10 février 2006

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TUNISNEWS
6 ème année, N° 2090 du 10.02.2006

 archives : www.tunisnews.net


CNLT: Journée de solidarité avec les « internautes de Zarzis » et toutes les victimes de la loi antiterroriste

CNLT: Non à l’incitation à la haine religieuse – Non à l’atteinte à la liberté d’expression
AISPP: Communiqué

AP: Un chalutier avec 14 marins à bord porté disparu au large de la Tunisie AP: Tunisie: condamnations en série des caricatures du prophète Mahomet     

AFP: Caricatures Mahomet: réprobations et appel à la compréhension en Tunisie         AP: Tunisian Senate denounces prophet drawings, calls for calm

AFP: Caricatures: un influent religieux dénonce les « débordements » de violence
AFP: Magazinet exprime ses regrets, les musulmans de Norvège les acceptent  AFP: Caricatures: l’ambassade d’Iran exige une excuse de deux journaux tchèques AFP: Un projet danois de démocratisation des pays arabes compromis AFP: Algériens et Tunisiens épargnés en partie par « l’immigration choisie »  AFP: Paris approuve l’invitation du Hamas par la Russie L’Otan tend la main au monde arabo-musulman AFP: L’Otan noue des liens plus étroits avec des pays musulmans et Israël  Reuters: L’Otan ira dans le Sud afghan mais attendra pour l’Est The Washington Post: Ex-CIA Official Faults Use of Data on Iraq Intelligence ‘Misused’ to Justify War, He Says  Neila Charchour Hachicha: Dissidence et Réformes dans le Monde Arabe
Malek El Ansari: Les vraies fausses caricatures qui ont enflammé le monde musulman
Adnane Ben Youssef : A propos des caricatures, à chaud, un message à la gauche
Henri Tincq: Mahomet : le choc des ignorances,
Gilles Kepel: L’Europe en nouveau « grand Satan »
Tariq Ramadan: Il ne s’agit pas d’un conflit entre la liberté et le dogme
Olivier Roy: Caricatures : géopolitique de l’indignation

CONSEIL NATIONAL POUR LES LIBERTES EN TUNISIE Tunis le 10 février 2006

Journée de solidarité avec les « internautes de Zarzis » et toutes les victimes de la loi antiterroriste

 
       La journée de solidarité avec les « internautes de Zarzis » et toutes les victimes de la loi antiterroriste, qui devait se tenir au siège du FDTL aujourd’hui 10 février, a été arbitrairement interdite par un important dispositif de policiers en civil qui ont fermé tous les accès menant au local et empêché tous les représentants de la société civile ainsi que les familles des victimes venues participer à cette manifestation et témoigner du calvaire de leurs proches, de pénétrer. A cette occasion le CNLT tient à souligner ce qui suit :   1- la question de l’amnistie générale pour les prisonniers politiques reste entière et aucune initiative visant à assainir le climat politique n’a été prise malgré le consensus national établi sur cette question. Bien au contraire, des mesures de rétorsion ont été prises à leur encontre – et particulièrement contre ceux qui avaient entamé des grèves de la faim de protestation – après le passage des enquêteurs du CICR.
   2- le premier groupe accusé de terrorisme et dont l’affaire a servi de cas d’école pour concocter la nouvelle loi antiterroriste du 10 décembre 2003, connu sous le nom des « Internautes de Zarzis » continue de purger une peine inique de 13 ans. Leurs conditions de détention ont empiré et certains d’entre eux souffrent de maladies graves. Le cas le plus  flagrant est celui de Abdelghaffar Ben Guiza, atteint de tuberculose et que l’administration carcérale refuse d’hospitaliser au CHU de Phtisiologie, malgré une prescription urgente effectuée par les médecins de l’hôpital Charles Nicolle où il avait été admis en urgence. On refuse également les soins à d’autres prisonniers, comme Omar Chelendi, contaminés par l’épidémie de gale qui sévit dans les prisons à cause de la surpopulation carcérale et la mauvaise hygiène qui y prévaut.
  3- Pas moins de douze affaires « terroristes » sont actuellement examinées au niveau de l’instruction et où sont impliqués plus de 120 jeunes. Le nombre des interpellés encore interrogés dans les locaux de la sûreté de l’Etat dépasserait les 200 personnes. Il n’y a pas une seule région épargnée par ces rafles qui ciblent des jeunes de 18 à 25 ans, du Nord au Sud de la Tunisie (Tunis et ses banlieues, Bizerte, Menzel Bourguiba, Mateur, Nabeul, Kélibia, Sousse, Sfax, Sidi Bouzid, Kebili, Ben Guerdane…etc.) L’usage de la torture est redevenu systématique et se pratique en toute impunité avec l’adjonction de nouvelles méthodes. Une série de procès vont être examinés au mois d’avril prochain par l’unique tribunal compétent selon la nouvelle loi anti terroriste, le Tribunal de première instance de Tunis.      Le CNLT a de sérieuses raisons de craindre que ces affaires ne soient pas traitées par une justice sereine. En effet presque tous les procès verbaux d’instruction dont les avocats ont pris connaissance sont des copies conformes des PV de police où figurent des aveux extorqués sous la torture. Et ces PV de police  ressemblent davantage à des formulaires identiques où seuls les noms et les qualités des prévenus changent.
         Le CNLT qui prépare un rapport exhaustif sur ce sujet, considère que la question du terrorisme est politiquement instrumentalisée en vue de légitimer une politique sécuritaire qui cible en priorité les jeunes et fournir une matière au rapport périodique sur la lutte anti-terroriste présenté par le gouvernement tunisien aux instances concernées des Nations unies.
Ces affaires sont en train de donner lieu à une forme de «procès préventifs» où les autorités publiques donnent l’opportunité à la police politique d’agir en dehors du cadre de la loi et de ficeler des affaires prêts-à-porter où la vie de nombreux innocents est brisée, faisant croire à l’existence de crimes terroristes qui n’ont jamais existé, prenant en otage des citoyens innocents, attentant gravement à leur intégrité physique, leur dignité et leur liberté.
       Pour toutes les raisons invoquées, le CNLT exige la libération immédiate et inconditionnelle des condamnés, notamment les jeunes de Zarzis qui entament leur 3e année de prison. Il exige également l’ouverture d’une enquête sur les crime de torture commis.
Il appelle les autorités publiques à mettre fin à ce genre de «procès préventifs» qui se sont multipliés ces derniers temps et les met en garde contre la contre-productivité de tels agissements et le danger de banalisation du terrorisme qui en découle. Pour le Conseil La porte-parole Sihem Bensedrine

 

CONSEIL NATIONAL POUR LES LIBERTES EN TUNISIE Tunis le 9 février 2006

Non à l’incitation à la haine religieuse Non à l’atteinte à la liberté d’expression

                    Le CNLT observe avec inquiétude les effets de la crise provoquée par les caricatures, publiées dans le quotidien conservateur danois Jyllands- Posten, qui véhiculent une incitation claire à la haine de  l’islam. Le message qui assimile terrorisme et Islam est offensant pour la sensibilité des musulmans.
Le CNLT rappelle que toutes les législations des pays démocratiques sanctionnent l’incitation à la haine des races et des religions. De même que l’article 20 alinéa 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que :«tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité, ou à la violence est interdit par la loi.». De même le code de déontologie de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) réprouve l’utilisation de la liberté de la presse pour attenter aux croyances religieuses. 
Le CNLT tient à souligner que cette provocation, contraire à l’éthique professionnelle et aux valeurs de droits humains, émane d’une partie privée et qu’elle ne saurait engager, en aucune façon, l’ensemble d’un pays ou de ses citoyens. Il condamne, en conséquence, toute tentative d’amalgame et dénonce les appels aux représailles collectives.
De même qu’il se dresse vigoureusement contre la campagne qui vise à alimenter la prétendue «guerre des civilisations» théorisée par certains lobbies neo-conservateurs qui abreuvent l’opinion internationale de leurs conceptions réductrices.
Il rappelle que dans le monde occidental, se trouvent de nombreux partisans des causes justes du monde arabo-musulman, alors que dans nos pays, se déploient de puissantes forces hostiles aux libertés et particulièrement à la liberté religieuse.
Sur cette base, Le CNLT considère avec la plus grande suspicion la démarche du Conseil des ministres de l’Intérieur arabes, réuni à Tunis le 31 janvier 2006 qui a soulevé cette question des caricatures, 4 mois après leur publication. Ces représentants de pouvoirs autoritaires, à la légitimité de plus en plus contestée, prennent prétexte de défendre l’Islam alors qu’ils confisquent au quotidien la liberté d’expression de leurs peuples et violent les libertés religieuses.
Le CNLT condamne fermement les actes de violences et les incendies criminels qui ont accompagné certaines réactions. Il dénonce les manipulations, émanant de groupes extrémistes ou d’Etats, qui alimentent les ressentiments et les haines et font le jeu des partisans de la guerre des civilisations.
Il invite les intellectuels musulmans à combattre le racisme primaire de certaines forces extrémistes dans les pays occidentaux en recourant aux formes d’expression pacifiques à travers les médias et en promouvant le dialogue, tout en dénonçant certaines formes de censure à géométrie variable qui y sévit.         Le CNLT réaffirme avec force son attachement à la liberté d’expression comme étant une liberté fondamentale inaliénable et rejette toute légitimation d’une quelconque forme de censure et particulièrement dans les pays arabo-musulmans qui vivent un déficit flagrant en la matière et des violations graves à la liberté d’expression. Il appelle à la vigilance pour que ces événements ne soient pas une occasion de pratiquer une censure débridée et niveler par le bas les libertés publiques et individuelles. Pour le Conseil La porte-parole Sihem Bensedrine

Sauvez la vie de Mohammed Abbou Sauvez la vie de tous les prisonniers politiques Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 33 rue Mokhtar Atya, 1001, Tunis Tel : 71 340 860 Fax : 71 351 831 Tunis, le 10 février 2006

Dieu est bon

Zyad Douletli, ex prisonnier et militant, membre du comité du 18 octobre pour les Droits et les Libertés, a été admis dans la matinée du 8 février 2006 à la Clinique Ibn Sina à El Manar pour des examens médicaux et un scanner. Dans la foulée une tumeur maligne du colon a dû être éradiquée. L’opération a duré quatre heures. Grâce à Dieu, la tumeur a été repérée précocément (…).
Cette affection est consécutive aux longues années qu’il a passées dans différentes prisons, dans des conditions extrêmement dures, qu’il a relatées lors de la conférence de presse organisée à Tunis par le représentant de l’association Human Rights Watch à Tunis l’année passée. L’AISPP (…)
Tient l’administration générale des prisons pour responsable de la maladie de Zyad Douletli, comme de celle de beaucoup d’autres, affectés par cette maladie très grave, dans la mesure où leur est interdite toute vaisselle, hormis celle en plastique, et en raison des pressions psychologiques, des provocations permanentes et du harcèlement gratuit auxquels sont exposés les prisonniers politiques.
-Elle exige que des examens soient prescrits à tous les prisonniers politiques qui ont passé en prison plus de trois ans, afin d’écarter tout danger à même de menacer leur pronostic vital.
Le militant Zyad Douletli, docteur en pharmacie, a été empêché d’exercer sa profession en raison du harcèlement dont il est l’objet et du contrôle administratif auquel il est astreint depuis qu’il a quitté la prison le 2 novembre 2004 après y avoir effectué quatorze années pour son appartenance au mouvement de la Nahdha. Le Président de l’Association Maître Mohammed Nouri (traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version originale, LT)

 

MAGHREB CONFIDENTIEL N° 728 du 09/02/2006  

Tunis Les « effets collatéraux » des caricatures « danoises » du prophète Mahomet

Pas moins de 12 agences ont annulé leurs réservations sur la Tunisie (plus de 20 000 Danois bronzent chaque année en Tunisie) et le consulat général du Danemark à Tunis a fermé ses portes.  

Tunis Fitch et les banques : c’est la guerre

L’agence de rating Fitch est entrée en conflit ouvert avec les dirigeants de certaines banques qui refusent de présenter les comptes des entreprises. Seules les filiales de trois groupes ont été passées « à la moulinette » : Poulina et Abdessalam Affes (agro-alimentaire) et Mohamed Amouri (hôtellerie).  

Tunis Coopération pharmaceutique avec Cuba

Pour renforcer son industrie pharmaceutique, la Tunisie a signé un accord avec Cuba pour la réalisation d’une unité de fabrication de vaccins contre l’hépatite B. La France contrôle toujours, à hauteur de 65%, le marché tunisien des médicaments.  

TUNISIE Tijani Haddad

En août dernier, on croyait le ministre du tourisme tunisien sur un siège éjectable. Le premier ministre Mohamed Ghannouchi lui avait renvoyé trois fois le dossier de la mise à niveau hôtelière et l’avait fait seconder par un secrétaire d’Etat au tourisme, en la personne de Slim Tlatli.   Depuis, Tijani Haddad, qui est par ailleurs le beau-frère de l’ancien premier ministre et actuel vice-président du RCD, Hamed Karoui, a pu, avec l’appui du puissant lobby sahélien, se débarrasser de son encombrant second. Celui-ci a été nommé conseiller principal à la présidence de la république, et président de la commission des grands projets.   Le poste de secrétaire d’Etat au tourisme a été supprimé. Le dossier a été confié au directeur général du ministère du tourisme, Habib Ammar.


