12 avril 2010

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TUNISNEWS
9 ème année, N° 3611 du 12.04.2010
 archives : www.tunisnews.net 


FDTL: Seizième anniversaire de la création du FDTL Liberté  et Equité: Arrestation du jeune Mohammed Hédi Klaï à Nabeul AFP: Expulsions: les assurances des pays où l’on torture ne valent rien (Amnesty) AP:Tunisie: le principal parti de l’opposition légale décide de boycotter les municipales de mai Slim Bagga: Sale temps, temps « Mossad » pour Ben Ali Béchir Ben Yahmed: Habib Bourguiba, dix ans après Jeune Afrique: Tunisie : Ce que jeunesse veut… Jeune Afrique: Démocratie : il y a loin de la coupe aux lèvres AFP: Cisjordanie: une action concertée doit préparer l’Etat palestinien (Banque mondiale)


 FORUM DEMOCRATIQUE POUR LE TRAVAIL ET LES LIBERTES

Communiqué

9avril 2010

Seizième anniversaire de la création du FDTL

 

           Le 9 avril 1994, un groupe de militants, osant  relever le défi de créer un nouveau parti malgré les difficultés  du moment, a entrepris de fonder le  FORUM DEMOCRATIQUE POUR LE TRAVAIL ET LES LIBERTES, « au service de la Tunisie, dans la tradition des valeureux martyrs de la libération, dans la lignée des militants qui se sont sacrifiés pour la liberté et la Démocratie dés l’aube de l’indépendance, en continuité avec les initiatives multiples engagées au cours des dernières années par les forces de démocratie et de progrès en vue de réaliser leur unité »

           Pour ces militants, « au seuil du XXI ème siècle, après trente huit ans d’indépendance, il apparaît de plus en plus urgent d’abolir les obstacles, de droit ou de fait, qui, au niveau des textes et de la pratique, empêchent la séparation des pouvoirs, et la distinction claire et nette entre les rouages de l’Etat et l’appareil d’un parti quel qu’il soit. C’est seulement ainsi que nous pourrons avancer dans la voie de la concrétisation de l’Etat de droit et du respect du principe de l’alternance. C’est ainsi que nous consacrerons l’impérieuse nécessite d’une égalité de traitement pour tous les citoyens, indépendamment de leur appartenance idéologique et sans discrimination ni exclusion ».

 

 

           La   déclaration fondatrice du parti énonce les grands thèmes de leur projet afin de  

  « mobiliser les forces démocratiques et les forces du travail, sujettes actuellement à la dispersion et à la marginalisation, autour de l’élaboration d’un projet d’alternative globale en vue de:

               – Rompre avec l’héritage négatif du parti unique et ses pesanteurs,

               – Imaginer des articulations vivantes et dynamiques afin de dépasser les dichotomies traditionnelles opposant le politique et le social, le social et l’économique, le culturel et le mercantile, le national et l’international,

               – Concevoir une nouvelle organisation du pouvoir susceptible de libérer les énergies positives latentes de notre société permettant à notre peuple de sortir de la résignation et de la démission et de  prendre en charge son destin grâce à un système d’institutions et de représentations capables d’exprimer ses préoccupations présentes et ses aspirations pour l’avenir,

               – Renforcer l’esprit d’ouverture et de tolérance de notre société, imprégnée des valeurs de la civilisation arabo-musulmane, permettant de l’insérer dans une dynamique d’échanges avec les forces de progrès dans le reste du monde afin de faire face aux défis de l’avenir et de rejeter toute forme de sectarisme et de fanatisme,

               – Concrétiser un Etat de Droit, qui soit l’ état de tous les Tunisiens, reconnaissant les droits des personnes, protégeant les droits de l’homme et assumant la poursuite des efforts accomplis pour tendre vers l’égalité de droit entre toutes les composantes de la société, et entre hommes et femmes,

               – Renforcer notre culture nationale par un débat largement ouvert, capable de restituer au peuple l’initiative d’un projet culturel réconciliant les racines de notre  civilisation et les composantes de notre  histoire avec les avancées scientifiques et techniques de notre époque, cette réconciliation étant indispensable pour nous permettre de participer  à l’évolution du monde moderne,

               – Construire une société démocratique. Cette tâche doit être un objectif stratégique essentiel, et sa réalisation présuppose l’indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, l’institutionnalisation de contre-pouvoirs à tous les niveaux, constitutionnels, politiques, économiques, syndicaux, sociaux ou culturels ; cette délimitation des compétences au sein de la société est seule susceptible de favoriser l’émergence et le développement du civisme  et son intériorisation dans le vécu quotidien,

               – Supprimer les obstacles entravant la liberté d’information et d’expression et faisant des moyens audiovisuels et de communication des instruments dociles au service du pouvoir et de son parti. Pour rompre le monologue et instaurer une information pluraliste il faut notamment réviser radicalement le code de la presse, démocratiser l’accès aux médias , réhabiliter les professions du journalisme pour les protéger des intrus et  de la médiocrité,

               – Favoriser les voies politiques et pacifiques pour traiter des divergences et des conflits, quel qu’en soit l’objet, et établir un dialogue permanent entre toutes les composantes de la société dans le respect du droit à la différence et des droits de la minorité, quelles que soient les situations afin de concrétiser une réconciliation nationale véritable,

               – Adopter une politique économique mettant la restructuration des rouages de l’économie au service du développement et de la justice sociale , cette conception rejetant le désengagement de l’Etat comme étant un déni de responsabilité , imposant une transparence totale dans la gestion des deniers publics et ouvrant ainsi  la voie à l’initiative nationale en encourageant l’effort, récompensant l’innovation et la création et réhabilitant la science et le savoir » .

