts de l’identification interviennent-ils de manière indissociable et à des degrés divers dans la production de ce lien quartier-association sportive qui structure le discours et les représentations des acteurs. Au fondement de ce lien, il est fréquent de retrouver les deux arguments que sont l’origine géographique des membres fondateurs et des joueurs ainsi que les lieux de sociabilité et de réunion du club. S’ils structurent le discours et les représentations qui entourent et façonnent l’Espérance, ces derniers ne suffisent cependant pas à expliquer de manière entièrement satisfaisante cette identification entre l’association sportive et le territoire urbain dans lequel elle s’inscrit 7.

 

Un autre facteur intervient de manière décisive (et complémentaire avec les deux précédents) : la figure de Habib Bourguiba. Par sa fonction au sein du club, l’installation de son cabinet d’avocat (rue Bab Souiqa) et le rôle de ce quartier dans le mouvement national, la personne du « Combattant Suprême » – et sa position médiatrice entre l’Espérance et Bab Souiqa – a contribué à accentuer l’identification entre l’association sportive et le faubourg nord de la Médina.

 Quant au Club Africain, il s’identifie dès sa naissance au faubourg sud de la Médina, et plus exactement au quartier de Bab Jedid, au sud-ouest de la « ville arabe », au pied de la Kasbah. La provenance et l’origine géographique des premiers membres du Club Africain sont les quartiers de Bab Jedid et de Bab al-Jazira. Les lieux de sociabilité et de réunion – plus concentrés par rapport à son homologue de Bab Souiqa – confirment cette implantation dans cette partie de Tunis. La prégnance de ces deux éléments d’identification quartier-club ont même joué un rôle capital dans la production et la reconstitution du tissu social local. La mobilisation autour d’un enjeu ou d’un symbole commun peut en effet renouer des liens entre des individus, si différents soient-ils. Même si ce qu’ils perçoivent en l’équipe diverge8, le simple fait de la soutenir contribue à en faire un ciment qui bouchera les fissures apparues au sein de la communauté.

 

Ainsi, l’émergence du toponyme Bab Jedid – légitimé par le prestige grandissant de l’équipe de football – s’est substitué au nom historique du quartier (Bab al-Jazira) dans le parler quotidien. Avec l’apparition et le succès du Club Africain, « on assiste à l’émergence et à la promotion d’un quartier et d’un toponyme qui (…) n’a jamais désigné aucun des quartiers traditionnels administratifs du Rbat [quartier]. Cette promotion est le fait de la quasi-totalité des habitants du faubourg ; même les beldis résidant dans le faubourg ou y ayant résidé parlent de Rbat Bab al-Jedid »9.

 

En partageant un trait distinctif exclusif au quartier (une équipe de football et le nom d’un club sportif), les individus, quels qu’ils soient, parviennent à produire une unité territoriale et à donner une identité propre au quartier. Le nom de Bab Jedid devient indissociable de l’équipe de football rouge et blanche. Cette dernière joue le rôle de « phare urbain », entendu comme « idée directrice capable de cohésion, qui relie entre eux des phénomènes épars et dote l’agglomération, à la fois, d’individualités, et d’optimisme »10.  

UNE OPPOSITION SOCIO-POLITIQUE

 

Hormis l’opposition territoriale, le mécanisme d’adhésion d’un individu à un des deux clubs repose sur une identification qui s’opère fréquemment dans le champ socio-politique. L’étude des équipes tunisoises permet de reconstituer des registres variés d’identification qui dépassent le cadre de la revendication sportive et qui recoupent ou réinvestissent les oppositions classistes, politiques ou locales. Cette identification est la conséquence de l’élaboration de représentations et d’images mentales autour des clubs dont le derby se fera le réceptacle et le vecteur.