Un chalutier avec 14 marins à bord porté disparu au large de la Tunisie

           

Associated Press, le 09.02.2006 à 14h49             TUNIS (AP) — Un chalutier tunisien avec 14 marins à bord est porté disparu depuis mardi au large des côtes du nord-est du pays, rapporte jeudi le quotidien tunisien « Achourouk ».             Selon le quotidien, le bateau, long de 27 mètres, a quitté mardi dernier le port de La Goulette, à 10km de Tunis, en direction de l’île de Zembra, distante de 50 milles marins. Il devait normalement regagner son port d’attache au bout de six heures environ. Les familles des marins sont depuis sans nouvelles de leurs proches.             Contactée par téléphone, une source portuaire a confirmé la disparition du chalutier. Selon la même source, les recherches menées sans arrêt par des unités de la marine et de l’armée de l’air tunisiennes demeuraient vaines jeudi à la mi-journée.             La navigation aux alentours de Zembra, située à la pointe de la presqu’île du Cap Bon, est connue pour être dangereuse par mauvais temps en raison notamment des côtes rocailleuses de l’île. Par mer agitée, les vagues y atteignent jusqu’à une dizaine de mètres.   Associated Press

 

 

Tunisie: condamnations en série des caricatures du prophète Mahomet

           

Associated Press, le 09.02.2006 22h51             TUNIS (AP) — La chambre des conseillers (Sénat) et les avocats tunisiens ont condamné jeudi les caricatures du prophète Mahomet publiées par un journal danois et reproduites par plusieurs médias européens.             Dans un communiqué, les parlementaires estiment que ces caricatures « nourrissent la haine » et constituent « un acte de provocation à l’égard des religions et des croyances ».             Tout en appelant à « éviter de porter atteinte aux symboles sacrés et de semer le ressentiment et l’amertume », ils se déclarent hostiles à l’extrémisme et à la violence.             Les sénateurs tunisiens plaident, en revanche, pour le dialogue des civilisations et des religions et la diffusion des principes de modération et de tolérance.             Le même jour, les avocats ont observé un arrêt du travail durant la première heure des audiences, pour exprimer leur condamnation des « atteintes » au Prophète, qualifiant d’ « agression » les caricatures danoises.             De leur côté, des partis d’opposition ainsi que la centrale syndicale se sont élevés contre ce qu’ils appellent une « campagne attentatoire » au symbole de l’islam.             Le Mouvement des démocrates socialistes (MDS-gauche) dénonce « une manoeuvre provocatrice », tandis que l’Union démocratique unioniste (UDU-nationaliste arabe) considère « les pratiques agressives de certains journaux occidentaux comme étant le résultat de politiques internationales visant l’islam ».             Il met cependant en garde contre « toute exploitation politique tendancieuse et toute forme de violence qui ne peuvent nullement servir les causes de l’islam et des musulmans », analyse-t-il.             Pour sa part, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) conteste l’argument de la liberté de la presse avancé comme « prétexte pour rabaisser les autres cultures, porter atteinte aux religions et à leurs symboles ».             La centrale syndicale impute ces pratiques aux « apôtres des guerres de religions et de civilisations ».   Associated Press

Caricatures Mahomet: réprobations et appel à la compréhension en Tunisie

 

AFP, le 09.02.2006 19h54             TUNIS, 9 fév 2006 (AFP) – La Chambre tunisienne des  représentants (sénat) a condamné jeudi les caricatures  « attentatoires » au prophète Mahomet et appelé au « dialogue pour  l’instauration de la compréhension entre les peuples ».             Dans un communiqué publié à Tunis, le sénat a fustigé « les  comportements et caricatures qui nourrissent la rancoeur et qui sont  un acte de provocation à l’égard des religions et des croyances ».             Il a estimé que la « meilleure voie réside dans l’instauration de  la compréhension entre les peuples à travers la consolidation du  dialogue, de la tolérance et du respect des croyances religieuses de  tous ».             « La Tunisie oeuvre en permanence en vue d’instaurer le dialogue  des civilisations et des religions », ajoute le sénat, affirmant son  « rejet de l’extrémisme, de la violence et de toutes les prises de  positions et formes d’_expression qui portent atteinte aux symboles  sacrés des religions ».             Il « appelle à tout mettre en oeuvre pour assurer la diffusion  des valeurs de tolérance, de solidarité et de respect des  spécificités notamment en ce qui concerne les sentiments  religieux ».             Le sénat est la première institution à réagir à l’affaire des  caricatures en Tunisie, où la seule réaction officielle directe  avait été la saisie le 2 février du journal français France-Soir,  qui avait reproduit les caricatures parues le 30 septembre dans un  quotidien danois, provoquant des protestations dans le monde  musulman.             L’Union générale tunisienne du Travail (UGTT, centrale  syndicale) a également dénoncé jeudi « l’injure faite aux musulmans »  et fustigé des « pratiques sans rapport avec la liberté de la presse,  ni le droit à l’information ».             Trois partis d’opposition siégeant au parlement ont aussi  dénoncé « la provocation » que constitue, selon eux, la publication de  caricatures de Mahomet.             Les avocats ont observé jeudi un arrêt du travail d’une heure,  alors que alors qu’un message écrit (SMS) était relayé sur le réseau  du téléphone mobile invitant les Tunisiens à une journée de jeûne et  à s’unir dans la prière en hommage au prophète « humilié ».             Par ce même moyen, une campagne de boycottage des produits  danois avait été lancée la semaine dernière, alors que le consulat  danois a dû être fermé vendredi suite à une menace anonyme par  téléphone.   AFP

Tunisian Senate denounces prophet drawings, calls for calm

Associated Press, le 09.02.2006 à 22h19             TUNIS, Tunisia (AP) _ Tunisia’s Senate on Thursday condemned caricatures of the Prophet Muhammad that have inflamed the Muslim world, but also criticized the violence they have sparked.             The lawmakers issued a statement saying the drawings, first published by a Danish newspaper but later reprinted in several other countries, «nourish hatred» and were an «act of provocation toward religions and beliefs.»             Islam forbids representation of the prophet, and the drawings have angered many in this largely Muslim North African country.             The Senate also appealed for dialogue, moderation and tolerance, and said it was «hostile» toward the violent response to the drawings, which has included deadly protests and burning of European embassies.             Also Thursday, Tunisian lawyers halted work for an hour at the beginning of the day to protest the «attacks» on the prophet.             The opposition Democratic Socialist Movement warned against using the drawings as a pretext for violence or political gain, «which cannot serve the interests of Islam and Muslims.»             Earlier this week, Denmark’s honorary consulate general in Tunisia shut temporarily after receiving a threatening anonymous phone call.   Associated Press

Caricatures: l’ambassade d’Iran exige une excuse de deux journaux tchèques

   

AFP, le 09.02.2006 à 19H18             PRAGUE, 9 fév 2006 (AFP) – L’ambassade d’Iran à Prague exige une  excuse de deux journaux tchèques, Dnes et Hospodarske Noviny, pour  la publication début février de caricatures controversées du  prophète Mahomet, a révélé jeudi soir la télévision publique tchèque  (CT).             Interrogés par CT, les responsables des deux rédactions ont  argué que les journaux n’avaient publié certaines des caricatures en  question qu’à titre d’illustration, pour accompagner les articles  sur ce sujet.             « Je suis bien sûr désolé qu’une telle chose puisse blesser  quelqu’un mais chacun doit comprendre que si nous traitons un sujet,  nous devons dire et montrer à nos lecteurs de quoi s’agit-il », a  indiqué le rédacteur en chef du quotidien économique Hospodarske  Noviny, Petr Simunek.             De son côté, le rédacteur en chef de Dnes, Robert Casensky, a  affirmé: « C’est avec plaisir que nous allons inviter le chargé  d’affaires iranien chez nous dans la rédaction, pour que nous  puissions discuter ensemble de cette affaire ».             Egalement interrogé par CT, le chef de la diplomatie tchèque  Cyril Svoboda a estimé que les caricatures controversées de Mahomet  étaient « de mauvais goût », avant de qualifier d' »inadéquate » la  réaction dans les pays musulmans, provoquée par leur publication par  le journal danois Jyllands Posten.             Le même jour, le journal danois a présenté ses excuses, dans une  lettre transmise à la presse algérienne. 

Magazinet exprime ses regrets, les musulmans de Norvège les acceptent

    AFP, le 10.02.2006 à 11h19             OSLO, 10 fév 2006 (AFP) –  Le rédacteur-en-chef du magazine  chrétien norvégien Magazinet, Vebjoern Selbekk, a répété vendredi  qu’il « regrettait profondément » l’offense faite aux musulmans,  indignés par les caricatures du prophète Mahomet, sans toutefois  s’excuser pour la publication elle-même.             Le Conseil islamique, organisation parapluie pour les musulmans  de Norvège, s’est dit satisfait des regrets de M. Selbekk, à la  formulation desquels l’organisation a contribué.             « Je m’adresse personnellement au milieu musulman pour dire que  je suis désolé que vos sentiments religieux aient été blessés (…).  Cela n’a jamais été notre intention de blesser qui que ce soit », a  déclaré M. Selbekk lors d’une conférence de presse.             « En tant que rédacteur-en-chef, je n’ai pas complètement réalisé  combien la publication du fac-similé (des dessins d’abord parus dans  le journal danois Jyllands-Posten, ndlr) était blessante. Je tiens à  m’en excuser aujourd’hui. Je regrette profondément que vos  sentiments religieux à vous, musulmans, aient été blessés par ce que  nous avons fait », a-t-il ajouté.             Le Conseil islamique, qui représente de nombreuses associations  musulmanes et de nombreux imams de Norvège, a accepté ces  « excuses ».             « Nous sommes heureux que M. Selbekk ait compris combien cela a  été douloureux pour les musulmans et nous demandons aux musulmans  d’accepter ses excuses », a indiqué l’organisation dans un  communiqué.             « Les imams de Norvège condamnent tout recours de la violence et  toute menace d’y recourir, que ce soit par ou contre les musulmans »,  précise le communiqué.             Adoptant une ligne similaire à celle de Jyllands-Posten, M.  Selbekk n’a pas expressément présenté d’excuses pour la publication,  elle-même, des caricatures.             Le journaliste avait confié jeudi à l’AFP qu’il « réfléchissait à  des mesures de réconciliation » en liaison avec le Conseil  islamique.             « Il y a des limites au-delà desquelles je ne peux pas aller  (…) Autrement, je peux me chercher un autre travail », avait-il  toutefois précisé, excluant ainsi des excuses inconditionnelles.             Le 10 janvier, son petit périodique avait été le premier organe  de presse à reproduire les dessins parus le 30 septembre dans  Jyllands Posten et repris, depuis, dans de nombreux journaux.  L’islam interdit les représentations de Mahomet.             Une large majorité de Norvégiens (57%) estime que les médias  n’auraient pas dû publier ces caricatures, révèle un sondage paru  vendredi dans le journal Aftenposten, tandis que 30% sont d’un avis  contraire et que 13% se disent incertains.   

Caricatures: un influent religieux dénonce les « débordements » de violence

    AFP, le 10.02.2006 à 13h58             DOHA, 10 fév 2006 (AFP) –  Youssef Al-Qardaoui, un influent  religieux qatariote d’origine égyptienne, a dénoncé vendredi les  « débordements » de violence qui ont eu lieu durant les manifestations  de musulmans contre la publication de caricatures de Mahomet.             « Lorsque nous avons appelé à ce que vendredi dernier soit un  jour de colère, nous voulions que cette colère soit réfléchie et  sage », a déclaré cheikh Qardaoui lors du prêche du vendredi à la  mosquée Omar ibn al-Khattab à Doha.             « Je déplore les débordements et le dépassement des limites, qui  ont eu lieu dans certains pays où des ambassades, des consulats et  des propriétés privées ont été incendiées », a-t-il affirmé.             « Nous ne voulons pas de cela », a ajouté le cheikh dont le  programme télévisé hebdomadaire sur la chaîne qatariote al-Jazira  est largement suivi dans le monde musulman.             « Nous avons appelé à une position positive. Nous n’avons appelé  à tuer personne comme certains journaux l’ont prétendu », a-t-il  ajouté, annonçant « le lancement d’un site internet pour la défense  du prophète ».             Cheikh Qardaoui a consacré une partie de son prêche au mouvement  islamiste palestinien Hamas et a appelé les pays arabes à « appuyer  et à protéger » le mouvement, qui a remporté les élections  législatives palestiniennes.             Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, a assisté  au prêche.             M. Mechaal a proposé jeudi de « jouer un rôle pour apaiser » les  esprits dans l’affaire des caricatures controversées, qui a provoqué  une vague de violences dans le monde musulman.   

Un projet danois de démocratisation des pays arabes compromis

Par Slim ALLAGUI               AFP, le 10.02.2006 à 13h47             COPENHAGUE, 10 fév 2006 (AFP) – Une initiative danoise de  dialogue et de démocratisation des pays arabes a été quasiment  torpillée par l’affaire des caricatures de Mahomet avec laquelle le  Danemark s’est mis à dos le monde arabo-musulman, estimait-on  vendredi à Copenhague.             « Il y a un grand risque que les pays qui se sont ouverts à notre  initiative nous claquent la porte au nez à une période où il est  important plus que jamais de dialoger avec les pays arabes », a  déclaré à l’AFP Steen Gade, président de la commission des Affaires  étrangères du parlement.             S’exprimant en tant que représentant du Parti socialiste du  peuple (opposition), M. Gade estime que « la situation est d’autant  plus absurde que le Danemark a besoin énormément de dialoguer avec  le monde arabe, de réparer les dégats, et redorer le blason terni du  royaume ».             La commission parlementaire se réunira « prochainement pour  évaluer l’avenir de ce projet ». « Je suis pour qu’on mise sur la  société civile, les ONG, dans ces pays qui veulent avoir la  démocratie au lieu de travailler avec leurs dirigeants »,  confie-t-il, optant « pour la redistribution des fonds qui iraient à  la création de centres de dialogues » dans le monde arabe.             Cette « Initiative arabe » avait été lancée en 2003 par le  gouvernement libéral-conservateur pour promouvoir la démocratie et  les réformes dans les pays arabes, foyers potentiels du terrorisme  international, avait souligné à l’époque le chef de la diplomatie  danoise Per Stig Moeller.             « Il est important d’aider à la démocratisation des pays du  Proche et Moyen-Orient et d’Afrique du Nord afin de couper l’herbe  sous le pied des terroristes, et il est tout aussi essentiel qu’il y  ait des réformes afin que  nous n’ayons pas une situation  conflictuelle et de grandes confrontations dans le bassin  méditerranéen dans quelques années », avait-il estimé.             Interrogé mercredi par la 1ère chaîne de télévision DR1, M.  Moeller, a dit ne pas croire que ce projet soit enterré, du fait de  la situation actuelle. « Il est en veilleuse, et nous sommes très  attachés à le poursuivre, car le dialogue est plus nécessaire que  jamais ».             Et de citer comme exemple concret de cette initiative la  création en 2004 d’un institut au Caire, appelé « L’institut égyptien  du dialogue ».             Mais pour le professeur Mehdi Mozaffari de l’université  d’Aarhus, spécialiste des questions islamiques, « cette initiative  n’a pas beaucoup de chances de survivre ».             « J’ai été critique dès le début de ce projet ambitieux et  honorable pour le Danemark, car le gouvernement n’y consacre que 100  millions de couronnes danoises (13,42 millions d’euros) par an, ce  qui est sans rapport avec la diversité et l’ampleur de la mission »,  a-t-il indiqué à l’AFP.             « Mais c’est surtout la perception d’une telle mission qui passe  mal dans les pays du monde arabe avec un petit pays venant chez eux  leur donner des leçons sur la démocratie, les droits de l’homme et  de la femme. C’est difficile à digérer pour les gouvernants arabes »  pense-t-il.             Selon lui, « le Danemark ferait mieux de se concentrer sur  l’intégration et la démocratisation des musulmans qui vivent sur son  territoire, et qui devrait constituer la première priorité ».             La communauté musulmane au Danemark très hétéroclite représente  environ 3,5% de la population de 5,4 millions d’habitants.             Cet expert suggère que le gouvernement danois « établisse un  centre des civilisations dans son pays qui sera un forum ouvert  notamment au monde arobo-musulman ».             Le Danemark est désormais mal vu dans le monde arabo-musulman, y  compris dans les pays les plus pauvres qui bénéficient de la  généreuse aide danoise au développement.             L’assistance danoise (y compris humanitaire) à ces pays  s’élevait à environ 1 milliard de couronnes danoises (134 millions  d’euros) en 2005, soit quelque 13% à 14% de l’aide totale au  développement.             Elle est allée notamment à l’Egypte, au Bangladesh, au Pakistan,  à la Malaisie, à l’Indonésie, à l’Afghanistan et aux territoires  palestiniens.   