 

           Seize années se sont écoulées depuis la création  du FORUM DEMOCRATIQUE POUR LE TRAVAIL ET LES LIBERTES.

           Pendant la première moitié de ces années nous avons dû lutter pour obtenir la légalisation de notre parti, légalisation pourtant garantie par la Constitution ; la deuxième période, nous l’avons consacrée à lutter pour rendre  effective cette légalisation afin que notre parti soit  « reconnu » et puisse participer à la vie publique dans le cadre d’un pluralisme politique réel respectant le droit à la différence et la liberté d’opinion.   

           Il est regrettable de constater qu’aucune de nos revendications n’a été concrétisée. Les idées de citoyenneté et de mobilisation des efforts au service de l’intérêt général et du développement du pays sont restés de simples outils de propagande utilisés pour masquer l’absence de volonté du pouvoir à engager la réforme de démocratisation politique qu’il a cependant promise. Le pluralisme est absent tout autant de la vie politique, où les partis d’opposition sont discriminés et ne disposent d’aucune liberté de mouvement et d’action, que de la vie associative où toute velléité d’indépendance est vite réprimée, que du champ médiatique où les libertés d’opinion, d’expression et de publication ne sont aucunement garanties.

           Dans un tel contexte, les rendez vous électoraux n’ont pu être que des occasions perdues, perpétuant un statu quo  inadapté à l’évolution de la société, et créant autant d’entraves au développement politique  du pays.

           Fidèle aux martyrs de la lutte pour l’Indépendance et aux principes qui l’ont fondé, le FORUM DEMOCRATIQUE POUR LE TRAVAIL ET LES LIBERTES  constate que le pays traverse une période très délicate qui engage son proche avenir, notamment avec les échéances électorales et la problématique qu’elles posent concernant l’alternance démocratique du pouvoir. Dans ce contexte il insiste sur l’importance qu’il accorde au dialogue engagé entre diverses composantes de l’opposition  démocratique en vue de proposer les réformes nécessaires, d’engager toutes les actions et de prendre toutes les initiatives aboutissant à une position commune face à ces échéances.

                                                                                                 Pour le bureau politique

                                                                                                  Le secrétaire général

                                                                                                  Dr. Mustapha BENJAAFAR

 

Liberté  pour tous les prisonniers politiques Liberté  pour Sadok Chourou, le prisonnier des deux décennies Liberté  et Equité Organisation indépendante des droits humains 33 rue Mokhtar Atya, 1001, Tunis Tel/fax : 71340 860 Liberte.equite@gmail.com Tunis, le 11 avril 2010

Nouvelles des libertés en Tunisie


 

Arrestation du jeune Mohammed Hédi Klaï à Nabeul

Cinq agents de la police politique sont arrivés à bord d’une voiture, notamment Adel Mannaï, chef du poste de Dar Chaabane El Fehri, et Choukri Ben Saïd, qui travaille dans le même poste, à 7 heures du soir dimanche 11 avril à la suite d’un différent verbal entre le jeune Mohammed Hédi Klaï qui travaille dans le commerce des fleurs et le vigile du marché de gros de Nabeul. Ils lui ont immédiatement menotté les mains dans le dos et l’ont abreuvé de coups de pieds et de poings au vu et au su de nombreux citoyens, comme les commerçants, pour l’emmener au poste de Dar Chaabane d’où il n’a toujours pas été libéré. […] Pour le Bureau exécutif de l’Organisation Le Président Maître Mohammed Nouri (traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)


Expulsions: les assurances des pays où l’on torture ne valent rien (Amnesty)

AFP, le 12 avril 2010

LONDRES, 12 avr 2010 (AFP) – Amnesty international a appelé les pays européens à ne pas croire, en cas d’expulsion d’étrangers, les assurances qu’ils ne seront pas maltraités quand elles sont données par des pays soupçonnés de pratiquer la torture.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, de telles assurances sont de plus en plus utilisées pour justifier le renvoi de ceux qui sont considérés comme une menace pour la sécurité nationale, assure l’organisation humanitaire, dans un rapport publié lundi.

« Les assurances que le déporté ne sera pas torturé ne peuvent être prises pour argent comptant, quand elles sont données par des gouvernements qui pratiquent habituellement la torture », a déclaré Julia Hall, expert pour l’Europe des questions d’antiterrorisme et de droits de l’homme.

« Les gouvernements européens qui acceptent ces fausses promesses portent atteinte à l’interdiction absolue de la torture », a-t-elle dit.

Le rapport cite l’exemple de Sami Ben Khemais Essid, expulsé d’Italie en Tunisie en juin 2008, sur la base de promesses du gouvernement tunisien qu’il ne serait pas maltraité à son retour.

Huit mois après, il a affirmé avoir été torturé pendant un interrogatoire au ministère de l’Intérieur.

Le rapport cite des cas semblables d’expulsions d’Espagne, d’Autriche et de Géorgie vers la Russie, d’autres de Suède vers l’Egypte et de Turquie vers l’Ouzbékistan.

« La meilleure manière d’éviter la torture est de refuser de renvoyer quelqu’un où il risque d’être maltraité », a déclaré Mme Hall.