 La multiplicité et la force de la représentation viennent probablement du fait que l’image mentale conserve de l’information, mais transformée, réduite ou schématisée selon l’acteur qui en est à l’origine ou qui la véhicule. Cette image simplifiée participe du processus d’élaboration de la représentation de l’acteur ou de l’objet. Ainsi, l’image populaire de l’Espérance Sportive de Tunis est-elle un attribut primordial de la dimension nationaliste de l’équipe. Toutefois, en se penchant sur la composition des premiers bureaux-directeurs ou sur la constitution des équipes, il est étonnant de constater combien la bourgeoisie et les notables étaient présents, ruinant ainsi le fondement de la représentation. L’occultation d’une partie des faits qui président à la création d’une représentation devient alors un biais nécessaire. Mais peu importe, finalement, que cette image et cette représentation soient vraies ou fausses (puisqu’il s’agit précisément d’une représentation). L’important est qu’elle soit fonctionnelle, qu’elle « représente » et qu’elle fasse sens pour les individus récepteurs11.  

Les matchs entre les deux clubs des faubourgs tunisois charrient symboliquement deux oppositions majeures : une opposition de classe entre, d’un côté, un club riche et bourgeois (le Club Africain) et, de l’autre, un club pauvre soutenu par les masses populaires (l’Espérance Sportive de Tunis) ; une opposition communautaire – paradoxale – entre tunisois (EST) et pro-sahéliens (CA), et entre club tunisien (EST) et club tunisois (CA).

 La  représentation club riche/club pauvre, si elle s’avère peu fondée, opère comme un puissant et efficace vecteur d’identification. L’individu issu des milieux populaires éprouvera ainsi des difficultés à ne pas s’identifier à l’Espérance. De même, les milieux aisés seront naturellement portés à adhérer au Club Africain, équipe « socialement » plus proche d’eux.

 

Le clivage riche/pauvre recoupé par cette confrontation sportive trouve son origine dans l’identification des équipes avec les quartiers de Bab Souiqa et de Bab Jedid, ainsi qu’avec les populations y résidant. Il opposerait les anciennes familles tunisoises (beldies), citadines et bourgeoises, aux masses populaires et aux milieux moins favorisés. Il convient de noter que l’image bourgeoise du Club Africain provient davantage du statut social des familles qui en sont à l’origine que de leur fortune. Néanmoins, si le derby parvient, en effet, à véhiculer cette opposition de classe, c’est aussi parce que les membres du club et les supporters espérantistes impriment une image populaire à leur club.

 

L’origine de cette dernière est indéniablement à rechercher dans la classe sociale des membres-fondateurs et dans le quartier de Bab Souiqa. Mais si l’on se penche avec attention sur la composition des premiers bureaux-directeurs ou, par exemple, sur l’équipe espérantiste de la saison 1927-1928, la proportion de joueurs issus de la bourgeoisie ou des milieux notabiliers ne manque pas de surprendre et ébrêche quelque peu le mythe d’une Espérance populaire.

 En outre, pour fragile qu’il soit, le clivage n’en fut pas moins éphémère. Après l’indépendance, avec le ralliement de prestigieuses familles à l’EST, cette dichotomie club riche-pauvre n’est plus une matrice de lecture pertinente.    Le derby entre le Club et l’Espérance retranscrit, dans une moindre mesure mais tout aussi symboliquement, des tensions communautaires et régionalistes. Il réinvestit et donne une dimension nouvelle à deux oppositions politiques majeures : celle entre Tunisois et Sahéliens, et celle entre Tunisois et Tunisiens.

 Le match de football CA-EST met en scène l’opposition entre les populations tunisoises (représentées par l’EST) et les populations pro-sahéliennes (CA). Il redonne corps à une dimension de la vie politique de la Tunisie indépendante : la prédominance des Sahéliens qui se sont substitués aux notables tunisois dans les sphères dirigeantes du pays. L’EST se présente dans ce cas de figure comme un club tunisois. Pourtant, son rôle et son activité aux côtés de Bourguiba et du mouvement national en font un instrument privilégié entre les mains des sahéliens du Néo-Destour.

 

Cette identité tunisoise de l’Espérance s’élabore, se construit et se consolide surtout par opposition au Club Africain qui apparaît comme un allié des Sahéliens. La décision du pouvoir politique de dissoudre la section football de l’Espérance, en 1971, à la suite d’événements dramatiques, fut vécu comme une atteinte au pouvoir des Tunisois par le système politique dominé par les Sahéliens. Les liens amicaux qui se sont tissés entre le Club Africain et l’Étoile Sportive du Sahel – l’équipe de Sousse – identifient de manière plus forte le club de Bab Jedid aux milieux sahéliens.