Algériens et Tunisiens épargnés en partie par « l’immigration choisie »

Par Isabelle WESSELINGH              AFP, le 09.02.2006 à 15h33             MARSEILLE (France), 8 fév 2006 (AFP) –  Algériens et Tunisiens  devraient échapper à de nombreuses mesures restrictives du projet  loi sur l’immigration « choisie » avalisé jeudi par le gouvernement  français, sauf si Paris modifie des accords bilatéraux, selon une  spécialiste en droit des étrangers.             Pour Lucile Barros, directrice à Marseille (sud) du Centre  d’accès au droit des étrangers (CADE), une association qui dispense  des conseils juridiques aux immigrants légaux ou illégaux, »le projet  de loi concernera principalement des personnes originaires de  l’Afrique sub-saharienne ».             « Les Algériens et les Tunisiens ne sont pas concernés par ce  projet à moins que le gouvernement soit en train de négocier une  révision des accords bilatéraux avec la Tunisie et l’Algérie », a  déclaré Mme Barros à l’AFP              Selon des accords bilatéraux signés en 1968, puis modifiés en  juillet 2001 avec l’Algérie, et 1988 avec la Tunisie, les  ressortissants de ces pays bénéficient de conditions spécifiques,  moins contraignantes, pour l’obtention de titres de séjour. Ils  relèvent en revanche de la loi traditionnelle pour les mesures de  refoulement et d’expulsion.             « Ces accords découlent des liens historiques de la France avec  ces pays », l’Algérie étant une ancienne colonie et la Tunisie un  ancien potectorat,  rappelle Mme Barros.             Un durcissement des conditions d’attribution de titres de séjour  et de regroupement familial, comme celui envisagé pour les autres  étrangers, ne peut se faire que dans des négociations directes avec  Alger ou Tunis.             D’après l’Observatoire statistique de l’immigration et de  l’intégration, les personnes originaires du Maghreb constituent l’un  des principaux flux migratoires vers la France.             Au ministère français de l’Intérieur, on confirme que certaines  mesures envisagées, notamment dans le domaine du regroupement  familial ne s’appliqueront pas aux Algériens mais seront valables  pour les Tunisiens.             Alors que l’avant-projet de loi prévoit de renforcer la lutte  contre les fraudes au mariage binational, Mme Barros estiment que  « les étrangers mais aussi les Français sont directement concernés »,  par ce durcissement. Le CADE aide de nombreux couples mixtes dans  les démarches de régularisation du partenaire ou d’obtention de la  nationalité française.             « Avec les conditions qui seront posées, on peut considérer que  la vie conjugale des couples mixtes ressemblera à un parcours  d’obstacle », explique la juriste.             Si la loi est adoptée, l’étranger qui se marie en France avec un  Français devra non seulement prouver qu’il est entré de manière  régulière mais qu’il séjourne aussi légalement en France,  ajoute-t-elle.             La fin des régularisations automatiques au bout de dix ans de  présence en France va aussi affecter de très nombreux étrangers,  poursuit Mme Barros.             « Par exemple, nous avons le cas d’un homme, arrivé légalement en  France en 1972 avec un contrat OMI (contrat saisonnier de l’Office  des migrations internationales, ndlr) qui a été en situation  régulière entre 1972 et 1997, puis qui a eu une rupture dans sa vie  et n’a pas fait renouveler sa carte de résident », raconte Mme  Barros.             « Avec la nouvelle loi, dit-elle, il ne pourrait pas obtenir sa  carte de séjour sur la base de dix ans de présence en France alors  qu’il a été pendant vingt-cinq ans en situation régulière ».   AFP

Paris approuve l’invitation du Hamas par la Russie

   

AFP, le 10.02.2006 à 13h10             PARIS, 10 fév 2006 (AFP) –  L’initiative russe d’inviter les  responsables du Hamas à se rendre à Moscou « peut contribuer à faire  avancer nos positions » au sein du Quartette (Etats-Unis, Russie,  Union européenne, Onu), a estimé vendredi le ministère français des  Affaires étrangères.               « C’est une initiative qui a été prise sans concertation avec les  partenaires (du Quartette), mais pour autant que nous restions dans  le cadre des objectifs et des principes que nous nous sommes fixé,  nous estimons que c’est une initiative qui peut contribuer à faire  avancer nos positions », a déclaré le porte-parole adjoint du  ministère, Denis Simonneau.               « Nous partageons avec la Russie l’objectif d’amener le Hamas  vers des positions qui permettent d’atteindre l’objectif de deux  Etats vivant en paix et en sécurité », a souligné le porte-parole.               Le président russe Vladimir Poutine, en visite à Madrid, a  annoncé jeudi qu’il allait « inviter prochainement les dirigeants du  Hamas à Moscou » pour rechercher une issue au conflit  israélo-palestinien.               Les Etats-Unis, pris par surprise, se sont inquiétés de ce  projet et ont demandé jeudi des « éclaircissements » à la Russie.               Israël de son côté s’est indigné de cette invitation, qualifiée  par la voix d’un ministre israélien de coup de « couteau dans le dos »  alors que l’Etat hébreu s’efforce d’isoler le mouvement islamiste  palestinien.   

 

L’Otan noue des liens plus étroits avec des pays musulmans et Israël

   

AFP, le 10.02.2006 à 02h00             TAORMINA (Italie), 10 fév 2006 (AFP) – Les ministres de la  Défense de l’Otan devaient s’entretenir vendredi à Taormina, en  Sicile (Italie), pour la première fois avec leurs homologues de  plusieurs pays nord-africains ou arabes, ainsi qu’Israël, dans le  contexte de crise des caricatures.             Il s’agit de la première réunion internationale à laquelle  participent des responsables occidentaux et musulmans depuis le  début de la vague d’indignation et des violences provoquées par la  publication en Europe de caricatures du prophet Mahomet.             La rencontre se déroule dans le cadre du « Dialogue  méditerranéen » de l’Otan, un programme de coopération créé il y a  une dizaine d’années mais qui n’a jamais pris forme. Sept pays y  participent: Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte, Mauritanie, Jordanie  et Israël.             « Nous devons travailler à améliorer la perception de l’Otan »  dans la région, a fait valoir jeudi soir le secrétaire général de  l’Alliance, Jaap de Hoop Scheffer.             L’Otan, qui multiplie les relations de partenariat à travers le  monde, cherche à nouer des liens de coopération plus étroits avec le  monde arabo-musulman.             Elle a aussi établi des canaux de communication avec les Etats  du Golfe et approché l’Arabie saoudite.             Par ailleurs, le ministre russe de la Défense Sergueï Ivanov se  joindra également aux discussions vendredi pour parler de  coopération, notamment dans la lutte contre le terrorisme.             Des navires de la marine russe doivent se joindre l’été prochain  à l’opération antiterroriste « Active Endeavour » (Engagement actif)  lancée par l’Otan en mer Méditerranée après les attentats du 11  septembre 2001.             Il s’agit de patrouilles en Méditerranée et dans le détroit de  Gibraltar pour surveiller la circulation de navires marchands.             Pour marquer l’occasion, le secrétaire général de l’Otan avait  prévu de monter à bord du croiseur russe, le « Moscou », amarré dans  le port de Messine, en Sicile, ont indiqué des responsables de  l’alliance.             Cette participation inédite de la Russie est censée illustrer le  rapprochement entre les deux anciens ennemis de la Guerre froide,  malgré la persistance d’une méfiance réciproque. 

L’Otan tend la main au monde arabo-musulman

Par Léon BRUNEAU               AFP, le 10.02.2006 à 12h08             TAORMINA (Italie), 10 fév 2006 (AFP) –  Les ministres de la  Défense de l’Otan achevaient vendredi une réunion informelle de deux  jours en Sicile en rencontrant pour la première fois leurs  homologues de plusieurs pays arabo-musulmans, ainsi qu’Israël, dans  le contexte de crise des caricatures.             « Le message que nous voulons faire passer, c’est la  désescalade », a déclaré vendredi le ministre allemand de la Défense,  Franz Josef Jung, à des journalistes.             « Nous devons clairement montrer combien il est important d’avoir  un dialogue entre cultures », a-t-il ajouté.             Les manifestations de colère dans le monde musulman pour  protester contre la récente publication en Europe de caricatures du  prophète Mahomet se sont poursuivies malgré les appels au dialogue  et à la raison.             La rencontre à Taormina (Italie) se déroule dans le cadre du  « Dialogue méditerranéen » de l’Otan, un programme de coopération créé  il y a une dizaine d’années mais qui n’a jamais pris forme. Sept  pays y participent: Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte, Mauritanie,  Jordanie et Israël.             La plupart de ces pays étaient représentés vendredi au niveau  ministériel, mais l’Egypte a dépêché un haut responsable militaire,  selon des responsables de l’Otan.             Il s’agit de la première réunion internationale à laquelle  participent des responsables occidentaux et musulmans depuis le  début de la crise des caricatures.             « Nous devons travailler à améliorer la perception de l’Otan »  dans la région, a également fait valoir le secrétaire général de  l’Alliance atlantique, Jaap de Hoop Scheffer.             L’Otan, qui multiplie les relations de partenariat à travers le  monde, cherche à nouer des liens de coopération plus étroits avec le  monde arabo-musulman mais se heurte aux réticences d’opinions  publiques historiquement méfiantes à l’égard de l’alliance militaire  occidentale dominée par les Etats-Unis.             Elle a aussi établi des canaux de communication avec les Etats  du Golfe et approché l’Arabie saoudite.             Jeudi, les ministres de l’Otan avaient affiché leur « totale  solidarité » avec le Danemark, qui est au centre de la tourmente  provoquée par la publication des caricatures dans un journal de ce  pays, et insisté sur la nécessité de dialogue.             Ils s’étaient aussi déclarés résolus à poursuivre l’expansion de  la mission de l’Otan en Afghanistan, malgré la flambée de violence  dans ce pays.             L’Otan a elle-même été directement impliquée par les violences,  des manifestants ayant attaqué mardi des troupes norvégiennes à  Maïmana (nord de l’Afghanistan) faisant 4 morts.             La crise des caricatures a éclaté au moment où l’Otan prévoit  d’étendre sa Force internationale d’assistance à la sécurité (Isaf)  dans les provinces du sud de l’Afghanistan. Les attaques-suicide se  sont multipliées dans le sud et l’est du pays depuis 2005.             Dans ce contexte, les ministres de l’alliance ont mis en exergue  la nécessité pour l’Otan d’avoir « les capacités de faire face » aux  nouvelles menaces de sécurité d’où qu’elles surgissent.             Par ailleurs, le ministre russe de la Défense, Sergueï Ivanov,  s’est joint aux discussions vendredi, pour parler de la coopération  pratique au niveau militaire entre la Russie et l’alliance, y  compris en matière de lutte contre le terrorisme.             Des navires de la marine russe doivent se joindre à l’opération  antiterroriste « Active Endeavour » (Engagement actif) lancée par  l’Otan en mer Méditerranée après les attentats du 11 septembre  2001.             Pour marquer le rapprochement, le secrétaire général de l’Otan  avait prévu de monter à bord du croiseur russe le « Moscou », amarré  dans le port voisin de Messine, une première dans l’histoire de  l’alliance, selon des responsables.   AFP

 