Tunisie: le principal parti de l’opposition légale décide de boycotter les municipales de mai

 


Associated Press, le 12 avril 2010 à 21h44 TUNIS (AP) — Le comité central du Parti démocratique progressiste (PDP), considéré comme la principale formation de l’opposition légale en Tunisie, a décidé vendredi de boycotter les élections municipales prévues le 9 mai. Le PDP, qui est dirigé par Maya Jribi, première femme à présider un parti politique en Tunisie, motive sa non participation par « le climat caractérisé par un verrouillage politique », dans une motion dont l’Associated Press a obtenu copie. Le parti déplore en outre « l’absence de volonté politique de rompre avec la stagnation pour engager le pays sur la voie démocratique », estimant que « le système électoral actuel consacre la domination du parti au pouvoir sur les instances représentatives ». Selon le PDP, seul des neuf partis légaux à boycotter à ce jour le prochain scrutin, les Tunisiens sont appelés à se rendre aux urnes  « en l’absence totale de liberté d’expression » et alors que « le pouvoir exerce une mainmise absolue sur les médias ». Il a par ailleurs exprimé sa « grande préoccupation quant à l’opacité qui entoure l’avenir de la Tunisie », évoquant notamment « la fin du mandat de l’actuel président (Zine El Abidine Ben Ali) » qui expire en 2014, et appelé à la tenue d’une conférence nationale « sans exclusion » pour préparer le pays à « l’alternance  pacifique au pouvoir ». Un appel similaire a été lancé récemment par deux autres partis d’opposition, le mouvement Ettajdid (Le Renouveau) d’Ahmed Brahim, candidat malheureux à la dernière présidentielle et le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) du Dr Mustapha  Ben Jaâfar. Au pouvoir depuis plus de 22 ans, le président Ben Ali, 73 ans, a été réélu en octobre 2009 pour un cinquième mandat de cinq ans, qui devrait être le dernier selon les dispositions actuelles de la Constitution. Celles-ci limitent à 75 ans l’âge de la candidature à la magistrature suprême.  


Sale temps, temps « Mossad » pour Ben Ali


par Slim BAGGA Le fantôme qui se fait appeler « M. Ouali » et qui a reçu l’ordre de m’insulter samedi 9 avril sur sa page facebook dénommée « Bil Mirsaad » devrait avant tout me donner des droits d’auteur. A lire sa prose, et exceptant les fautes de grammaire que ne ferait pas un novice, j’ai eu l’impression de me relire lorsque je peins le tableau des mafieux à la tête du non-Etat tunisien. Dans le pur style des mercenaires de « Kol Ennas » et des officines apparentées à Carthage, il me prédit même de vivre « ma dernière minute ». Comme si je craignais les menaces commanditées par des poltrons qui se prennent au sérieux et qui se croient réellement chefs d’Etat, alors qu’à mes yeux ils ne sont que des chefs de clans mafieux. Donc, comme toujours, je ne vais pas répondre aux écrivassiers sans nom et sans visage, mais plutôt à leurs maîtres pour leur rappeler certaines choses essentielles: D’abord, je ne crains rien d’une voyoucratie sur le déclin, et j’assisterai malgré elle à son « Nuremberg », assis aux premiers rangs. Venons-en maintenant à « mes vacances de nabab en Espagne (qu’en savez-vous?), payées par des Etats étrangers pour nuire à mon pays ». Le problème, le vrai, est-il dans les moyens avec lesquels je subsiste ou dans les décollages réguliers de l’avion « présidentiel », bourré de millions dollars et d’euros vers les paradis fiscaux, vers la Suisse, les Maldives, les Bahamas, le Lieschtenchtein et j’en passe? Le problème, le vrai, réside-t-il dans mes revenus personnels ou dans le saignement et le racket des Tunisiens à travers le compte 26-26 dont le Parrain Ben Ali fait un usage personnel pour récompenser ses mercenaires et acheter les consciences? En réalité, la cabale de Ben Ali à travers ses sbires et ses « Tonton-Macoute » dont l’objectif est de salir et d’humilier trouve ses origines dans son échec de voir à genoux ses opposants les plus irréductibles. C’est parce que des Tunisiens comme Sihem Bensedrine, Kamel Jendoubi, Ahmed Bennour ou moi-même lui échappons, avons sauvé nos familles, éduquons nos enfants, ne courbons pas l’échine, refusons son système tyrannique et corrompu, croyons encore aux valeurs universelles qui n’ont jamais effleuré l’esprit de Ben Ali que nous essuyons la foudre de ses vues de l’esprit, enfin de son tout petit esprit: agents du Mossad, traîtres, homosexuels et la liste est longue. A propos de Mossad, parlons-en à la veille du 22ème anniversaire de l’assassinat d’Abou Jihad dans la nuit du 15 au 16 avril 1988, à moins d’un kilomètre du palais de Carthage!!! Etait-ce moi qui avais livré au Mossad les plans de la villa d’Abou Jihad à Sidi Bou Said afin que les lâches criminels qui l’ont assassiné aient même le temps de filmer leur forfait sans être inquiétés? Etait-ce moi qui avais ordonné à la voiture de police stationnée devant la villa de l’ancien secrétaire d’Etat à l’Intérieur, Chedli Hammi (voisin de face d’Abou Jihad) de déguerpir dès le milieu de l’après midi du 15 avril? Etait-ce moi qui avais organisé dès 18 heures à Sidi Bou Said une rafle policière sans précédent, vidant le village de toute âme et de toute vie en ce jour de printemps, laissant même étonnés les touristes étrangers principalement du 3ème âge, particulièrement nombreux à cette époque de l’année? On ne m’a pas raconté ces détails; j’étais là, je vivais tout à côté. Pour ce qui est de mon implication dans le raid de Hammam Chatt, le 1er octobre 1985, il est pour le moins curieux que Ben Ali et ses services ne s’en soient aperçus que 20 ans plus tard, en 2005, lorsque « L’Audace » a réussi à mettre à nu le système corrompu des Ben Ali-Trabelsi. Mais où étaient-ils durant tout ce temps, alors que je vivais à Tunis jusqu’en 1991? A moins de leur incompétence ou de l’implication des autorités policières de l’époque dans cette affaire, et pourquoi pas les deux à la fois, je ne vois pas d’autre explication à ce long silence précédant une découverte aussi farfelue d’avoir participé de près ou de loin à ce crime. La vérité n’est-elle pas que les Palestiniens ont commencé à disparaître depuis que Ben Ali a pris les commandes de la sécurité en 1984, puis a empoché la République en 1987? Quid aussi de l’assassinat d’Abou Iyad et Abou El Houl, toujours à Sidi Bou Said, à deux pas de Carthage en 1990? Cela ne fait-il pas trop en somme pour le bilan encore inachevé de celui qui instrumentalise la cause palestinienne pour régler ses différends politiques avec ses adversaires et qui se sait profondément coupable lorsqu’il se regarde dans une glace? N’est-il pas temps pour Ben Ali d’arrêter ses turpitudes, de rendre au pays ce que lui et sa famille ont pris indûment et de partir? N’ont-ils pas fait assez de mal et commis d’irréparables dégâts en 22 ans de mensonges, de simulation, de désinformation, de sauvageries, de vols et de rackets? Pour ma part, je continuerai d’ignorer l’aboiement des chiens, mais je ne serai en paix que lorsque je marcherai sur le cadavre de la dictature corrompue et malfaisante qui sévit dans mon pays…