 Paradoxalement, une autre lecture du derby consiste à distinguer la communauté tunisoise (incarnée cette fois par le Club Africain) dans l’ensemble tunisien (symbolisé par l’Espérance Sportive de Tunis). Cette confrontation sportive met face à face le club des grandes familles tunisoises (le CA) à l’EST qui représente, de par son identification au combat nationaliste de H. Bourguiba et l’origine géographique de ses présidents, la nation tunisienne. Le président du CA est généralement un Tunisois, issu des grandes familles de la capitale. En revanche, l’Espérance incarnait davantage, au travers de la personne de H. Bourguiba, la nation en lutte, combattant pour arracher l’indépendance aux autorités coloniales. La paternité du football tunisien qui lui était attribuée la prédestinait à jouer un rôle national plus que local (malgré son rattachement au faubourg nord de la Médina). D’autre part, par leur origine, les présidents espérantistes ont représenté la Tunisie dans son ensemble, et pas uniquement une de ses régions.

 En reconstruisant l’opposition selon une nouvelle tonalité (et différents registres), le derby fait de l’adhésion et de l’identification à un des deux clubs un attribut de l’identité d’un groupe ou d’un individu. Être Espérantiste ou être Clubiste détermine, ou du moins influence, un comportement ou un mode de paraître vis-à-vis d’Autrui (il est en ce sens un critère d’identification et de reconnaissance de l’autre) et génère des registres identificatoires qui permettront à des acteurs de se positionner dans la société, par rapport aux pouvoirs institutionnels ou à ses semblables. Si « l’identité est un état de la personne à un moment donné de son existence [et] l’identification est l’instrument qui lui a permis d’aboutir à cet état »12, alors nous pouvons poser l’hypothèse que l’équipe de football est un instrument, un vecteur de cette identification, ou encore, un processus par lequel l’individu parvient à acquérir une identité.  

LES CLUBS : ENJEUX POLITIQUES ET INSTRUMENTS DU POLITIQUE

Objet de dévotion et de passion populaires, les deux acteurs du derby constituent indéniablement des enjeux politiques. D’une part, en l’absence de structures d’encadrement des supporters, les présidents de club sont directement en charge de masses inorganisées. Avoir une mainmise sur les structures et la gestion des ces deux associations sportives permet d’en contrôler – au moins partiellement – les supporters et de réduire, voire d’éviter, tout trouble de l’ordre public.

 

D’autre part, les deux associations sportives étant de puissants capitaux symboliques susceptibles de devenir des ressources légitimantes pour les acteurs qui les manient et se les approprient, le pouvoir politique va tenter de les associer étroitement au projet sociétal qu’il promeut. L’État tunisien s’est donc employé – et s’emploie toujours – à maîtriser (au sens littéral du terme, c’est-à-dire « se rendre maître de ») et à instrumentaliser les deux clubs selon des modalités qui varient suivant les contextes politiques et les époques. Elles ont principalement revêtu deux formes bien distinctes.

 

Le contrôle des structures sportives

 

Évoquant l’équipe nationale de football et s’offusquant de l’autonomie de la Fédération Tunisienne de Football, H. Bourguiba déclara : « (…) son appellation même indique qu’elle représente l’ensemble du pays. Il est donc naturel qu’elle relève du pouvoir public »13. Loin de constituer une figure de rhétorique politique, cette logique d’immixtion de la puissance publique dans le sport s’est institutionnalisée par le décret du 9 février 1960 définissant le statut des associations sportives, et complétant en cela la loi du 7 novembre 1959 relative aux associations. Il stipule notamment que la Direction de la Jeunesse et des Sports « oriente et contrôle l’activité de tous les groupements ayant pour but la pratique de l’éducation physique et des sports et l’organisation sportive » (article 2), mais aussi « juge en dernier ressort de toutes les décisions et mesures individuelles et collectives prises par les associations » (article 3). En outre, d’après l’article 18, cet organisme contrôle, « dans le souci de l’intérêt supérieur des sports et du prestige national », la participation de la Tunisie aux compétitions sportives internationales à l’intérieur comme à l’extérieur du territoire national. Cet encadrement institutionnel rigide mis en place par le pouvoir politique contribue à domestiquer la sphère des activités physiques et sportives et à l’associer étroitement à l’État par le biais de son ministère de tutelle.