L’Otan ira dans le Sud afghan mais attendra pour l’Est

par Yves Clarisse  Reuters, le 09.02.2006 à 20h21             TAORMINA, Sicile, 10 février (Reuters) – L’Otan s’est engagée jeudi à opérer cet été dans le sud de l’Afghanistan malgré les tensions liées à la crise des caricatures de Mahomet, mais son calendrier de déploiement dans les régions tribales de l’Est pourrait être reporté à l’an prochain.             Les ministres de la Défense de l’Otan ont débattu de cette opération à haut risque au moment où les caricatures du prophète publiées par des journaux européens ont provoqué des troubles parfois violents dans de nombreux pays musulmans.             Des soldats norvégiens et finlandais de la Force de stabilisation de l’Otan en Afghanistan (Isaf) ont été pris à partie par des foules en colère, mais ils n’ont pas répliqué par des tirs mortels, signe de « professionnalisme et de retenue » salué lors de la réunion de Taormina (Sicile).             Cela n’empêchera pas l’Isaf, déjà présente à Kaboul, dans le nord et dans l’ouest du pays, de se déployer dans le Sud grâce aux troupes britanniques, néerlandaises et danoises.             « Les ministres ont reconfirmé (…) qu’il y a plein accord pour étendre la mission de l’Isaf dans le Sud », a déclaré le secrétaire général de l’Otan, Jaap de Hoop Scheffer.             Après ce déploiement, qui est prévu à l’été, elle contrôlera 75% du pays et les effectifs passeront de 9.000 à 16.000.                         UN PROBLÈME DE « PERCEPTION » DE L’OTAN             De Hoop Scheffer a reconnu qu’il faudrait travailler à la « perception de l’Otan » dans les pays musulmans, ce que les ministres tenteront de faire dès vendredi avec leurs homologues d’Egypte, de Tunisie, de Jordanie, de Turquie, du Maroc et de la Mauritanie, une « première » dans l’histoire de l’Alliance.             Malgré cette extension de son champ d’action, l’Otan restera absente des régions de l’Est dans lesquelles les Etats-Unis mènent l’opération « Liberté immuable » pour traquer les taliban réfugiés dans cette zone où pourrait aussi se trouver Oussama ben Laden, chef d’Al Qaïda.             Logiquement, l’Otan aurait dû prendre en main l’aspect de sécurisation de ces régions difficiles d’accès avant la fin de l’année, mais cet objectif paraît maintenant hors de portée.             « L’Otan a sur la table des plans pour finalement se déployer à l’Est, à un certain moment cette année ou l’année prochaine », a dit le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld.             Il admet ainsi que l’objectif risque de ne pas être tenu.             De Hoop Scheffer a aussi reconnu que l’incertitude régnait.             « Il y aura une quatrième phase, a-t-il déclaré. Quand cela se produira exactement, je ne peux le dire. »             Plusieurs raisons expliquent ce retard probable.             Des difficultés ont déjà été rencontrées pour réunir le contingent nécessaire à l’extension de la mission vers le Sud – aux Pays-Bas, le dossier a provoqué des problèmes politiques – et l’affaire des caricatures a eu des répercussions violentes.             Remplacer les 19.000 Américains présents dans l’Est sera une mission autrement plus difficile à réaliser.             Rumsfeld a par ailleurs reconnu que l’idée originale américaine d’une fusion de l’opération de l’Otan avec « Liberté immuable » ne pourrait être réalisée, un accord de coopération entre les deux forces ayant été conclu l’an dernier.                         TRANSFORMATION             Les ministres prépareront vendredi le sommet de l’Otan qui aura lieu à Riga (Lettonie) en novembre prochain et qui doit traiter de la transformation de l’Alliance pour l’adapter aux nouveaux défis, ceux qui sont nés après l’adoption en 1999 du dernier « concept stratégique » de l’après-Guerre froide.             Le symbole de cette transformation est aussi le dossier sur lequel les nuances entre alliés sont les plus importantes, comme sur l’idée d’un financement commun des opérations, qui est considérée avec beaucoup de réticence par la France.             Le rôle précis de la « Nato response force » (NRF), véritable outil de guerre ultramoderne composé d’environ 20.000 hommes hyper-entraînés et équipés, susceptible d’éteindre n’importe quel foyer de crise dans le monde, suscite des rivalités.              Officiellement, il n’est pas question de réviser le spectre des missions que l’accord constitutif de la NRF, en 2002, a prévu: de la restauration de la paix aux crises humanitaires.             Mais pour nombre de pays, la NRF doit pouvoir utilisée partout, comme elle l’a été au Pakistan après le tremblement de terre de l’an dernier dans la région du Cachemire.             Dans le cas des petits pays, cela les soulage d’un effort individuel souvent trop lourd pour leurs budgets et, pour les Etats-Unis, cela rend l’Otan visible comme « gendarme du monde ».             Cette vision n’est pas celle de la France, dont les diplomates insistent sur le fait que la NRF ne doit être utilisée pour des crises humanitaires que dans des cas « exceptionnels » – le Pakistan en est un selon eux -, l’Union européenne étant mieux adaptée que l’Otan pour ce cas.   REUTERS   

Ex-CIA Official Faults Use of Data on Iraq Intelligence ‘Misused’ to Justify War, He Says

 

By Walter Pincus Washington Post Staff Writer   The former CIA official who coordinated U.S. intelligence on the Middle East until last year has accused the Bush administration of « cherry-picking » intelligence on Iraq to justify a decision it had already reached to go to war, and of ignoring warnings that the country could easily fall into violence and chaos after an invasion to overthrow Saddam Hussein.   Paul R. Pillar, who was the national intelligence officer for the Near East and South Asia from 2000 to 2005, acknowledges the U.S. intelligence agencies’ mistakes in concluding that Hussein’s government possessed weapons of mass destruction. But he said those misjudgments did not drive the administration’s decision to invade.   « Official intelligence on Iraqi weapons programs was flawed, but even with its flaws, it was not what led to the war, » Pillar wrote in the upcoming issue of the journal Foreign Affairs. Instead, he asserted, the administration « went to war without requesting — and evidently without being influenced by — any strategic-level intelligence assessments on any aspect of Iraq. »   « It has become clear that official intelligence was not relied on in making even the most significant national security decisions, that intelligence was misused publicly to justify decisions already made, that damaging ill will developed between [Bush] policymakers and intelligence officers, and that the intelligence community’s own work was politicized, » Pillar wrote.   Pillar’s critique is one of the most severe indictments of White House actions by a former Bush official since Richard C. Clarke, a former National Security Council staff member, went public with his criticism of the administration’s handling of the Sept. 11, 2001, attacks and its failure to deal with the terrorist threat beforehand.   It is also the first time that such a senior intelligence officer has so directly and publicly condemned the administration’s handling of intelligence.   Pillar, retired after 28 years at the CIA, was an influential behind-the-scenes player and was considered the agency’s leading counterterrorism analyst. By the end of his career, he was responsible for coordinating assessments on Iraq from all 15 agencies in the intelligence community. He is now a professor in security studies at Georgetown University.   White House officials did not respond to a request to comment for this article. They have vehemently denied accusations that the administration manipulated intelligence to generate public support for the war.   « Our statements about the threat posed by Saddam Hussein were based on the aggregation of intelligence from a number of sources and represented the collective view of the intelligence community, » national security adviser Stephen J. Hadley said in a White House briefing in November. « Those judgments were shared by Republicans and Democrats alike. »   Republicans and Democrats in Congress continue to argue over whether, or how, to investigate accusations the administration manipulated prewar intelligence.   Yesterday, the Senate Republican Policy Committee issued a statement to counter what it described as « the continuing Iraq pre-war intelligence myths, » including charges that Bush  » ‘misused’ intelligence to justify the war. » Writing that it was perfectly reasonable for the president to rely on the intelligence he was given, the paper concluded, « it is actually the critics who are misleading the American people. »   In his article, Pillar said he believes that the « politicization » of intelligence on Iraq occurred « subtly » and in many forms, but almost never resulted from a policymaker directly asking an analyst to reshape his or her results. « Such attempts are rare, » he writes, « and when they do occur . . . are almost always unsuccessful. »   Instead, he describes a process in which the White House helped frame intelligence results by repeatedly posing questions aimed at bolstering its arguments about Iraq.   The Bush administration, Pillar wrote, « repeatedly called on the intelligence community to uncover more material that would contribute to the case for war, » including information on the « supposed connection » between Hussein and al Qaeda, which analysts had discounted. « Feeding the administration’s voracious appetite for material on the Saddam-al Qaeda link consumed an enormous amount of time and attention. »   The result of the requests, and public statements by the president, Vice President Cheney and others, led analysts and managers to conclude the United States was heading for war well before the March 2003 invasion, Pillar asserted.   They thus knew, he wrote, that senior policymakers « would frown on or ignore analysis that called into question a decision to go to war and welcome analysis that supported such a decision. . . . [They] felt a strong wind consistently blowing in one direction. The desire to bend with such a wind is natural and strong, even if unconscious. »   Pillar wrote that the prewar intelligence asserted Hussein’s « weapons capacities, » but he said the « broad view » within the United States and overseas « was that Saddam was being kept ‘in his box’  » by U.N. sanctions, and that the best way to deal with him was through « an aggressive inspections program to supplement sanctions already in place. »   « If the entire body of official intelligence analysis on Iraq had a policy implication, » Pillar wrote, « it was to avoid war — or, if war was going to be launched, to prepare for a messy aftermath. »   Pillar describes for the first time that the intelligence community did assessments before the invasion that, he wrote, indicated a postwar Iraq « would not provide fertile ground for democracy » and would need « a Marshall Plan-type effort » to restore its economy despite its oil revenue. It also foresaw Sunnis and Shiites fighting for power.   Pillar wrote that the intelligence community « anticipated that a foreign occupying force would itself be the target of resentment and attacks — including guerrilla warfare — unless it established security and put Iraq on the road to prosperity in the first few weeks or months after the fall of Saddam. »   In an interview, Pillar said the prewar assessments « were not crystal-balling, but in them we were laying out the challenges that would face us depending on decisions that were made. »   Pillar wrote that the first request he received from a Bush policymaker for an assessment of post-invasion Iraq was « not until a year into the war. »   That assessment, completed in August 2004, warned that the insurgency in Iraq could evolve into a guerrilla war or civil war. It was leaked to the media in September in the midst of the presidential campaign, and Bush, who had told voters that the mission in Iraq was going well, described the assessment to reporters as « just guessing. »   Shortly thereafter, Pillar was identified in a column by Robert D. Novak as having prepared the assessment and having given a speech critical of Bush’s Iraq policy at a private dinner in California. The column fed the White House’s view that the CIA was in effect working against the Bush administration, and that Pillar was part of that. A columnist in the Washington Times in October 2004 called him « a longstanding intellectual opponent of the policy options chosen by President Bush to fight terrorism. »   Leaked information « encouraged some administration supporters to charge intelligence officers (including me) with trying to sabotage the president’s policies, » Pillar wrote. One effect of that, he said, was to limit challenges to consensus views on matters such as the Iraqi weapons program.   When asked why he did not quit given his concerns, Pillar said in the interview that he was doing « other worthwhile work in the nation’s interest » and never thought of resigning over the issue.   Pillar suggests that the CIA and other intelligence agencies, now under Director of National Intelligence John D. Negroponte, remain within the executive branch but « be given greater independence. »   The model he cites is the Federal Reserve, overseen by governors who serve fixed terms. That, he said, would reduce « both the politicization of the intelligence community’s own work and the public misuse of intelligence by policymakers. »   (Source: The Washington Post, Friday, February 10, 2006; A01)


Dissidence et Réformes dans le Monde Arabe

Neila Charchour Hachicha

« Dissidence et Réformes dans le monde Arabe », tel fût le thème de la première conférence organisée par l’American Enterprise Institute

à Washington le 13 Janvier 2006, tant il est vrai que les autocraties produisent essentiellement des dissidents et ne peuvent produire des réformateurs.

 

L’invitation

qui m’a été adressée par l’AEI pour participer à cette conférence, a constitué une nouvelle étape pour mes activités politiques. En effet, j’ai été invitée en tant qu’activiste politique fondatrice d’un parti politique non reconnu en Tunisie. Ce sont donc les Etats Unis qui m’ont reconnu en premier un statut citoyen et politique que mon propre pays, après cinquante ans d’indépendance, ne se sent pas encore capable de me reconnaître. La citoyenneté, voire même le patriotisme y sont encore exclusivement reconnus aux seuls adhérents du régime.

 

Quelque part, c’est presque normal que les choses se passent ainsi, puisque nos propres gouvernants dans le Monde Arabe détiennent leur légitimité bien plus du soutien et de la reconnaissance de la communauté Internationale, et particulièrement des Etats-Unis, que de leur propre peuple à travers de vraies élections démocratiques.

 

Il est temps que tout cela change!

 

Sachant que l’AEI est une institution civile indépendante mais très influente sur l’administration Américaine, que celle-ci soit Républicaine ou Démocrate, j’ai accepté cette invitation dans le but de me faire entendre au cœur même des centres de pouvoirs et de décisions qui gèrent notre propre avenir.

 

Nous étions un premier groupe de six personnes à avoir été invités pour parler chacun de son pays: la Tunisie, la Libye, l’Egypte, le Kuwait et le Yémen. Si nous souffrons tous de manque de libertés et de mauvaise gouvernance, les degrés de celles-ci étaient différents d’un pays à l’autre et les solutions n’étaient pas forcément les mêmes. En effet, la démocratie ne peut s’assimiler à du prêt à porter, mais plutôt à du sur mesure bien adapté selon chaque pays.

 

Par cette invitation, l’AEI nous a généreusement offert, de part sa propre influence, une introduction de choix auprès de personnalités et d’institutions Américaines de haut niveau. Plus efficient encore, fut de nous rencontrer, nous activistes politiques Musulmans qui ne nous connaissions pas, puisque aucune plateforme démocratique et libérale qui aurait permis notre rencontre, n’existe encore dans le monde Musulman. En effet, les Etats ont leurs réseaux à travers différentes institutions nationales et internationales. Par contre, en dehors des Islamistes, le reste des activistes  politiques sont encore à leurs premiers pas dans la construction de leurs réseaux dans un environnement très hostile.

 

Des meetings on été organisé à notre intention par l’AEI, au Sénat, au Département d’Etat, au Pentagon et avec plusieurs journalistes de la place.

 

La visite la plus marquante fut celle du Pentagon. Nous y avons rencontré des membres du bureau de M. Donald Rumsfeld, chargés du Maghreb, du Moyen Orient et des stratégies d’information. Des personnes de qualité exceptionnelle. Alertes, vigilants, clairs, précis, interactifs, en un mot extrêmement professionnels et particulièrement ouverts à toutes nos propositions. La chaîne de télévision Al Hurra a été au centre des questionnements quant à son efficacité et les meilleurs moyens de la rendre plus efficace.

 

Au Sénat, ce sont les conseillers en politique étrangère des Sénateurs Gordon Smith et Orrin Hatch, qui nous ont reçus. Eux aussi sont très professionnels, mais évitent l’interactivité. Leur attitude est purement politique. Ils écoutent et notent tout, mais ne réagissent que très peu à nos propres propos. Néanmoins leurs questions sont particulièrement précises, preuve de leur connaissance aigue des différents pays représentés et des sujets abordés. L’avenir nous dira s’ils tiendront compte de nos revendications.

 

Quant au Département d’Etat, ce fut une surprise. Nous y avons été reçus par M. Scott Carpenter, Assistant du Sous Secrétaire d’Etat pour la promotion des droits de l’Homme et de la démocratie ainsi que par le Bureau de Mme Karen Hughes, Sous Secrétaire d’Etat pour la diplomatie et les affaires publiques.

 

Aujourd’hui, je comprend mieux pourquoi les USA ne s’en sortent pas aussi brillamment dans leur politique étrangère qu’ils ne s’en sortent dans leur politique interne. En effet, et sans parler des différences de vision entre Démocrates et Républicains, le Département d’Etat est divisé en une multitude de bureaux spécialisés qui ne communiquent pas entre eux. Chacun travaille sur sa région ou sur son thème sans en référer aux autres. Le langage diplomatique aidant, rien de concret ne semble pouvoir sortir de cette immense battisse.

 

Ayant bien plus l’habitude de coopérer avec les Etats, les représentants du Département d’Etat avaient bien du mal à avoir des positions claires avec des dissidents. Je n’ai pas manqué de le souligner en précisant que c’était bien la crédibilité des Etats-Unis qui est mise en doute face à autant d’ambiguïté qui crée un fossé énorme entre les discours encourageants du Président Bush et la réalité sur le terrain.

 

Enfin, la rencontre avec les journalistes. Les plus grands journaux et agences de la place étaient représentés. Ces derniers cherchaient nos conseils afin de déterminer quel serait le meilleur ordre de priorité des sujets à aborder pour faire avancer la démocratie dans le monde Arabe. L’un d’entre eux rappela l’effet du scandale Marcos.