Diffusion de « Jeune Afrique » (avec un supplément de
 10 pages consacrées à Bourguiba)… retardée et limitée.. ???!!!!

Dans sa nouvelle livraison (N°2570 ) diffusée cette semaine, l’hebdomadaire parisien a tenu à adresser ce petit mot à ses « lecteurs tunisiens »…

À nos lecteurs tunisiens

Pour des raisons indépendantes de notre volonté, la mise en vente du no 2569 de Jeune Afrique, en partie consacré au dixième anniversaire de la mort de Habib Bourguiba, a été

retardée de quatre jours. De plus, à l’heure où nous mettons sous presse, la moitié seulement des exemplaires expédiés dans le pays ont été autorisés à la vente. Nous prions nos lecteurs

tunisiens de nous excuser et les remercions de leur fidélité.

 

Habib Bourguiba, dix ans après

Béchir Ben Yahmed

En mai 1954, le général vietnamien Vo Nguyen Giap, commandant en chef des forces du Vietminh, infligea à la France la grave et spectaculaire défaite de Dien Bien Phu: pour la première fois depuis bien longtemps, une puissance et une armée occidentales étaient vaincues militairement, sur le terrain, par des colonisés en guenilles.

Un général, des dizaines d’officiers et quelques milliers de soldats français furent faits prisonniers et conduits à pied en détention.

L’onde de choc fut énorme, mondiale; l’Histoire s’accéléra et l’empire français se mit à vaciller…

À Paris, le gouvernement de Joseph Laniel tomba et, revirement inespéré, on fit appel pour diriger l’exécutif français à Pierre Mendès France, l’homme qui plaidait pour une nouvelle politique coloniale de la France.

En un mois, PMF, comme on l’appelait, désengagea la France de la guerre d’Indochine et, sans perdre un jour, s’attaqua au « problème tunisien ».

Le chef incontesté du nationalisme tunisien était alors Habib Bourguiba; le régime colonial l’avait arrêté en janvier 1952 et déporté dans l’île inhabitée de La Galite, où il languissait depuis trente mois, seul, gardé par des gendarmes.

PMF le fit transférer en France, et, du jour au lendemain, d’infréquentables, lui et son parti, le Néo-Destour, furent érigés, discrètement, en interlocuteurs valables de la République française.

Celle-ci consentit à l’autonomie interne de la Tunisie, puis, en 1955, se résigna, dans la foulée, à l’indépendance quasi simultanée du Maroc (le 3 mars 1956) et de la Tunisie (le 20 du même mois). Pour tenter, vainement d’ailleurs, de sauver sa mainmise sur l’Algérie…

Le 6 avril 1956, Habib Bourguiba devint le premier président du Conseil de la Tunisie indépendante. Seize mois plus tard, le 25 juillet 1957, il écartait le Bey, monarque nominal, et proclamait la République. Tout naturellement, il en fut le premier président et le demeura… jusqu’en novembre 1987.

Lorsqu’il accéda au pouvoir, Habib Bourguiba avait 55 ans. Ses longues années de prison ou d’exil lui avaient permis de lire et de réfléchir. C’était en tout cas, j’en témoigne, un homme reposé et qui s’était méticuleusement préparé, physiquement et intellectuellement, à l’exercice du pouvoir.

J’ai eu le privilège de le connaître et de le pratiquer dès 1954, avant qu’il ne parvienne au pouvoir, puis dans les premières années de sa présidence, alors qu’il était au summum de ses moyens. À 26 ans, je suis devenu l’un de ses très proches collaborateurs et le suis demeuré près de quatre ans pendant lesquels il me manifesta beaucoup d’affection. Je l’ai quitté à la fin de 1957.

Par la suite, et jusqu’au début des années 1970, j’ai fait partie du cercle de ceux qu’il recevait à sa table et traitait en amis, dont il sollicitait les avis.

Je pense donc être l’un de ceux qui le connaissent le mieux. Je lui voue, en tout cas, et à ce jour, comme tous ceux qui l’ont bien connu, la plus grande admiration.

L’état civil le déclarait né le 3 août 1903. Mais on savait, et lui-même admettait, qu’il avait vu le jour en 1901.