 S’étant assuré de la maîtrise « institutionnelle » des associations sportives, il restait au pouvoir à en contrôler l’évolution et le cours en les dotant d’une mission et d’un projet à caractère social et d’envergure nationale. L’analyse des discours bourguibiens permet de constater que le club est à la fois une matrice civilisationnelle dont la finalité est de libérer l’homme de l’emprise de ses passions (et d’en faire ainsi un individu raisonnable), et un organisme de formation civique.

 

La fonction principale des associations d’éducation physique consistait, dans cette optique, à encadrer et à former la jeunesse. « Le club sportif est un établissement d’éducation par l’organisation rationnelle des loisirs, des jeux, de la vie communautaire »14. En outre, exercer un sport participait du processus de civilisation de l’homme ; ce n’est qu’à cette condition que l’homme deviendra un « citoyen utile » et qu’il aura « conscience d’appartenir à un peuple évolué »15.

 On prendra l’exemple de l’EST pour illustrer cette mainmise du pouvoir bourguibien sur le club. Cette dernière, loin d’être effective à l’indépendance, se réalisa en deux temps16. Tout d’abord, succédant au charismatique président espérantiste Chedly Zouiten (après le « quinquennat » de Mohamed Ben Smail), Ali Zouaoui inaugurait le rapprochement entre le pouvoir politique et l’EST. Membre du comité central du Néo-destour, celui-ci fut nommé directement par le gouvernement et exerça les plus hautes fonctions au sein du club de 1968 à 1971. Toutefois, c’est surtout la nomination à l’instance suprême de Hassen Belkhodja, président de la Société Tunisienne de Banques (STB), bénéficiant de la confiance du président de la République, qui entérine l’imbrication de l’Espérance avec le pouvoir bourguibien.

 

 La mise sous tutelle des présidences des clubs

 

 Cette domestication du club par le pouvoir bourguibien s’institutionnalise au travers de procédures d’accès à la présidence modifiées et imposées. Le pouvoir politique considérait en effet que le club resterait sous son contrôle tant qu’il pourrait décider du choix de son président.

 

Ainsi, la procédure nominative décidée dans les hautes sphères politiques et avalisée par le comité directeur s’est substituée à l’élection du président du club par les membres du comité directeur. La fonction de président n’est pas uniquement administrative ; elle est aussi et surtout stratégique : ses décisions déterminent l’attitude et le comportement de milliers de supporters.

 

Un choix malheureux d’entraîneur, une défaite mal ressentie suscitent des mécontentements qui peuvent se transformer en chahut aux abords des stades. Preuve en sont les attroupements de supporters espérantistes au Parc B, lieu d’entraînement de l’Espérance, qui, à la fin de l’année 1996, suite aux mauvais résultats de l’EST, ont incité les dirigeants du club à se séparer de l’entraîneur italien Gigi Maifredi.

 

Le club comme lieu de déploiement de stratégies Instrument du pouvoir politique, les deux clubs sont aussi des lieux du politique où s’esquissent et se mettent en place des stratégies individuelles et collectives extra-sportives. Ils sont à ce titre des plates-formes de transactions et d’échanges entre des individus membres d’un même groupe (et dont le point commun est l’appartenance à la même « famille », clubiste ou espérantiste). Ce même attribut identitaire est la pierre angulaire du réseau et des échanges et devient un capital confiance qui facilite ceux-ci.