 

Leur approche me révolta et j’ai exprimé ma colère. A mon sens, il s’agissait que l’on nous aide à obtenir notre propre liberté d’__expression par tous les moyens de pression disponibles, plutôt que de vouloir s’exprimer et réfléchir à notre place selon les circonstances, les intérêts et les possibilités. Mon attitude déplut à certains d’entre eux qui voyaient dans la revendication de nos propres libertés, une partie de leur propre pouvoir s’effriter.

 

Au delà de l’efficacité des discussions que nous avons engagé, toutes ces relations établies sont en elles-mêmes un acquis certains qu’il va falloir développer. Si l’AEI nous a offert l’opportunité de rencontrer tout ce monde, il nous revient à nous démocrates de faire nos preuves de réformateurs pour mériter un soutien durable. Etre dissident, c’est légitime et mérite reconnaissance, mais être réformateur c’est bien plus appréciable et bien plus constructif.

 

Enfin, arriva le jour de la conférence où chacun de nous devait présenter sa propre vision et les solutions qu’il pense être les meilleures pour faire avancer la situation de son pays.

 

Cette page contient un lien vidéo de toute la conférence, un transcript

de celle-ci et même une présentation détaillée pour ceux qui veulent en savoir plus. (Une traduction française sera bientôt disponible pour les francophones)

 

Avoir l’AEI comme plateforme d’__expression suscite beaucoup d’intérêt et de curiosité, d’autant que le sujet est d’une actualité brûlante. C’est pourquoi les présents étaient très nombreux et d’horizons divers. Bien entendu l’Ambassade Tunisienne n’a pas manqué au rendez-vous, même si aucun des présents n’a osé se présenter spontanément à moi.

 

La question sur les élections soulevée par Radwan Masmoudi, Président du « Centre for the Study of Islam and Democracy

 », m’a value beaucoup d’intérêt de la part de l’assistance. Nombreux ont été ceux qui ont voulu me rencontrer ultérieurement pour en savoir plus et mieux comprendre mon point de vue.

 

En effet, si je réclame le droit à des élections libres, je les conditionne néanmoins à l’acquisition préalable de la liberté d’__expression et d’association afin que l’outil électoral ne se transforme pas en outil démagogique qui conduirait à une réponse non démocratique, voire même anti-démocratique. Contrairement à M. Masmoudi qui estime que ma position a pour conséquence de freiner une situation déjà stagnante et que des élections libres doivent être notre objectif immédiat. Grand débat, qui mérite à lui tout seul une autre conférence.

 

Les plus rapides à réagir ont été l’équipe de la chaîne satellitaire Arabe

Al Jazeera. Malgré leur ligne éditoriale très orientée, l’équipe d’Al Jazeera à Washington est suffisamment professionnelle pour comprendre que si l’AEI s’est intéressée à nous, Al Jazeera devait faire autant et faire entendre nos voix dans tout le monde Arabe. Deux jours plus tard, l’émission « Min Washington » fut consacrée au programme « Dissidence et Réformes dans le Monde Arabe » engagé par l’AEI.

 

Au niveau de la presse écrite arabe, seule l’agence officielle Koweitienne Kuna a repris l’information. D’autres journaux arabes indépendants on fait de même. Quant aux journaux Tunisiens, c’est uniquement Alchourouk, repris par Alhadeth, à travers un auteur anonyme qui a cru bon de s’attaquer à ma personne et à mes valeurs en des termes indignes de tout professionnalisme et de tout esprit démocratique.

 

A ce niveau, ce cirque doit cesser immédiatement. 

 

Ou bien la Tunisie opte pour la censure de toute voie libre, en n’autorisant que l’information neutre et professionelle, ou alors, elle se doit d’autoriser tout un chacun de s’exprimer. Mais permettre à des poussières d’individus anonymes de s’en prendre aux citoyens, relève de la manipulation politique irresponsable et malsaine propre aux autocraties et non aux Etats qui se respectent et veulent faire preuve d’une réelle volonté de démocratisation.

 

Ce n’était pas, fort heureusement, la position et la vision des présents à la conférence qui sont d’une toute autre qualité et d’un tout autre niveau intellectuel et politique. En effet, suite à la conférence, j’ai été invitée à titre individuel par différentes personnalités et institutions.

 

Le Département d’Etat et plus précisément le « Bureau du Maghreb », cette fois-ci, m’a convié de nouveau pour une discussion plus détaillée sur la Tunisie. Ils m’ont aussi procuré une liste de conférences qui avaient lieu à Washington, se rapportant à la démocratie et au Maghreb,  dont une conférence qui devait être présentée par notre Ambassadeur, M. Hachana, sur les relations Tuniso-Américaines, et à laquelle je n’ai pas manqué de me rendre pour poser mes questions.

 

Le « Congressional Reseach Service » m’a convié à une visite au Congrès et un meeting avec des spécialistes des affaires Moyen-Orientales. Mme Sherry Shapiro m’a exprimé tout son soutien, s’est engagée à me mettre en contact avec le réseau féminin du Congrès Américain et a proposé de mettre à ma disposition toute documentation de la Librairie du Congrès dont je pourrai avoir besoin.

 

Des entretiens très enrichissants ont aussi eu lieu avec des journalistes de « Reuters » et de « Voice of America » qui m’ont demandé de maintenir un contact régulier tout en me mettant en contact avec d’autres militants démocrates du monde Musulman.

 

La « Fondation pour la Défense des Démocraties » m’a proposée son soutien logistique et financier pour tout projet apte à répandre les principes démocratiques au sein du Monde Arabe.

 

M. Jason Isaacson de  l’ « American Jewish Commitee », m’a exprimé son souhait personnel de voir se construire des sociétés civiles Musulmanes prêtes à coopérer avec Israël dans un esprit de dialogue et de paix. Un souhait que je partage sans l’ombre d’un doute.

 

Quant au Dr Jon Alterman du « Center for Strategic and International Studies » il m’a invité à participer à une des « Table Ronde du Maghreb » concernant les flux de migration maghrébine vers l’Europe, les conditions de migration et les capacités d’intégration de ces flux en terre d’accueil. C’était si triste de constater que d’autres que nous-mêmes étudient, analysent et cherchent des solutions à un problème qui nous concerne en premier lieu et sur lequel les Etats Maghrébins échouent lamentablement.

 

Enfin, Dr Lorna Hahn Présidente de l’ « Association on Third World Affairs » proposa gracieusement son soutien et exprima une volonté de coopération.

 

Malheureusement, un rendez-vous pris avec le «

Sénateur John Mc Cain » a du être annulé en dernière minute. Je souhaitais aborder avec lui particulièrement le problème des prisonniers politiques non reconnus en tant que tels, et envers lesquels la délégation qu’il a conduite en Tunisie en Février 2005 a exprimé un intérêt clair. Il est utile de savoir que le Sénateur Mc Cain a été lui-même prisonnier de guerre lors de la guerre du Vietnam, et est donc très sensible à ce sujet.

 

Tout ceci m’a valu l’appréciation et les encouragements de beaucoup d’amis, et à leur tête M. Paul Wolfowitz, le Président de la Banque Mondiale, M. Rust Deming, l’ancien Ambassadeur Américain en Tunisie, Dr Daniel Pipes, Président du Middle East Forum à l’origine de ma relation avec l’AEI, de mes compagnons dissidents du Monde Arabe et surtout des sympathisants du PLM, de mes amis en Tunisie et de toute ma famille.

 

Voilà en résumé le contenu de cette visite aux Etats-Unis, entièrement aux frais de l’AEI. Une institution civile qui a montré une nette volonté de vouloir soutenir et accompagner publiquement ceux qui sont prêts à s’engager sur le terrain de l’évolution démocratique dans leur pays en coopération avec les Etats-Unis. Une coopération exempte de toute condition préalable ou ultérieure, si ce n’est la volonté de perpétuer la politique de démocratisation du Président Bush même après son départ et ce, au niveau de la société civile Américaine. 

 

De part et d’autre, nous sommes convaincus que seuls le dialogue franc, le respect de l’autre dans ses différences et la coopération peuvent mener vers l’expansion économique, la stabilité des relations et l’espoir d’une paix durable.

 

Cela vaut bien entendu, et au même titre, pour mon pays.

 

Si je reconnais l’effort de l’Etat Tunisien de m’avoir laissée partir et revenir sans intimidation aucune, j’espère toutefois que c’est le signe d’une réelle ouverture, que mon message a été entendu et qu’un dialogue constructif suivra.

 

J’aurai de loin préféré discuter avec les miens afin de trouver des solutions, plutôt que de m’adresser à l’étranger pour me faire entendre chez moi. Je souhaite être une réformatrice au service de mon pays et non une dissidente que l’on refuse d’entendre au mépris de sa dignité citoyenne et humaine.

 

Lorsque l’on sait que M. Zakaria Ben Mustapha n’est habilité depuis le SMSI, qu’à écouter sans pouvoir répondre, seulement la société civile et les partis reconnus, non seulement l’Etat démontre au grand jour l’inexistence d’un dialogue, mais l’on se demande de qui peuvent alors dépendre la société civile et les partis non reconnus dans leurs droits constitutionnels.

 

Sommes-nous devenus des intrus dans notre propre pays?

Y a-t-il encore un seul  responsable capable de nous répondre et d’assumer ses responsabilités pour nous servir d’éclaireur?

 

La Tunisie se doit d’être le bien commun de tous ses enfants sans aucune distinction ni exclusion d’aucune nature.

 

Pour conclure j’exprime de nouveau mes plus vifs remerciements à l’American Enterprise Institute pour toute son écoute, tout son soutien et toute sa coopération.

 

Neila Charchour Hachicha

Tunis le 1er Février 2006

 

(Source: http://www.plmonline.info/id206.html )

 

 

Les vraies fausses caricatures qui ont enflammé le monde musulman

Malek El Ansari    Il est maintenant établi que les réactions démesurées qui ont accompagné le « caricaturegate », sont loin d’être spontanées. La trame telle qu’on la voit aujourd’hui, a commencé à se dessiner depuis l’été 2005 l’osque Kaare Bluitgen, auteur d’un livre sur la vie du prophète Mohamed se hurtat à l’autocensure en cherchant un illustrateur pour son livre« Koranen og profeten Muhammeds liv » (le coran et la vie du prophète Mahomet). Le meurtre de Théo Van Gogh étant encore dans les esprits, toutes les personnes contactés par l’auteur, déclinèrent sa demande. C’est alors que le quotidien danois le Jyllands-Posten se décida de lancer un appel à une quarantaine de caricaturistes et dessinateurs danois pour faire des portraits du prophète. Douze parmi la quarantaine sollicités, envoyèrent leurs dessins, tous publiés dans l’édition du 30 septembre sous le nom « les douze visages de Mahomet ». Au moment de leur publication, et selon l’avis de toute la profession au Danemark, les caricatures étaient aussi « médiocres » qu’inutiles. Mais c’était sans compter sur les responsables de la communauté musulmane du pays, qui se précipitèrent pour exiger des excuses officielles du Danemark qu’ils ne parviennent pas à obtenir. Ils se dirigèrent alors vers les ambassades des pays musulmans qui envoyèrent à leur tour une « déclaration commune de protestation » à l’attention du premier ministre danois qui jugea inutile de les recevoir.   C’est la que surgit un personnage obscure répondant au nom de Ahmed Abdel Rahman Abu Laban, se présentant comme étant l’imam principal du Danemark. Le 20 novembre 2005, Abou Laban, à la tête d’un collectif de 21 organisations musulmanes danoises, entreprit une tournée dans les pays musulmans ou il rencontra plusieurs grandes personnalités arabes et musulmanes dont le secrétaire général de la ligue arabe, Amr Moussa, Mohamed Sayyed Tahtawi, le grand imam de l’université d’Al-Azhar ainsi que le sheikh sunnite, très influent, Yusuf al-Qaradawi. « L’imam principal de danemark », présenta, alors à ces interlocuteurs un rapport de 43 pages illustrés par 15 dessins présentés comme étant ceux du quotidien danois. Parmi ces images, il y avait effectivement les 12 caricatures du journal mais également 3 autres images jamais publiées sur aucun journal et qui sont, selon toute vrai semblance, entièrement crées pour l’occasion. En plus de la médiocrité flagrante des caricatures, une des images présentées, représentant un homme avec un accoutrement de cochon sur le visage et une légende qui le désigne comme étant le prophète, sort directement d’un site Internet qui relate les faits d’un concours d’imitation de cochons. Selon le quai d’Orsay, qui confirme l’existence des ces trois images supplémentaires, se sont justement celles-ci, par leurs caractères franchement insultant et dégradant, qui ont le plus contribué à alimenter la polémique. Par ailleurs l’existence de ces trois images n’a pas été démentie par les responsables de cette virée explicative. Ahmad Akkari, porte parole des 21 organisations musulmanes danoises protestataires, explique que « ces images ont été ajoutées pour montrer comme l’atmosphère au Danemark est détestable pour les musulmans ». Akkari affirme qu’il ne connaissait pas l’origine de ces photos et rajoute qu’elles avaient été envoyées à des musulmans danois, dont il refuse de révéler l’identité aux journalistes du Ekstra Bladet.   La suite on la connaît tous. Chacun à profiter de cette occasion pour mettre de l’eau dans son moulin et servir sa propre politique. Chacun a vu dans cette affaire le moyen de paraître plus royaliste que le roi, moyen dérisoire pour prolonger encore de quelque temps leurs règnes affaiblis. Mais derrière la fumée des ambassades brûlées, les portes drapeaux de l’obscurantisme se gaussent, en comptant les jours, les mois, les années…   Malek El Ansari http//stranger-paris.blogspot.com


 

 A propos des caricatures, à chaud, un message à la gauche

 

Une certaine gauche a fait valoir les arguments suivants quand elle n’était pas restée silencieuse : Les caricatures ne sont pas de bon goût, mais il faut respecter la liberté d’expression qui est sacrée. Cette même gauche ajoute : il est nécessaire que la religion demeure dans la sphère privée, entre le croyant et son dieu sans que cela touche à la politique.