Il a quitté ce monde il y a tout juste dix ans, dans la dernière année du XXe siècle. Mais, en vérité, il s’était retiré de la vie active bien plus tôt. Et en deux temps.

La première fois, dès 1969, lorsque s’est déclarée une maladie neuropsychologique qui en a fait un être très diminué pour le reste de sa vie, ce qui aurait dû l’inciter – ainsi que son parti – à préparer sa succession.

Au lieu de quoi ses proches collaborateurs le déclarèrent (et il se laissa déclarer par eux), en mars 1975… président à vie. Âgé et malade, devenu l’ombre de lui-même­, il sera, douze années durant, un président fantôme manipulé par sa famille et par son entourage.

Jusqu’à ce 7 novembre 1987 où le Premier ministre qu’il venait de désigner se décida, courageusement, à mettre un terme à cette mauvaise comédie: trente et un ans après avoir accédé au pouvoir, en couronnement d’un combat intelligemment mené et qui avait lui-même duré un quart de siècle, Habib Bourguiba perdait ce pouvoir et le quittait sans gloire, définitivement.

C’est son second retrait de la vie active, à 86 ans.

Il est mort (presque) centenaire après avoir été chef de l’exécutif pendant plus de trente et un ans. Et pourtant, il n’aura réellement exercé le pouvoir – et très bien – que pendant treize ans, de 1956 à 1969.

C’est vers le milieu de cette année-là, en effet, qu’il perdit l’esprit. Sa belle intelligence sombra, victime d’une dépression tenace dont on savait, dès 1970, qu’il ne se relèverait pas.

Les neurologues qui le traitaient en informèrent alors sans ambages son entourage et son gouvernement… lesquels, parce que cela les arrangeait, ne tinrent aucun compte de l’avis médical…

De là où il est, s’il voyait son pays, gouverné depuis près d’un quart de siècle par d’autres que lui-même et ceux dont il s’était entouré, qu’en penserait-il?

L’esprit éminemment synthétique que j’ai connu dirait, je pense, que l’essentiel de ce qu’il a semé a été préservé et continue de pousser:

• Le pays dont il a voulu la modernisation poursuit dans la même voie et tire le meilleur parti des bases qu’il a laissées.

• La libération de la femme tunisienne, qui lui tenait à cœur au point qu’il l’a édictée et mise sur les rails dans les cent premiers jours de son accession au pouvoir, s’enracine. En 2010, une troisième génération en bénéficie.

• Quant à la scolarité obligatoire des garçons et des filles, qu’il a commencé à généraliser dès son premier gouvernement, elle a atteint le stade dont rêvait le père de l’indépendance tunisienne: un quasi-100 %.

La démocratisation n’a pas progressé au même rythme que l’éducation et l’économie? Et alors, où est le problème? répondrait Bourguiba, qui, lorsqu’il était encore lucide, pensait, à l’instar d’un Deng Xiaoping en Chine, que son peuple n’y était pas préparé et qu’il n’était pas encore temps d’y songer…

Habib Bourguiba a donc perdu jusqu’aux apparences du pouvoir il y a vingt-trois ans et n’est plus de notre monde depuis dix ans. Le temps est venu de commencer à évaluer la trace historique qu’il a laissée.

C’est aux historiens de le faire. Mais le témoin que j’ai été et le journaliste que je suis peut, à leur intention et à celle du lecteur, ajouter quelques touches à ce qui a été dit.

1) Même sur le plan physique, Habib Bourguiba ne ressemblait pas au Tunisien moyen. Mais, plus étonnant, s’il avait avec certains chefs d’État et autres fauves de la politique quelques traits communs, il ne ressemblait en vérité à aucun autre, en tout cas à aucun de ceux que j’ai pu connaître. Il n’a d’ailleurs compté aucun ami parmi eux et ne se plaisait pas en leur compagnie.

2) Les chefs d’État arabo-musulmans ne le considéraient pas comme l’un des leurs; lui moquait leur inculture et l’absence, chez eux, du sens de l’État.

Contrairement à la plupart d’entre eux, il ne s’intéressait pas à l’argent, dont il se tenait à bonne distance.

Là où il suscitait inébranlables fidélités et admiration, eux faisaient éclore complots et trahisons.

Si, au Maghreb, un Hassan II rivalisait de culture avec lui, il l’exécutait d’une phrase. À ma question: « Quel est votre jugement sur lui? », il répondit sans hésiter: « C’est un tueur, et qui parvient à ne laisser aucune trace. »

Bourguiba ne parlait, ne lisait que l’arabe et le français, mais il a lu le plus intéressant de ce qui est paru dans ces deux langues et a beaucoup retenu. Président, il ne ratait aucun livre important, consacrant une partie de ses après-midi à la lecture.

3) S’il n’avait pas d’atomes crochus avec les chefs d’État du Maghreb, il était en revanche apprécié de leurs peuples et de leurs cadres, qui, dans leur majorité, admiraient ses positions courageuses et iconoclastes, enviaient les Tunisiens de l’avoir comme président.

4) L’Afrique noire, comme on l’appelait à son époque, Bourguiba la regardait d’assez loin, sans montrer un réel désir d’approfondir sa connaissance de ses hommes et de ses problèmes.

Il a participé à la création de l’OUA en mai 1963, voyagé au sud du Sahara, reçu les hommes politiques de la région, qu’ils fussent au pouvoir ou dans l’opposition, aidé financièrement l’ANC de Mandela et d’autres combattants de la liberté. Mais il donnait l’impression que c’était seulement par devoir.