 L’adhésion à un club et la volonté d’y exercer une fonction ne s’expliquent pas toujours exclusivement par la passion pour une discipline sportive ou par l’irrésistible attrait pour ses couleurs. D’autres préoccupations – parfois bassement matérielles ou moralement douteuses – sont à l’origine de l’entrée dans le cercle étroit du comité directeur. Plusieurs stratégies, individuelles ou collectives (familiale par exemple), peuvent ainsi être reconstituées. Elles se recoupent et se succèdent souvent tout au long du parcours et de la trajectoire d’un acteur. Une rapide typologie permet de rendre compte de leur diversité.

La passion sportive. L’engouement pour un club est généralement à l’origine de la volonté de remplir des fonctions au sein de celui-ci. Néanmoins, cette position, entièrement altruiste et uniquement guidée par les sentiments à l’égard du club, est fréquemment concomitante avec la poursuite d’autres stratégies. Elle est le paravent d’ambitions moins avouables telles que la recherche d’une notoriété, le lancement d’une carrière politique ou la quête d’intérêts matériels. La recherche d’une notoriété et du prestige. La présence d’un individu au sein des plus hautes instances d’un club prestigieux constitue un capital symbolique dont il est susceptible d’user tantôt pour se mettre en valeur, tantôt pour tirer parti d’une situation. Son accession participe alors d’un processus de valorisation personnelle et témoigne de son rang ou de sa réussite sociale. Dans cette optique, le club fait figure de « socle de popularité » . La poursuite d’intérêts matériels. Certains individus voient dans leur adhésion aux clubs un moyen de faire prospérer une affaire personnelle ou une opportunité pour développer une activité entrepreneuriale. La recherche d’un gain – même symbolique – motivera essentiellement leur démarche. Il est vrai que les bureaux-directeurs de l’Espérance ou du Club sont parfois composés d’hommes d’affaires ou d’individus appartenant ou évoluant à proximité de la sphère politique17. Côtoyer des personnalités importantes ou des grandes familles, collaborer et partager avec elles des sentiments forts permet d’entrer dans des réseaux et de profiter des nouvelles relations que l’on tisse alors. Le club n’est plus la fin première de l’action de l’individu ; les intérêts particuliers priment avant tout. Le club, une antichambre de la politique ? L’adhésion d’un individu à un club prestigieux peut entrer dans le cadre d’une stratégie dont la finalité est l’obtention d’un mandat ou d’une fonction politique. Lorsque l’on dissèque les fonctions exercées par les présidents de l’Espérance Sportive de Tunis, par exemple, on ne manque pas d’être surpris par les charges politiques remplies par ces derniers. Beaucoup de présidents de l’Espérance sont en effet devenus ministres ou ont assumés de hautes responsabilités au sein de l’État. Il serait néanmoins hâtif et imprudent de conclure que la fonction de président de l’EST constitue un tremplin pour une carrière politique. Si l’on peut établir une régularité et une concomitance dans le passage de l’une à l’autre de ces fonctions, il est difficile d’y voir un rapport de cause à effet.

 Le derby est le « foyer virtuel d’une gamme extraordinairement variée de possibilités identificatoires »18. La rencontre sportive et le match de football théâtralisent des oppositions extrasportives qui font plus ou moins sens selon les individus et les groupes. En effet, comportant fréquemment une part d’imaginaire, les termes de l’antagonisme se modulent selon les sensibilités et les expériences des acteurs. Ils deviennent les attributs d’une palette identitaire extrêmement variée.  

Dans le cas du derby tunisois, nous pourrions nous hasarder à un essai de rationalisation de l’opposition, même si celle-ci réduit et schématise de manière excessive les multiples combinaisons qu’elle sous-tend. Le Club Africain rassemblerait les grandes familles tunisoises (beldies) du faubourg sud de la Médina, dont les membres, issus pour la plupart de la Zitouna ou de la Khaldounia, sont plus enclins à militer au Vieux Destour et demeurent fortement attachés aux traditions musulmanes.