Tout d’abord une presse qui dit tout est une presse qui s’attaque au fondement même de la liberté de l’expression. Inscrite dans un tel cadre, elle banalise son propos et l’éloigne de la recherche des vérités qui peuvent se superposer sur un même sujet. Elle n’est donc plus outil de la confrontation des vérités / subjectivités, mais instrument de réconfort de ses récepteurs. Et donc le véhicule d’une seule vérité, celles du dominant [celui qui vend et diffuse le plus] qu’il soit démocrate ou autocrate. Hors, ce à quoi nous sommes confronté-es actuellement est une instrumentalisation pure et simple de la liberté d’expression à des fins visant à porter atteinte à l’islam et aux musulmans dans des sociétés où l’islamophobie se normalise comme un racisme respectable. Dans ces sociétés revendiquant la liberté d’expression, il devient coutume qu’un grand journal, un grand éditorialiste ou un « intellectuel » déclare publiquement qu’il déteste l’islam, ou que l’islam est « la religion la plus con ». Et cela réconforte le lecteur de masse de le lire parce qu’au fond il le pense puisuq’on l’a conditionné. Ceci nous inscrit dans une certaine logique dans la réanimation des réflexes identitaires et confessionnalisant les rapports sociaux permettant à des politiciens défaillants de se détourner des vrais questions. On a donc trouvé dans la présence musulmane en Europe un hameçon idéal. D’autant plus idéal qu’il s’y prête surtout après le 11 septembre. En France par exemple, les autorités ont cru bon d’interdire à un nombre insignifiant de filles voilées l’accès à l’école tant qu’elles n’enlèvent pas leur voile. La raison invoquée par l’état, et partagée par l’écrasante majorité de la classe politique, est la protection de la laïcité, fondement de l’état jacobin. Mais en réalité, le débat fut de toute autre nature et la promulgation de cette loi d’exception a été vécue par les musulmans comme une mobilisation médiatique, politique et sociale contre eux. Une société qui les criminalise. Ils sont contre le droit et l’émancipation des femmes, car l’islam est contre les femmes ». Ces musulmans seraient à l’origine de la violence comme on a pu le lire ou l’entendre lors des révoltes dans les quartiers populaires ; révoltes dont l’analyse faite par un pseudo-philosophe en dit long sur le degré de corruption du débat et son glissement de ces bonnes questions : « ils ne sont pas pauvres, ils sont musulmans ».

Les caricatures du prophète versent dans la même volonté de créer un ennemi intérieur. Dire du transmetteur de la parole de dieu chez les musulmans qu’il est terroriste proclame clairement que tout musulman est une éventuelle bombe humaine. C’est un glissement simple vers l’essentialisme. C’est un racisme.

 

Bien évidemment, l’émotion qui a été suscitée chez les musulmans par ces caricatures est vécue comme une réaction des barbares contre l’un des fondements des « grandes démocraties » : la liberté d’expression. Nous sommes dans un schéma de guerre des civilisations. Du Bien contre le Mal. Mais nous n’y sommes que poussés vers, nous ne l’avons pas voulu.

 

Il n’en reste pas moins qu’accepter la publication de ces caricatures dans le contexte actuel, c’est accepter l’existence d’une presse raciste et ce, quelque soit le jugement que l’on porte sur la disproportion de la réaction des musulmans. Il faut respecter l’ordre de la causalité. C’est une position que la gauche démocrate et progressiste se doit d’adopter.

 

Mais allons au-delà de cet aspect de la question de liberté d’expression. Ne devrions-nous pas voir dans cette réaction un sursaut de fierté de la part des musulmans ? Un refus d’aller plus bas dans l’humiliation ? Certes, c’est une réaction que nous attendions depuis un certain temps en d’autres circonstances ; pour dire non à l’invasion de l’Iraq ou l’Afghanistan, pour soutenir le peuple palestinien, pour s’opposer aux dictatures qui les oppressent avec la même vigueur. Soit. Nous pouvons considérer que ce n’est qu’un début. Un début qui montrera probablement aux musulmans que s’énerver peut faire mal face à la systématisation de l’agression, et que l’humiliation n’est plus tolérable. Mais ceci appelle aussi les forces de gauche à jouer leur rôle, c’est à dire développer une lecture proche des gens, une lecture qui émane d’eux, de ce qu’ils vivent et ressentent. Et à ce niveau, dire que la religion reste du domaine privé, « entre le croyant et son dieu », relève de la fuite en avant au regard d’un constat qui établit le fait religieux musulman comme un fait politique, et qui appelle donc à une réappropriation de l’islam par cette gauche, hors sol, et de plus en plus déconnectée de la société. Parfois à injuste titre, car pourtant, la gauche démocrate et progressiste continue de défendre la société, avec le peu de moyens dont elle dispose, pour ses droits et ses libertés contre l’offensive libérale que mènent des dictatures aliées à ceux là même qui ont peur pour la « liberté d’expression ». Mais une gauche qui, paradoxalement, ne peut se prévaloir d’être une alternative viable parce qu’entre autres raisons, elle n’a pas une vision de l’identité de sa société qui concilierait ses principes politiques et sa lecture de la modernité-progrès-« Hadatha » avec le fait religieux et sortir de l’impasse du discours laïciste anti-religieux. Un discours aujourd’hui en pleine crise comme modèle même dans la France qui l’a produit. Un discours probablement dépassé.

 

Adnane Ben Youssef

8-02-2006

 

(Source : www.tunezine.com, le 8 février 2006)


ANALYSE

Mahomet : le choc des ignorances,

par Henri Tincq

 

L’histoire à nouveau s’emballe. Près de vingt ans après l’affaire Rushdie, l’affrontement entre un Occident arc-bouté sur la défense de ses libertés et un islam insurgé contre le blasphème se répète. Comme si personne n’avait tiré les leçons d’une crise majeure qui, en 1989 déjà, avait opposé, d’un côté, les héritiers de Voltaire, de Rousseau et des droits de l’homme et, de l’autre, les fanatiques d’un obscurantisme islamique partout désignés du doigt. En vingt ans, ni l’escalade du terrorisme, ni les efforts diplomatiques, ni les ponts jetés par les hommes de dialogue n’ont eu raison des malentendus, des ignorances, de l’aveuglement hystérique des uns, du refus de toute autocritique chez les autres.

 

 

Dans l’affaire Rushdie de 1989, avant d’être politiquement récupérée par l’Iran de Khomeiny, la colère des mosquées était partie de Manchester (Grande-Bretagne) jusqu’au Pakistan. Dans celle des caricatures de Mahomet, l’onde de choc, partie en fait de Norvège — où une revue chrétienne a reproduit en janvier les dessins publiés six mois plus tôt dans le journal danois — a atteint en premier lieu l’Arabie saoudite. Mais, dans les deux cas, l’étincelle est la même. Le romancier — Salman Rushdie — et les caricaturistes danois ont osé s’en prendre au tabou par excellence, celui du sacré que l’homme, nous dit René Girard, dans toutes les sociétés, anciennes ou modernes, a toujours utilisé pour justifier, légitimer, réguler sa propre violence.

 

La liberté d’expression doit-elle ou non s’arrêter à cette frontière du sacré ? On ne manie pas impunément, même pour la fiction ou la dérision, des symboles et des figures comme celle du « Prophète ». La figure prophétique est un paradigme commun à toutes les théologies tirées d’une Révélation divine. La preuve en est la rapidité avec laquelle les autorités chrétiennes ou juives ont volé au secours des musulmans outragés par les caricatures de leur Prophète. Dans cette réaction, le réflexe « corporatiste » des institutions religieuses ou leur solidarité face à sociétés laïcisées qui, à tort ou à raison, leur semblent hostiles, ne sont pas seuls en cause. Ainsi se trouve- t-on face à la répétition du même conflit qu’il y a vingt ans entre deux imaginaires, deux systèmes d’exclusion mutuelle fondés sur l’ignorance. Ignorance des ressorts intérieurs à la foi musulmane d’un côté. De l’autre, ignorance de la liberté de création dans un monde arabo-islamique privé de droits et de démocratie. Avec les éléments aggravants que sont la montée du terrorisme, de l’islamophobie et le déclin des institutions traditionnelles de régulation de la foi musulmane.

 

La liberté de l’artiste et de l’écrivain est sacralisée en Occident, mais les musulmans récusent ce postulat de la supériorité d’une pensée occidentale incapable d’évoluer, disent-ils, en dehors de modèles historiques mis en place par elle seule et qui ont mis des siècles avant de s’imposer. Le « temps mental » n’est pas le même en Occident et en islam. Le souvenir de la colonisation continue d’atteindre des pays qui, par exemple, se sentent écartés de la relation à leur propre histoire, depuis que l’Europe chrétienne, puis l’Europe capitaliste et laïque ont satellisé et marginalisé les peuples et les cultures de la Méditerranée, ensuite, du monde entier.

 

Ce choc entre deux types de mémoire et de représentation est entretenu par tout un arsenal d’images et d’arguments qui expliquent et légitiment les affrontements d’aujourd’hui. Mohamed Arkoun, universitaire, spécialiste de l’histoire de la pensée islamique, s’étonne encore que la représentation de l’Europe chrétienne dans la conscience musulmane — nourrie par le souvenir des croisades — occupe plus de place que la Révolution anglaise et française qui, pourtant, ont « consacré une rupture décisive avec la symbolique religieuse et produit l’avènement de la raison et des Lumières, qui sont l’impensé de la pensée musulmane ».

 

La disproportion prise par cette affaire de caricatures du prophète Mahomet traduit l’extrême fébrilité de sociétés muselées où, après la phase nationaliste et socialiste, la religion, avec toute sa force explosive, sert d’identité de substitution. L’islam est devenu le premier élément cristallisateur de la solidarité face à l’oppression politique, aux guerres, à la misère sociale, à la stigmatisation. Dans ce contexte, seuls les oulémas, les savants, les juristes pourraient trancher des questions comme celles posées par le droit à la caricature, par le statut de l’image figurative en islam, par le blasphème et sa punition et par toutes celles qui sont liées à l’intégration de la religion musulmane dans les sociétés sécularisées d’Occident.

 

Mais qui dira assez la misère de la réflexion théologique aujourd’hui en islam ? Les « docteurs de la Loi » se terrent et se taisent. Autrefois tout-puissants dans l’interprétation des textes, ils ont été domestiqués par les pouvoirs politiques en place et ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes. Aujourd’hui n’importe quel individu, disposant d’un serveur Internet ou d’un réseau câblé, peut se croire autorisé à prêcher, commenter les événements, voire édicter des fatwas. On les appelle déjà les « i-muftis » ou les « télé-imams » qui produisent des injonctions en fonction de la demande de leur clientèle. Ils agissent en dehors de tout contrôle des institutions traditionnelles (universités, etc.) dans lesquelles régnait autrefois la ijma, c’est-à-dire la recherche du consensus entre les docteurs. Dans cette situation, ce qu’on appelle l’ijtihad — à savoir la production personnelle de normes lorsque les textes sont muets — a disparu. On a coutume de dire que les « portes de l’ijtihad », c’est-à-dire de l’interprétation rationnelle des textes révélés, sont refermées depuis le quatorzième siècle. Dans les pires conditions politiques, l’islam religieux est affronté aujourd’hui à toutes les crises d’interprétation et d’autorité.

 

La dérision occidentale d’un côté, le verrouillage de la pensée de l’autre, ne peuvent qu’encourager une « victimisation » de l’oumma (communauté musulmane) qui est le pain bénit des intégristes. L’affaire des caricatures sert avant tout de révélateur à cette accumulation de souffrances et de frustrations, sans arrêt énoncées, égrénées par des noms répétés comme dans une litanie : Irak, Palestine, Tchétchénie, hier Kosovo et Bosnie, où pourtant, dans chaque cas, les situations politiques et religieuses diffèrent. Un Ben Laden est passé maître dans l’art de mobiliser cet islam souffrant et humilié. En l’absence de toute contradiction intellectuelle, le jeu des extrémistes consiste donc à poursuivre cet affrontement de civilisations, de cultures, de religions, en se fondant sur l’historicité de l’action du Prophète, sur une interprétation à l’état brut des versets les plus belliqueux du Coran, sur une absence totale d’interprétation historique et critique. Une course de vitesse est engagée entre eux et un islam dit modéré qui voudrait se réapproprier le meilleur de sa tradition humaniste de l’âge classique. Il n’en a aujourd’hui plus les moyens, mais il serait périlleux de l’enfermer dans les caricatures de mauvais goût.

 

(Source : « Le Monde » du 11.02.06)


 

Point de vue

L’Europe en nouveau « grand Satan »

par Gilles Kepel (*)

 

De l’Indonésie à Djibouti, de Kaboul à Londres, l’embrasement est extrême là où les facteurs de tension étaient déjà à vif : en Palestine après la victoire du Hamas aux élections législatives, en Syrie et au Liban au moment où les pressions internationales s’accentuent sur le régime de Damas, en Iran où la question nucléaire est devenue une pomme de discorde majeure entre Téhéran et les pays occidentaux. La dégradation de la situation est ici l’aboutissement du processus mal maîtrisé de la « guerre contre la terreur » lancée par le président américain et ses alliés — qui a nourri un ressentiment antioccidental volatil auquel l’étincelle des caricatures a mis le feu.

 

 

Aux lendemains du 11-Septembre, Al-Qaida — par sa provocation spectaculaire et sanglante — avait accentué son isolement auprès des masses qu’elle voulait mobiliser. Cinq ans plus tard, en se faisant le fer de lance de la « résistance irakienne » les acolytes de Ben Laden sont parvenus, par le truchement des images satellitaires d’Al-Jazira et autres, à banaliser leur conception d’un djihad violent et légitime. Même si les chiites irakiens sont les principales victimes de la terreur, les téléspectateurs du monde arabe ont massivement perçu celle-ci comme une résistance à l’occupation étrangère.

 

L’incapacité des Etats-Unis à remporter la bataille des médias en ce domaine est allée de pair avec l’illusion que les chiites irakiens gagnés à la démocratie après l’élimination de Saddam Hussein seraient un facteur de libéralisation de l’Iran chiite voisin, préparant la chute du régime des mollahs. Au contraire, Téhéran a vite tiré parti de l’embourbement américain en Irak, utilisant ses propres réseaux chiites dans ce pays pour fragiliser la base d’appui du gouvernement soutenu par Washington et peser sur ce levier pour faire monter les enchères sur le dossier nucléaire.

 

En ce domaine, l’Europe, qui a joué un rôle majeur pour porter l’affaire devant le Conseil de sécurité de l’ONU, après l’échec de sa médiation avec l’Iran, s’est présentée aux yeux du monde comme une force morale face aux menaces planétaires provenant d’un Etat incontrôlable. Et elle s’est soudain trouvée en porte-à-faux lorsque l’affaire des caricatures l’a mise au ban des accusés : dans la presse arabe, on a présenté leur publication comme une forfaiture morale. En quoi le Vieux Continent peut-il se poser en juge ou arbitre alors qu’il insulte le Prophète, demande-t-on dans les talk-shows et les éditoriaux ?