5) Il connaissait bien l’histoire de France et savait pertinemment qu’il avait été façonné par la culture de ce pays, qui était, à son époque, très marqué par l’esprit colonial.

Malgré son long combat contre le colonialisme et sa dizaine d’années de prison, il ne nourrissait à l’égard de la France et des Français aucun grief.

Mais il n’avait pas d’amis français, ne s’est senti en connivence avec aucun dirigeant, ni de la IVe ni de la Ve République. Il ne passait pas ses vacances en France, n’y possédait aucun compte en banque, aucun bien.

6) Restent les États-Unis: je pense qu’il n’a jamais oublié qu’un certain général Juin avait eu le pouvoir de le tuer et avait voulu passer à l’acte en 1944.

Pour supprimer ce levain de nationalisme qu’il jugeait, à juste titre, éminemment dangereux pour la présence coloniale française.

Et qu’il revint alors au consul général des États-Unis en Tunisie de lui sauver la vie.

Lorsque Bourguiba accéda au pouvoir, en 1956, la guerre froide battait son plein et l’anticommuniste viscéral qu’il était trouva dans cet affrontement une raison supplémentaire de déclarer son indéfectible amitié au chef de file de l’anticommunisme qu’étaient les États-Unis.

Il attendait en outre de ce pays qu’il fasse contrepoids à la France et protégeât la jeune République tunisienne de tout empiétement post-colonial de l’ancienne métropole, embourbée alors dans la guerre d’Algérie.

7) C’était connu et cela faisait même sourire: Habib Bourguiba avait une très haute conscience de sa valeur. Mais, lui, contrairement à d’autres, ne se gênait nullement pour proclamer qu’il était… exceptionnel!

– Des hommes de ma stature, la nature n’en produit, dans le monde, que quelques-uns par siècle, disait-il volontiers.

Et à cette question que lui posa un journaliste vers la fin de la guerre d’Algérie: Y a-t-il, à votre avis, un Bourguiba algérien? Il n’hésita pas une seconde à répondre: S’il existait, cela se saurait.

Je précise cependant, pour être juste, que cette haute idée qu’il avait à juste titre de lui-même et qu’il exprimait sans fausse modestie n’a aucunement tué en lui le sens de l’humour.

Et j’ajoute que je n’ai jamais vu personne appréhender aussi vite et aussi bien que lui, en un éclair, la vérité d’un homme, d’une femme ou d’une situation.

8) Il ne cédait pas pour autant à n’importe quel compliment. Un jour, l’un de ses collaborateurs, voulant dire à Bourguiba qu’il était un grand réformateur et pensant le flatter, le compara à Mustapha Kemal, le célèbre Atatürk, fondateur, en 1923, de la République turque.

– Non, répondit-il, Atatürk a été trop brutal, il a fait trop et trop vite, il est allé trop loin… Ce n’est pas moi.

À la réflexion, et pour conclure, je connais trois autres chefs d’État contemporains très différents les uns des autres, mais qui ont de nombreux points communs.

Tous les quatre ont exercé la fonction de chef d’État avec la même dignité et l’ont quittée en laissant une trace à ce jour perceptible.

Pour moi, de Gaulle, Mitterrand, Senghor et Bourguiba sont, si j’ose dire, de la même race. Tous les quatre avaient une vaste culture historique et générale – mais universelle – et étaient à la fois des intellectuels et des hommes d’action! Comme, de nos jours, un certain Barack Obama!

Ils ont, chacun à sa manière, mis une distance certaine entre eux et l’argent.

Ils ont été des centralisateurs de pouvoir, voire des autocrates. Et, en même temps, ils ont su beaucoup déléguer, faire confiance à leurs collaborateurs et leur laisser une très grande latitude.

Mais ce qui les a véritablement distingués, et qui est le signe de leur grandeur, c’est qu’ils n’ont pas été trahis par leurs proches. Ils ont, tout au contraire, fait naître d’inébranlables dévouements, des fidélités à toute épreuve.

Tous les quatre ont suscité, de leur vivant, l’admiration de leurs compatriotes et de leurs contemporains.

Et la suscitent encore aujourd’hui, bien après leur mort.

(Source : « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N°2569 du 4 au 10 avril 2010)

 


Tunisie : Ce que jeunesse veut…

Les 15-29 ans représentent près de 30 % de la population tunisienne. Leur vie et leurs aspirations n’ont plus grand-chose à voir avec celles de leurs aînés. Quels sont leurs problèmes? Quels sont leurs atouts, leurs attentes?

« Qu’on soit un garçon ou une fille, qu’on vienne de la classe aisée, moyenne ou populaire, nous sommes tous poussés par nos parents à obtenir les meilleurs diplômes possible », explique Wassim, étudiant à l’Institut des hautes études commerciales (IHEC) de Carthage, à Tunis. Considérées comme sacrées, les études sont un temps fort de la vie des jeunes Tunisiens. Avec la montée du chômage, l’obtention d’un diplôme reste le sésame indispensable pour intégrer le monde du travail. « Contrairement à nos parents, qui ont connu le plein-emploi, nous avons grandi dans une culture de la compétition. Ma tante n’avait même pas le bac et elle a pourtant fait une belle carrière dans une entreprise. Aujourd’hui, c’est impossible », ajoute Wassim. À 22 ans, ce dernier vit encore chez ses parents et n’envisage pas de les quitter avant de fonder lui-même une famille. « Pourquoi dépenser de l’argent inutilement? Je m’entends bien avec mes parents, ils sont très ouverts et me laissent libre de mes faits et gestes. »