 

Proche des milieux aisés et du club sahélien de l’Etoile Sportive, le CA s’identifierait principalement aux notables tunisois. En revanche, incarnant davantage les classes populaires, l’EST passerait pour être à la fois artisan de la lutte nationaliste sous le Protectorat et instrument du pouvoir bourguibien post-colonial. Il exprimerait aussi le projet sociétal « moderniste » des milieux sadikiens et néo-destouriens. Imparfaites et partielles, ces caractéristiques élaborent les images de chaque club et construisent une dichotomie dont le derby se fera le réceptacle et le vecteur. Ainsi, « (…) prendre parti pour un ou des clubs, c’est (…) affirmer une ou plusieurs appartenances, exclusives ou enchevêtrées, rêvées ou revendiquées et adhérer à une nébuleuse singulière de valeurs qu’incarnent (…) « son » équipe et « ses » joueurs » préférés »19. Dans ce derby, cependant, ce ne sont pas les équipes qui contribuent à la production des valeurs et des images mentales, mais plutôt l’environnement (géographique, social, politique) dans lequel elles s’inscrivent, imaginairement ou pas.

 L’adhésion à un club n’est donc pas univoque. Contrairement au derby irlandais de Glasgow, l’opposition n’est pas si tranchée et échappe à une bipartition claire, rigoureuse et quasi-hermétique. La complexité et la mouvance des registres identificatoires du derby tunisois vient du fait qu’ils amalgament le nouveau et l’ancien. L’Espérantiste peut, par exemple, au gré des situations, se prétendre avant tout tunisois (l’EST étant inséparable du faubourg nord de la Médina) ou avant tout tunisien (par le destin nationaliste de l’EST). Le derby ne serait-il pas finalement un moyen de redonner vie, de faire perdurer ou de réinventer des configurations sociales ou communautaires anciennes (une opposition de quartiers, un antagonisme de grandes familles, un clivage de classes sociales, etc.) ?

 

 Mais le football n’exprime pas que des oppositions. Dans cette perspective, il faut envisager le derby comme une articulation entre deux groupes, leur antagonisme ne constituant alors qu’une modalité de cette articulation. Pendant l’occupation française, la rivalité entre ces deux équipes dissimule en fait une complémentarité symbolique : la référence commune arabo-musulmane et la concurrence avec des équipes italiennes, françaises et maltaises contribuent plus à les unir qu’à les diviser. La tentative avortée de fusion des deux clubs par Bourguiba, en 1934, en témoigne. Aujourd’hui encore, le derby est indubitablement producteur de lien social. Sujet de discussions enjouées, prétexte pour défier l’Autre ou pour s’en moquer, il ne peut laisser neutre et pousse Espérantistes et Clubistes l’un vers l’autre, avant de les monter l’un contre l’autre. En outre, il soude les supporters d’une même équipe et participe à l’élaboration d’une identité locale (même si une nationalisation du derby tend à se substituer à la dimension locale). En cela, le sport est Agôn, c’est-à-dire une lutte, une rivalité entièrement gratuite, pour la gloire dont la finalité n’est que le combat lui-même20. Il est « un mode de vivre ensemble dans lequel la rivalité « arrange » les rapports, les échanges »21.

 

 Le derby tunisois n’est pas seulement le révélateur d’un type particulier de sociabilité. Il met aussi à nu les relations entre l’État et la « société civile », met en exergue des trajectoires individuelles et des stratégies d’acteurs, souligne des dynamiques urbaines et des tensions sociales et fournit une matrice de lecture – partielle mais complémentaire – de l’histoire d’un pays et d’une société. Loin d’être le nouvel opium des peuples, un vecteur d’abrutissement ou de dépolitisation des masses, il constitue un prisme privilégié d’intelligibilité de nos sociétés et de compréhension de l’instance politique.  