 

Une telle situation représente une opportunité exceptionnelle pour Téhéran, où la violation de l’ambassade danoise est une réminiscence de la prise d’une autre ambassade, celle des Etats-Unis, à l’automne 1979. En se lançant dans la surenchère à la défense de l’islam offensé, et au leadership du monde musulman, les dirigeants iraniens mettent aussi leurs pas dans ceux de Khomeiny, qui, par la fatwa condamnant à mort Salman Rushdie le 14 février 1989, avait tenté de sauver la face de son régime, fragilisé par l’armistice qu’il avait été contraint de signer au terme de la guerre Irak-Iran.

 

A Damas et à Beyrouth, le saccage et l’incendie des locaux diplomatiques danois s’inscrivent dans une logique similaire : montrés du doigt après l’assassinat de Rafic Hariri, la Syrie et ses alliés locaux ne peuvent qu’encourager la populace à s’en prendre, à travers le Danemark, à l’Europe et à l’Occident, incriminés au nom des valeurs universelles de la morale et de la religion. Ils tentent de se refaire une vertu au regard de la « communauté des croyants » en vengeant l’outrage par le feu purificateur.

 

Le cas palestinien est plus flagrant encore : les doutes émis en Europe — principal bailleur de fonds de l’Autorité palestinienne — sur la continuité de l’aide si le Hamas ne renonçait pas à l’objectif de détruire Israël et recourait encore aux attentats-suicides se sont traduits, avec l’affaire des caricatures, par l’attaque des locaux de l’Union européenne (par-delà le seul Danemark) à Gaza. Là encore, on retrouve le même refus de se soumettre aux critères moraux et politiques déterminés par l’Europe pour la continuation de l’aide, en lui déniant le droit de juger, au prétexte de l’indignité qu’on lui impute.

 

On peut voir, à travers ces exemples, comment une situation profondément dégradée, où l’Irak et la Palestine symbolisent l’impuissance politique arabe, où l’Iran est entré dans une logique d’affrontement, est à la merci d’une provocation incidente qui permet à des acteurs politiques de pousser à la surenchère afin de faire prévaloir leurs intérêts particuliers.

 

Par-delà les manipulations dont l’affaire des caricatures est l’objet, celle-ci exacerbe aussi la question de l’islam en Europe, à travers des enjeux touchant aux grandes questions du droit — comme dans l’affaire Rushdie. On a le sentiment que le même conflit est remis sur le métier — liberté d’expression ou châtiment du blasphème. Mais les choses ont changé : la presse arabe publie ces jours-ci des tableaux statistiques qui font état de plus de 15 millions de musulmans dans l’Union européenne, un nombre bien plus élevé qu’il y a quinze ans.

 

Ces populations sont décrites comme une communauté de fidèles menacés dans leur foi, et justifiant l’intervention salvatrice de leurs coreligionnaires à travers le monde. On est ici au coeur de la bataille d’Europe : les populations européennes d’origine musulmane seront-elles le vecteur de la démocratisation des pays d’où elles proviennent, à travers l’exemplarité de leur intégration et de leur réussite dans des sociétés libérales et pluralistes, ou se verront-elles au contraire prises en otage par ceux — Etats autoritaires du monde musulman ou mouvements islamistes — qui s’efforcent d’en faire un cheval de Troie pour déstabiliser le Vieux Continent en aiguisant des antagonismes confessionnels ? Tel est l’un des principaux enjeux politiques derrière cet embrasement.

 

Les manifestations de contrition exigées du gouvernement danois sont surtout propres à exacerber, en Europe, le sentiment d’exaspération face au chantage des fanatiques et à alimenter des attitudes de rejet face aux populations d’origine musulmane. Quelques voix raisonnables, en Jordanie et en Arabie saoudite notamment, se font entendre au milieu du tumulte et de la fureur. Elles font remarquer que la dégradation de l’image de l’islam se produit à une époque où les attentats-suicides et les décapitations d’otages en direct perpétrés au nom du djihad et de l’islam en sont la principale cause. Et qu’il appartient aussi aux musulmans du monde de se débarrasser du terrorisme dans leurs rangs s’ils veulent éviter d’être caricaturés à ce prisme.

 

Ces voix ont du mal à se faire entendre, entre la rage des foules, les manipulations des gouvernements, la démagogie des médias. C’est à l’Europe démocratique qu’il revient, sans doute, de les encourager et de leur donner toute la place qu’elles méritent. Le retour du dialogue est à ce prix.

 

(*) Gilles Kepel est professeur à l’Institut d’études politiques de Paris, chaire Moyen-Orient Méditerranée.

 

(Source : « Le Monde » du 11.02.06)

 

Les réactions des abonnés du Monde.fr à la lecture de cet article.

 

vorslov

10.02.06 | 20h08

Je suis surpris par l’expression musulman athée. C’était également dans un point de vue . Contrairement aux religieux, un athée n’a pas de dieu et il ne peut exister aucune discrimination entre les athées de ce point de vue. Pourquoi pas un athée mormon scientologue ou évangéliste

 

Nora DB

10.02.06 | 19h01

Votre analyse serait plus crédible si elle ne faisait pas l’impasse sur le climat xénophobe et islamophobe qui règne au Danemark, ou un chercheur de votre rang oserait-il reprendre à son compte l’amalgame primaire de l’extreme droite danoise et qui consitutue le véritable message de ces caricatures, à savoir « islam/musulmans=terrorisme/terroristes »? Après le « tumulte », comme vous dites, il reste à espérer que la « liberté d’insulter » redonnera leur place à la liberté d’exression et à déontologie

 

LR

10.02.06 | 18h47

Cheval de Troie … à méditer. Les Européens tolèrent, laissent leurs frontières ouvertes et distribuent des aides. Après il y a de la discrimination à l’embauche et certains européens de souche pratique ce que l’on appelle le rascisme oridinaire. C’est vrai et c’est à corriger. De là à accepter les piscines séparées… L’Europe a colonisé mais de repentance. Elle est en train de se perdre et ca risque d’exploser dasn 30 ans. Pas une guerre contre l’Iran.. mais des guerres civiles. Attention..

 

ANNICK L.

10.02.06 | 18h34

Le ventre mou des Occidentaux ne sont pas les USA (trop durs à abattre) mais l’Europe divisée, ramollie, repentante à souhait et avec ses fortes minorités. Messieurs les Islamistes vous tenez la bonne cible !

 

ANNICK L.

10.02.06 | 18h20

L’Europe accusée se dégonfle, les USA la laisse tomber (juste retour de manivelle) la Russie veut causer avec le Hamas, l’année commence bien pour les Islamistes, continuez l’étendard du Prophète flottera bientôt sur Notre Dame (peut être samedi ?)

 

Robert Sol

10.02.06 | 17h22

Comme d’habitue, il est rassurant d’ecouter la voix des specialistes comme Mr Keppel sur les questions traitées trop a vif. Il ne faut pas chercher a parler des evenemments d’actualité de maniere isolée mais voir comment ils traduisent des evolutions politiques, demographiques sociales. Mr Keppel fait un bilan tres clair: l’Europe n’avait en fait aucune raison d’etre plus épargnée que les EU par la demagogie arabe; moins meme, du fait de l’importance de ses populations musulmanes.

 

Citizen Q

10.02.06 | 17h09

l’europe en nouveau grand satan, c’est surtout l’europe facile a destabiliser. 15millions de musulman sont comme des pions qui pourrais se retourner contre l’europe elle-même, engageans celle-ci avec les USA dans une guerre contre le térrorisme et une théorie du choc des civilisations dont celle-ci n’a somme toute que faire et dont elle se passerais bien. mais elle devras bientôt faire avec puisque celle-ci n’a as pris le soin de fermer la porte a ses propres démons nationaux

 

Citizen Q

10.02.06 | 17h03

les neo-cons sont arrivé a un deuxième point, celui d’un début de destabilisation de l’europe. après avoir pris le centre de l’echiquier geopolitique pour ceinturer l’iran, avoir la main mise sur le pétrole pour compenser le cout de guerre et minimiser la croissance chinoise, voila que l’europe au première loge l’occident recevra la monaie que le monde arrabe ne peux renvoyer aux etat-unis. bien pratique pour aintenir celle-ci dans l’etat ou elle se trouve, c’est a dire nulle part politiquement.

 

Calembro

10.02.06 | 15h32

Au vu de ses précédents livres Képel est totalement disqualifié pour prononcé le mot « islam ».

 

Fawzi H.

10.02.06 | 15h01

(suite)…des laïcs musulmans,voix médiane,qui sans renier son « occidentalité »,portent en eux une islamité apaisée et une arabité quelque peu nostalgique(ne pas confondre avec Tarik Ramadan svp!)Donnons leur un peu plus la parole,depuis le 11 sept,ils parlent et disent des choses que l’actualité ne veut pas entendre!c’est la meilleure garantie pour une meilleure défense de nos principes républicains et laïcs!merci pour votre réflexion qui sur le fond est juste! »Délégitimons » Ben Laden!

 

Mahomet_Flaubert

10.02.06 | 14h56

Sur le fond,je suis d’accord,mais si l’on oubliait quelques instants l’actualité qui masque des réalités,et si vous le permettez,je vous suggère ceci:sur toutes les questions (Islam,caricatures,liberté d’expression),il y a trois postures dans l’opinion euro-arabe:1/les barbus,qui sont sur-médiatisés(actualité oblige) et promus par certaines élites politiques européennes(Sarko en premier)2/les laïcards arabes(pétitionnaires avec Charlie-Hebdo et et enfin 3/une voix que l’on entend pas beaucoup..

 

Gil_Gamesch

10.02.06 | 14h39

Le titre est scandaleux!racoleur et comporte en soi des « à-priori » De la nuance avant toute chose!lisez votre voisin Thinq!(sur les pages du Monde)mais vous nous incitez à refléchir et vous répondre!On cogite alors!

 

Aher (aher59@hotmail.com)

10.02.06 | 14h18

Le retour du dialogue, tiens donc ? Allez, chiche, organisons une grande conférence d’excuses et de repentir en un lieu symbolique. Mais où ? Munich, Pearl Harbor, Yalta, Ground Zero, La Mecque, Jérusalem libérée ? Non, M. Kepel. Le dialogue demande de la hauteur, et l’Europe s’abaisserait à dialoguer avec les intégristes. Le droit au blasphème n’est pas négociable. Surtout pas avec les religieux. Car en vérité, je vous le dis, Dieu est tout petit, et son prophète a la grosse tête.

 

Maria Jose L.

10.02.06 | 14h09

C’est l’Europe qui a creuse, a coups de pelle de demissions successives de ses responsabilites, la fosse dans laquelle s’appretent a l’enterrer les integrismes de tout poil au Moyen Orient. Les arabes commencent a croire que la resistance europeenne a lancer la guerre contre Saddam etait vraiment le produit de raisons commerciales. Que l’Europe ait repondu a la victoire electorale de Hamas en Palestine avec le chantage economique, a ete la goutte qui a fait deborder le verre.

 

Layla

10.02.06 | 14h02

Les Musulmans européens, athés, pratiquants, laïques, sont, comme tout citoyen clairvoyant et attaché à la justice internationale, soucieux de la politique européenne au Proche et Moyen-Orient. C’est de son équité et de sa transparence, de sa cohérence aussi avec les principes qu’elle prône que dépend l’avenir. Si choc il y a, ce n’est pas entre Orient et Occident (cela signifie-t-il encore quelque chose?) mais entre tenants du droit international et partisans du droit à géométrie variable.

 

Layla

10.02.06 | 13h53

Si la colère des musulmans défilant dans les rues arabes citées est sans aucun doute instrumentalisée, le malaise des musulmans européens,pratiquants, laïques, ou athés ne l’est pas. Et les voix qui s’élèvent calmement en Europe sont peut-être, aussi paradoxal que cela puisse paraître,celles qui ont le mieux intégrer les valeurs universelles (et pas seulement européennes s’il-vous-plaît) dont celle du respect; précisément parce qu’ils ne l’ont pas toujours connue dans leurs pays.

 

alain C.

10.02.06 | 13h46

Il conviendrait qu’un professeur à l’IEP précise ce qu’il entend par « populace », terme qui, sans autre précision, décèle des vues incompatibles avec l’exercice d’une responsabilité, qu’elle soit politique, morale ou scientifique. S’agissant de la conclusion : « C’est à l’Europe démocratique qu’il revient de(…)leur donner toute la place qu’elles méritent. Le retour du dialogue est à ce prix. » Exhortation-cliché qui ne mériterait certainement pas derche dans la copie d’un étudiantà l’IEP.