Tous les étudiants n’ont cependant pas sa chance, surtout quand ils sont originaires de province et doivent s’installer dans la capitale pour leurs études. L’arrivée à Tunis peut constituer un choc pour certains. Ce fut le cas pour Omar, un Djerbien venu étudier à l’IHEC. « Il ne comprenait pas la liberté de certains étudiants par rapport au ramadan, par exemple, raconte Wassim, et il a fini par quitter l’école au milieu du semestre. » Pour Sara, 23 ans, originaire de Jendouba (à 150 km à l’ouest de Tunis et à 50 km de la frontière algérienne), l’adaptation se passe en revanche plutôt bien. Comme sa sœur aînée avant elle, elle est venue à Tunis pour suivre des études d’anglais. « Ma sœur s’est mariée à 19 ans et a arrêté ses études. Mes parents ont été très déçus », confie-t-elle. Sara s’accroche, donc. Elle a commencé par vivre dans un foyer privé de jeunes filles, pour 150 dinars (un peu moins de 80 euros) par mois. Depuis un an, elle vit en colocation avec deux autres étudiantes et est ravie de son choix: « Ce n’est pas encore vraiment dans la culture tunisienne, mais cela devient très à la mode chez les étudiants. Ça permet d’économiser et, surtout, de ne pas être seul. » La colocation ne concerne d’ailleurs pas que les étudiants. De plus en plus de jeunes actifs choisissent cette solution, comme Amine, un cadre de 28 ans, qui partage un appartement avec deux amis dans le centre de Tunis.

Les jeunes issus de milieux populaires peuvent étudier sans trop de difficultés. Une chambre en cité universitaire coûte seulement 30 dinars (15 euros) par trimestre. Le prix d’un ticket restaurant est de 300 millimes (16 centimes d’euros). Et, comme la plupart des étudiants du monde, de plus en plus exercent des petits boulots en marge de leurs études; les plus modestes pour boucler les fins de mois, les autres pour pouvoir s’offrir de petits plaisirs. Beaucoup sont serveurs ou vendeurs à temps partiel et, phénomène nouveau en Tunisie, les centres d’appels sont devenus les principaux recruteurs d’étudiants. « Si on veut aller au café, s’acheter des bricoles et inviter de temps en temps une copine au cinéma, on est obligés de se débrouiller pour gagner un peu d’argent », explique Khalil, élève à l’IHEC. Élevés dans le culte du libéralisme et de la société de consommation, les jeunes Tunisiens associent réussite et bon salaire. « Ce qui vous définit, c’est ce que vous gagnez. Je sais que l’argent ne fait pas le bonheur, mais la misère non plus! » assène Wassim.

Plus libres, mais moins engagés

Moins idéalistes, moins romantiques que ne l’étaient leurs parents dans les années 1960-1970, ils sont aussi moins engagés et plus individualistes. « À la fac, il y a peu d’associations, et les jeunes préfèrent ne pas parler politique », reconnaît Sara. Ils s’intéressent plus à la politique des autres pays et, en particulier, à la cause arabe. Seul le conflit israélo-palestinien est capable de les faire sortir dans la rue. Quant à la religion, c’est un sujet qui les passionne, même si, comme l’explique Sara, « c’est un peu tabou. Une de mes amies qui portait le voile a fini par arrêter ses études. Ceux qui affichent leurs croyances ne sont pas toujours bien vus, ni par les élèves ni par l’administration ». Elle n’en dira pas plus.

Comme tous les jeunes du Maghreb, les Tunisiens sont bercés d’influences diverses, parfois contradictoires. Connectés en permanence à internet, fans de chaînes satellitaires, ils naviguent de l’Orient à l’Occident, passant des prêches d’imams célèbres sur les chaînes qataries aux jeux de téléréalité sur des chaînes américaines. Ouverts sur le monde, ils sont avides d’informations et se targuent d’être le plus possible à la page et au fait des tendances. Jacky Moati, patron d’un célèbre restaurant tunisois qui a tenu plusieurs établissements depuis les années 1960, a vu défiler chez lui des générations de jeunes. « Aujourd’hui, ils sont plus libres, plus autonomes. Il n’y a qu’à voir leur façon de dépenser, de sortir ou de s’habiller. Ils ont le souci des apparences, ils font attention à ce qu’ils mangent et prennent soin d’eux », observe-t-il.

Pourtant, derrière ce souci des apparences, les jeunes Tunisiens sont loin d’être insouciants. Comme beaucoup de ses camarades de classe, Sara veut avant tout acquérir une autonomie financière. « Avoir mon appartement, ma voiture et ne pas avoir peur de l’avenir », telle est sa définition du bonheur. Avant même de songer à se marier, elle voudrait acquérir un capital et, pourquoi pas, créer sa propre entreprise. Comme la moyenne des Tunisiennes, elle se mariera sans doute vers l’âge de 29 ans (moyenne qui a reculé à 33 ans pour les hommes). Longtemps, elle a envisagé d’aller travailler en France, en Italie ou dans un pays du Golfe. Mais ses velléités d’émigration se sont émoussées. La crise aidant, les jeunes savent que le fléau du chômage les suivra là où ils iront et ne voient plus l’Europe comme un eldorado. D’ailleurs, ils sont de plus en plus nombreux à en revenir, dans tous les sens du terme.