Franck MOROY  

NOTES  

1 Selon l’_expression de Erving Goffman, in E.G., La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi, Paris, Ed. de Minuit, 1992, 251p. 2 MILZA (Pierre), « Guerre dans les stades », L’histoire, n°201, juillet-août 1996, p. 95. 3 BROMBERGER (C), Le match de football. Ethnologie d’une passion partisane à Marseille, Naples et Turin, Paris, Ed. de la MSH, 1995, p.21. 4 FAURE (Jean-Michel), SUAUD (Charles), Les enjeux du football, Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n°103, juin 1994, p.5. 5 CALLÈDE (Jean-Paul), « Les premiers clubs sportifs à Bordeaux, la vocation de dirigeants et le renouvellement des élites locales », pp. 529-540, Sports, relations sociales et actions collectives, Bordeaux-Talence, MSH d’Aquitaine, 1995. 6 On peut se référer à ce sujet au travail d’Isabelle BERRY-CHIKHAOUI sur le quartier de Bab Jedid, Quartier et sociétés urbaines : le faubourg sud de la Médina de Tunis, Thèse de Doctorat sous la direction de Pierre Signoles, Université Tours (URBAMA), 1994. 7 Les « pères » de l’EST et les joueurs de l’équipe ne sont pas tous issus du quartier. Quant aux lieux de sociabilité et de réunion de l’association, ils tendent à montrer que le lien (s’il existe indéniablement depuis que le club s’est créé) n’a été mis en avant, exprimé et revendiqué qu’au milieu de la décennie 1930 et par certains acteurs uniquement, situés notamment dans la mouvance nationaliste. Dans les années 1920-1930, les activités de l’Espérance s’organisaient selon un axe qui allait de la Porte de France à la Kasbah. Ce n’est que dans les années 1940-1960 que ce club devient l’ »équipe de Bab Souiqa ». Cf. l’article de Franck Moroy, « L’Espérance Sportive de Tunis : genèse d’un mythe bourguibien », Monde Arabe Maghreb Machrek, n°157, juillet-septembre 1997, pp. 69-77. 8 Cf. le chapitre « Les joueurs : des figures emblématiques des identités sociales », Le Match de football…, op. cit., pp. 165-172. 9 BERRY-CHIKHAOUI (Isabelle), Quartiers et société urbaine…, op. cit., p. 549. 10 BERQUE (Jacques), Le Maghreb entre deux guerres, op. cit., p.195. 11 « Entretien avec Michel Denis », Sciences Humaines, n°27, avril 1993, p. 21. 12 CHEBEL (Malek), La formation de l’identité politique, Paris, PUF, 1986 (Sociologie d’aujourd’hui), pp. 35-36. 13 « Éduquer le corps et l’esprit », discours prononcé par le Président Bourguiba le 28 juillet 1962 à Tunis, Ministère de l’Information, Discours, Tome IX, 1962, Tunis 1978, p. 61. 14 « Il faut encadrer et éduquer la jeunesse », discours prononcé par le président Bourguiba le 30 mars 1961 à Tunis, Discours, Tome IX, 1961, Ministère de l’Information, Tunis, 1978, p. 294. 15 « Le rôle du sport dans la bataille contre le sous développement », discours prononcé par le président Bourguiba le 30 septembre 1960 à Tunis, Discours, Tome VIII, 1960, Ministère de l’information, Tunis, 1978, p. 101. 16 Pour une analyse plus détaillée, on se référera à l’article Franck Moroy, « L’Espérance Sportive de Tunis… », Monde Arabe Maghreb Machrek, op. cit. 17 Les sept derniers présidents du CA étaient des hommes d’affaires, PDG de sociétés publiques ou actionnaires majoritaires au sein de grands holdings. 18 BROMBERGER (Christian), Le match de football…, op.cit., p.111. 19 Idem, p.111. 20 Selon la définition qu’en donne Jean-Luc Boileau dans Conflit et lien social. La rivalité contre la domination, Paris, La Découverte/M.A.U.S.S., 1995, (collection Recherches), pp.54-55. 21 Idem, p. 53. 

 

(Source : Article paru dans le N° 48 (année 1998) de « Correspondances », bulletin scientifique de l’IRMC, l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain. Il est un établissement du ministère français des Affaires Etrangères qui « contribue à la recherche en sciences humaines et sociales sur le Maghreb, depuis son siège situé à Tunis ». D’autre part, 

L’IRMC « développe ses programmes de recherche en partenariat avec des institutions scientifiques du Maghreb, et en liaison avec des équipes françaises et européennes»)

URL: http://www.irmcmaghreb.org/corres/textes/moroy.htm


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