 

(Source : leMonde.fr, visité le 10.02.06)

 

 

Il ne s’agit pas d’un conflit entre la liberté et le dogme

par Tariq RAMADAN   J’étais à Copenhague en octobre dernier lorsque l’affaire des caricatures a commencé à provoquer des manifestations au Danemark. Interviewé par un journaliste de la rédaction qui avait publié les douze dessins, celui-ci m’avait fait part des vifs débats internes au journal, du malaise que beaucoup de journalistes éprouvaient autour de cette affaire en même temps que de leur surprise face à la vive réaction des musulmans et des ambassades du monde arabe. Il semblait néanmoins que la tension ne devait pas franchir les frontières du Danemark. Aux musulmans qui dénonçaient un acte raciste, une provocation dont allait se servir l’extrême droite danoise en pleine expansion, je conseillais de ne pas réagir émotionnellement, d’expliquer calmement en quoi ces caricatures les blessaient et de ne point manifester ni prendre le risque de déclencher un mouvement de foule impossible à maîtriser.    Tout semblait réglé et on peut se demander pourquoi, trois mois après les faits, on a intérêt à rallumer la flamme d’une controverse aux conséquences aujourd’hui aussi dramatiques qu’incontrôlables. Des musulmans danois se sont rendus dans des pays du Moyen-Orient et ont attisé la flamme du ressentiment : des gouvernements, trop contents de prouver leur attachement à l’islam – et ainsi de se légitimer aux yeux de leur population- ont saisi l’aubaine et se sont présentés en grand défenseur de la cause. Il n’en fallait pas davantage pour que des politiciens, des intellectuels et des journalistes – avocats de l’autre grande cause de la liberté d’_expression- se présentent en résistants à l’obscurantisme religieux au nom des valeurs de l’Occident. Et nous voilà en face de la grande simplification, de la polarisation la plus simpliste qui soit : il s’agirait d’un clash entre les civilisations, d’un affrontement entre, d’un coté, l’inaliénable principe de la liberté d’_expression et, de l’autre, le principe qui fonde l’inviolable sphère du sacré. Présenté en ces termes, le débat a malheureusement viré au bras de fer : qui l’emportera ? Des musulmans veulent des excuses, menacent de s’en prendre aux intérêts européens, voire au personnes ; des gouvernements et des journalistes occidentaux refusent de plier sous les menaces et certains organes de presse en rajoutent en publiant à leur tour les caricatures. La majorité des populations du monde observent ces excès avec perplexité : quelle folie mène le monde ?   Il faut pourtant trouver les moyens de sortir de ce cycle infernal et de demander à tous et à chacun de cesser de jeter de l’huile sur le feu pour enfin entrer dans un débat sérieux, profond et serein. Non, il ne s’agit pas d’un clash entre les civilisations ; non, cette affaire ne symbolise pas l’affrontement entre les principes des lumières et ceux de la religion. Non, trois fois non. Ce qui est en jeu au coeur de cette triste affaire c’est de mesurer la capacité des uns et des autres à savoir être libre, rationnel (croyant ou athée) et, dans le même temps, raisonnable. La fracture qui se dessine aujourd’hui n’est point entre l’Occident et l’Islam mais entre celles et ceux qui dans les deux univers, savent être et affirmer ce qu’ils sont avec mesure au nom d’une foi et/ou d’une raison raisonnables et ceux qui se laissent emporter par les certitudes exclusives, la passion aveugle, les perceptions réductrices de l’autre et les conclusions hâtives. Ces traits de caractère sont équitablement partagés entre certains intellectuels, savants religieux, journalistes et une partie des populations des deux univers. Face aux dérives graves qu’ils peuvent provoquer, il est urgent d’appeler à plus de sagesse.   Il est interdit en islam de représenter les Prophètes de n’importe quelle façon que ce soit. Il s’agit là non seulement de l’_expression du respect fondamental qui leur est dû mais également d’un principe de la foi qui exige que Dieu et ses Prophètes ne soient jamais figurés pour éviter toute tentation idolâtre. En ce sens, représenter un Prophète équivaut à une transgression grave. Si, en sus, on y ajoute l’insulte et l’amalgame bien maladroit comme cela a été perçu par les musulmans dans la représentation du Prophète avec un turban en forme de bombe, on comprend la nature du choc et du rejet qui s’est manifesté très largement parmi les musulmans (dont certains ne sont pas même pratiquants). Ils estimaient qu’on allait trop loin : il était bon et important qu’ils puissent l’exprimer et être entendus. Il était néanmoins nécessaire qu’ils n’oublient pas que les sociétés occidentales depuis trois siècles, se sont habituées (à la différence des sociétés musulmanes) à la dérision, à l’ironie et à la critique du fait et des symboles religieux, du Pape, du Christ voire de Dieu. Même s’ils ne partagent pas cette attitude, il est impératif que les musulmans sachent garder une distance intellectuelle critique en pareille circonstance et ne se laissent pas entraîner par une ferveur qui est mauvaise conseillère. En face de caricatures aussi maladroites que bêtement méchantes, il eut été – et il demeure préférable – d’exposer sans fracas au public ses principes et ses valeurs et de passer son chemin jusqu’à ce qu’une conjoncture plus favorable permette un débat plus serein. Ce qui sourd des communautés et du monde musulmans aujourd’hui est aussi excessif qu’insensé : l’obsession des excuses, les appels aux boycotts voire les menaces de représailles physiques et armées sont totalement démesurés et ces excès sont à rejeter et à condamner.   Invoquer le « droit à la liberté d’_expression » pour se donner le droit de tout dire, n’importe comment, contre n’importe qui, est également une attitude irresponsable. D’abord parce qu’il n’est pas vrai que tout est permis au nom de la liberté d’_expression. Chaque pays a des lois qui fixent un cadre qui permet, par exemple, de condamner les propos racistes et auxquelles il faut ajouter un corps de règles particulières qui correspondent à la culture, aux traditions, à la psychologie collective de la société en question et qui régulent les relations entre les individus et la diversité des cultures et des religions en présence. On ne traite pas de la même façon l’injure raciale et/ou religieuse selon les sociétés occidentales : à l’intérieur d’un cadre légal à peu près commun, chaque pays a sa mémoire et sa sensibilité que la sagesse impose de reconnaître et de respecter. Les sociétés européennes ont changé et la présence des musulmans a quelque peu modifié cette sensibilité collective. Plutôt que d’être obsédé par le droit – au point de le transformer en dictature du droit à l’_expression de n’importe quoi – ne serait-il pas bienvenu d’appeler les citoyens à un usage responsable de leur liberté d’_expression qui tienne compte des sensibilités qui composent nos sociétés contemporaines ? Il ne s’agit pas d’ajouter des lois et de restreindre l’espace de la parole libre : non, il s’agit simplement d’appeler les uns et les autres à user de leurs droits de façon raisonnable. Il s’agit bien plus de civisme que de droits ; les citoyens de confession musulmane ne demandent pas plus de censure, simplement un peu plus de respect. On ne décrète pas le respect mutuel à coup de lois, on l’enseigne au nom d’une citoyenneté libre, responsable et raisonnable.   Nous sommes à la croisée des chemins. Il est l’heure que des femmes et des hommes refusent les faux clivages entre deux mondes et bâtissent des ponts entre deux univers qui ont de nombreux principes communs. Qu’ils affirment le droit à l’_expression libre en même temps que le sens de la mesure quant à son usage ; qu’ils promeuvent l’autocritique nécessaire et qu’ils refusent les vérités exclusives et les postures binaires. Nous avons un urgent besoin de confiance mutuelle. La crise provoquée par ces caricatures nous montre combien le pire est possible (à partir d’ « apparemment rien « ) entre deux univers de sens quand ils deviennent sourds l’un à l’autre et sont tentés de se définir l’un contre l’autre. Un désastre dont les extrémistes des deux camps ne manqueront pas de tirer parti. Si les femmes et les hommes qui chérissent la liberté, qui savent l’importance du respect mutuel, qui ont conscience de l’impérative nécessité du dialogue critique et constructif ; si ces femmes et ces hommes, disais-je, ne s’expriment pas, ne s’engagent pas plus visiblement ensemble et ne résistent pas aux dérives de notre temps alors il y a fort à parier que des lendemains douloureux et noirs nous attendent. Au demeurant, c’est à nous de choisir.   (Source : le site de Tariq Ramadan, le 9 février 2006)  


Caricatures : géopolitique de l’indignation

Par Olivier Roy
mis en ligne le vendredi 10 février 2006 Le conflit sur les caricatures danoises est souvent présenté comme l’_expression d’un “clash” des civilisations entre un Occident libéral et un islam qui refuserait la liberté d’_expression. Il faut beaucoup d’ignorance et encore plus d’hypocrisie pour s’en tenir à cette thèse. La liberté d’_expression est dans tous les pays occidentaux d’ores et déjà limitée, et par deux choses : la loi et un certain consensus social. L’antisémitisme est réprimé légalement. Mais l’atteinte à d’autres communautés aussi : en 2005, l’Eglise catholique de France a obtenu le retrait d’une publicité utilisant la Cène, mais remplaçant les apôtres par des femmes court vêtues. Cela relève exactement de la même démarche qu’entreprennent les associations musulmanes aujourd’hui. Quels journaux ont alors publié la publicité incriminée en défense de la liberté d’_expression ?   Il y a également un seuil de tolérance très variable dans l’opinion publique : aucun journal respectable ne publierait aujourd’hui une interview de Dieudonné, alors qu’il n’a pas (encore) été condamné en justice pour antisémitisme. Aucun grand journal ne publierait des caricatures se moquant des aveugles, des nains, des homosexuels ou des Tziganes, plus par peur du mauvais goût que de poursuites judiciaires. Mais le mauvais goût passe pour l’islam, parce que l’opinion publique est plus perméable à l’islamophobie (qui très souvent recouvre en fait un rejet de l’immigration). Ce qui choque le musulman moyen, ce n’est pas la représentation du Prophète, mais qu’il y ait deux poids et deux mesures.   Les protestations des musulmans en Europe, à part quelques excités qui en font leur fonds de commerce, sont en fait plutôt modérées et relèvent aussi de la liberté d’_expression. Mais plus généralement elles s’inscrivent aussi dans ce qui est sans doute le grand débat en Occident aujourd’hui : dans quelle mesure la loi doit-elle défendre un espace du sacré, qu’il s’agisse de blasphème, de négationnisme, de mémoire ou du respect d’autrui ? Ce qui rentre dans un débat plus général : qu’est-ce qui relève de la liberté de l’homme d’un côté et de l’ordre naturel ou divin de l’autre ? Rien d’étonnant à ce que les religieux conservateurs, chrétiens, juifs ou musulmans se retrouvent de plus en plus souvent ensemble pour réclamer des limites à la liberté de l’homme, que ce soit sur les questions d’avortement, de mariage homosexuel, de bioéthique ou de blasphème. Rien d’étonnant à ce que la conférence épiscopale, le grand rabbinat et le consistoire protestant aient fait savoir qu’ils comprenaient l’indignation des musulmans. Ce débat sur les valeurs n’oppose pas l’Occident à l’islam, il est à l’intérieur même de l’Occident.   D’où vient alors la violence dans le cas des caricatures ? Ici, il ne faut pas se voiler la face. La carte des émeutes montre que les pays touchés par la violence sont ceux où le régime et certaines forces politiques ont des comptes à régler avec les Européens. La violence a été instrumentalisée par des Etats et des mouvements politiques qui rejettent la présence des Européens dans un certain nombre de crises au Moyen-Orient. Nous payons un activisme diplomatique croissant, mais qui ne fait pas l’objet d’un débat public. Que le régime syrien se présente en défenseur de l’islam ferait sourire si les conséquences n’avaient pas été tragiques. Un régime qui a exterminé des dizaines de milliers de Frères musulmans se trouverait à la pointe de la défense du Prophète ! Ici, il s’agit d’une manoeuvre purement politique pour reprendre la main au Liban en s’alliant avec tous ceux qui se sentent menacés ou ignorés par la politique européenne. La crise révèle donc aussi une évolution importante de la politique européenne. Au moment de l’intervention américaine en Irak, il était de bon ton d’opposer à la coalition anglo-saxonne une “vieille Europe” continentale, hostile à l’intervention américaine, plutôt propalestinienne, insistant sur la souveraineté des Etats au détriment parfois de la démocratisation. La France était ainsi créditée d’une tradition gaullienne d’indépendance par rapport aux Etats-Unis.   Or, en trois ans, les choses ont bien changé. Les Européens se sont lancés tout seuls dans un bras de fer avec l’Iran au sujet du nucléaire et se retrouvent en première ligne dans la mise en accusation de Téhéran devant le Conseil de sécurité, alors que les Etats-Unis s’en tiennent à une prudente rhétorique. Faut-il s’étonner que le Hezbollah et Téhéran jettent de l’huile sur le feu des caricatures ? En Afghanistan, les forces de l’OTAN, c’est-à-dire les troupes européennes, sont en train de remplacer les soldats américains et vont se retrouver en première ligne contre les talibans et Al-Qaida : la coalition des partis pakistanais qui manifeste aujourd’hui pour protester contre les caricatures danoises est précisément celle qui soutient les talibans et Al-Qaida. Au Liban, la France — et donc aussi l’Europe — a pris soudainement une position très dure sur la présence syrienne, qui a exaspéré le régime de Bachar Al-Assad : il se venge aujourd’hui en organisant en sous-main les attaques contre les ambassades (qui peut imaginer qu’une manifestation spontanée et incontrôlée puisse se dérouler à Damas aujourd’hui ?). Mais c’est peut-être sur la Palestine que le changement, sinon de fond, du moins de forme, est le plus criant : l’Europe, en ordre groupé cette fois, a imposé des conditions draconiennes pour la continuation de son aide après la victoire du Hamas, ce qui a été mal compris par de nombreux Palestiniens, qui s’attendaient à une plus grande neutralité ; d’où les débordements de Gaza contre les représentations de l’Union.   Loin d’être neutre ou absente, l’Europe depuis trois ans a pris une posture beaucoup plus visible et interventionniste au Moyen-Orient, tout en se rapprochant des Etats-Unis. Contrairement à ce qui se passait il y a trois ans, Washington souhaite désormais une plus grande présence européenne, surtout dans la perspective d’un retrait progressif d’Irak. Cette plus grande exposition de l’Europe entraîne donc des tensions avec une coalition hétéroclite de régimes et de mouvements, qui ont alors pris en otage les musulmans européens.   En fait, cette stratégie offensive était inscrite dès la démarche que les ambassadeurs arabes ont effectuée auprès des autorités danoises. Les régimes arabes, en effet, se sont toujours efforcés de maintenir l’immigration en Europe comme une diaspora, mobilisable pour les causes nationales. Les pays du Maghreb considèrent la deuxième génération née en France comme retenant automatiquement la nationalité des parents. Les consulats se présentent toujours comme des intermédiaires pour gérer les tensions autour de questions d’islam, et se sont livrés à une intense campagne pour contrôler les élections au CFCM. L’université Al-Azhar, au Caire, se présente comme un recours pour former les imams et donner des fatwas, rejetant par exemple le Conseil européen de la Fatwa, basé à Londres et qui défend l’idée d’un droit spécifique à l’islam minoritaire. Bref, Etats comme organisations font tout pour maintenir les musulmans d’Europe dans une mouvance moyen-orientale, et c’est de bonne guerre.   Mais ce parrainage pesant est de plus en plus mal vécu par la majorité des musulmans d’Europe : il est intéressant de voir que les grandes organisations prennent en fait leurs distances par rapport à la polémique sur les caricatures (il suffit de regarder sur le site de l’UOIF ou bien sur oumma.com). C’est dans le sens de cette déconnection entre islam d’Europe et crises du Moyen-Orient qu’il faut chercher la clé de la gestion de ces inévitables tensions et traiter les musulmans d’Europe comme des citoyens, comme on le fait avec chrétiens et juifs, même s’il faut rappeler régulièrement à tous les principes de la liberté d’_expression et de la laïcité.   Mais il faut aussi que l’opinion publique européenne prenne conscience de cette implication beaucoup plus importante de l’Europe dans les affaires du Grand Moyen-Orient, de la Palestine à l’Afghanistan, car elle entraînera une plus grande exposition tant de ses représentations diplomatiques que de ses ONG ou de ses simples citoyens. On peut approuver un plus grand rôle de l’Europe en Afghanistan ou au Liban, mais il faut en assumer les conséquences. Une fois de plus, ce qui manque à l’Europe, c’est un espace de vrai débat politique.
 Olivier Roy, chercheur, est directeur de recherche au CNRS. Il a publié récemment La Laïcité face à l’islam, Stock, 2005.
Source : LE MONDE | 08.02.06

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