La peur de l’avenir

En quête d’autonomie mais très attachés à leur cocon familial, ouverts sur le monde mais plutôt conformistes, les jeunes Tunisiens ne craignent pas les contradictions et assument, souvent sans complexe, leur matérialisme dans une société où l’argent a pris beaucoup de place. Ils s’inquiètent pour leur avenir, dans un monde parfois plus injuste que celui de leurs parents: Khalil, qui se bat pour avoir 15/20 dans toutes les matières, trouvera-t-il un emploi sans être pistonné? S’il le trouve, est-ce que ce travail et sa rémunération seront à la hauteur de ses compétences? Dans cet océan d’incertitudes, la famille constitue le principal élément de stabilité sur lequel les jeunes se reposent. Ce qui explique que très rares sont ceux qui jouent les rebelles. « À chaque étape de la vie, il est essentiel que j’aie le soutien de ma famille. Jamais je ne me marierais avec une femme que mes parents n’aimeraient pas », assure Wassim.

Leïla Slimani

(Source : « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N°2569 du 4 au 10 avril 2010)

 


Démocratie : il y a loin de la coupe aux lèvres


Par Constance Desloire

Selon une étude sur l’état des réformes dans le monde arabe, les avancées démocratiques sont réelles sur le plan législatif mais insuffisantes dans les faits.

La seconde édition de l’« Index démocratique arabe » (IDA, première étude panarabe sur les progrès de la transition démocratique) a été présentée le 29 mars, à l’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne (IESUE), à Paris.

Menée par des équipes de chercheurs locaux, sous l’égide de l’Initiative de réforme arabe (IRA), une ONG codirigée par la Syrienne Bassma Kodmani, et du Centre palestinien de recherche politique et statistique, cette enquête porte sur dix pays (Maroc, Algérie, Égypte, Palestine, Jordanie, Syrie, Liban, Arabie saoudite, Yémen, Koweït) qui ont tous « montré des premiers signes de démocratisation » en 2009.

Quarante critères ont été retenus et répartis en quatre groupes: État de droit, fiabilité des institutions, égalité et justice sociale, respect des droits et des libertés. La plus grande innovation de l’IDA, c’est qu’il fait la distinction entre les lois – les « moyens » – et leur application – « les pratiques ». Conclusion: si les avancées démocratiques sont réelles sur le plan législatif, elles ne se traduisent pas suffisamment dans les faits.

Comme en 2008, c’est la Jordanie qui est première, juste devant le Maroc et l’Égypte. En dernières positions, on retrouve la Syrie, le Yémen et l’Arabie saoudite. En assez net recul, la Palestine et le Yémen. Pour Bassma Kodmani, cela illustre le lien entre sécurité et progrès de la démocratisation: un pays qui subit ou craint la guerre aura moins tendance à se démocratiser. Pourtant, insécurité et réformes peuvent cohabiter, comme en Irak, de même que la stabilité n’induit pas forcément des avancées démocratiques.

Cinquième au classement général, l’Algérie enregistre la troisième meilleure progression. Sur le respect des droits et des libertés individuelles, elle se situe dans la plus haute catégorie, où « les progrès de la transition sont visibles ». En revanche, elle est dernière sur un indicateur innovant de l’index: le poids des dépenses sociales par rapport aux dépenses sécuritaires. Le Maroc, quant à lui, a progressé sur l’égalité des sexes et sur la tenue d’élections régulières et transparentes. Mais il est encore faible en termes d’accès à l’éducation ou de visibilité de l’opposition dans les médias.

Par cet index, l’IRA espère stimuler par l’exemple, la publicité autour des progrès démocratiques d’un pays pouvant en encourager d’autres à l’imiter. Le nombre de participants à l’index 2010-2011 dira si cela a été le cas. En 2009, plusieurs pays n’ont pu être étudiés en raison du refus des États de fournir les données nécessaires…

(Source : « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N°2569 du 4 au 10 avril 2010)

 


Cisjordanie: une action concertée doit préparer l’Etat palestinien (Banque mondiale)


AFP, le 12 avril 2010 à 09h10 JERUSALEM, 12 avr 2010 (AFP) – Une action concertée prévoyant la levée des restrictions israéliennes, l’accélération des réformes et la mise au point d’une politique fiscale palestinienne doit préparer l’avènement d’un Etat palestinien, indique un rapport de la Banque mondiale publié lundi à Jérusalem. Tout en se félicitant de la croissance économique constatée en Cisjordanie, ce texte s’élève contre la poursuite du blocus israélien de la bande de Gaza, et estime que sa levée est « primordiale ». Il appelle en outre Israël à lever ses barrages routiers en Cisjordanie, notamment pour faciliter les relations entre ce territoire et la partie orientale de Jérusalem que l’Etat hébreu a conquise et annexée en 1967. Toujours selon ce rapport, l’Autorité palestinienne devrait de son côté réduire le déficit de son budget, réduire sa dépendance vis-à-vis des pays donateurs, et accélérer la mise au point de ses réformes fiscales, du système des retraites et du réseau de distribution de l’électricité. « L’Autorité palestinienne est sur la bonne voie pour tenir sa promesse de créer un Etat palestinien capable de fournir des services publics et une économie prospère à sa population », estime dans ce rapport Mariam Sherman,  directrice de la Banque Mondiale pour la Cisjordanie et Gaza. La veille, le Fonds monétaire international (FMI) avait souligné dans un nouveau rapport que le PIB de la Cisjordanie a progressé de 8,5% en 2009 grâce aux réformes économiques, à l’assouplissement des restrictions israéliennes et à l’aide internationale. En revanche, la bande de Gaza n’a enregistré qu’une croissance de 1% l’an dernier en raison de la poursuite du blocus imposé par Israël mais aussi par l’Egypte depuis l’arrivée au pouvoir du mouvement islamiste Hamas en juin 2007. Le rapport du FMI a été publié à la veille d’une réunion des pays donateurs à Madrid, lundi et mardi, qui vise à mobiliser le soutien financier de la communauté internationale à l’édification d’un Etat palestinien. AFP
 

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